Avons-nous tout perdu ?

Nous avons tout perdu, même ce que nous n’avions plus : du temps, et de l’espoir. Il est difficile de traduire le désarroi, la colère, la rage du citoyen face à cette campagne électorale. Avions-nous cinq ans à perdre pour l’emploi ? Avions-nous cinq ans à perdre pour la croissance ? Avions-nous cinq ans à perdre pour l’éducation ? Cinq ans à perdre contre la progression de l’islamisme ? Cinq ans pour relever le pays ? Pour lui insuffler une vision, un projet commun, pour le redessiner ?

Nous voterons au premier tour dans six semaines et demi, dont deux semaines de vacances, décalées selon les zones. Cela signifie en somme quatre semaines et demi de campagne utile. Il se dit classiquement que le tableau d’une présidentielle se fige fin février. Il se dit certes tout aussi classiquement qu’une campagne se joue sur les trois dernières semaines. Laissons alors, pour la beauté du geste, une place à l’improbable.

Mais comment croire que ces quatre à six semaines qui nous séparent de l’élection ont une chance d’être utiles ? Elles seront scandées par l’égrènement des défections, des états d’âme, des appels au retrait, des analyses juridiques et judiciaires, des spéculations sur les conséquences de la décision d’un juge, ou deux. Les électeurs de la gauche et du centre, leurs représentants dans la presse, auraient tort de s’en satisfaire. Très concrètement, leurs candidats gaspilleront un temps précieux à évoquer les aventures judiciaires du candidat de la droite. Plus largement, nous sommes dans le même bateau, le même pays. Cette situation nourrit une colère qui devra bien trouver un exutoire.

Il nous reste le choix entre une candidature sapée dans ses fondements, et une étrange créature.

Une « droite des valeurs » n’a pas vocation à articuler mâchoire serrée les yeux fermés une défense par défaut.
Le réflexe militant supposerait de taire ses doutes : je n’ai pas le réflexe militant. Une « droite des valeurs » n’a pas vocation à articuler mâchoire serrée les yeux fermés une défense par défaut. « Les autres ne sont pas mieux ». C’est tous ensemble que l’on sombre. Pas de naïveté pour autant : non, ils ne sont pas mieux. Et non, je ne crois pas au résultat fortuit d’une enquête journalistique. Le calendrier de la révélation de ces affaires, anciennes, sur un candidat dont l’intégrité n’avait jamais été mise en cause en 35 ans de vie politique, faite après la primaire de sorte qu’aucun autre candidat ne puisse prétendre à la même légitimité, et alors que le candidat d’une gauche en difficulté était en passe d’être désigné, a tout d’un tir prémédité. Je ne néglige pas non plus le caractère inédit d’une approche judiciaire en pleine campagne présidentielle : les précédentes ont connu leurs lots de boules puantes et autres mises en cause, mais il était d’usage de les régler sur le pré – électoral.

Pour autant, même s’il est probable encore que ce qu’on lui reproche ait été bien répandu, cela ne suffit pas à en effacer la portée désastreuse. Et si François Fillon remportait l’élection, c’est le fondement même de sa candidature et de sa politique qui serait miné, et son quinquennat resterait plombé par cet abcès jamais crevé – puisqu’aussi bien il bénéficiera d’une immunité.

Emmanuel Macron est une étrange créature. J’ai mes doutes par principe sur la mystique de l’homme providentiel mais l’on peut à tout le moins escompter que, si homme providentiel il y a, ce soit le peuple qui le fasse émerger. Je suis profondément sceptique sur un homme dispensé du « cursus honorum », issu de nulle part sinon de la haute finance, conseiller économique puis ministre de l’économie d’un quinquennat en faillite, et qui affirme incarner l’espoir. Propulsé en quatre ans du parfait anonymat aux portes de l’Elysée, qui l’aura fait roi, sinon les couvs des magazines et une impressionnante cohorte de soutiens millionnaires, depuis son mentor Henry Hermand jusqu’aux hommes d’affaires et magnats de la presse Niel et Drahi, en passant par Pierre Bergé ? Emmanuel Macron peut bien proposer une loi pour interdire les conflits d’intérêt, il semble qu’il y soit structurellement plongé… toutes inquiétudes que soulevait légitimement François Bayrou avant de juger que sa haute conception de l’intégrité lui enjoignait de mettre son mouchoir sur tous ses principes. Si je concède que, stratégiquement divulgué tard, il est tôt pour se prononcer sur son programme, il a prend les allures d’un patchwork d’ajustements marginaux ripolinés de « révolution ».

On s’en veut de ne pas partager le juvénile amusement du candidat devant le « pragmatisme » de Mao Zedong, authentique ordonnateur de crimes contre l’humanité.
A cet égard, Emmanuel Macron s’enorgueillit d’une Grande Marche, menée cet été. Elle me faisait grandement penser à la « Longue Marche » de Mao. Voilà que je découvre ceci dans Le Parisien : « « Je suis maoïste », balance-t-il tout de go, pas peu fier de surprendre son auditoire. Pour Mao, explique-t-il, « un bon programme c’est ce qui marche. » On s’en veut de ne pas partager le juvénile amusement du candidat devant le « pragmatisme » de Mao Zedong, initiateur d’un Grand Bond en Avant et d’une Révolution Culturelle, qui ont causé des dizaines de millions de mort, provoqué le naufrage culturel et intellectuel de la Chine et des désastres écologiques monumentaux. Outre la légèreté très malvenue de cette référence et de cet amusement, s’agit-il à ses yeux un « programme qui marche » ? On présente Emmanuel Macron comme un intellectuel, comme l’ancien assistant de Paul Ricoeur : lui qui jouait dernièrement du crime contre l’humanité, serait bien inspiré de prendre un peu de recul sur l’Histoire. Car entre cette déclaration et l’idée fantasque de s’excuser auprès de rapatriés d’Algérie en leur proclamant du balcon : « je vous ai compris », se dessine un personnage un peu hors sol, dont on peut se demander quel est exactement son bagage historique et culturel. Plus prosaïquement, très prosaïquement, et à titre d’exemple, qualifier de « révolution de la flexisécurité » l’interdiction de refuser successivement deux offres d’emploi dont le salaire ne serait pas inférieur de plus de 20-25% au salaire antérieur laisse perplexe : à supposer que ce soit de la flexisécurité, nous sommes loin d’une révolution.

Tous deux jouent la deuxième place derrière une Marine Le Pen dont on pourrait me reprocher de ne pas dire grand-chose ici. C’est que ce billet n’avait pas l’intention d’offrir un panorama exhaustif, et qu’il me semble que mes derniers écrits en disent assez long pour leur part sur mon appréciation des orientations auxquelles elle souscrit.

*

Pragmatiquement, il reste les législatives. Elles prendront cette fois un tour décisif. Il n’est pas impossible qu’elles soient le tout premier lieu d’expression de la colère de ceux qui se seront vus confisquer la présidentielle. Ceux qui se réjouissent de la situation présente, ceux qui l’alimentent, devraient y songer.

Au-delà, il y a cette conviction, qui se renforce : engageons-nous. Engageons-nous dans le débat d’idées, dans la production culturelle et intellectuelle. En associations. Dans des démarches d’entrepreneuriat solidaire. Si nos institutions et nos représentants faillissent, c’est à nous, à chacun, de prendre notre destin en mains et de façonner notre France. La politique peut décider beaucoup, mais c’est aussi après le peuple qu’elle court. N’attendons pas tant d’elle.

Au risque de tout y perdre. Le temps et l’espoir.

 

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148 commentaires

  • J’ai souvent du mal a vous suivre, la lecture de vos billets est parfois très compliquée et on ne comprend pas toujours où vous voulez en venir, mais cette fois ci, je trouve votre point de campagne tres réussi. Merci.

  • Oui, quelle dégringolade !

    Il y a deux mois je me réjouissais d’une élection qui se jouerait entre deux candidats intéressants. Fillon offrait une droite qui n’a pas honte de ses valeurs et propose (enfin!) une réduction des déficits et des dépenses publiques. Macron une gauche (enfin) modernisée, moins démago, valorisant le travail et la liberté.

    Aujourd’hui FIllon, dans les cordes, ne fait plus campagne et rabote tout ce que son programme comptait d’aspérités. Et Macron dit à chacun ce qu’il veut entendre et s’enfonce dans le hollandisme.

    J’ai très peur d’un retrait de Fillon, je crains qu’une grande partie de la droite, légitiment très en colère qu’on lui vole son vote, choisisse de faire sauter la baraque en votant Le Pen.

    Sur le fond de l’affaire Fillon, aussi condamnables que soient ces pratiques, le timing inédit et surtout le caractère disproportionné et arbitraire du bruit juridico-médiatique laisse un goût très désagréable. Surtout à l’issue d’un quinquennat où les coups portés à l’état de droit (état d’urgence permanent, loi renseignement…) et à l’indépendance de la justice (mur des cons, violations systématiques du secret de l’instruction, Davet-Lhomme, affaire Sauvage…) ont été légion.

    Il est plus urgent que jamais de réduire l’influence qu’ont ces gens-là sur notre vie.

  • Je crains que la colère des électeurs ne soit déjà là, retrait ou non. On peut d’ores et déjà considéré que cette élection a été « confisquée », que ce soit par des groupes, par les circonstances, par les affaires. Il est vrai toutefois que si Fillon se retirait, il serait probable que certains de ses électeurs votent Le Pen par colère. Mais si Fillon perd – ce qui est probable : quand on pense qu’à la mi-janvier, son plus gros souci était sa réforme de la Sécu, insuffisamment sociale, comment la ferait-il aujourd’hui, avec l’image qu’il assume ? – il y aura de toutes façons une colère importante.

    Je viens de lire une tribune de Dominique Reynié dans Le Monde, à laquelle je n’aurais pas manqué de faire allusion si je l’avais lue avant : « C’est une présidentielle sans débat ».

    Et si je dis que les législatives prendront cette fois un tour décisif, c’est parce qu’aucune majorité n’est certaine, donc aucun programme, ni aucun projet. Ce qu’il développe ainsi :

    Il est impossible de savoir quelle politique sera approuvée par une assemblée dont nous ignorerons jusqu’en juillet, et peut-être encore après, sa capacité à dégager une majorité. C’est à ce moment-là, vers septembre, au terme d’une élection présidentielle sans débat, que serait conduite au pouvoir une équipe gouvernementale empruntant beaucoup à ceux que les électeurs ont sèchement sanctionnés depuis cinq ans, et à laquelle il appartiendra de prendre des mesures dont il serait surprenant qu’elles soient toutes très populaires. Pour la première fois depuis 1965, nous risquons de vivre en 2017 une élection présidentielle qui passera sans avoir eu lieu. Si les Français ne devaient découvrir qu’après avoir voté qui gouverne, avec qui et pour faire quoi, il nous resterait à espérer que le tohu-bohu judiciaire et le branle-bas de combat procédural qui se sont abattus sur François Fillon parviennent à démontrer que la gravité des faits justifiait d’empêcher le bon déroulement de ce rendez-vous démocratique considéré, faut-il le rappeler, comme la clé de voûte de nos institutions.

    @ Bruno : je vais en parler à mon épouse. Elle me comprend, elle.

  • Je suis d’accord avec votre analyse le fondement de toute société est pour longtemps détruite que laisse t’on a nos générations future depuis 68 ce libéralisme destructeur ou nos valeurs morale sont considérées comme conservatrice et arriérées de la parts même de beaucoup de croyants , jusqu’où doit t’on descendre pour retrouver l’espérance , je crains, de voir le pire , mais pas la renaissance qui doit nous animée.

  • Merci pour ce « point » bien vu.
    Mais beaucoup de choses laissent effectivement très, très amer.
    D’une part le matraquage continu depuis plus d’un mois, dans un seul sens. La dernière fois que j’ai eu ce sentiment c’était fin avril / début mai 2002. C’était peut-être un peu moins pénible du fait qu’il ne s’agissait pas de dézinguer le candidat que j’avais choisi bien sûr ; mais je ne trouvais pas ça sain pour autant et surtout ça n’avait duré que la quinzaine de l’entre-deux tours. Là, je me sens vraiment usé par la propagande continue, la meute de loups qui hurle et se relaie pour harceler. Les mots de F.F. ont été forts ? Certes. Excessifs ? Sans doute. Mais quand on prend des coups à longueur de journée, la modération souvent n’est plus possible, ne serait-ce que parce qu’elle n’est pas « audible ».

    Ce mot est celui qui m’apporte le plus de consternation (ou de rage selon les moments) en ce moment, car il porte témoignage de la malhonnêteté (il me semble) foncière de tant de journalistes.
    Quant un journaliste me dit « un tel est inaudible », mon premier réflexe est de penser : ce qui veut dire que toi journaliste, tu ne fais pas ton travail, puisque tu me dis ce que tu veux et tu brouilles le message au lieu de me transmettre ce qu’a dit le candidat !! Quand presque tous les journalistes passent leur temps à créer « l’inaudibilité » d’un candidat au lieu de relayer (quitte à le « nettoyer ») le message, je pleure d’avoir une presse qui balance donc entre l’incompétence coupable et la mauvaise foi inexcusable.

    Sur F.F. toujours : il est vraisemblable qu’il ait un certain temps abusé du système ; lequel système doit à coup sûr être réformé pour éviter de tels abus. Qu’il faille moraliser la vie publique est une évidence.
    Que ce soit le moment pour le faire ? Non, il y a d’autres enjeux bien plus immédiats, cruciaux, que ce billet souligne à bon droit.

    La « trêve » judiciaire tacitement appliquée jusqu’ici n’était pas faite pour provoquer l’impunité des politiques mais l’effet du discernement des juges. Certes ils agissent en conformité avec la loi – bien sûr ! Mais il y a toujours (vous ‘lavez souligné en d’autres occasion) une différence entre la détention d’un pouvoir et l’opportunité d’y recourir – et le moment de le faire. Donc, oui, il est clair qu’il y a instrumentalisation de l’outil judiciaire à des fins politiques, et il me paraît légitime de le regretter et même de le déplorer.

  • J’ai coupé mon commentaire parce que je devenais verbeux je crois, on va laisser le lecteur souffler ! Mais je poursuis…

    Sur Macron : drôle d’animal en effet mais pas amusant, au contraire très inquiétant. Il se présente en répétant que ce qui compte ce n’est pas un programme précis mais une « vision ». Pourquoi pas, pourvu qu’elle soit partagée. Or cette « vision » qu’il propose, au travers de son action, et de chacun de ses propos, me paraît à peu près antinomique de toute la mienne à part quelques mesures de bon sens – mais très insuffisante – sur le fait de limiter un peu l’étouffement qui pèse sur l’initiative économique dans ce pays.

