Le "coming-out" eurovolontariste de Sarkozy

A peine avais-je relevé l’absence de reprise d’éléments de fond sur les blogs et notamment sur le discours de Nicolas Sarkozy sur l’Europe à Strasbourg que Jmfayard m’indiquait que Jean Quatremer, journaliste à Libération, avait analysé ce discours, de façon plutôt sévère, titrant son billet, Le « coming out » eurosceptique de Sarkozy. Je n’ai pas la prétention de réaliser ici une antithèse. Pourtant, c’est un peu en réponse au réquisitoire de Quatremer qu’il faut lire ce billet.

Car Quatremer est virulent : le discours de Nicolas Sarkozy y est qualifié de « réquisitoire anti-européen« , les arguments s’enchaînant « ad nauseam » sur « des pages et des pages » et en fin de compte, si Sarkozy avait des roupignolles, il irait jusqu’au bout de sa logique et proposerait de quitter cette Europe marasmatique.

Or, (i) je me pense européen et (ii) j’ai lu son discours et n’ai pas été choqué par un anti-européanisme flagrant. Serait-ce (i) que je ne suis pas européen ou (ii) que je suis idiot ?

Il y a bien évidemment une question de regard. Qu’on le veuille ou non, Quatremer et moi ne regardons pas d’emblée un discours de Nicolas Sarkozy de la même manière. Alors, parce que ce n’est pas nécessairement l’autre qui se trompe, je reconnais une chose : Nicolas Sarkozy n’évoque guère de succès actuel de l’Europe dans son discours. Il est vrai que l’exemple habituel, Airbus, ne produit plus exactement le même effet dans les meetings. Et il est vrai que les hommages qu’il adresse à l’Europe sont dans le même temps mâtinées de rudes critiques.

Mais, pour un eurosceptique, Nicolas Sarkozy consacre tout de même de longs développements, dans la veine des discours certes, à vanter l’Europe :

« On a souvent critiqué cette politique du pas à pas et ce choix de mettre l’économie avant la politique. Mais c’est cette démarche humble et patiente qui a permis d’aller du marché commun jusqu’à la monnaie unique sans heurter le sentiment national sur lequel le rêve européen pouvait à chaque instant se briser.

L’Europe aurait-elle pu se faire autrement ? Qui le saura jamais ? Elle s’est faite ainsi et personne ne peut refaire l’histoire.

Nous devons prendre l’histoire de la construction européenne comme l’histoire de France là où elles en sont et les continuer. Ce qui ne veut pas dire que nous sommes obligés d’imiter ceux qui nous ont précédés. Mais ce qui veut dire que, pour l’Europe comme pour la France, la table rase est impossible. Nul ne peut repartir de zéro.

Ce qui a été accompli est immense. Ne serait-ce que parce que, sur notre continent, les peuples ont perdu l’habitude de se faire la guerre, et parce que depuis plus d’un demi-siècle ils ont pris celle d’appeler Europe leurs valeurs et leurs intérêts communs.

L’Europe comme idéal de paix et de fraternité s’est inscrite dans les consciences. Au sortir de la dernière guerre, au milieu de tant de ruines et de tant de victimes, nul n’aurait jamais cru qu’un tel miracle put un jour s’accomplir.

La construction européenne ce fut la paix.

Ce fut la reconstruction.

Ce furent les Trente Glorieuses.

Ce fut l’ouverture des frontières.

Ce fut la liberté plus forte que la dictature.

Ce fut la réunification du continent.

L’Europe en cinquante ans a plus accompli qu’aucun Européen aurait pu l’espérer.

La crise actuelle de l’Europe est d’autant plus douloureuse que ses succès furent grands. »

Reconnaissons, tout de même, que c’est donner une tonalité pour le moins ambigüe à son euroscepticisme prétendu. Encore n’ai-je pas repris l’ensemble des premières phrases de son discours.

