Sarkomence

Il publie ses mémoires, alors on se souvient. D’autant qu’il les annonce de la plus fracassante des manières : parce que Nicolas Sarkozy aurait la stature de l’homme d’Etat, le grand homme se hisse au-dessus du commun et du consensus occidental. Le voilà qui déclare que l’Ukraine « doit rester un pays neutre », être « un pont » entre l’Europe et la Russie, qu’on ne peut « lui demander de choisir » entre elles. On ne fait certes pas de bonne politique internationale avec des bons sentiments, les « réalistes » le rappellent. Mais où est le réel dans ces propositions qui sont autant de défis au bon sens que d’injures à l’honneur ? Notre honneur, puisque sa position est pour le monde celle d’un ancien président français. Celui des Ukrainiens aussi, car qui peut croire qu’une adolescente ukrainienne violée acceptera que son pays « reste » neutre ? Que l’enfant ukrainien arraché à sa mère et déporté en Russie refusera de choisir ? Que les proches de tant de civils délibérément massacrés dans autant de crimes de guerre hésiteront entre l’Europe et la Russie ? Qu’un pays étrillé avec une haine implacable sera demain « un pont » avec son agresseur ?

Il n’y a pas de réalisme dans cette position. Son incongruité même pousse à considérer sérieusement les soupçons que soulèvent les conférences grassement payées de Nicolas Sarkozy en Russie… de même que son renvoi devant le tribunal correctionnel dans l’affaire du financement libyen de la campagne de 2007 éclaire d’un autre jour l’intervention militaire de 2011 en Libye. Le dépassement du mandat de l’ONU par la France et l’exécution de Mouammar Kadhafi étaient-il guidés par des considérations stratégiques ? On n’oserait plus le jurer. Le bilan de cette intervention est à tout le moins discutable quand on constate la déstabilisation persistante du pays. Faut-il évoquer le sort de la Géorgie, « succès » de Nicolas Sarkozy qui voit le pays amputé depuis plus de dix ans de 20% de son territoire ?

Tourne-t-on les yeux vers la politique nationale et l’on trouvera le même homme, qui se remet en lice aujourd’hui, initiateur d’une prétendue stratégie de conquête des électeurs du Front National qui n’a jamais pu se parer de la moindre victoire et n’offre en héritage que la décomposition des Républicains. Alors oui, on se souvient, avec amertume, d’avoir été sarkozyste pendant 24 mois. Nos contradicteurs de l’époque en souriront, avant de se souvenir aussi. Eux soutenaient Ségolène Royal.

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