    Ce que je vois de sa « vision » c’est typiquement l’humain nomade, sans racine, ce « citoyen du monde » donc de nulle part qui croit que la mondialisation n’apporte que le bonheur aux peuples, que ceux qui sont contre ne le sont que parce qu’ils sont trop inéduqués pour en comprendre les bienfaits. ISF supprimé sur les valeurs mobilières mais maintenu sur l’immobilier, bienveillance (il me semble ?) à l’égard de cette idée d’alternatives économiques et autres de taxation des loyers fictifs, taxe d’habitation réduite et pilotée de façon jacobine, etc : tout cela dessine un effacement du territoire, du terroir, par rapport à une vision de mobilité, de liquidité du capital y compris humain.

    L’emploi de mots aussi forts que « crime contre l’humanité » sur la colonisation d’Algérie (et non ce qui aurait été tout à fait défendable, de dire qu’elle avait été l’occasion de tels crimes – non ce n’est pas la même chose, et ce n’est pas juste une « imprécision » excusable quand on prétend à de tells fonctions) est également révélateur.
    Au final, je ne vois pas comment envisager de voter à la présidence de la République Française, pour quelqu’un qui manifestement ne croit pas que la notion de « France » ait une pertinence au-delà d’un paquet de données macroéconomiques et d’un niveau temporairement déterminé d’infrastructures.

    Donc on perçoit une colère oui. En cas de second tour EM / MLP le niveau d’abstention/blanc et nul sera sans doute très élevé. (Et sans doute dès le premier tour aussi).
    Je lis sur les réseaux, notamment depuis l’annonce du rassemblement de dimanche prochain au Trocadéro, des commentaires sur l’accélération d’une « trumpisation » de la campagne. C’est très vrai. Mais c’est le camp médias/teamClinton (pardon, Macron) qui a suscité cette évolution. Et on ne peut pas exclure le même résultat au bout (que le rôle de Trump, ou plutôt de l’anti-Système, soit in fine joué par FF ou MLP).
    Dès le lendemain du premier article du canard j’ai cessé de croire impensable une victoire de MLP. Cette impression est encore renforcée aujourd’hui. Je ne parle pas de mon cas personnel, je n’ai aucune sympathie pour MLP ni la plupart de ses thèses. Mais contrairement à trop de journalistes contemporains je m’efforce d’éviter le wishful thinking dans mes pronostics.

    Au final, il reste, en effet, les législatives.Parce qu’il faut continuer à espérer. Espérer que « ça ira (possiblement) mieux demain » comme l’écrivait je ne sais plus qui…

  • Oups, encore long et pourtant j’ai oublié l’essentiel de ce que je voulais dire sur E. Macron. Sa « vision », son « projet », il les déclame avec des accents mystiques. Certains ironisent sur ses postures christiques, mais ce n’est pas qu’une exagération ironique, ça semble vraiment profond et assumé.
    Or, j’ai beaucoup de respect voire d’admiration pour les mystiques. Les suivre dans une démarche spirituelle peut être très prenant, stimulant, enrichissant, beau…
    Mais en politique, ça me paraît extrêmement dangereux.

  • Bravo.
    J’adhère à la moindre virgule de cette analyse. Il est bon de poser ces principes fondamentaux en ces temps troublés.

  • Tout ce qui arrive de mauvais à François Fillon n’est pas le fait uniquement de femmes et d’hommes de gauche malfaisants et tordus. Tout ce qui arrive de mauvais à François Fillon n’est pas le fait uniquement des médias diaboliques dont tous les politiques usent et abusent. Il y a dans les droites françaises des pratiques malfaisantes qui ne datent pas d’aujourd’hui. Affaire Markovici pour abattre Pompidou, affaire feuille d’impôt pour abattre Chaban, tuerie d’Auriol, affaire Boulin etc… etc… Bien sûr les gauches ne font pas mieux et il est possible de faire une liste de coups tordus à gauche entre personnalités de gauche. Mais si le mal répond au mal quand s’arrêtera donc le mal? Il y a dans notre pays depuis longtemps maintenant une incapacité à faire exister un parti Démocrate Chrétien de masse. Depuis l’encyclique Rerum novarum et toutes les encycliques qui ont suivi il y a une difficulté que je ne sais pas expliquer à faire entrer la doctrine sociale de l’Eglise catholique dans la vie politique de notre pays. Bien que cela n’ait aucune importance j’affirme que j’ai personnellement trouvé plus de satisfactions dans la vie associative que dans la vie politique. Ainsi que dans l’engagement dans des mouvements de l’Eglise catholique.

  • Bravo Koz pour cette analyse très claire, et merci ! Si F. Fillon a peut-être eu tort dans sa gestion de ‘l’argent public » (mais est-ce vraiment de l’argent public ? je laisse le soin aux spécialistes de le déterminer), il n’a pas mené la France à la faillite ni tué personne. Ce n’est pas un procès qu’on lui fait, c’est une curée avec pour seul objectif de sonner l’hallali. Quant au résultat prévisible, il suffit de parcourir les commentaires des journaux et des réseaux sociaux pour constater qu’effectivement, si F. Fillon se retire, une immense colère pourra se traduire, hélas, par un vote vers MLP. Mais n’est-ce pas ce qui est recherché dans le but de faire gagner « l’étrange créature » dont vous parlez si bien ? Étrange créature qui, je l’avoue, me fait quant à moi très peur tant elle semble fabriquée de toute pièce, sans ancrage, hormis l’argent des millionnaires qui l’ont conçue et n’ont de cesse de la mettre en valeur (un remake politique de Pygmalion ? ), sans vraie histoire. Je me raccroche un peu aux élections législatives qui suivront mais je crains fort que nous n’allions vers des temps difficiles. Alors merci justement pour la fin de votre post qui va nous aider à ne pas baisser les bras et à nous engager, chacun à son niveau et selon ses capacités. Et puis c’est bien le moment de lire et relire « Veilleur, où en est la nuit », non ?

  • J’aime beaucoup ton billet, et j’ai été touché par tes mots.

    Je retiens notamment ton introduction, qui résume avec des mots magnifiquement choisis mon état d’esprit, et mon malaise.

    Bonne fin de semaine

  • Ce que je vois c’est un candidat dont le programme sur la justice pénale se résume à envoyer tous les délinquants en prison, le plus longtemps et le plus vite possible (voir par exemple ses propositions sur les peines planchers). Je ne vois pas pourquoi vous ne demandez pas l’application de ces principes à Fillon aussi…

    Je vous signale quand même que, si les faits sont avérés (et ils le sont probablement, vous l’avouez vous-même à demi-mot), eh bien, la plupart des gens en prison en France y sont pour des faits moins graves que ce qu’a fait Fillon.

  • humpty-dumpty a écrit :

    Qu’il faille moraliser la vie publique est une évidence. Que ce soit le moment pour le faire ? Non, il y a d’autres enjeux bien plus immédiats, cruciaux, que ce billet souligne à bon droit.

    Je crains que le respect des institutions et de ceux qui les incarnent ne soit une condition sine qua non pour engager les réformes dont le pays a besoin. Et Fillon s’est placé dans l’incapacité absolue de jouir de ce respect. Dans l’incapacité absolue d’appliquer son programme d’austérité sociale. Son refus de le reconnaître passe aujourd’hui pour un aveuglement ou un égotisme sans limite.

    En cas de second tour EM / MLP le niveau d’abstention/blanc et nul sera sans doute très élevé.

    Mais bien moindre qu’en cas de second tour FF / MLP. Quel choix que celui de deux candidats détournant l’argent public et méprisant la justice.

  • Billet intéressant, moi qui ne partage que très rarement vos avis, je comprends parfaitement votre desarroi.

    Par contre, je vous trouve très très modéré envers M. Fillon qui devrait clairement être le receptacle de votre colère, en se présentant comme le chevalier blanc de sa famille politique, alors qu’il avait des histoires si ce n’est illégales, au moins très amorales est savamment camouflées (prouvant sa connaissance de leur côté sulfureux)

    Se présenter en armure avec un tel tendon d’Achille seul face à ses ennemis politiques, était une stupidité sans nom, pour lui, mais une trahison pour ses électeurs qui se retrouvent le bec dans l’eau.

    J’espère que les gens qui refuseront de voter pour M. Fillon (et ils auront raison vu les circonstances) préféreront choisir le candidat Macron qui bien que jeune, maladroit, possède une ligne politique modérée, au lieu de se jeter dans les affres de lePen, bien plus affairiste encore et tellement plus radicale, dangereuse, et loin des idées que vous partagez.

  • Excellent billet ! Je souscris presque en totalité. Car, cela risque de durer plus que 5 ans. On a déjà vu les dégâts qui peuvent être faits en 5 ans et qu’il faut bien plus d’un lustre pour réparer et redresser tout ce qui a été cassé.
    Comme vous, je fais partie de tous ceux qui sont très inquiets pour notre démocratie, pour ce qui va encore se passer dans les prochaines semaines et surtout au prochain quinquennat. Et pour les jeunes générations, pour nos enfants, qui risquent de subir pendant longtemps les conséquences de certaines attitudes irresponsables.
    Dans toute cette cacophonie je ne comprends toujours pas « à qui profite le crime » !

  • C’est vrai que la situation est dramatique ! C’est vrai que la campagne est nulle, et que c’est dramatique.

    Mais, je suis en désaccord avec votre analyse :
    F. Fillon est seul responsable de ce qui arrive aux républicains . Il aurait dû se retirer dés le début . Ses attaques contre la presse et les magistrats sont hors de propos pour quelqu’un qui a fait salarier sa femme 7000 euros par mois pour ne RIEN faire (même pas garde du corps) . Je ne comprends pas votre indulgence , ni le procès en « complot ».
    F. Fillon est dans une fuite en avant – il n’a, à titre personnel plus rien à perdre en se maintenant, mais tout à faire perdre à son camp. C’est le contraire de ce que l’on attendait de lui.

    Je ne comprends pas votre détestation d’E. Macron. Ce n’est pas une créature sortie de nulle part, et il n’est pas « trop jeune » – Certes, il s’est peu confronté au suffrage universel (mais FF n’a pas pris beaucoup de risque), mais il à vécu autre chose, certes brièvement, qu’une carrière politique – et c’est toujours ça de mieux que tous les autres candidats.

    Alors de là à dire que s’il est élu, la France va perdre 5 ans pour l’emploi, l’éducation, la sécurité, l’écologie, par rapport à ce qu’aurait fait (ou pas) un F. Fillon , je n’arrive pas à comprendre ce qui vous donne cette certitude .

    PS : E. Macron n’avait sans doute rien à gagner dans les révélations sur F. Fillon, puisque le plan B évident, à l’époque, était A. Juppé, quasi certain de gagner face à E. Macron. Qui d’autre y avait intérêt (l’Élysée, pour faire gagner Hamon (le frondeur), ou Macron (le traitre), ou le Pen (?))
    PS2 : peut être que si Fillon renonce maintenant (en cohérence avec ce qu’il a dit depuis 20 ans, en reconnaissant que le 1,5 million d’euros d’argent public détourné pour l’entretien de son chateau n’est ni moral ni honnête), le candidat LR quel qu’il soit (s’il n’a pas de casserole) aura un capital sympathie colossal (les français adorent les victimes) et pourra être élu (au 1er tour , même !).

  • Bonjour,
    Je ne comprends pas que la presse ou la justice soient questionnées dans cette affaire. Je n’ai pas soutenu Fillon à la primaire LR, et j’ai pas réellement imaginé voter pour lui à la présidentielle. Je le voyais cependant comme un signe que tout n’était pas complètement corrompu dans ce parti de droite après Chirac et Sarkozy.

    J’aurais pu le trouver cohérent s’il avais admis avoir abusé d’un système pré-existant, en remboursant simultanément les sommes concernées et en proposant de modifier le système une fois élu.

    Ce n’est pas du tout ce qu’il s’est passé. Il a fait des déclarations m’expliquant que sa femme l’avait aidé dans son ascension politique est que c’était bien normal que je paye des impôts pour ça. Aucun journaliste ni aucun juge ne l’a obligé à me débiter pareille énormité.

  • J’ai voté pour François Fillon à la primaire. Je m’étais d’ailleurs servi du billet de Koz en novembre et de ses commentaires pour affiner ma réflexion. Pourquoi avoir choisi M.Fillon? Parce qu’il n’avait pas de passé judiciaire, et parce qu’il me semblait le rempart le plus solide contre la possibilité d’une présidence Le Pen.

    Raté, et raté. Il y avait tromperie sur la marchandise.

    D’aucuns (mais pas toi, Koz) cherchent à minimiser la gravité des accusations contre François Fillon. Ils sont gentils, ceux de ses partisans qui jouent cette carte, mais tout de même: on parle d’argent public, on parle de centaines de milliers d’euros, et on parle d’enrichissement personnel. Ce n’est pas une peccadille.

    Tu pointes la date des révélations pour évoquer à demi-mot la possibilité d’une opération calculée pour casser le candidat de droite: j’y crois peu, pour ma part. D’abord, il est normal qu’on s’intéresse de beaucoup plus près à un homme qui est sur le point d’accéder au pouvoir suprême (il était de très loin le favori il y a encore six semaines…) qu’à un gars qui est troisième ou quatrième dans les sondages d’une primaire. Rappelons qu’en octobre, peu donnaient cher des chances du candidat Fillon. Un dossier sur lui, s’il avait existé, n’aurait pu être gardé de côté qu’au risque de perdre beaucoup de son intérêt après la primaire.

    Je peux me tromper sur ce point, mais c’est de toute façon un sujet mineur. Même à supposer qu’il y ait eu machination: comme tu le dis, cela n’efface rien à la gravité de la faute commise. Faute morale, d’abord: le serviteur de l’État s’est servi de la caisse publique pour arrondir les fins de mois de sa famille. Faute politique: se faisant l’avocat grandiloquent d’une République irréprochable, allant jusqu’à invoquer la mémoire du général de Gaulle à l’appui, il a décrédibilisé la notion même de service de l’État en se révélant lui-même le contraire de ce qu’il prônait: le parallèle avec Jérôme Cahuzac est évident. J’ajouterai à cela une faute personnelle, spécialement odieuse à mes yeux: il a entraîné dans l’opprobre, et dans l’illégalité, son épouse et sa famille. Est-ce cela, la défense des valeurs traditionnelles de la droite?

    Le plus grave est encore dans sa réaction. Au lieu de se retirer dignement et de laisser encore une chance à un autre candidat de son parti, il s’est accroché férocement, obligeant ses camarades à le suivre et donc à couler avec lui. Pire encore, au lieu de se défendre en clamant son innocence, il a choisi d’attaquer les juges: la violence de ses assauts contre le pouvoir judiciaire, à elle seule, le disqualifie. Comment prétendre à accéder au sommet de l’État, alors qu’on met ainsi en cause son fonctionnement? Comment être garant de la Constitution quand on en piétine les principes élémentaires? Comment obtenir le respect, quand on verse dans une outrance qui rappelle autant celle de Donald Trump?