Jean Quatremer critique aussi le fait que Nicolas Sarkozy se limiterait à une proposition institutionnelle, qu’il qualifie de « cautère sur une jambe de bois« . Il me semblait avoir trouvé ceci, également, dans son discours :

« Si je suis élu je proposerai à nos partenaires de rouvrir le dossier de la politique agricole commune avec l’objectif de garantir l’indépendance alimentaire de l’Europe, mais aussi la sécurité sanitaire, le respect de l’environnement et un revenu décent pour les agriculteurs qui passe par des prix qui respectent le savoir faire des agriculteurs. Repenser la politique agricole est une nécessité. La supprimer serait une catastrophe pour l’indépendance de l’Europe. Elle mettrait le sort de l’agriculture entre les mains de la spéculation.

En ce début du XXIe siècle où ce n’est plus l’acier et le charbon qui comptent mais l’énergie, je proposerai à nos partenaires l’instauration d’une politique commune de l’énergie pour que nous nous préparions ensemble à affronter la raréfaction du gaz et du pétrole.

Il y a tant à faire pour l’Europe en matière d’indépendance énergétique, tant d’enjeux, tant d’urgence en matière d’achats de gaz, d’énergies renouvelables, de nucléaire, de réchauffement climatique qui ne peuvent être abordés qu’à l’échelle de l’Union. »

Ailleurs, Nicolas Sarkozy dit ceci :

« Malraux disait : « L’Europe sera volonté ou mort ». Où est la volonté de l’Europe ?

Aucune Constitution européenne, quelle que fût sa qualité, ne saurait répondre à cette question. »

Même un « traité simplifié » n’y suffira pas. C’est certain. Et il ne me parait pas que Nicolas Sarkozy ait estimé que, les réformes institutionnelles faites, l’essentiel serait fait.

* * *

Jean Quatremer me semble négliger un point qu’il n’ignore certainement pas : nous sommes en campagne électorale. Et la période influence quelque peu les discours. La période suppose non pas que l’on se fasse le chantre béat de la situation existante, mais que l’on expose les réformes que l’on entend mener. Qui dit réforme dit aussi nécessité de réformer. Tous les candidats exposent les faiblesses de la France, doit-on pour autant les croire franco-sceptiques ? Exposer les faiblesses de l’Europe, pointer les axes d’action à entreprendre, est-ce se montrer défiant envers l’Europe ? Nicolas Sarkozy a-t-il proposé de sortir de l’euro, de rétablir les barrières douanières ? Aurais-je manqué certaines lignes de son discours. Vite, que je feuillette…

Nicolas Sarkozy fait un constat : il y a une crise. D’autres vous diront que l’Europe fonctionne très bien. On peut le dire. Il me semble que c’est mettre sous le boisseau les 55% d’électeurs français qui m’ont paru penser l’inverse. J’étais pour le « Oui ». C’est bien qu’à mon sens, l’évolution de l’Europe était satisfaisante. Un homme politique peut-il, lui, faire l’impasse sur le fait que les français n’ont majoritairement pas cette vision ?

Plutôt qu’eurosceptique, je pense que l’on peut voir Nicolas Sarkozy en eurovolontariste. Combien d’eurosceptiques consacrent la totalité d’un discours à appeler de leurs voeux une Europe politique et, même, politisée ?

Certains penseront que Nicolas Sarkozy dit aux français ce qu’ils veulent entendre, lorsque, par exemple, il déclare :

« On comprend mieux la force du « non » à la Constitution européenne quand on se rend compte qu’il est paradoxal de parler de l’Europe politique alors que dans le même temps on dépolitise l’Europe. Il est paradoxal de vouloir organiser une démocratie européenne et de nier en même temps la liberté de choix. »

On peut, à l’inverse, imaginer que, plutôt que dire aux français ce qu’ils veulent entendre, il a entendu ce que les français ont voulu dire.

« On ne peut pas continuer de répondre à la souffrance sociale et à des angoisses légitimes : « c’est triste mais on n’y peut rien ».

On ne peut pas continuer de répondre à l’angoissante question de l’avenir que « le marché est tout et la politique rien ». « 

On ne peut pas continuer dans la construction d’une Europe qui, Nicolas Sarkozy n’a pas tort de le dire, deviendrait une « sous-région de l’OMC« . A quoi nous demande-t-on d’adhérer sinon à un espace économique ? Comment veut-on que les français adhèrent à un objectif qui ne peut que leur paraître bien théorique, bien lointain ? Pourquoi voudrait-on que l’on fasse montre d’un enthousiasme débordant à l’idée d’adhérer plus encore à un « espace de libre échange« .

