
J’ai une tendresse particulière pour les personnes d’un certain âge. J’aime la paix dans leurs gestes, la douceur de leur regard, j’aime qu’ils portent une histoire. Parce que je suis, pour quelques temps encore d’une jeunesse relative, elles m’accueillent bien souvent avec la bienveillance poignante de celles qui croient que c’est une faveur qu’on leur fait de s’intéresser à elles. Et j’aime, pour tout avouer, emmerder de concert le jeunisme et l’âgisme. Mais j’ai une faiblesse dans cette tendresse : je ne supporte pas d’entendre ces personnes expliquer qu’elles partiront sans regret et plaignent les jeunes, « quand on voit l’état du pays ». Le ressort psychologique est compréhensible, mais ce n’est pas bien aimable pour ceux qui vont devoir faire avec.
Reconnaissons tout de même que cette rentrée est faite de défis. Internationaux, nationaux, militaires, douaniers, politiques, c’est un festival qui sollicite l’espérance. De mes lectures estivales, je retiendrais une phrase : « il y a peu de générations qui n’aient eu l’impression de vivre une « crise » ou même d’être à un « tournant ». Depuis le XVIème siècle, ce que l’on trouverait difficilement, c’est une génération qui ait cru vivre dans une période stabilisée ». Je disconviens, Raymond (Aron). D’une part, si les baby-boomers n’ont pas connu que la stabilité, ceux qui ont mûri dans cette dizaine allant de l’effondrement du mur de Berlin à l’adoption de l’euro ont pu y croire. D’autre part, lorsque tout bascule, il est difficile de ne pas identifier le tournant.
Peu importe que François Bayrou ait peut-être failli dans la méthode. Peu importe l’hostilité que certains peuvent concevoir à l’encontre d’Emmanuel Macron. Ce n’est pas approuver nécessairement leurs solutions que de reconnaître que le diagnostic est juste : nous vivons dans un monde où la violence fait un retour en force. C’est la violence militaire de Poutine, c’est la violence politique de Trump. Or, quand même Emmanuel Macron soutient que, dans ce monde, « il faut être craint », nous semblons nous enfoncer dans une instabilité bien impropre à susciter la crainte de quiconque, comme à prendre des décisions fortes. Nos aînés ont su espérer lorsque notre continent plongeait dans l’obscurité, nos parents ou grands-parents ont enfanté quand l’horizon était sombre, ils ont su relever la France des abîmes. C’est de cet esprit, qu’ils ont connu, qu’il leur faudrait témoigner.
Pour ma part, je referme ici le chapitre de mes chroniques à La Vie, avec toute ma gratitude pour son accueil et pour votre lecture. « Partir, c’est mourir un peu » ? Même un peu, je n’entends pas céder davantage au fatalisme. Pour moi, pour les jeunes, et pour ceux qui leur succèderont.
Photo de Haydn Golden sur Unsplash
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