    On voit, dans le renoncement d’une grande part de ses soutiens, à la fois la marque de sa culpabilité (qui l’a défendu sur le fond? bien peu, et avec guère de crédibilité) et celle de l’impasse politique dans laquelle il a fourré son camp. Ce ne sont pas les grands noms qui le quittent – ceux-là ne peuvent se permettre d’être les premiers à quitter le navire. Non, ce sont les personnages de second rang, moins connus, ceux qui doivent faire tourner la mécanique de la campagne. Ceux-là ont perdu la foi dans la victoire, et ne veulent pas être personnellement associés à des attaques scandaleuses et dangereuses contre le système judiciaire.

    On peut encore espérer, mais bien faiblement, que quelqu’un fasse comprendre à M.Fillon que son devoir est de retirer sa candidature. Au lieu d’être un rempart, il a fait croître le risque d’une victoire du Front National, et donc renforcé une grave menace qui pèse sur le pays. Il est encore possible de limiter la casse.

    S’il s’entête comme il l’a fait jusqu’ici, alors il faudra bien s’intéresser de plus près au programme et à la personne de M.Macron. C’est très largement une inconnue, et ce n’est pas très rassurant. Le personnage semble léger, la ligne politique incertaine, l’entourage complexe. Mais cela vaut forcément mieux qu’un homme qui serait plombé pendant cinq ans par un boulet pareil… sans parler de la possibilité bien réelle que Mme Fillon soit condamnée pendant son mandat alors que lui-même bénéficierait de la suspension des poursuites.

    Je voudrais pour finir réagir à une remarque faite plus haut.
    humpty-dumpty a écrit :

    Qu’il faille moraliser la vie publique est une évidence. Que ce soit le moment pour le faire ? Non, il y a d’autres enjeux bien plus immédiats, cruciaux, que ce billet souligne à bon droit.

    Je suis en absolu désaccord avec vous sur ce point. La campagne présidentielle est exactement le meilleur moment pour mettre au jour ce type de turpitudes. C’est justement au moment de visibilité maximum, au point où les conséquences seront le plus lourdes, qu’il faut crever l’abcès. Ce type d’affaire ne semble jamais avoir de conséquences graves pour ceux qui s’y adonnent. Qu’une élection en soit changée fera peut-être réfléchir une bonne fois ceux qui aspirent à gouverner.

  • Entre ceux qui verront dans ce billet un soutien et ceux qui y verraient un lâchage, permettez-moi de tracer ma propre voix. Je n’ai pas le goût de frapper un homme à terre, de joindre mon cri à la meute. On peut évidemment se parer de sa vertu – insoupçonnable puisque personne n’ira la vérifier – et en rajouter autant que possible sur le dos de François Fillon. Quelqu’un comme René Dosière, que l’on ne peut soupçonner de légèreté dans l’utilisation des fonds publics, s’est dit, hier sur Europe 1 « surpris par l’ampleur de l’affaire Fillon », qui « n’est pas l’affaire du siècle ». Ne nous prétendons donc pas plus vertueux que nous ne sommes.

    Les montants évoqués sont élevés et choquants, certes, mais on oublie de les diviser par 20 pour les ramener à une base annuelle et par 12 ensuite.

    Je ne suis pas non plus dupe de ce qui se produit. Non, je ne crois pas qu’il s’agisse uniquement ici de s’intéresser spécialement à un candidat simplement parce qu’il est candidat. Ce serait certes un motif légitime mais, en pratique, je suis convaincu qu’il n’est pas le seul. D’une part, parce que c’est oublier un détail : François Fillon a été premier ministre pendant 5 ans. Des batailles politiques il y en a eu. Des occasions de s’intéresser à lui de près et de le mettre en porte-à-faux, également. D’autre part, parce que j’ai des raisons de penser que ce n’est pas innocent, compte tenu de mes échanges avec certains journalistes politiques, dont l’une, de gauche, à laquelle je soumettais justement le fait que ce ne soit qu’un travail journalistique, me répondait en rigolant : « non, non, ce n’est pas comme ça que ça se passe« .

    Il est évident que des éléments ont été opportunément adressés à la presse.

    La célérité de la justice n’est pas exempte de tout soupçon non plus, même s’il peut aussi y avoir des motifs légitimes à une action rapide.

    Quant à la presse, il suffit de suivre les journalistes sur Twitter pour constater une véritable détestation à l’encontre de François Fillon, liée non seulement au fait qu’il soit de droite mais qu’il ait marqué une proximité, relative, avec les catholiques. Hier encore, de nombreux journalistes (y compris au Figaro) diffusaient l’info selon laquelle la Manif Pour Tous était chargée de l’organisation de la manifestation de dimanche. Connaissant tous les intervenants, et mon associé étant l’avocat de LMPT, je suis bien placé pour savoir que c’est radicalement faux. Cela n’empêche aucun journaliste de rediffuser ce mensonge qui, par sa nature, montre bien ce que l’on reproche à Fillon sur le plan politique.

    La lucidité sur ces plans-là ne me conduit pas à me leurrer sur le cas de François Fillon. Qu’il ait fait comme tant d’autres n’est pas une excuse – ni audible ni recevable. Le fait est qu’il s’est présenté comme étant différent des autres, il s’est présenté sur le mode de l’intégrité, est allé jusqu’à évoquer sa foi chrétienne. Il n’est effectivement pas surprenant qu’il soit flingué sur le terrain sur lequel il se montre incohérent. Sa communication a été laborieuse, cachant mal le fait qu’il était bien compliqué d’apporter des éléments concrets sur le travail de sa femme. Et la contradiction entre ce qu’il avait imprudemment avancé sur sa décision en cas de mise en examen et son attitude actuelle n’est pas audible. Comme je l’ai écrit, c’est le fondement de sa candidature comme de sa politique qui est atteint.

    Il faut encore prendre en compte sans candeur la réalité politique, déconnectée du juste ou de l’injuste. Aujourd’hui, sa candidature va dans le mur. Il n’est pas en mesure de faire gagner la droite et ce, alors même qu’il est évident que l’alternance est souhaitée. D’un point de vue purement pragmatique, il ne va même plus en avoir les moyens, perdant des soutiens précieux comme des petites mains.

    Mais il faudrait encore être un peu naïf pour imaginer que son retrait ouvre la voix à une victoire, ou que cela atténue le risque FN. Le seul bénéfice de son retrait serait d’éviter ce que beaucoup pointent comme un « suicide collectif« . Il s’agit de sauver les meubles pour l’avenir, de disposer aussi d’un chef de la majorité pour les législatives. Mais il est loin d’être certain qu’une candidature Juppé connaisse un meilleur sort. Comme il est loin d’être certain que le risque FN soit moindre : de nombreux électeurs vont être emportés par la colère de s’être fait voler la primaire, l’élection et la victoire (qu’ils aient raison de le penser n’étant pas le sujet : ils le penseront). Un certain nombre d’entre eux étaient retenus par l’élastique de la culotte par une candidature Fillon, mais iront « chez Marion ». Et si de surcroît les catholiques continuent d’être présentés comme des repoussoirs – comme Juppé l’a fait pendant l’entre-deux-tours de la primaire et comme certains le font aujourd’hui – l’effet sera pire encore. Avec pour conséquence que ces gens, qui ne partagent probablement pas toutes ses idées, finiront par frayer avec des électeurs FN qui ne manqueront pas de les radicaliser.

    Bref, l’heure n’est pas à se faire plèze.

  • psam a écrit :

    il [E. Macron] a vécu autre chose, certes brièvement, qu’une carrière politique

    Oui. Il a vécu les hautes sphères de la grande banque internationale. Les grandes opérations entre grands groupes avec la bénédiction voire la complicité de l’appareil d’Etat. Bref, le capitalisme de connivence. Exactement ce qui mine à la fois notre économie (à l’opposé d’un libéralisme où c’est la liberté d’entreprendre et la valeur relative des projets, et non pas la valeur relative des copinages avec le pouvoir) qui fait évoluer les choses), et notre vie politique. Le déblocage du rachat de SFR par Drahi dès son arrivée à Bercy (lequel le lui rend amplement en matraquant sur ses medias une propagande pro-Macron jamais vue) est l’illustration la plus patente de ce type de collusions qui me paraissent très dangereuses pour la vie démocratique d’un pays. Sans avoir avoir une approbation très grande des idées que défendait A. Montebourg je lui faisais au moins crédit d’un souci sincère de l’intérêt national.

    Gwynfrid a écrit :

    Je suis en absolu désaccord avec vous sur ce point. La campagne présidentielle est exactement le meilleur moment pour mettre au jour ce type de turpitudes.

    Du point de vue de l’efficacité de la démarche, sans doute. Mais à quel prix ? Il me paraît exagérément élevé pour un objectif qu’on n’est pas sûr d’atteindre et qu’on pouvait (et à mon avis devait) atteindre sans cela.

  • « Emmanuel Macron peut bien proposer une loi pour interdire les conflits d’intérêt, il semble qu’il y soit structurellement plongé… « Sans être toujours d’accord avec vous, j’ai toujours apprécié votre honnêteté intellectuelle, c’est pourquoi je ne peux m’empêcher de vous indiquer ma déception devant les procès d’intention de ce billet. Que quelques grands patrons soutiennent EM, soit, mais d’autres et sans doute la majorité soutiennent FF. EM est soutenu aussi par 200 000 adhérents dont plusieurs dizaines de milliers ont contribué à l’élaboration du programme présenté hier et sont précisément revenus grâce à En Marche vers l’engagement politique que vous appelez de vos voeux…

    Que le droite et le PS soient en ce moment en retrait du débat d’idées du fait de dissensions internes, c’est un fait qu’on ne saurait nier. Mais répéter à l’envi comme les chroniqueurs que le débat d’idées est absent devient gimmick autoréalisateur.

    Quant à dire qu' » Emmanuel Macron serait bien inspiré de prendre un peu de recul sur l’Histoire », sa position sur la colonisation est au contraire d’une exigence rare (il suffit de réécouter son entretien sur France Culture pour s’en rendre compte, et ici pour la réponse à la polémique http://www.20minutes.fr/politique/2015795-20170216-video-algerie-emmanuel-macron-repond-ceux-veulent-instrumentaliser-propos)

    Mais je vous rejoins sur une chose : si des gens comme Koz perdent leur pertinence et leur exigence intellectuelle, alors oui, nous aurons tout perdu.

  • Votre billet est très bien car il donne une voix à ceux que ce déferlement médiatique a rendu muets.
    Toutefois, les médias, les juges, le regard moqueur ou offusqué des autres n’entreront pas dans l’isoloir avec vous. L’élection se fait encore par le suffrage universel. Plier le bulletin Fillon et le mettre dans l’enveloppe et l’enveloppe, dans l’urne en se murmurant « tout est perdu, fors l’honneur » : c’est du panache !

    Honneur, oui, même si le mot peut prêter à rire, honneur de qui n’est pas allé se jeter aux pieds de Macron comme Bayrou et les autres, ne brandira pas le poing chez Marion par rage, ne renoncera pas à voter par dépit et dégoût des institutions républicaines, honneur de qui a placé sa confiance dans un candidat : est-ce un crime ? et le découvrant « comme les autres » ne pousse pas les hauts cris du « tous pourris », honneur de qui ne s’estime aucunement irréprochable et qui, s’il a parfois hésité à jeter sa pierre avec les autres en contribution de justice, ne l’a pas fait.

    Que dites-vous ?… C’est inutile ?… Je le sais !
    Mais on ne se bat pas dans l’espoir du succès !
    Non ! non, c’est bien plus beau lorsque c’est inutile !

  • Gwynfrid a écrit :

    Tu pointes la date des révélations pour évoquer à demi-mot la possibilité d’une opération calculée pour casser le candidat de droite: j’y crois peu, pour ma part.

    Si l’on parle calendrier, notons que c’est après la primaire que les investitures aux législatives ont été traitées, et que par exemple NKM a été préférée à Dati. Peut-on définitivement exclure que sur un coup de sang celle-ci ait lâché une « bombinette » sans réaliser qu’elle était nucléaire ?

  • Koz,

    je respecte totalement ta position de soutien critique de F. Fillon, essayant de prendre du recul même si, pendant la primaire , ton activisme pro Fillon sur Twitter dépassait parfois le sens de la mesure auquel j’étais habitué (je crois que c’est la premire fois que je te vois soutenir aussi quasi aveuglement un candidat, – mais c’est sans doute un effet de loupe de twitter)

    Néanmoins, la phrase ci-dessous est de l apure propagande, et est uinsuportable pour beaucoup d’entre nous
    Koz a écrit :

    Les montants évoqués sont élevés et choquants, certes, mais on oublie de les diviser par 20 pour les ramener à une base annuelle et par 12 ensuite.

    Si on regarde le salaire des ses autres attachés parlementaires sur la même periode, c’est insupoortable – ils ont été payé des clopinettes a coté, alors sur 20 ans ..
    Si on compare à la moyenne des « moyennes des salaires des attachés parlementaires sur 20 ans » (et non à un instant T), je pense que cela reste indécent !

    Et le fait qu’il ai toujours été au maximum légal (4000 quand elle était son attachée à lui, 8000 quand elle était l’attachée de son suppléant, immédiatement) est le signe d’une optimisation de l’abus de biens publics diificile à faire passer dans une moyenne …

    Non, cette phrase est de trop !

  • @ Koz:
    Je viens de faire le calcul : 1.000.000 sur 20 ans cela donne une moyenne de 4500 euros par mois., ce qui n’est pas non plus une somme astronomique. Ceci dit, je peux fort bien comprendre que l’on s’élève contre un présumé enrichissement personnel sur « l’argent public ». Mais dans ce cas-là, il faudrait secouer le cocotier un peu partout, jusqu’au plus haut somme de l’Etat. Or moi, ce qui me chagrine, c’est que dans le cas présent il n’y a qu’une cible, victime d’un acharnement politico médiatique absolument sans précédent. Une mise au pilori du 21ème siècle en quelque sorte. Alors que, faut-il le rappeler, aucun jugement n’a encore été rendu…

  • Les montants évoqués sont élevés et choquants, certes, mais on oublie de les diviser par 20 pour les ramener à une base annuelle et par 12 ensuite.

    Vous oubliez de diviser encore par 30 pour arriver au détournement journalier. En fait très modeste.

    Votre raisonnement souligne juste que non seulement il s’est enrichi à nos frais mais qu’en plus il l’a fait continument sur une durée de 20 ans.

    20 ans de détournements!

    Etes vous bien sûr que cette présentation lui est plus favorable?

  • Je crains que certains n’aient besoin d’apprendre à lire, à relire, ou à s’appliquer à eux-mêmes le sens de la mesure qu’ils réclament de la part des autres. Si ce que j’ai écrit est un soutien de Fillon, mazette… Manifestement, pour certains, il n’est tout bonnement pas acceptable de ne pas participer à la curée. Amusez-vous, faites reluire vos vertus outragées, mais sans moi.