Construire l’Europe, c’est prendre des risques. C’est bouleverser des schémas qui perdurent, des envies de frontière. Les français en particulier ne paraissent guère aventureux sur l’Europe. Prendre des risques sans contrepartie ne les motive guère. Ne peut-on voir dans les affirmations régionales une volonté de se référer à un espace géographique concret et délimité, qui serait le pendant de la mondialisation ?

Alors oui, il faut proposer aux français un projet auquel ils peuvent s’identifier. C’est la raison pour laquelle je suis tout à fait favorable à la constitution d’une Europe politique. Une Europe politique, et dotée de frontières. A-t-on déjà vu beaucoup d’eurosceptiques militer avec autant de vigueur pour une Europe politique ?

Je relisais récemment la synthèse des travaux du Forum de Paris, par Elie Barnavi et j’y trouve un fort écho avec ce que dit Nicolas Sarkozy :

« Et puis, divine surprise, le Mur s’est effondré dans les clameurs de joie de la foule en liesse ; l’élargissement s’est fait à la hâte – comment refuser à ces Européens si longtemps coupés de l’Europe l’entrée immédiate dans la maison commune ? Et il a bien fallu se poser d’angoissantes questions : jusqu’où ? et au nom de quoi ? À Pekin Baran, qui somme les Européens de ne pas laisser enfermer leur identité dans le passé ; à Fathallah Sijilmassi, qui les invite à imaginer une identité euro-méditerranéenne ; à Dominique Strauss-Kahn et à Jacques Attali, qui reprennent à leur compte cette exigence ; à Vaira Vike Freiberga, qui leur demande de ne pas jeter la clé et de ne pas faire de l’Europe une forteresse, Hubert Védrine et Kzrysztof Pomian répondent que cela dépend de l’Europe que l’on veut faire : dans les mots de ce dernier, une Europe marché peut s’élargir à l’infini, voire se fondre dans l’Organisation mondiale du commerce ; une Europe politique, une « Europe puissance » (nous y reviendrons) ne le peut pas. Cette Europe-là a besoin de frontières. Faut-il rappeler que les États-Unis, qui poussent l’Europe à s’élargir jusqu’à l’horizon et au-delà, sont bel et bien pourvus de frontières, eux – l’une d’ailleurs en train de se matérialiser par un mur -, et que nul n’y songe d’englober le Canada et le Mexique. »

Alors, s’il y a certainement des européens plus enthousiastes sur l’état actuel de l’Union, non, je ne pense pas que l’on puisse aller jusqu’à voir en Nicolas Sarkozy un eurosceptique. Décidément, j’en reviens à ce Forum de Paris. Lors du déjeuner auquel j’avais eu la chance d’être convié, Albert Mallet, Jean-Paul Fitoussi et Elie Barnavi se définissaient comme des européens lucides. Certains groupes européens – qu’ils nommaient mais que je ne nommerai pas – leur reprocheraient d’accréditer l’idée de l’existence d’une crise, alors qu’il y aurait tant de réussites à vanter. Et pourtant, nous disaient-ils, peut-on la nier, cette crise ? A tout le moins, en termes d’adhésion à l’idée européenne ?

Une dernière fois, peut-on vraiment penser de celui qui axe tout son projet européen sur la constitution d’une Europe politique qu’il serait eurosceptique, voire anti-européen ? Ce projet ne vaut-il pas bien des incantations auto-satisfaites ?

25 commentaires

  • « Serait-ce (i) que je ne suis pas européen ou (ii) que je suis idiot ? »

    La question est purement théorique, évidemment, et n’attend pas de réponse. Je répète: pas de réponse.

  • Cela étant, je me demande bien ce qu’on peut reprocher à un discours qui, tout en tenant compte du résultat d’un scrutin, donne pour objectif une Europe qui soit autre chose qu’un marché commun.

  • J’étais à cette réunion publique ou il a prononcé ce discours.

