De ce petit matin descendu en pèlerin du Mont Valérien. De l’aube qui se levait, des milliers de fidèles et puis moi assis relisant dans l’herbe les textes de la veille. Je veux me souvenir de ce ciel, du silence et de la paix soudaine. De la frénésie avant, de la résolution après.
Après les Bernardins – « leur motivation était beaucoup plus simple. Leur objectif était de chercher Dieu, quaerere Deum. Au milieu de la confusion de ces temps où rien ne semblait résister, les moines désiraient la chose la plus importante : s’appliquer à trouver ce qui a de la valeur et demeure toujours, trouver la Vie elle-même. Ils étaient à la recherche de Dieu« . Après Notre Dame. Après ce silence à 300.000. Et les mots de saint Paul. Fuyez le culte des idoles.
Nous étions ces jours-là dans la crise financière. Panique, incertitude, frénésie. Et puis ce matin-là, le calme, et la parole qui ne passe pas. Personne n’avait choisi cette lecture pour les temps que nous vivions, c’était simplement la lecture de ce jour, celle qu’en toute paroisse dans le monde entier les fidèles lisaient. Je l’ai reçue, 2.000 ans plus tard, comme le témoignage de ce qui a de la valeur et demeure toujours. Quoi qu’il soit arrivé, et quoi qu’il puisse arriver, nous sommes les mêmes. Les mêmes hommes, les mêmes femmes, sensiblement les mêmes problèmes. Et Benoît XVI prêche. Fuyez le culte des idoles. Demain, Lehman Brothers s’écroulera. Il ne l’a pas faite tomber, je le concède, mais le signal est fort.
A cette date, je suis encore « le blogueur sarkozyste ». Le nouveau pouvoir a un an. La campagne m’a amusé, elle m’a parfois passionné, elle a coïncidé avec les premiers temps du blog. Je ne parle que de politique ou presque, je consacre des billets à leurs discours …et jusqu’à leurs affiches. Le blog a son petit succès – blogueur de droite est un petit créneau – que vais-je en faire ? M’en servir pour moi-même ? Pour célébrer le pouvoir ? Ces mêmes jours, je me rappelle ces paroles entendues au baptême de ma fille : vous êtes « prêtre, prophète et roi ». Prophète ? En peau de chameau, à manger des sauterelles ? Surtout pas destiné à être courtisan.
Pendant ces semaines d’automne 2008, le court-terme des politiques m’agace, leurs paroles qui s’envolent, la superficialité des réponses à la crise. L’idolâtrie du pouvoir et celui de l’argent me sautent en pleine face. Et ces paroles me reviennent : « Au milieu de la confusion de ces temps où rien ne semblait résister (…) s’appliquer à trouver ce qui a de la valeur et demeure toujours, trouver la Vie elle-même. »
Je date de ces jours un tournant de mon blog. Un tournant de ma vie surtout.
C’était aujourd’hui. Je veux m’en souvenir, surtout ces jours-ci.
Du coup je suis allé relire le billet du 14 septembre 2008. Il a gardé une force, une vérité particulières.
Je vois, aussi, que vous êtes (tu es ?) fidèle depuis au moins dix ans. C’est impressionnant. Merci. Un jour peut-être, nous mettrons des visages sur les pseudos – mais je respecte ta (du coup) discrétion.
En effet. Ça en fait, des commentaires. Ce blog est resté pour moi un lieu de réflexion. Moins de discussion, car bien d’autres commentateurs sont partis ailleurs (Facebook? Ou bien ont-ils renoncé à ce qui fait l’intérêt de la discussion en ligne?). Je trouve cela dommage, mais je te lis toujours avec bonheur et je préfère le faire ici que sur tout autre médium.
Soit dit en passant, après quelques années de vouvoiement, nous sommes passés au « tu », je ne sais plus exactement quand…
Comme je suis toujours aussi expatrié (au Canada) les chances de mettre un visage sur le pseudo resteront limitées. Tu dois avoir mon nom quelque part dans un email, cela dit.
Malheureusement oui, les commentaires sont largement passés sur Facebook. j’ai tenté à toutes forces d’inciter les gens à venir commenter sous les billets, mais le courant est trop fort. C’est d’autant plus dommage qu’ils sont souvent moins approfondis.
Aucune chance que je suive un jour ce courant-là. Pour commencer, je ne suis pas client de FB. Et puis, j’ai jeté un coup d’oeil sur la page plusieurs fois, et je n’ai pas ressenti l’envie de participer.
Très touchant.
Comme quoi il ne me faut jamais désespérer des personnes qui ne pensent pas comme moi, qui ne sont pas comme moi. 🙂 Très beau texte une foi(s) encore.
Cela fait partie des leçons de toutes ces années.
Oui, très touchant. Surtout que je suis aussi à un tournant dans ma vie. J’entre dans un béguinage. La prière, le silence, le temps à retrouver pour que la vie, la vraie, soit féconde. Merci Koz, continuez, ne nous lâchez pas.
Je vous envierais presque. Mais il y a un temps pour tout. C’est tout de même un beau tournant que vous prenez. Merci aussi pour ce que vous dites. Et priez pour moi dans votre béguinage.
Cher Monsieur,
J’ignorais que nous étions “frères et sœurs” à travers la visite de Benoit XVI à Paris. C’est au sortir de la célébration aux Invalides, après ce temps de silence incroyable où j’ai ressenti la présence de Jésus, que j’ai décidé d’aller à la messe tous les dimanches, moi qui n’y mettait jamais les pieds. Et ce qui fût décidé ce jour, fût fait dès le lendemain en l’église Notre Dame du Travail. Je m’en souviens très, très bien. Il y eut un avant et un après que j’ai célèbré avec joie ces jours-ci. Merci à vous pour votre belle plume !
Merci pour votre message. On pourra rendre grâce d’y avoir un gagné un frère, une soeur.
Il est bon de te retrouver ici avec un billet comme celui-là. Et du coup de revenir sur ton blog pour le lire.
S’arrêter pour relire des étapes de vie ou raviver des émotions qui nous façonnent souterrainement, et s’émerveiller de ce vers quoi elles nous ont porté. Merci !
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Très beau récit de conversion, très émouvant. Merci Koz