  • Merci Koz toujours. Tout est dit. Ce qui m’énerve, c’est que l’AFFAIRE, démarre toujours pour des histoires de « fric » . Les oreilles sont attentives à cet argument. Pour démolir quelqu’un qui a beaucoup gagné (? tout à fait légalement, c’est imparable. Mais comme moi, je me fiche complètement que mes petits impôts (car je gagne peu) aille chez quelqu’un qui a plus d’argent que moi, c’était ses autres valeurs que j’avais retenues. Depuis des années (j’ai 75 ans) j’espère que les Français sortiront de la lutte des classes. Hélas ce n’est pas gagné. Mais il faut reconnaître que, psychologiquement, F.Fillon n’a pas utilisé de bons arguments pour se défendre. Et maintenant, Je ne compte plus que sur l’Esprit-Saint, que je prie chaque jour, pour guider ma main quand elle choisira le bulletin à mettre dans l’urne !

  • Il va quand même y avoir un côté paradoxal à remplacer une personne soupçonnée d’emplois fictifs par quelqu’un condamné pour emplois fictifs. Je ne suis pas sûr non plus du nombre de gens qui pourraient jurer n’avoir jamais détourné un euro d’argent public, ou toujours payé à l’Etat ce qu’ils devaient : les oublis sur les feuilles d’impôts, les aides perçues non justifiées, les héritages non déclarés, les fraudes aux assurances et en particulier l’assurance chômage…

    Il reste que ce qu’il a fait n’est pas défendable, on le voit bien. Une des choses qui me choquent est l’exemple donné à ses enfants eux-mêmes : comment peut-on avoir une seule seconde considéré comme normal de payer son fils 4 800 euros bruts par mois, simple étudiant en droit, avec de l’argent public ? D’un point de vue éducatif, c’est terrible, et ça contribue à perpétuer des systèmes profondément mauvais.

    Bref, ça me fait assez mal, je souhaitais vraiment sa victoire, mais je ne vois pas de sortie honorable.

  • En ce qui concerne les enfants, il est clair que les montants concernés sont assez sidérants pour un début de carrière. En revanche, je ne crois pas que l’on prétende qu’ils n’aient pas travaillé. Et, franchement, on a vu passer la liste des parlementaires employant un membre de la famille : c’est ultra répandu et ça n’était pas illégal. Moral, en revanche… On en revient à la source des problèmes de Fillon : s’être présenté sur une image d’intégrité.

    Pour ce qui est de Juppé, je suis assez d’accord avec vous, mais avec une différence qui n’est pas anodine : Alain Juppé a été l’un des ordonnateurs d’un système qu’il n’a pas mis en place et sans enrichissement personnel, ce qui change la nature des actes et leur perception, y compris devant la Justice.

  • @ Gatien:
    Je n’ai pas dit que je trouvais son attitude formidable mais seulement que je ne comprenais pas pourquoi il était une proie à abattre absolument, sans laisser une chance à la justice de faire son travail en toute indépendance. Mais là je rêve peut-être. En ce qui concerne votre expression « enrichi à nos frais », 1) ça reste encore à démontrer (même si c’est envisageable) parce que pas encore jugé et 2) une info trouvée dans l’Obs de ce jour : http://actualites.nouvelobs.com/presidentielle-2017/20170228.OBS5904/6-000-euros-d-argent-de-poche-et-autres-privileges-des-parlementaires.html

  • Gwynfrid a écrit :

    on parle d’argent public, on parle de centaines de milliers d’euros, et on parle d’enrichissement personnel.

    Il y a tout de même un point de fond sur lequel je peine à avoir une idée claire. Est-il vrai que l’enveloppe parlementaire est versée au député, qu’il la dépense souverainement et que les sommes non utilisées lui reviennent in fine personnellement?

    Si c’est vrai, alors il n’y a pas eu détournement de fonds publics, enrichissement personnel etc. J’ai cru comprendre que c’était vrai, à la lecture de blogs au début de l’affaire. Mais je n’arrive pas à en avoir la certitude.

    Généralement, quand je parle de ce sujet précis avec des gens qui ne sont pas de mon avis, ils détournent la conversation vers l’importance des montants et l’incohérence avec la posture de droiture adoptée par Fillon.

    Tout ceci tend à me convaincre que (i) c’est effectivement vrai et (ii) il y a bien une violence, une intransigeance spécifiques envers Fillon. Koz met cela sur le compte de ses convictions catholiques et cela joue certainement. Pour ma part, je ne peux m’empêcher de noter que Fillon est le seul candidat (et le premier depuis des décennies) à avoir axé sa campagne sur une réduction franche des déficits, des dépenses et des effectifs du léviathan. C’est d’ailleurs pour cette raison essentielle que j’ai voté pour lui à la primaire.

    Gwynfrid a écrit :

    Comment prétendre à accéder au sommet de l’État, alors qu’on met ainsi en cause son fonctionnement?

    Pourquoi accéder au sommet de l’Etat si on ne met pas en cause son fonctionnement? L’institution judiciaire n’est pas au-dessus de la critique ni de la loi.

    J’observe par ailleurs qu’il n’y a pas 6 mois, de l’autre coté de l’Atlantique, une situation symétrique avait lieu. Le FBI faisait irruption dans la campagne électorale US en annonçant avoir ouvert une enquête sur Clinton. Curieusement, à l’époque, la presse française trouvait scandaleuse l’influence de la justice sur le processus électoral. Et Trump était un fasciste de dire qu’il y aurait une enquête s’il était élu. Je n’ose imaginer les glapissements s’il avait appelé à ce qu’elle se retire de l’élection.

    Gwynfrid a écrit :

    La campagne présidentielle est exactement le meilleur moment pour mettre au jour ce type de turpitudes. C’est justement au moment de visibilité maximum, au point où les conséquences seront le plus lourdes, qu’il faut crever l’abcès.

    Let’s agree to disagree. C’est donner un pouvoir exorbitant et dangereux, non pas à la justice, mais à une poignée de magistrats. Rappelons qu’il n’y a aucune conséquence dommageable pour le juge si une mise en examen aboutit à un non-lieu.

    Beria disait « montre moi l’homme et je te trouverai le crime ». Avec l’inflation des lois et règlements, je pense qu’aucun politique n’est à l’abri d’une instruction judiciaire; il n’y a même pas besoin de beaucoup de mauvaise foi. En tous cas, dans ma « line of business », aucun contrôle URSSAF, fiscal, médecine du travail ou droit du travail ne revient bredouille. Ca n’arrive jamais. Il y a toujours un papier que tu as oublié, un règlement obscur que tu n’as pas respecté.

    On doit apprendre à vivre avec cet arbitraire (directement conséquence de la croissance métastasique du léviathan, mais je digresse). Le tolérer au moment de l’élection suprême, c’est saper le principal pilier de la démocratie.

    C’est la mise en examen qui a vraiment nui à Fillon. Imagine qu’il ne soit pas élu (pour avoir renoncé ou pas) et que dans 1 an l’enquête aboutisse à un non-lieu. Pourra-t-on encore parler d’élection libre et ouverte?

  • @Cardabelle
    « enrichi à nos frais » n’est plus à démontrer par la justice, puisque c’est ce qu’a affirmé FF lui même. Pour rappel: il a reconnu que sa femme touchait un salaire tiré de l’enveloppe parlementaire de son suppléant sans jamais avoir travaillé pour le suppléant en question. Ca s’appelle « détourner » dans le langage courant.

  • @Cardabelle
    « enrichi à nos frais » n’est plus à démontrer par la justice, puisque c’est ce qu’a affirmé FF lui même. Pour rappel: il a reconnu publiquement (entre autres) que, à sa demande express, sa femme touchait un salaire tiré de l’enveloppe parlementaire de son suppléant sans jamais avoir travaillé pour le suppléant en question. On peut raisonnablement considérer que cet argent a été détourné, indépendamment de ce qu’en diront les juges.

  • @Lib écrit « Il y a tout de même un point de fond sur lequel je peine à avoir une idée claire […] me convaincre que (i) c’est effectivement vrai « 

    Comment avez vous pu sérieusement croire que les parlementaires pouvaient se reverser à eux même des montants pareils?
    Votre autopersuasion vous perdra.
    « Il peut aussi céder ce crédit collaborateur à son groupe parlementaire à hauteur de 50 % et se réserver 5 958 € annuels qui seront détournés sur son IRFM (indemnité représentative de frais de mandat) »
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Collaborateur_parlementaire_en_France

  • Je ne suis pas certain que l’objet soit ici de refaire toute l’affaire. Le fait est qu’il y a, ensuite, une situation politique, difficilement contournable : François Fillon ne peut plus faire gagner son camp. Que l’on trouve cela scandaleux ou non.

    @ Lib : sur quoi a été attaqué Fillon ? Sur ses propos sur l’IVG (cf l’entre-deux-tours), sur la présence de Sens Commun à ses côtés et, hier sur le reproche mensonger d’une organisation de la manif de dimanche par LMPT (quoi qu’en dise la presse : je suis en contact quasi-direct avec Ludovine de la Rochère et sais tout de même un peu ce qu’il en est), sur l’affirmation selon laquelle il était chrétien. Je ne crois pas vraiment – voire vraiment pas – que ce soit son relatif libéralisme qui soit en cause, même s’il n’arrange pas le tableau.

  • @ Jean-Luc:
    Merci. Il serait intéressant de connaître la proportion des députés qui rendent une partie de la somme.

    Koz a écrit :

    Le fait est qu’il y a, ensuite, une situation politique, difficilement contournable : François Fillon ne peut plus faire gagner son camp.

    Tu sais, des élections j’en ai gagnées, j’en ai perdues, la différence n’a pas toujours été si importante que ça. A titre perso, je supporte très bien la perspective de perdre une élection, beaucoup moins celle de voir mon vote annulé ou interdit.

  • Non Koz, ce que tu écris maintenant n’est pas un soutien à Fillon, c’est mesuré et cela montre tes doutes. (je parlais de ce que tu écrivais pendant les primaires)

    Juste la façon que vous avez les uns et les autres, de minimiser le fait qu’il aurait fait payer son épouse 8000 euros par mois pour ne rien faire (et ceux qui prétendent qu’elle aurait travaillé sans laisser aucune trace sont aveuglés par leur militantisme) – même si ça n’avait duré que quelques mois, cela s’appelle du vol. Je pense que si je vole 60 000 euros à qui que ce soit (un particulier, une banque, l’état), j’aurais droit à un proces, et serais probablement condamné

    le montant est injustifié, le coté fictif illégal, la somme des 2 cela ressemble à du vol (un genre de braquage sans violence, de détournement de fond,… que ce soit de l’argent public ou pas) .

  • Koz a écrit :

    Je n’ai pas le goût de frapper un homme à terre, de joindre mon cri à la meute.

    François Fillon n’est pas à terre. Il est debout, et il cogne dur. Ces coups font du mal à la démocratie. C’est le fait qu’il se maintienne, et, plus encore, qu’il se fasse accusateur de ses juges, qui mérite autant de colère à son égard..

    Les termes de meute, halalli, lynchage, chasse à l’homme et autres de la même eau ont été employés par les partisans de M.Fillon. Ce sont les mêmes que les défenseurs des Thévenoud, Cahuzac et autres DSK ont utilisés, sans plus de résultat qu’aujourd’hui. Je revendique mon droit à l’indignation envers nos gouvernants, lorsqu’ils trahissent ainsi notre confiance. Les mots que j’ai employés sont durs. Je ne les crois pas excessifs. Mon point de vue, bien sûr est coloré par le fait que je vis à l’étranger. Dans mon pays d’adoption, une telle mise en cause aurait résulté en une démission dans les 48 heures maximum.

    Ne nous prétendons donc pas plus vertueux que nous ne sommes.

    D’accord. Par contre, exigeons de le devenir davantage. Notamment lorsqu’on postule aux responsabilités les plus hautes.

    Les montants évoqués sont élevés et choquants, certes, mais on oublie de les diviser par 20 pour les ramener à une base annuelle et par 12 ensuite.

    Ce calcul amène en gros à un salaire de cadre supérieur en milieu de carrière, pendant 20 ans, en échange d’une absence complète ou quasi-complète de travail. C’est là un vol qui enverrait en prison n’importe quelle personne comptable de deniers privés.

    Il est évident que des éléments ont été opportunément adressés à la presse

    Cela ne fait guère de doute. Il est juste regrettable que cela ne se soit pas produit six mois plus tôt.

    La célérité de la justice n’est pas exempte de tout soupçon non plus, même s’il peut aussi y avoir des motifs légitimes à une action rapide.

    Non seulement c’est légitime, mais c’est indispensable. C’est la lenteur de la justice qui a permis aux affaires passées (je pense à Jacques Chirac, notamment) de se finir sans conséquence sérieuse. C’est une raison majeure de la perte de crédit de notre démocratie.

    Quant à la presse, il suffit de suivre les journalistes sur Twitter pour constater une véritable détestation à l’encontre de François Fillon, liée non seulement au fait qu’il soit de droite mais qu’il ait marqué une proximité, relative, avec les catholiques.

    C’est vrai. Il est d’autant plus désolant que ce soit lui qui se soit érigé en représentant d’une sensibilité catholique en politique.

    La lucidité sur ces plans-là ne me conduit pas à me leurrer sur le cas de François Fillon. Qu’il ait fait comme tant d’autres n’est pas une excuse – ni audible ni recevable. Le fait est qu’il s’est présenté comme étant différent des autres, il s’est présenté sur le mode de l’intégrité, est allé jusqu’à évoquer sa foi chrétienne. Il n’est effectivement pas surprenant qu’il soit flingué sur le terrain sur lequel il se montre incohérent.

    100% d’accord là-dessus.

    Sa communication a été laborieuse, cachant mal le fait qu’il était bien compliqué d’apporter des éléments concrets sur le travail de sa femme. Et la contradiction entre ce qu’il avait imprudemment avancé sur sa décision en cas de mise en examen et son attitude actuelle n’est pas audible. Comme je l’ai écrit, c’est le fondement de sa candidature comme de sa politique qui est atteint.

    Itou.

    Mais il faudrait encore être un peu naïf pour imaginer que son retrait ouvre la voix à une victoire, ou que cela atténue le risque FN.

    C’est vrai, bien sûr. Mais il reste tout de même une chance non négligeable. Il est clair aujourd’hui que la course se fait pour la deuxième place, en espérant un ralliement au second tour contre l’aventure lepéniste. Donc la droite a besoin d’un candidat crédible contre M.Macron… Ce n’est pas une barre extraordinairement haute, si? Même si on ne veut pas d’Alain Juppé, ce qui serait compréhensible (ou s’il ne veut pas, lui-même, ce qui le serait aussi) il y a au moins une dizaine de membres de LR avec une expérience et une envergure politique largement comparables à celles d’Emmanuel Macron.

    Le seul bénéfice de son retrait serait d’éviter ce que beaucoup pointent comme un « suicide collectif« . Il s’agit de sauver les meubles pour l’avenir, de disposer aussi d’un chef de la majorité pour les législatives. Mais il est loin d’être certain qu’une candidature Juppé connaisse un meilleur sort. Comme il est loin d’être certain que le risque FN soit moindre : de nombreux électeurs vont être emportés par la colère de s’être fait voler la primaire, l’élection et la victoire (qu’ils aient raison de le penser n’étant pas le sujet : ils le penseront). Un certain nombre d’entre eux étaient retenus par l’élastique de la culotte par une candidature Fillon, mais iront « chez Marion ».