    Personne dans ceux avec qui j’ai pu parler on pris ce discours comme eurosceptique

  • Koz je vous trouve bien héroïque d’être de ce qui pensent que l’Europe se porte bien. J’ai voté non, et si c’était à refaire, j’avoue que j’aurais aujourd’hui encore moins de scrupules à le refaire.

    Ma conception de l’Europe est qu’aujourd’hui je pense que le fruit européen est gâté. On ne peut continuer à aller au delà au sein de cette macabre auberge espagnole (celà dit je n’ai rien contre nos amis ibériques). Chacun veut tirer la couverture à soi, indépendamment des « contributions » au fonctionnement de l’Europe. Trop de différences au sein d’une même famille n’oblige pas à ce que tous les membres festoient au même banquet.

    J’en reviens à M.Sarkosy, dont il est sujet dans ce post. Je suis intéressé à ce que l’homme s’aventure sur le sujet du pourquoi de la contestation du traité (ca change du « je mets tout dans un coin et je ferme les yeux »). Je suis également charmé par quelques-uns de ses propos.
    Mais je me souviens également qu’il avait proposé dans un premier temps de faire ratifier par le Parlement l’adhésion de la Turquie avant de faire marche-arrière face à une opposition devenue trop visible.

    Ainsi donc, je me méfie des bonnes intentions. L’orateur est habile, voire même trop : on ne sait quelle part de sincérité on peut lui accorder. Vous me direz la chose est identique quel que soit les deux autres candidats de poids, et ce serait vrai. Simplement je considère que ce point, l’Europe, mérite plus qu’une déclaration de circonstance pour juger de la pertinence d’un candidat à la fonction de président de la Vème.

  • J’ai étudié de près le discours du 21 février à Strasbourg de N. Sarkozy. Je ne vois pas en quoi il se montre eurosceptique même s’il dit qu’il veut que l’Europe change.
    Il y a d’abord une longue introduction historique qui, comme à son habitude, ne manque pas de souffle.
    Puis il commence son argumentation :
    « l’Europe en cinquante ans a plus accompli qu’aucun Européenaurait pu l’espérer. »
    il ajoute « la crise actuelle de l’Europe est d’autant plus douloureuse que ses succès furent grands » puis « Comment s’est installée dans les esprits cette idée que l’Europe n’est plus une promesse mais une menace »
    c’est le regret de qulqu’un ataché à l’Europe !
    « …Nous avons fait l’Europe pour agir, pas pour subir »
    « …. dans le monde tel qu’il est, l’immobilité est mortelle »  » Trop de politique tue la politique mais pas assez de politique tue la liberté »
    C’est le constat d’un homme qui veut que l’Europe soit plus qu’un marché. « …On ne peut pas continuer de répondre à l’angoissante question de l’avenir que le marché est tout et la politique rien » et plus loin……je crois aux avantages du libre-échange mais un libre échange maitrisé, régulé où l’Etat intervient pour compenser les dumping monétaireetc… » et encore « Je ne veux pas d’une Europe sans usine et sans paysan » »
    Je ne reprend pas ce que vous avez déjà cité mais il dit également vouloir une « Europe qui travaille à humaniser et à moraliser la mondialisation » et quelle doit regarder aussi au Sud (cf discours de Toulon) et il souhaite « débloquer l’Europe institutionnellement » (par un traité simplifié).
    Suit une grande déclaration d’amour à l’Europe qui doit reprendre sa place.

    Bref, ce que je crois c’est que ce journaliste est tellement désemparé en tant
    que journaliste de Libération de voir le souffle, l’énergie, la lucidité et l’exigeance de ces discours à coté des ritournelles compassionnelles de Madame Royal, que contre toute logique il lit ce qu’il voudrait lire !

  • [quote comment= »6289″]
    Bref, ce que je crois c’est que ce journaliste est tellement désemparé en tant
    que journaliste de Libération de voir le souffle, l’énergie, la lucidité et l’exigeance de ces discours à coté des ritournelles compassionnelles de Madame Royal, que contre toute logique il lit ce qu’il voudrait lire ![/quote]

    malheureusement je crois que le mal est plus profond et que comme tout être humain qui a un passé et des convictions personnelles il a parfois tendance à lire (cette partie ne me dérange nullement) et écrire ce qu’il voudrait que l’on lise…

  • Est-ce que les discours de sarkozy ont encore une importance? Tout le monde a bien compris que son offre c’est, essentiellement, de lui faire confiance à lui, de manière largement indépendante de son programme affiché.
    Ces discours compteront peu dans quelque temps, qu’il soit à l’Elysée ou pas.

    D’ailleurs au delà des discours et autres tribunes de sarkozy, qui se suivent sans forcément se ressembler, on ne trouve toujours pas de programme clair et arrêté du candidat (je ne parle pas de l’UMP).

  • Etant très soucieux du sort de l’Europe, j’avais regardé puis relu le discours le lendemain du jour où il a été prononcé, et je l’avais trouvé brillant. J’étais en fait déçu qu’il n’ait pas été plus repris, y compris sur les blogs, et prendre l’initiative d’en parler sur les blogs des autres lorsque ce n’est pas le sujet est irrespectueux. Enfin bon, par la grâce d’un journaliste de Libé assez étrange, le voilà sorti de l’obscurité.

    [quote comment= »6287″]J’en reviens à M.Sarkosy, dont il est sujet dans ce post. Je suis intéressé à ce que l’homme s’aventure sur le sujet du pourquoi de la contestation du traité (ca change du « je mets tout dans un coin et je ferme les yeux »). Je suis également charmé par quelques-uns de ses propos.
    Mais je me souviens également qu’il avait proposé dans un premier temps de faire ratifier par le Parlement l’adhésion de la Turquie avant de faire marche-arrière face à une opposition devenue trop visible.[/quote]

    J’ai fait tourner mon arme secrète, une base de données d’articles de presse depuis une décennie, et je n’ai pas retrouvé trace d’une telle intention. Par contre, il souhaitait faire ratifier le TCE par le parlement (aucun lien avec la Turquie, dont il n’a jamais voulu), en fait comme actuellement avec son traité simplifié.

  • Tout à fait d’accord avec vous.

    Comme très souvent d’ailleurs, puisque j’apprécie beaucoup vos analyses.

    Encore une fois, vous partez du texte même du discours de Sarkozy, la méthode la plus efficace pour démonter les caricatures de ceux qui ne lisent ni n’écoutent les vrais propos de Nicolas Sarkozy.

    A très bientôt,

  • [quote comment= »6306″]pour info L’article de Thomas Quatremer est aussi sur Europeus[/quote]

    Mowglii,

    Euh, visiblement vous avez du mal avec les prenoms. Koz se refere a JEAN Quatremer, journaliste de Liberation. Or, bien qu’ayant ecrit un post sur le discours de Strasbourg sur Europeus, je m’appelle Thomas Lefebvre (et non Thomas Quatremer!!!!).

  • [quote comment= »6307″]J’ai fait tourner mon arme secrète, une base de données d’articles de presse depuis une décennie, et je n’ai pas retrouvé trace d’une telle intention. Par contre, il souhaitait faire ratifier le TCE par le parlement (aucun lien avec la Turquie, dont il n’a jamais voulu), en fait comme actuellement avec son traité simplifié.[/quote]

    Je crains qu’Irul ait une compréhension personnelle de certains sujets. Ainsi lorsqu’il dit que je considère que l’Europe fonctionne bien. Cela ne me sembler pas vraiment être le propos de mon billet mais une phrase, une seule l’aura fait « bondir ». A la vérité, et à titre personnel, je n’avais pas de raisons d’être opposé au TCE. Mais je veux prendre en compte les raisons des français, aussi diverses soient-elles, parce que c’est tout simplement eux qui, in fine, décident. Et je m’efforce d’entendre des reproches qui n’étaient pas les miens.

  • En fait je pense que J. Quatremer s’est fait peut-être rappeler à l’ordre ou se croit obligé de donner des gages de son appartenance à la gauche car il me semble qu’on lui a beaucoup reproché son avis positif sur le discours de N. Sarkozy à Bruxelles en automne dernier…

    « Au final, les idées de Sarkozy sont à la fois raisonnables (il faut renégocier le traité constitutionnel) et ambitieuses (il faut poursuivre l’intégration y compris à quelques-uns). Sa sortie de crise en douceur peut fonctionner à condition que son « mini traité » soit rapidement accepté par les Vingt-cinq afin de redonner un élan à la construction communautaire. »
    http://bruxelles.blogs.liberation.fr/coulisses/2006/09/sarkozy_leurope.html#more

  • Il est certain que cet extrait est pour le moins contradictoire avec le billet qui nous intéresse. Disons, pour éviter l’hypothèse « donner des gages », qu’il se « cristallise », se « radicalise », comme nombre d’entre nous à l’approche des élections, et que sa nature d’analyste peine à réprimer une volonté militante.