    C’est vrai, le risque existe aussi de ce côté. Mais j’ai du mal avec une stratégie qui consiste à renoncer à faire mieux. La campagne Fillon est dans le coma plus depuis un mois maintenant, et ne peut plus être ranimée. La maintenir en vie revient à accepter de couler avec le Titanic. Les canots de sauvetage ne sont peut-être pas terribles, mais au moins ont-ils le mérite d’exister.

    Oui, les électeurs de la primaire se sont fait voler la campagne. Par François Fillon, et personne d’autre. Je ne vois aucun avantage à le laisser continuer à le faire.

    humpty-dumpty a écrit :

    Mais à quel prix ? Il me paraît exagérément élevé pour un objectif qu’on n’est pas sûr d’atteindre et qu’on pouvait (et à mon avis devait) atteindre sans cela.

    Le prix, c’est juste un remplacement par n’importe laquelle de dix ou douze personnalités, certes avec leurs défauts, mais qualifiées, et défendant, à queqlues détails près, la même politique (c’est l’avantage d’avoir un parti qui est grosso modo uni sur le fond). Parfaitement raisonnable, à mon sens, du point de vue du parti, comme de celui du pays.

  • « François Fillon ne peut plus faire gagner son camp ».

    Je me répète mais l’élection se joue dans les urnes et non dans les médias et les bureaux des juges. Et j’ajoute que pleurnicher sur la scélératesse de l’adversaire ne sert à rien. Que les dés soient truqués, c’est évident. Aussi que la haine contre Fillon vienne d’abord du soutien de Sens commun. Le mariage pour tous aurait dû déboucher sur la PMA-GPA (avancée majeure pour le camp du Progrès) or la manif pour tous a mis ce plan en échec et fait de ce sujet un sujet hautement inflammable. Puis Sens commun a joué un grand rôle dans l’élection de Fillon et c’est encore Sens commun qui forme le roc sur lequel Fillon peut résister quand une bonne partie de ses versatiles soutiens politiques le lâche.

    René Girard dirait que tout est mûr pour que Sens commun devienne le bouc émissaire de toutes les innocences autoproclamées de gauche et de droite, celles qui jamais n’ont truandé et jamais ne soutiendraient un candidat soupçonné de pratiques immorales. Fillon est coupable, Sens commun qui persiste à le soutenir est coupable : lâchons les chiens. Cela dépasse les manœuvres politiciennes. Encore Girard : qu’ils ne savent pas ce qu’ils font, qu’ils agissent sous l’effet d’une détestation irrationnelle, dévastatrice. Toujours Girard : que le temps n’est plus où le bouc émissaire pouvait être tranquillement sacrifié pour ressouder la société déchirée.

    Donc attendons de voir sur quoi l’hystérie actuelle va déboucher. Le rassemblement de dimanche sera déjà un signe. S’il est un échec ou un succès, s’il est interdit, s’il est infiltré par les casseurs. Et encore et toujours que le fondement de notre société, le contre-pouvoir à toutes les manigances est le suffrage universel. Un citoyen, un vote. Très humblement mais très résolument.

  • Cher Koz,
    Merci pour ce magnifique billet, qui réussit le tour de force de dresser un constat d’une totale lucidité, et de refuser la facilité du découragement pour, au contraire, appeler à l’engagement sans naïveté mais avec détermination.

  • Lib a écrit :

    Koz met cela sur le compte de ses convictions catholiques et cela joue certainement. Pour ma part, je ne peux m’empêcher de noter que Fillon est le seul candidat (et le premier depuis des décennies) à avoir axé sa campagne sur une réduction franche des déficits, des dépenses et des effectifs du léviathan. C’est d’ailleurs pour cette raison essentielle que j’ai voté pour lui à la primaire.

    Exact. Et c’est aussi pour cette raison que sa candidature est morte. Le coeur de son programme perd toute crédibilité, ce qui n’aurait pas été le cas de celui de Nicolas Sarkozy, par exemple, dans les mêmes circonstances. De même que je lui reproche d’avoir entaché l’idée de l’engagement chrétien en politique par sa conduite, on peut aussi lui attribuer un affaiblissement du crédit de ses propositions sur la rigueur: elles ne valent rien, si leur premier défenseur ne se les applique pas à lui-même.

    Pourquoi accéder au sommet de l’Etat si on ne met pas en cause son fonctionnement? L’institution judiciaire n’est pas au-dessus de la critique ni de la loi.

    On peut et on doit critiquer. Pas parler de « coup d’État » et d' »assassinat de l’élection présidentielle ». C’est là mettre en cause la validité de l’élection elle-même.

    J’observe par ailleurs qu’il n’y a pas 6 mois, de l’autre coté de l’Atlantique, une situation symétrique avait lieu. Le FBI faisait irruption dans la campagne électorale US en annonçant avoir ouvert une enquête sur Clinton. Curieusement, à l’époque, la presse française trouvait scandaleuse l’influence de la justice sur le processus électoral. Et Trump était un fasciste de dire qu’il y aurait une enquête s’il était élu. Je n’ose imaginer les glapissements s’il avait appelé à ce qu’elle se retire de l’élection.

    Mme Clinton a pris beaucoup de précautions afin d’éviter de donner le sentiment qu’elle remettait en cause le résultat de l’élection. Le comportement de François Fillon est exactement inverse. Il ressemble d’ailleurs à celui de Donald Trump, qui a parlé de fraude avant de connaître le résultat (et de nouveau, après).

    Let’s agree to disagree. C’est donner un pouvoir exorbitant et dangereux, non pas à la justice, mais à une poignée de magistrats. Rappelons qu’il n’y a aucune conséquence dommageable pour le juge si une mise en examen aboutit à un non-lieu.

    Je le reconnais. C’est un véritable problème.

    Il y a toujours un papier que tu as oublié, un règlement obscur que tu n’as pas respecté.

    Oui, bon, mais là on ne peut pas dire que l’affaire se réduit à un détail administratif. L’argent a été pris dans la poche du contribuable, sans ambiguïté, commme l’a confirmé Jean-Luc, plus haut.

    On doit apprendre à vivre avec cet arbitraire.

    Encore faut-il montrer que les actions des juges étaient arbitraires. En l’espèce, et jusqu’à preuve du contraire, elles sont conformes à la loi. Le seul à prétendre le contraire est M.Fillon, et cela de façon si peu convaincante que ses soutiens en viennent à le quitter, précisément pour cette raison.

    C’est la mise en examen qui a vraiment nui à Fillon. Imagine qu’il ne soit pas élu (pour avoir renoncé ou pas) et que dans 1 an l’enquête aboutisse à un non-lieu. Pourra-t-on encore parler d’élection libre et ouverte?

    À cette question, je réponds oui. Son élimination aurait alors déterminée sur la base de l’apparence de corruption. La notion d’apparence de corruption (ou d’apparence de conflit d’intérêt) est mal comprise en France, mais je me souviens d’avoir déjà échangé avec toi sur ce sujet. La corruption est chose grave, mais sa simple apparence fait tout autant de dégâts, car elle gangrène la cohésion de la société et dégrade son intégrité, sous l’effet de l’exemple. Ce n’est pas un hasard si les organisations internationales qui s’en occupent parlent de « perception de corruption ».

    La différence, ici, entre l’apparence de corruption et la corruption tout court, c’est juste quelques centaines de milliers d’euros – peu, au regard des milliards du budget. Le véritable coût pour la nation est dans l’exemple donné, qui autorisera des gens beaucoup moins haut placés à se croire libres de prendre des libertés similaires avec l’intégrité; dans la perte de crédit des ceux de nos dirigeants qui essaient de rester scrupuleusement intègres; dans l’esprit « tous pourris » qui affaiblit la confiance du pays en lui-même. Même si M.Fillon obtient un non-lieu en bout de compte, il restera soupçonné, et le non-lieu lui-même donnera une impression de collusion entre puissants pour se protéger.

    C’est pour cela que dans d’autres pays, la sanction politique tombe sans attendre la mise en examen. C’est dommage pour la personne mise en cause, si c’est fait injustement; mais ce sont les aléas de la vie politique, et cela donne une atmosphère politique nettement plus respirable. De telles affaires ne sont d’ailleurs pas si fréquentes, moins qu’en France, en tout cas: c’est parce que les politiques ont appris à éviter à se mettre dans des situations qui peuvent être interprétées comme des conflits d’intérêt, à prendre conseil auprès d’organismes ad hoc pour les cas ambigus, etc. Ce n’est pas parfait, mais encore une fois, la France souffre de la comparaison.

  • Gwynfrid a écrit :

    Mme Clinton a pris beaucoup de précautions afin d’éviter de donner le sentiment qu’elle remettait en cause le résultat de l’élection. Le comportement de François Fillon est exactement inverse.

    Je ne te parle pas de remettre en cause le résultat de l’élection, je te parle de critiquer l’action de la justice quand elle vient frapper un candidat pendant la campagne.

    Ni Clinton ni Fillon n’ont remis en cause le résultat de l’élection. L’un et l’autre ont critiqué l’initiative de la justice.

    Gwynfrid a écrit :

    À cette question, je réponds oui. Son élimination aurait alors déterminée sur la base de l’apparence de corruption.

    Je suis d’accord avec toi sur l’apparence de corruption tout comme je l’étais alors. Mais la réalité de notre pays est que la mise en examen cause un dommage politique infiniment plus grand que la simple suspicion. Je le regrette mais on ne peut le nier. Quant à la comparaison avec d’autres pays, elle est à nuancer. La récente campagne US l’a montré.

    Plus fondamentalement, je ne pense pas que la corruption diminuera dans notre pays par la destruction de la carrière politique de quelques « heureux élus » pris « au hasard ». Ca fait des décennies que le Canard dénonce régulièrement et parcimonieusement des élus, fonctionnaires ou patrons et ça ne diminue pas. Il y aurait même un effet d’accoutumance (on a été à peine choqué que l’Etat commande pour 500 millions de motrices TGV inutiles dans un but politique)

    Par contre cet aspect arbitraire devient vraiment problématique. Aujourd’hui, les 2 candidats favoris sont englués dans des ennuis juridiques graves à moins de 2 mois de l’élection. Il se trouve, c’est sans doute un hasard, qu’ils sont tous deux opposés au pouvoir en place. Le Pen vient de se voir voter la levée de son immunité parlementaire au motif qu’en retweetant des photos de massacres de Daech elle en aurait fait l’apologie. C’est complètement grotesque.

    Cite moi un pays démocratique où ce genre de choses arrive.

    On peut choisir de se dire que tout va bien et que la justice est parfaite. Mais arrive un moment ou c’est pire que le mal.

  • Je partage à peu près l’analyse de votre billet, mais il me semble qu’il y a un point, évoqué par un de vos commentateurs, qui rend la candidature de F. Fillon désormais irréaliste. C’est avec amertume que je fais ce constat, car la dynamique déclenchée par la primaire de droite me redonnait espoir dans la vie démocratique du pays « profond », loin de l’écume médiatique et parisienne ; et plus encore parce que cette conclusion donne une victoire bien imméritée à ceux à qui le crime profite. Car la machination ne fait -quasiment- aucun doute, les indices concordants en ont été rappelés : « déblocages opportuns » d’information, célérité de l’enquête, lynchage médiatique. F. Fillon a raison de le dénoncer, mais c’est une faute politique (plus encore qu’une erreur stratégique) d’en faire un argument de campagne.

    Car, j’en viens au « point » dont je parlais, dans l’hypothèse où Fillon est élu, les procédures lancées contre lui s’interrompent le temps de son mandat. Mais pas celles (pour complicité) contre sa femme, potentiellement même ses enfants. Lui président, à ce titre garant de l’indépendance de la Justice, laissera-t-il les juges travailler (après les avoir accusés d’être aux ordres de l’Exécutif) ? Vous comprenez bien que le doute polluera complètement la suite de la procédure. Et si celle-ci aboutit à une condamnation de sa femme, il est quasiment forcé de démissionner.

    Ce qui arrive est dégueulasse, un gâchis sans nom. La suite est aventureuse, car comme vous l’avez dit, ni Macron ni Le Pen n’ont de majorité législative. Cela veut dire potentiellement pas de gouvernement investi en juin. Et alors …. alors, c’est le moment de relire l’article 16 de la Constitution. … Vous imaginez Marine Le Pen prenant les pouvoirs exceptionnels ?

  • @Lib écrit
    « Il se trouve, c’est sans doute un hasard, qu’ils sont tous deux opposés au pouvoir en place. »

    Je suppose que c’est dit sans ironie. Le problème est que d’après Fillon ce n’est pas un hasard, lui se dit victime d’un vaste complot. Ce qui révèle une tendance insoupçonnée (par moi) chez lui.

    Plus fondamentalement, je ne pense pas que la corruption diminuera dans notre pays par la destruction de la carrière politique de quelques « heureux élus » pris « au hasard ». Ca fait des décennies que le Canard dénonce […] et ça ne diminue pas.

    D’où tenez vous que ça ne diminue pas? Je n’ai pas cette impression. L’évolution est beaucoup trop lente est irrégulière, il y a parfois des retours en arrière, mais sur les dernières décennies il me semble que la transparence avance un peu (la plupart du temps en dépit plutôt que grâce aux hurlements des RPR/UMP/LR, il est vrai).

    Cette évolution est-elle aiguillonnée par les articles du canard et d’autres et/ou des condamnations? Vous dites non. Pourquoi? Pensez vous que la presse devrait se taire et la justice laisser faire?

  • Pierre a renié trois fois Jésus. Un horrible péché, répété trois fois. Le pire qui soit. Un péché terrible vu la position de Pierre Apôtre, choisi, car mieux qu’un simple mortel. Pierre le pêcheur, Jésus va pourtant le pardonner. Mieux, il va lui confier la tête de l’Église, une fonction très exigeante, impliquant une totale adhésion à la réalité du Christ, à la reconnaissance de son caractère divin, Fils de Dieu. Conscient de l’énormité de son reniement et de sa faute, Pierre en pleurera à chaudes larmes.

    Oui, il est probable que Fillon ait pêché. Au moins trois fois. Fillon simple mortel, comme Pierre le pêcheur. Comme vous et moi. Je suis sûr qu’il en a pleuré, tout avant de s’excuser officiellement.

    La loi étant écrite parfois pour arranger les bricoles des députés, ministres et autres de nos « représentants », il l’a utilisé. Il n’est probablement pas le seul mais peu importe. Faut-il pour autant l’enterrer vivant ? peut-on juger, nous autres qui n’avons que des pièces judiciaires ayant fuité dans des journaux gauchisants trop heureux d’une telle situation ? Ces derniers ont jeté la première pierre, puis ensuite de très grosses pierres. Faut-il se joindre à la meute ? Faut-il également tuer Fillon qui nous a déçus, lui le si bien élu à la primaire ?