    Bien vu, pour l’extrait, en tout cas. J’imagine que tu le lui as rappelé.

  • Allez soyons beau joueur, la volonté d’aller vers une Europe politique est là et c’est positif !

    Reste que la critique de Jean Quatremer tient. Pour résumer : Sarkozy entrainé par son élan aurait dressé un tableau gris très très foncé de l’Europe actuelle, pour mieux promettre une Europe de demain radieuse. Or donner raison aux eurosceptiques sur des choses réelles tangibles pour mieux se réfugier dans des promesses illusoires à négocier à 27 n’est pas la meilleure façon de convaincre. Sans vouloir polémiquer, en l’état on risque fort de voir des extraits entiers du discours recopiés sur le site de De Villiers.

    Soyons constructifs : mettons-nous sans polémique à la place de Sarkozy et réparons cet oubli en voyant ce qu’on aurait pu mettre dans la case « actif », en plus de la paix, pour équilibrer un peu le bilan européen.

    Ca ne devrait pas être si compliqué, il me semble qu’il y a eu plusieurs évolutions positives ces dernières années :

    * bon ok, le référendum sur le TCE que tout le monde attribue en Europe à l’impopularité du gouvernement Sarkozy, c’est pas glorieux dans mon bilan. N’empêche, ne serait-ce que sur la méthode, de grands progrès ont été faits : fini les conférences inter-gouvernementales à huis clos, les ratifications en catimini au Parlement, place à une Convention qui délibère démocratiquement et à un référendum. Ah mince… détail : ces précisément ces avancées que j’enterre dans ma proposition de « mini-traité ». Parlons d’autre chose, des politiques par exemple, du concret !

    * grâce à l’UE, deux millions de jeunes ont pu faire des études à l’étranger. Pas mal mais classique. Mitterand a fait le coup à Séguin lors de Maastricht. Pas assez « rupture » pour moi.

    * grâce à l’UE, on peut voyager, séjourner, travailler dans n’importe quel pays de l’UE, le plus souvent sans formalité administrative. Mmh… y’a pas un risque que Le Pen rebondisse là dessus pour m’accuser de laxisme en matière d’immigration ? Méfiance.

    * l’UE, c’est politiques régionales qui ont permis aux régions les plus pauvres d’Europe d’être tirées vers le haut. Même problème : De Villiers va encore vouloir placé un mot sur l’épouvantail Turc.

    * grâce à l’UE, on a une règle claire en vigueur pour établir l’égalité homme-femme. Mouais, c’est le genre de terrain qu’adore monopoliser Ségolène. Evitons de lui donner des idées…

    * grâce à l’euro, finis les dévaluations destabilisatrices, les crises monétaires. Bof, c’est vrai, en même temps ce sont les socialos qui ont qualifiés la France pour l’euro, hors mon créneau c’est de faire croire que la gauche est incapable de gérer une économie ; de plus les français ne se rappelent pas de comment c’était avant l’euro et il faut que je garde une certaine cohérence avec mon discours d’Agen anti-euro.

    * l’UE est le principale promoteur du protocole de Kyoto. C’est important pour un signataire du pacte de Hulot comme moi. Pas mal… Ah on me fait signe que c’est une des mes concurrentes, Dominique Voynet, qui a connu son heure de gloire à cette époque en menant d’une main de maître avec la ministre de l’écologie allemande, une certaine… Angela Merkel, les négociations sur Kyoto qui semblaient mal parties. Je ne vais pas lui faire de pub non plus…

    * plus perso peut-être ? : en tant que ministre des finances et ministre de l’intérieur, j’ai un bon bilan européen sur XX et YY au niveau européen. Aïe, terrain miné ! Je suis connu pour être la fille de l’air qui sèche les scéances du Conseil européen. Bon laissons-là le conseil et voyons ce qu’il y a à creuser du côté de du Parlement européen.

    * la démocratie évolue positivement dans l’UE. Le Parlement européen a acquis une véritable crédibilité législative ces dernières années sur des sujets très complexes (directive services, brevets logiciels, …) et à des commissions d’enquêtes (comme sur les vols « Air Torture » de la CIA) que l’Assemblée Nationale lui envit. Mouais. En même temps, j’ai un mauvais souvenir des élections européennes depuis que j’ai mené la liste du RPR avec Madelin qui s’est fait dépassé par De Villiers et Pasqua, sous la barre des 15%, non loin de l’UDF et des Verts.

    * du législatif ? L’UE fait des bonnes choses, regardez comme le parlement européen a réussi à faire barrage aux brevets logiciels. Défaite de l’ultralibéralisme, victoire du libéralisme à visage humain que je veux incarner. … Oui ? Ah on me fait signe que mon gouvernement était du côté des partisans d’une brevetabilité illimitée des logiciels lors des votes au Conseil. Marre d’être entouré de connards !

    * bon, tant pis pour le parlement. La commission peut-être ? Je ferais preuve de courage en la dédiabolisant. Tenez, une belle initiative : elle a condamné les cartels du téléphone portable, la concurrence loyale est une vertu. Ah mince, Martin Bouygues c’est un copain.

    * Ou ceci alors : la commission européenne a pris le relais d’Arnaud Montebourg dans la dénonciation du dumping fiscal discriminatoire qu’accorde certains cantons à un Johnny par rapport aux Roger Federer locaux. Ah mince ! Je n’ai pas pu m’empêcher de dire à Johnny qu’il avait bien fait de se tirer coco. Puis je propose moi-même un mécanisme (bouclier fiscal) qui participe au mouvement général de baisse d’imposition sur les riches et le capital couplé au matraquage fiscal du travail. J’suis pas trop crédible là non plus.

    Arggh, j’ai plus d’idées… Bon Guaino, je compte sur toi, mets le paquet sur « l’Europe c’est la paix » !

  • [quote comment= »6320″]En fait je pense que J. Quatremer s’est fait peut-être rappeler à l’ordre ou se croit obligé de donner des gages de son appartenance à la gauche car il me semble qu’on lui a beaucoup reproché son avis positif sur le discours de N. Sarkozy à Bruxelles en automne dernier…[/quote]

    Le mini-traite-essentiel n’etait pas au centre du discours de NS, c’est le moins que l’on puisse dire (2 occurences sur 11 pages). On peut tres bien, comme moi, avoir apprecie le discours de Bruxelles et avoir trouve celui de Strasbourg imbuvable. Le discours de Strasbourg est techniquement un mauvais discours: le style est lourd et les propositions incoherentes. Par exemple NS veut un nouveau pacte entre l’Europe et la Mediterranee. Tres bien. Sauf que NS prend pour reference les croisades qui ne furent « pas tant un rêve de conquête qu’un rêve de civilisation. » Je ne veux pas rentrer dans un debat sur l’apport positif ou non des croisades aux peuples de la Mediterranee mais tout de meme, avouez que l’on peut s’y prendre un peu mieux pour faire un pacte entre la Mediterranee et l’Europe. Philippe Ridet dans le Monde parle d’un discours pour flatter les electeurs de Dupont-Aignan. C’est ca la rupture?

  • thomas, un , voire 10 points, pour vous . je me tais pendant un temps x et je vais prendre des vacances.

  • [quote comment= »6317″]Je crains qu’Irul ait une compréhension personnelle de certains sujets. Ainsi lorsqu’il dit que je considère que l’Europe fonctionne bien. Cela ne me sembler pas vraiment être le propos de mon billet mais une phrase, une seule l’aura fait « bondir ». A la vérité, et à titre personnel, je n’avais pas de raisons d’être opposé au TCE. Mais je veux prendre en compte les raisons des français, aussi diverses soient-elles, parce que c’est tout simplement eux qui, in fine, décident. Et je m’efforce d’entendre des reproches qui n’étaient pas les miens.[/quote]

    Deux choses :

    * La première : effectivement vous avez raison, c’est bien du TCE dont il s’agissait et non de l’éventuelle adhésion de la Turquie. Mea maxima culpa.