    Pourtant loin d’être un Saint, je suis tout de même enclin à vouloir lui pardonner, souhaitant qu’il devienne notre Saint Pierre laïc, la France en ayant bien besoin. Ainsi réparera-t-il sa faute.

    C’est dans doute un raisonnement très naïf. Mais je maintiens.

  • Lib a écrit :

    Je ne te parle pas de remettre en cause le résultat de l’élection, je te parle de critiquer l’action de la justice quand elle vient frapper un candidat pendant la campagne.

    Ni Clinton ni Fillon n’ont remis en cause le résultat de l’élection. L’un et l’autre ont critiqué l’initiative de la justice.

    Si l’élection est « assassinée », alors c’est que son résultat est faussé d’avance. Cela correspond, d’ailleurs, au sentiment des militants les plus convaincus, qui estiment qu' »on » est en train de leur voler l’élection. M.Fillon n’invente pas ce sentiment, mais en l’encourageant, il prend une posture très dangereuse pour la crédibilité du système électoral.

    Mme Clinton ne s’est jamais approchée de ce niveau de mise en cause, ce n’est pas comparable. D’autre part, elle n’a été accusée d’aucune action illégale par la justice, malgré les efforts infinis faits par ses adversaires pour lui coller un crime sur le dos (mais là, on dévie du sujet). Dès le lendemain de l’élection, il n’a plus été question d’une quelconque enquête.

    Je suis d’accord avec toi sur l’apparence de corruption tout comme je l’étais alors. Mais la réalité de notre pays est que la mise en examen cause un dommage politique infiniment plus grand que la simple suspicion. Je le regrette mais on ne peut le nier.

    Exact. C’est pour cela qu’ailleurs, la démission ne dépend pas de la mise en examen! L’apparence est suffisante, et il n’est pas besoin de la justice pour la constater. Ceci a l’immense avantage d’éviter le psychodrame à la française, qui traumatise le pays à chaque fois. Une personnalité est mise en cause, elle vient à la télé, clame son innocence, ou bien reconnaît avoir commis une erreur et présente des excuses. Elle « suspend » sa campagne, ou remet sa démission, afin de se consacrer à sa défense. Ses collègues de parti lui rendent un hommage, regrettent son départ et on passe à autre chose. Comme le politique n’est pas considéré comme une sorte de personnage miraculeux qui va sauver le pays, ni comme un monarque républicain, le démissionnaire n’est pas victime d’un « hallali ». Il s’efface, sans drame. Il peut d’ailleurs revenir en politique, si l’affaire n’a finalement pas de conséquences judiciaires. Note qu’il existe des exceptions: il peut arriver que le mis en cause s’accroche. Dans ce cas, ça se passe presque aussi mal qu’en France.

    Quant à la comparaison avec d’autres pays, elle est à nuancer. La récente campagne US l’a montré.

    La récente campagne américaine a fait exploser toutes les normes, toutes les barrières les mieux ancrées. C’est, pour l’instant, un cas tout à fait unique. Il reste à voir si cela devient la nouvelle norme, ou si cela passera à l’histoire comme une folle exception.

    Plus fondamentalement, je ne pense pas que la corruption diminuera dans notre pays par la destruction de la carrière politique de quelques « heureux élus » pris « au hasard ». Ca fait des décennies que le Canard dénonce régulièrement et parcimonieusement des élus, fonctionnaires ou patrons et ça ne diminue pas. Il y aurait même un effet d’accoutumance (on a été à peine choqué que l’Etat commande pour 500 millions de motrices TGV inutiles dans un but politique)

    Ça fait des décennies que ces dénonciations se terminent en amnistie, en affaires qui traînent pendant dix ans et davantage, en non-lieux pour vices de procédure, manque de preuves ou refus de témoignage, ou, au mieux, en condamnations avec sursis avec quelques années d’inéligibilité. Il n’y a pas d’accoutumance, au contraire le public devient de moins en moins tolérant à cet égard : c’est pour cela, par exemple, que Patrick Balkany s’est enfin vu priver d’investiture. Et ce n’est qu’assez récemment qu’une vraie condamnation a fini par tomber (cas Cahuzac, et encore n’est-elle pas définitive). Je ne désespère pas que la leçon finisse par rentrer.

    Par contre cet aspect arbitraire devient vraiment problématique.

    Autant que je sache, on est toujours dans le cadre de la procédure légale. Il ne suffit pas de qualifier quelque chose d’arbitraire pour que cela soit vrai.

    Aujourd’hui, les 2 candidats favoris sont englués dans des ennuis juridiques graves à moins de 2 mois de l’élection. Il se trouve, c’est sans doute un hasard, qu’ils sont tous deux opposés au pouvoir en place. Le Pen vient de se voir voter la levée de son immunité parlementaire au motif qu’en retweetant des photos de massacres de Daech elle en aurait fait l’apologie. C’est complètement grotesque.

    Cette histoire de tweets est en effet assez absurde. Plus sérieuse est l’affaire des assistants parlementaires, qui rappelle assez le cas Fillon.

    Cite moi un pays démocratique où ce genre de choses arrive.

    Ça semble unique à la France, effectivement. Mais tu sembles trouver que l’anomalie est du côté de la justice. Elle est du côté des politiques.

  • 100% d’accord avec Gwynfrid.

    Quelle que soit l’origine du lancement de cette affaire, elle est salutaire. Parce qu’elle va créer un exemple, d’abord, avec des vraies conséquences. Mais surtout parce qu’elle nous a évité le pire : élire un homme qui en réalité n’était pas ce qu’il paraît. Je ne parle pas tellement de sa faute, qu’il a dû nécessairement vivre comme vénielle : à côté des pratiques qui avaient cours quand il s’est lancé en politique, ça a pu lui paraître presque vertueux, presque comme une compensation pour avoir résisté aux tentations auxquelles il voyait tant de ses collègues succomber. On se compare toujours à plus malhonnête que soi, rarement à moins.

    Non, c’est surtout sa réaction qui montre qui il est : un homme incapable de faire passer l’intérêt de la France, de son parti, ou même simplement de sa famille avant son ambition personnelle. Un homme incapable de se remettre en question, capable de se déjuger du jour au lendemain alors qu’il a assis sa campagne sur le respect de la parole donnée. Un homme, aussi, étrangement dépourvu d’intelligence politique en situation de crise. Sans être du tout un électeur LR, j’étais de ceux qui trouvaient que Fillon avait le mérite d’incarner efficacement sa force politique, et d’assurer avec pertinence la présence dans le débat d’un positionnement qui se doit d’être défendu. L’affaire a démasqué l’homme, et s’il finit par entendre raison, ou si les électeurs la lui font entendre, nous y aurons gagné.

    Si je respecte le positionnement très modéré de Koz, je ne le suis pas sur son refus d’accabler Fillon, au prétexte qu’il serait à terre. Il n’y est pas encore, et il est important qu’il le soit. Quand il le sera, il sera temps de faire preuve de modération à son égard. Mais pas avant.

  • « Si je respecte le positionnement très modéré de Koz, je ne le suis pas sur son refus d’accabler Fillon, au prétexte qu’il serait à terre. Il n’y est pas encore, et il est important qu’il le soit. Quand il le sera, il sera temps de faire preuve de modération à son égard. »

    On parle bien d’un être humain, là ? Et la modération, ce sera quoi ? L’étrangler avant d’allumer le bûcher en place publique ?

  • Logopathe a écrit :

    Quand il le sera, il sera temps de faire preuve de modération à son égard. Mais pas avant.

    Tirons sur l’ambulance, il sera temps de respecter le corbillard.
    Mouais…

  • Merci pour ce blog l’un des derniers où les commentateurs se respectent, acceptent de débattre sans être arc-boutés sur leurs certitudes. Cela redonne confiance.

  • Yann, humpty-dumpty : par « à terre », on veut dire « plus candidat à l’élection présidentielle », il me semble que c’est clair dans le contexte. On est assez éloigné d’une mort physique ou même d’une simple violence. Et assez loin aussi du niveau de virulence verbale employé par le candidat en question (« assassinat politique », rien que ça).

  • humpty-dumpty a écrit :

    Ce mot est celui qui m’apporte le plus de consternation (ou de rage selon les moments) en ce moment, car il porte témoignage de la malhonnêteté (il me semble) foncière de tant de journalistes. Quant un journaliste me dit « un tel est inaudible », mon premier réflexe est de penser : ce qui veut dire que toi journaliste, tu ne fais pas ton travail, puisque tu me dis ce que tu veux et tu brouilles le message au lieu de me transmettre ce qu’a dit le candidat !! Quand presque tous les journalistes passent leur temps à créer « l’inaudibilité » d’un candidat au lieu de relayer (quitte à le « nettoyer ») le message, je pleure d’avoir une presse qui balance donc entre l’incompétence coupable et la mauvaise foi inexcusable.

    Votre propos est d’une remarquable justesse. Les émissions du type « C dans l’air » illustrent jusqu’à la caricature cette mauvaise foi.

    De manière plus générale, sans exonérer François Fillon de la désastreuse désinvolture dont il a fait preuve dans l’emploi de deniers publics (je dit « désinvolture », car je ne crois pas que le délit de détournement de fonds publics puisse être retenu à l’encontre d’un parlementaire, pour des raisons juridiques qui ont été brillamment expliquées par un ancien secrétaire général du conseil constitutionnel), nous assistons à une confiscation sans précédent du débat démocratique. La frustration, le ressentiment et pour tout dire la colère que cette situation provoque laisseront des traces terribles.

  • Lib a écrit :

    Plus fondamentalement, je ne pense pas que la corruption diminuera dans notre pays par la destruction de la carrière politique de quelques « heureux élus » pris « au hasard ». Ca fait des décennies que le Canard dénonce régulièrement et parcimonieusement des élus, fonctionnaires ou patrons et ça ne diminue pas. Il y aurait même un effet d’accoutumance (on a été à peine choqué que l’Etat commande pour 500 millions de motrices TGV inutiles dans un but politique)

    Entièrement d’accord avec cela. Au-delà du Canard, je remarque que cela fait des années qu’un certain nombre de médias, d’associations ou de think tanks dénoncent régulièrement, mais dans l’indifférence générale de l’institution judiciaire, des juridictions financières et des grands médias qui sont aujourd’hui en pointe contre Fillon, des comportements de nos élus, spécialement dans les collectivités territoriales, qui manifestent au mieux une désinvolture inacceptable dans la gestion des deniers publics. Les rapports de l’IFRAP, par exemple, ont mis en lumière depuis des années des pratiques hallucinantes de clientélisme dans l’attribution de subventions. Le Conseil Régional d’IDF, sous la Présidence d’Huchon, était vraiment champion toutes catégories. Je me souviens aussi qu’il n’y a pas si longtemps que cela, on a pu découvrir que certaines structures d’intercommunalité (comme la communauté urbaine de Rouen, par exemple, celles de Nice, Lyon, Bordeaux) sont allées jusqu’à nommer 45 vices-présidents simultanément, dans le seul but de pouvoir leur distribuer des indemnités de fonction mensuelles qui n’étaient pas si minimes que cela (1500 euros/mois de mémoire). Ces révélations ont toujours été accueillies dans la plus parfaite indifférence : pas d’enquêtes préliminaires, pas de relais dans les médias mainstream, silence radios des « décodeurs ». On avait seulement droit à des hochements d’épaule et des réflexions méprisante du genre : ah oui l’iFRAP se sont des ultra-libéraux…

    Tous ceux qui pensent que l’affaire Fillon amènera un assainissement des pratiques de nos élus se mettent gentiment le doigt dans l’oeil.

    Je remarque d’ailleurs que si le parquet national financier avait voulu contribuer à cet assainissement et, par-là même, se donner ne serait-ce que l’apparence de la neutralité politique, il aurait saisi l’occasion de la publication de l’article du Canard enchaîné pour annoncer l’ouverture d’enquêtes sur la situation de toutes les époux/épouses/fils/filles employés comme collaborateurs parlementaires.

  • @oli71 : donc, selon vous, Francois Fillon n’a rien commis de mal (au pire désinvolte), et ce n’est qu’une affaire de médias et de justice orientée?

    Je suis content de vous lire ici, je ne savais pas qu’il restait des gens avec cette certitude. Bonne manif aujourd’hui, j’attends avec impatience les commentaires des sur es chiffres police / organisateurs !

  • Pour les chrétiens, il y a dans la morale non pas le souci d’abord d’être en règle avec la loi civile mais des ordres qui peuvent être considérés comme supérieurs. On le dit pour le refus par l’Église de refuser aux catholiques toute légitimité dans la pratique de l’avortement (sur soi ou sur les autres) mais c’est aussi le cas dans la priorité aux plus pauvres où l’accueil de réfugiés dans des conditions illégales n’est pas condamné par les évêques.

    Sous cette dimension, François Fillon est plus cohérent qu’on ne le croit avec son programme. Rien chez ce chrétien ne montre une volonté dans son programme initial de soutenir les plus faibles. Son argumentaire concernant ses enfants, en particulier leur haut niveau de qualification, pose problème car la déqualification de la plupart des diplômes en raison de la multiplication de leurs titulaires est un des problèmes majeurs posés par le « seulement l’école pour réussir », croyance qu’aucun candidat ne remet en cause depuis des décennies alors que le décrochage entre PIB physique (permis par les ressources en énergie physique) et le PIB fictif (permis j’y viens par des bilans bancaires déconnectés de toute véritable production) se renforce cf les travaux de JM Jancovici et de Gaël Giraud sur ce point).

    La réalité est que la majorité des gens très riches restent des gens nés riches, et qu’une proportion non négligeable n’a même pas besoin de travailler pour vivre. Et quand bien même il existe des nouveaux riches, leurs enfants seront à leur tour en tant qu’héritiers dans cette situation. Or c’est souvent de ces rangs que part la demande -dès lors impudente- d’accepter des travailleurs pauvres par la dignité que serait le travail pour lutter contre le chômage. L’équivalence des taux de pauvreté entre Allemagne – qui a incontestablement vaincu le chômage, et la France -qui va sans doute si Macron ou FIllon l’emporte suivre cette voie, ne me semble pas nous interroger comme chrétiens. En quoi être insuffisamment payé pour travailler serait-il plus digne qu’être bien protégé quand on ne trouve pas de travail (et même si on n’en cherche pas ou mal : car celui qui ne cherche pas allège la pression sur le marché du travail : cela explique entre autres le décalage décevant entre une reprise économique et la décrue du chômage car de nouveaux postulants, encouragés par l’amélioration du marché, s’y réinscrivent).

    Il y a donc deux affaires Fillon : la première est en effet l’inconscience consistant à verser – qui plus est peut-être frauduleusement- des salaires élevées pour des tâches considérées par la plupart des gens moyennement payés comme de l’aide bénévole ou familiale classique.