    * La deuxième : Koz, je ne critique pas les personnes désireuses de plus d’Europe. Chacun à son vécu sur la chose, et tout comme vous, si le « oui » était passé, je l’aurai accepté comme l’expression de la volonté populaire. A contrario je n’accepte pas que l’on vote sur un sujet sans en avoir tirer la substantifique moelle. Et les appels des bergers à suivre les moutons me laissent plutôt de marbre.

    Par conséquent Koz, ne prenez pas mon message initial pour une agression personnelle : ce n’en était nullement le but. Concernant ma compréhension, comment dire : comment pourrait-elle être autrement que personnelle ? 😉

    Cordialement,

    Irul

  • Sarko et l’Europe : une position pragmatique vis-à-vis de nos partenaire, mais qui ne résoud pas la question du « non »

    Des mots, des mots ! Facile de dire que l’Europe c’est bien, etc. Ce sont les propositions et les actions qui comptent. Sur ce plan, sarko propose de faire adopter un mini-traité par le Parlement et de renvoyer les discussions sur le contenu de l’Europe sine die.

    Il me semble qu’il fait là une profonde erreur d’analyse interne.

    Depuis Maastricht et jusqu’au référendum du 29 mai , nos dirigeants ont commis la même erreur : ils n’ont parlé qu’à nos partenaires. Ainsi l’ouverture – absurde – du secteur de l’énergie à la concurrence a été décidée sans débat national.

    Du coup, nos dirigeants ont cassé la corde. D’où le « non » en 2005. Nous voila donc contraint à un débat 100% interne sur l’Europe, et plus précisément sur son contenu. Car les français veulent au fond plus d’Europe (sociale notamment), ou plus exactement « mieux d’Europe ».

    L’erreur de Sarko est de feindre de ne pas le voir : il propose une solution acceptable pour nos partenaires, mais inacceptable pour les français, qui sont indifférents aux questions institutionnelles et veulent parler du fond.

  • Le commentaire de micol98 me donne l’occasion de vous poser quelques questions au sujet d’un traité simplifié voté par le parlement et la suite.

    Si j’ai bien compris les propositions de N. Sarkozy il s’agirait uniquement d’extraire du TCE les articles concernant le fonctionnement des institutions de l’Europe élargie et de les faire approuver par le parlement français ?

    1) Cela éviterait que les pays qui ont déjà approuvé le TCE aient à se prononcer à nouveau. Seraient donc concernés par le traité simplifié seulement ceux qui l’ont rejeté et ceux qui n’ont pas encore approuvé le TCE ?
    Puis on entamerait une nouvelle négociation (constituante) pour une nouvelle constitution à soumettre à l’ensemble des pays européens.

    2) Soit on négocie un nouveau traité simplifié mais avec des dispositions nouvelles (immigration, frontières etc.) mais qui nécessiterait que tous les pays européens se prononcent à nouveau, ce qui prendra beaucoup de temps, à moins de le faire approuver uniquement par les gouvernements. Puis on entamera des négociations pour une nouvelle constitution.

    3) Soit on enterre complètement le TCE et on recommence les négociations pour une nouvelle constitution à soumettre par référendum à tous les pays européens, avec à la clé beaucoup de temps perdu, en attendant des difficultés de fonctionnement, de paralysie comme actuellement et le risque de nouveaux rejets…Qu’adviendra-t-il de la France s’il y avait un nouveau rejet ?

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  • L’ambiguïté réside dans le fait que les discours de Sarkozy sont rédigés par Guaino. C’est Guaino qui ajoute la patte humaniste du Sarkozy de ces derniers mois. Est-ce le même Sarkozy qui cite Jaurès et Blum à tout bout de champs, et qui nous sort de son chapeau le ministère de l’Identité Nationale, -ou ministère du « bon Français » – ? Qui croit-il berner ?

    Alors prétendre analyser le discours quand on sait que la moitié ou les deux tiers ne sont pas de Sarkozy, ça n’est pas très sérieux.

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