    La deuxième est la disproportion entre la loupe grossissante mise sur FIllon et l’évacuation totale en ce moment par l’affaire Fillon des revenus hallucinants gagnés par les anciens hauts fonctionnaires comme Macron qui ont pantouflé dans des banques à des postes où, l’économiste et jésuite Gaël Giraud l’a bien montré, ils ont pour le moins tout prouvé sauf une quelconque compétence dans la gestion des finances privées et les conséquences dramatiques sur le laxisme dans les finances publiques : la surestimation des bilans bancaires est de très loin, malgré l’avertissement de 2008 lui-même issu des initiatives rocambolesques des milieux proches de Macron depuis plusieurs décennies, le principal problème économique mondial.

    Le fait qu’un énarque puisse faire usage de son titre non pour être réellement haut fonctionnaire mais rapidement millionnaire par le privé dans des conditions faisant de l’enrichissement de la famille Fillon un coup d’amateurs me pose, comme chrétien, un grave problème : en quoi est-il moral et cohérent que l’élimination – certes argumentable- de François Fillon ait comme conséquence directe la victoire de Macron? J’aimerais que tous ceux que la question de l’enrichissement scandaleux des Fillon choque n’oublient pas que l’enrichissement sur les deniers publics, ce n’est pas d’abord – même si c’est fautif- l’utilisation frauduleuse pour du népotisme, c’est d’abord le détournement de la mission de service public par la formation de l’ENA payée par le contribuable afin de permettre à des jeunes gens comme Macron de pouvoir dès maintenant ne plus être en nécessité de travailler, simplement pour avoir obtenu l’un des très rares diplômes donnant accès à un carnet d’adresse de luxe plus qu’à des compétences de service de l’État autrefois légitimement reconnues.

    J’ajoute que les salaires des journalistes du Canard Enchaîné – payés essentiellement pour recevoir et diffuser des informations nécessairement obtenues auprès de fonctionnaires qui mériteraient la révocation pour violation répétée du secret de l’instruction-sont de l’ordre de ceux mis en cause dans la famille Fillon. Là encore la distinction entre respect de la loi dans un cas par le journaliste qui vit essentiellement de pratiques illégales des informateurs, et non respect direct de la loi par le politique ne me semble pas un bon critère d’arbitrage moral.

    Au fond de moi je préférerais, dans le cadre théologique de la théorie du moindre mal (sic), une victoire de François Fillon que de celle d’Emmanuel Macron. Car si Macron s’est enrichi bien plus vite que Fillon sans une grande utilité pour le pays (il a d’ailleurs pour lui d’avoir perdu beaucoup de sa paie en devenant ministre de la République ce qui est en principe une fonction plus nécessaire), c’est parce que nos usages comme nos lois ne l’empêchent pas. Et je trouve cela précisément bien plus grave. La référence à l’arbitrage en fonction du seul respect des lois pour trier entre candidat légitime et illégitime me semble, quand on se veut chrétien, une version post moderne du pharisaïsme.

  • Fillon n’es pas un saint.

    Ne pas voter pour lui parce qu’on est en désaccord avec son diagnostic et l’orientation de son programme, je comprends.

    Ne pas voter pour lui en raison du Penelopegate, c’est absurde. Eu égard aux moeurs parlementaires, sa faute est vénielle.

    Mais surtout, en quoi voter pour Macron, ou, horresco referens, pour MLP, garantirait-il en quoi que ce soit une moralisation de vie politique ? Le soutien à Macron de Drahi, propriétaire de BFMTV et de l’Express qui poussent Macron sans vergogne, n’aurait rien à voir avec le fait que Macron a usé de son influence pour permettre à Drahi de racheter SFR ?

    Combien de personnes ont voté FH en réaction aux affaires de Sarkozy, et se sont retrouvés avec FH, Cahuzac, Thévenoud, Morelle, etc.

    Si Fillon est élu, l’épreuve qu’il aura traversée lui donnera toute la légitimité requise pour gouverner.

    Cela dit, je ne fais pas une fixette sur Fillon. Si la droite sort de son chapeau un meilleur candidat pour porter le programme de Fillon, je suis partant. Mais si c’est pour faire du Macron, non.

  • Le mécanisme des primaires pousse chaque camp à réaffirmer son identité en élisant un héros conforme au coeur fantasmé de son identité propre, et non à choisir un candidat apte à dépasser ce camp et à rassembler au delà. Le candidat ne peut chercher le compromis sauf à être accusé de trahison. Il ne peut rassembler que par la force, c’est à dire si le camp qu’il représente de façon si tranchée est supérieur en nombre.

    Les primaires exacerbent les antagonismes et poussent à la radicalisation de chaque camp autour de son héros, choisi pour personnifier son identité et non pour rassembler les différentes facettes de la Nation. Ce n’est pas sain, surtout dans une élection à un tour comme la présidentielle française.

  • La question n’est pas de voter Fillon ou macaron Marine le pen, la question est de ne pas voter Fillon, ni macron ( s’il s’avère qu’il a également détourné de l’argent à son profit) ni Marine (qui est clairement de moins en moins républicaine et démocrate)

    La question est de sortir Fillon du jeu parce que :
    1 il a probablement commis une faute bien plus que vénielle (si c’est véniel de se verser 7900 euros par mois , juste parce que c’est possible, sans contrepartie , vous êtes d’une indulgence dont il faudra se souvenir)
    2. La campagne présidentielle est nulle !

  • @ Psam : essayons, si vous le voulez bien, de discuter posément et de ne pas catégoriser immédiatement son interlocuteur comme un militant aveuglé. Je crois que notre hôte est, à juste titre, très attaché au maintien d’une certaine courtoisie. Nous lui devons bien cela.

    Les mots de « désastreuse désinvolture » que j’ai utilisés vous ont choqué. Peut-être étaient-ils sous-dimensionnés. Je vais tenter de préciser ma pensée davantage, en distinguant ce qui relève de la loi, de la morale et de la politique.

    1) Puisqu’une enquête préliminaire et une instruction pénale ont été ouvertes pour des faits de détournement de fonds publics, il n’est pas totalement illégitime de faire un peu de droit. Que nous dit l’article 432-15 ? Que le détournement de fonds ou biens publics est « le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l’un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, ou effets, pièces ou titres en tenant lieu, ou tout autre objet qui lui a été remis en raison de ses fonctions ou de sa mission ». Le problème, qui a été mis en lumière par des juristes suffisamment éminents pour qu’on écoute ce qu’ils ont à dire (notamment Jean-Eric Schoettl, Conseiller d’Etat, ancien Secrétaire Général du Conseil constitutionnel), tient au fait qu’un député n’entre selon toutes probabilités dans aucune des catégories de personnes limitativement visées par la loi pénale lorsqu’elle incrimine le détournement de fonds publics : un député n’est ni « dépositaire de l’autorité publique », ni « chargé d’une mission de service public », ni « comptable public » et probablement pas non plus « dépositaire public ». Toutes ces notions ont une signification précise en droit public qui ne permet pas d’y faire entrer un parlementaire.

    On peut, certes, regretter que la loi pénale soit rédigée de cette manière et qu’elle renferme un angle mort pour les députés, mais il reste qu’elle est ainsi faite et que l’un des principes fondateurs de tout régime démocratique est qu’elle s’interprète strictement.

    S’il devait s’avérer dans 6 mois, un an ou davantage que le délit de détournement de fonds public ne pouvait pas être retenu contre F. Fillon, l’image serait dévastatrice pour l’institution judiciaire, qui s’est précipitée pour enquêter, perquisitionner (avec une utilité plus que douteuse), demain mettre en examen.

    C’est en ce sens, que je trouve que la précipitation judiciaire, spécialement en période électorale, dans laquelle on sait que ses effets sont démultipliés, pose de graves questions démocratiques.
    Comme l’a dit Lib plus haut, il y a 6 mois, les journalistes français ont dans une belle unanimité fustigé le rôle du directeur du FBI, lorsqu’il avait indiqué qu’il y a avait matière à enquêter sur les emails d’H. Clinton : on ne manquait pas de rappeler ses affinités avec le parti républicain et de dire que cette immixtion des enquêteurs dans la campagne électorale était une atteinte intolérable au processus démocratique. Vérité outre-Atlantique, mais pas en-deçà ?

    2) Au point de vue moral, cela ne veut pas dire pour autant que le comportement de F. Fillon est sans tâche. En parlant de « désastreuse désinvolture » je ne croyais pas l’avoir exonéré. Sa probité est gravement entachée et l’est d’autant plus que ce que nous apprenons vient cruellement démentir l’image d’homme intraitable sur les exigences éthiques qu’il s’était forgée tout au long de la campagne. Il y a eu tromperie sur la marchandise (et c’est pour cela que je n’étais pas au Trocadéro ce dimanche, contrairement à ce que vous supputiez).

    Cela étant, quand je dis qu’il faut aussi relativiser, c’est pour deux raisons.

    D’abord, parce que les assemblées parlementaires sont un vaste marécage dans lequel ont été tolérées pendant des décennies et jusqu’à une époque très récente des pratiques tout aussi inacceptables sur le plan de l’éthique que ce qui est reproché à F. Fillon. Il a fallu, par exemple, attendre l’année 2015 pour que le règlement de l’Assemblée Nationale vienne interdire aux députés de faire financer par l’IRFM (indemnité de frais de mandat : entre 5 et 6.000 €/mois) les mensualités des emprunts qu’ils contractaient pour acquérir en leur nom personnel les locaux de leur permanence parlementaire. Voyez par exemple cet article :
    http://www.francetvinfo.fr/politique/ces-deputes-qui-deviennent-proprietaires-grace-a-leur-indemnite-de-frais-de-mandat_807341.html
    ou celui-ci : http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/02/11/les-deputes-ne-pourront-plus-acheter-leur-permanence-avec-leur-indemnite_4574637_823448.html

    On y apprend que des députés de tous bords ont financé de cette manière l’acquisition de leur permanence parlementaire (par exemple notre actuel ministre de la justice…).

    Ensuite, la vertu en politique, ce n’est pas seulement traquer l’enrichissement personnel. Gaspiller des centaines de millions à des fins purement électoralistes ou clientélistes (ex : faire acheter par la SNCF des motrices TGV dont elle n’a pas besoin), c’est tout aussi grave.

    3) Sur le plan politique, enfin, si vous voulez me faire dire que F. Fillon est entièrement responsable de ce qui lui arrive, et bien je n’ai aucun mal à l’admettre. Je lui en veux d’autant plus qu’il s’est comporté en fossoyeur d’un programme auquel j’avais pleinement adhéré. Raison pour laquelle je souhaite qu’il s’efface et le plus vite sera le mieux ; dans l’espoir que l’on puisse enfin discuter de choses plus importantes que le sort de Pénélope Fillon…

    J’ajoute que sa prestation de ce soir au JT de France 2 était franchement pitoyable.

    Maintenant, je ne me fais aucune illusion sur la capacité de cet épisode à moraliser la vie publique.

  • Cela m’a pris plusieurs jours de relecture du billet et des commentaires pour être finalement d’accord avec Koz, François Baroin, Jean-Christophe Fromantin… C’est plutôt la qualité que la quantité des soutiens de Fillon qui m’intéresse.

    Je ne peux pas m’empêcher de penser au poème Si de Rudyard Kipling.

  • Gwynfrid a écrit :

    Si l’élection est « assassinée », alors c’est que son résultat est faussé d’avance.

    Si le candidat favori est empêché de se présenter à l’élection, alors effectivement son résultat est faussé, même si le système électoral demeure intègre par ailleurs. Dire cela n’a rien de factieux ou scandaleux, c’est juste une évidence.

    Gwynfrid a écrit :

    Mme Clinton ne s’est jamais approchée de ce niveau de mise en cause, ce n’est pas comparable. D’autre part, elle n’a été accusée d’aucune action illégale par la justice

    Clinton n’a pas été mise en examen (ou l ‘équivalent US) mais les attaques démocrates contre le FBI allaient largement plus loin que celles de Fillon avant (et même après) sa mise en examen. Et je doute que si une enquête finit par être ouverte à l’encontre de Clinton, les démocrates diront « fair game » et non « Trump fasciste ». Au fait, on ne parle plus trop des affaires judiciaires de Sarkozy depuis qu’il n’est plus susceptible d’être élu. A ma connaissance il n’a jamais été condamné.

    En état de droit, personne n’est au-dessus de la critique, pas même la justice et c’est très bien comme ça. J’ajoute que bien d’autres politiques de premier plan ont tenu des propos bien pires sur la justice (par exemple en marge de l’affaire Kerviel) sans que cela n’appelle les mêmes cris d’orfraie.

    Gwynfrid a écrit :

    C’est pour cela qu’ailleurs, la démission ne dépend pas de la mise en examen! L’apparence est suffisante, et il n’est pas besoin de la justice pour la constater. Ceci a l’immense avantage d’éviter le psychodrame à la française, qui traumatise le pays à chaque fois. Une personnalité est mise en cause, elle vient à la télé, clame son innocence, ou bien reconnaît avoir commis une erreur et présente des excuses. Elle « suspend » sa campagne, ou remet sa démission, afin de se consacrer à sa défense.

    Euh, je ne me souviens pas que Clinton ait « suspendu » sa campagne pour se consacrer à sa défense parce que l’apparence suffisait. Pour ma part, je m’en réjouis. Un système où il suffit d’une smear campaign pour shooter un candidat n’a plus rien de démocratique.

    Gwynfrid a écrit :

    Comme le politique n’est pas considéré comme une sorte de personnage miraculeux qui va sauver le pays, ni comme un monarque républicain, le démissionnaire n’est pas victime d’un « hallali »

    Tu as réussi à traverser les 8 années d’Obamania sans les remarquer, chapeau! Au fait, as-tu fini par comprendre pourquoi il a reçu le prix nobel de la paix?

    Gwynfrid a écrit :

    Ça fait des décennies que ces dénonciations se terminent en amnistie, en affaires qui traînent pendant dix ans et davantage, en non-lieux pour vices de procédure, manque de preuves ou refus de témoignage, ou, au mieux, en condamnations avec sursis avec quelques années d’inéligibilité.

    J’ai peur de comprendre ce que tu veux dire. Je te rappelle que si la procédure aboutit à un non lieu, c’est que la personne est innocente. Pas seulement présumée, innocente après verdict de la justice Tu semble regretter que des innocents soient innocentés et propose de détruire leur carrière préventivement malgré tout.

    Gwynfrid a écrit :

    Autant que je sache, on est toujours dans le cadre de la procédure légale. Il ne suffit pas de qualifier quelque chose d’arbitraire pour que cela soit vrai.

    L’arbitraire n’est pas illégal, il résulte de l’application sélective de la loi.

    Exemple pris au hasard : la violation du secret de l’instruction est un grave délit qui met à mal la confiance dans la justice, socle de l’état de droit. Ce secret est systématiquement violé, notamment dans l’affaire qui nous occupe. Hier le JDD publiait l’intégralité des PV d’audition de FIllon (enfin, ce qu’il prétendait comme tels ; quand tu en es là, tu peux aussi réécrire les PV, personne ne peut vérifier, c’est magique). Eh bien, ça va sans doute te surprendre, mais aucune enquête n’est jamais diligentée, pas d’audition de greffiers, pas de juge mis en examen, rien.

    C’est ça l’arbitraire. Choisir les lois qu’on va faire respecter. On ouvre une instruction contre un candidat favori des élections sur la base d’un article de journal, mais pas sur une attaque avérée, répétée, fondamentale contre l’état de droit.

    Ah, et puisqu’on en parle. Le président Hollande, garant des institutions, a pris la parole pour évoquer l’affaire. Il a critiqué son opposant Fillon mais n’a pas eu un mot sur le grave dysfonctionnement des institutions dont il a la charge.

    Et d’ailleurs, rappelons qu’il y a quelques années, c’était contre Sarkozy (principal opposant d’alors, une coïncidence) que les fuites étaient organisées. Notamment via deux « journalistes », MM. Davet et Lhomme qui publiaient dans un journal durablement déshonoré, article sur article recelant le secret des instructions relatives à l’ancien président. Et qu’apprend-on aujourd’hui? Le Président Hollande, qui ne pouvait ignorer les bassesses accomplies par les deux hommes et le dommage qu’ils causaient aux institutions dont il a la charge, les recevait presque quotidiennement à l’Elysée!

    Je n’ai pas lu un article de journal qui dénonce ce scandale, cette violation des principes républicains, par le premier personnage de l’Etat. Je n’ai pas entendu parler non plus de bronca contre ces deux hommes qui déshonorent le journalisme. Pas de motion des salariés du Monde demandant leur exclusion pour cette inadmissible compromission avec le pouvoir. Aucune tribune indignée pour pleurer la disparition de l’indépendance de la presse.

    Non, le scandale, la menace pour les institutions et la démocratie, c’est François Fillon (dénué du moindre pouvoir exécutif) qui trouve qu’il est traité plus durement qu’il ne devrait et le dit publiquement.

    Jusque-là je n’ai parlé que d’éléments avérés, certains : fuites judiciaires, articles de Davet et Lhomme, multiples entretiens à l’Elysée. Après il y a la suspicion. Le pouvoir n’aurait-il pas donné un coup de pouce à ces fuites? Il y a eu un article dans Valeurs Actuelles (oui, je sais) qui prétendait avoir fait une enquête et suivi Lhomme et Davet, qui allaient de l’Elysée à la Place Vendôme, au pôle financier puis au siège du Monde et publiaent les articles en question. Le Monde n’a pas démenti, il s’est contenté d’une tribune indignée pour dire, en gros, que ça ne se faisait pas entre confrères et que (je simplifie) soupçonner le Monde c’est fasciste.

    Aucune autre journal n’a enquêté. N’est pas Woodward et Bernstein qui veut.

    Donc voir cette presse-là et ce pouvoir-là prétendre qu’ils défendent l’indépendance de la presse et celle de la justice en shootant le principal opposant à 2 mois de l’élection, ça ne me fait plus rire.

    Gatien a écrit :

    D’où tenez vous que ça ne diminue pas? Je n’ai pas cette impression. L’évolution est beaucoup trop lente est irrégulière, il y a parfois des retours en arrière, mais sur les dernières décennies il me semble que la transparence avance un peu

    C’est peut-être une question de perception. L’attribution des HLM est toujours aussi opaque, on sait que c’est pourri mais on ne fait rien. Le rapport Perruchot sur le financement des syndicats a été enterré, fait inédit. La formation professionnelle, la construction sont toujours aussi corrompus. L’attribution de subventions publiques, illustrée par l’affaire Théo, est toujours incontrôlée (ce qui ne réduit en rien le scandale des violences policières qu’il a subies, s’il en a subies). Le rapport annuel de la cour des comptes est toujours autant ignoré. Et même quand une affaire est au centre du bruit médiatique (assistants parlementaires) cela n’aboutit pas à une demande de nettoyage systématique du merdier.

    Mais c’est peut-être une question de perception.

    Ah, et si ça vous fait plaisir, la droite est aussi coupable de corruption que la gauche.

    oli71 a écrit :

    Gaspiller des centaines de millions à des fins purement électoralistes ou clientélistes (ex : faire acheter par la SNCF des motrices TGV dont elle n’a pas besoin), c’est tout aussi grave.

    Selon moi l’absence d’enrichissement n’est pas une circonstance atténuante, plutôt le contraire. Pour 4 principale raisons : (i) je ne suis pas jaloux, le fait que quelque chose bénéficie à quelqu’un ne me dérange pas, ce qui me dérange c’est ce qui nuit (ii) je ne suis pas vénal, i n’y a pas que l’argent dans la vie; s’il n’y a pas d’enrichissement personnel il y a un bénéfice indirect, politique, qui peut être tout aussi important voire plus (iii) je ne suis pas idiot; pour obtenir le même bénéfice indirect il faut prélever en amont beaucoup plus que pour un bénéfice direct, exemple parfait avec cette affaire de TGV ou le pouvoir a brûlé 500 millions pour un infime bénéfice politique (iv) je ne suis pas aveugle, je vois bien que ces pratiques sont beaucoup plus faciles à mettre en oeuvre et beaucoup plus tolérées, elles sont donc beaucoup plus répandues.

    Pepito a écrit :

    Je ne peux pas m’empêcher de penser au poème Si de Rudyard Kipling.

    Moi aussi. Mais Kipling est devenu un auteur infréquentable…

  • @ Psam:

    Si Fillon, au lieu d’être fidèle à son épouse, ce qui l’a conduit à rémunérer 20 ans de suite la même femme, avait divorcé et s’était remarié deux fois, ou s’il avait entretenu sur son enveloppe trois ou quatre maîtresses sur la période,…, il n’y aurait pas d’affaire Fillon avec mention de sommes qui frappent le bon peuple.

    Et au fond, ce qui lui vaut l’inimitié féroce d’une partie de la médiacratie , c’est bien cela. Bourgeois, catholique et conservateur, il est le repoussoir absolu.

  • Rions ensemble avec un grand quotidien du soir :

    Quand le Monde dénonce, il y a 6 mois, une scandaleuse immixtion du directeur du FBI dans le processus électoral américain, sans omettre de rappeler que c’est un salaud de Républicain, cela donne cela (dans la version papier, l’éditorial est intitulé « la faute du FBI ») :

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/11/04/presidentielle-americaine-la-faute-du-fbi_5025329_3232.html

    « Sauf élément matériel substantiel, la tradition est de ne pas ouvrir d’enquête à deux mois d’un scrutin, pour éviter d’en influencer l’issue. M. Comey a enfreint cette jurisprudence. Il se défend en invoquant son devoir de compléter ce qu’il avait dit au Congrès cet été. Mais le mal est fait. Il a relégitimé ceux qui soupçonnent Mme Clinton d’avoir mis en danger des secrets d’Etat.

    C’est une intervention flagrante dans la campagne. Elle sème le doute sur l’impartialité de la police fédérale. Elle ternira le vainqueur de l’élection, quel qu’il soit. Loin d’agir en serviteur de l’Etat, James Comey a ranimé le souvenir de son lointain prédécesseur J. Edgar Hoover. Ce n’est pas glorieux ».

    Vérité outre-Atlantique ?

  • Donc si j’ai bien lu certain commentateurs, ces médias qui ont fait du Hollande bashing une habitude depuis un certain temps, et en particulier Davet et Lhomme dont le livre semble avoir pesé fortement dans son renoncement, seraient en réalité à la solde du pouvoir.

    Et cette justice qui déclenche une enquête sur Cahuzac suite à un simple article de Médiapart? A la solde du pouvoir itou. Tous des gauchistes qui veulent le déclin de la France.

    Voilà, maintenant c’est évident, nous sommes en campagne électorale.

    @Lib

    si ça vous fait plaisir, la droite est aussi coupable de corruption que la gauche

    Je vous laisse juge. Pour ma part je n’ai rien dit sur la corruption comparée des un et des autres. Je mentionnais que le parti de Fillon a souvent du mal à accepter les réformes dans ce domaine et les suscite moins souvent qu’à son tour. Ce qui ne concerne d’ailleurs pas que la corruption, cf. non-cumul des mandats sur lequel ils bataillent contre Fillon lui même (mais personne ici ne semble penser que c’est une faction de parlementaires cumulards qui a organisé des fuites dans la presse…).

    A propos de réformes, il est intéressant de retracer par exemple celles du financement des partis politiques (*). A première vue, chaque grande réforme a suivi de près l’éclatement d’un ou plusieurs scandales retentissants. Soit exactement l’inverse de ce que certain affirment ci-dessus.

    (*) https://fr.wikipedia.org/wiki/Financement_de_la_vie_politique_et_%C3%A9lectorale_en_France#Historique
    Je vous laisse compter les centristes, les socialistes, et les ump-istes parmis les acteurs ou c’est futile?

  • Je pense que Fillon va gagner avec un projet qui va franchement partir à droite. Toutes les personnalités qui étaient avec Juppé (et Juppé lui-même) le lâchent, tous les ralliés de l’après primaire aussi.

    Il n’y a plus de raison de diluer les propositions en vue d’un quelconque rassemblement, et il y a un appel d’air énorme qui peut favoriser le renouvellement de la classe politique ce qui constitue à mon avis une excellente opportunité pour la moralisation de la vie publique.

    Le peuple de droite reste, déçu certes, mais quand même, il reste.

    Pour un programme de droite.

  • @ oli71:
    Tout est dans le « sauf élément matériel substantiel ». Il n’y avait strictement rien dans le dossier Clinton. Ni moralement, ni juridiquement. Au pire, une imprudence. Imaginaire.

    Dans le dossier Fillon, la faute est déjà quasiment avouée. Le doute ne porte que sur le statut juridique de cette faute.

    Par ailleurs, je n’ai pas le souvenir que Clinton ait mis en cause la justice, ni même explicitement le FBI, pendant la campagne. Elle ne l’a fait qu’après. Mais je peux me tromper.

  • @ Logopathe:

    Strictement rien dans le dossier Clinton ?

    Le soupçon était quand même qu’elle avait utilisé un serveur mal protégé pour une partie non négligeable de sa correspondance électronique alors qu’elle était Secrétaire d’État, et qu’une des raisons était qu’elle n’aurait pas voulu laisser de traces de ses interventions liées à la Fondation Clinton., soupçon renforcé par l’effacement d’une partie importante de cette correspondance.

    Elle avait obligation de n’utiliser que les serveurs protégés de l’administration américaine.

    Je n’ai aucune information privilégiée sur la réalité des accusations les plus graves, comme le traffic d’influence, mais pour avoir suivi l’affaire en son temps, j’ai un peu de mal avec l’affirmation qu’il n’y avait rien dans le dossier Clinton.

  • Aristote a écrit :

    l’affirmation qu’il n’y avait rien dans le dossier Clinton

    Toutes choses qui avaient été préalablement étudiées et écartées. Au moment de la relance de l’affaire dans la dernière ligne droite de la campagne, il n’y avait rien de nouveau. Tout au contraire du cas Fillon.

  • @Logopathe : Et d’après vous, un article du Canard est un élément matériel substantiel ? Pardon, mais même si l’on est enclin à le croire (car le récit est prima facie vraisemblable), l’article initial du Canard ne donnait pas de preuve irréfutable du caractère fictif de l’emploi de PF. De manière plus générale, il faut arrêter de penser que le Canard est nécessairement infaillible. Ce journal, pour divertissant à lire qu’il soit, est capable de se tromper lourdement et de faire preuve de beaucoup de mauvaise foi. J’ai pu m’en rendre compte dans le traitement qu’il a consacré à certains dossiers que j’ai bien connus (à titre professionnel). Je crois que c’est aussi ce que l’on reconnaît rétrospectivement de l’affaire des diamants de Giscard.

    Vous dites encore : « Dans le dossier Fillon, la faute est déjà quasiment avouée. Le doute ne porte que sur le statut juridique de cette faute. ».

    Admettons que le doute ne porte, comme vous dites, que sur le « statut juridique de cette faute », c’est-à-dire sur son caractère punissable (Nota : je ne nie pas le caractère de faute éthique ou morale, ni l’évidente légitimité des électeurs d’en tirer les conséquences). Ce doute ne suffisait-il pas à justifier un peu de précaution de la part de l’institution judiciaire, un peu de réflexion avant la précipitation ? un peu de retenue avant les perquisitions ?

    Imaginons, comme je l’indiquais dans un message précédent, que l’on se rende compte dans 6 mois, 1 an, 3 ans, que sais-je, que la situation de François Fillon n’était punissable ni sous la qualification de détournement de fonds public, ni sous une autre qualification et que, sous son aspect juridique, l’affaire se termine pas un non-lieu ou une relaxe. C’est une hypothèse qui n’a rien de théorique. Vous pensez que l’institution judiciaire en sortirait indemne ?

    Pour être bien rendue, la justice doit suivre son cours de manière ni trop lente, ni trop précipitée. Et ses acteurs ne doivent pas se laisser dicter leur comportement ni leur calendrier par la pression de l’opinion publique, ni a fortiori devancer ce qu’ils pensent que l’opinion publique leur réclame. J’entends en boucle l’argument : « mais qu’aurait-on dit si le parquet national financier n’avait pas bougé ? ». Cet argument est totalement irrecevable. L’institution ne devrait pas se soucier du qu’en dira-t-on, ce qui ne peut que la détourner de sa mission. Et je maintiens qu’en période de campagne présidentielle, ce devoir de prudence et de retenue s’impose avec une intensité redoublée. Le Monde l’avait compris … enfin, au moins quand il s’agissait de ne pas compromettre les chances du candidat démocrate.

  • oli71 a écrit :

    Et d’après vous, un article du Canard est un élément matériel substantiel ?

    Disons que quand Penelope Fillon déclare ouvertement et à plusieurs reprises « Je n’ai jamais été son assistante ou quoi que ce soit de ce genre », cela éveille légitimement quelques soupçons sur la réalité du travail fourni.

  • @ Lib:
    Plus encore que l’exercice d’un pouvoir, je crois que ce qui est le plus attendu de la justice ici c’est qu’elle établisse une « vérité », denrée qui paraît de plus en plus rare de surcroît dans le monde politique, et dont les peuples sont assoiffés.

    Et cette demande paraît légitime en dehors de toute considération de calendrier.

  • @ Lib : merci pour ce lien.

    François Sureau exprime de plus belle manière ce que je disais : l’emballement est l’ennemi de la justice.

    J’ajoute qu’il est tout de même ennuyeux, dans cette affaire, que la première démarche du parquet national financier ait été de méconnaître allègrement les limites de sa compétence, qui n’est rien d’autre qu’une compétence d’exception. Car, enfin, le parquet national financier était-il tout simplement compétent pour ouvrir une enquête préliminaire ? Je n’aperçois pas dans la triviale simplicité de l’affaire Pénélope Fillon (qui, en fait, se résume à la question de savoir si elle a, ou non, effectué les tâches pour lesquelles elle était rémunérée ?) la « grande complexité » requise par l’article 705, 1° du code de procédure pénale pour asseoir la compétence du procureur de la République financier (pour mémoire le PNF est compétent pour les « délits prévus aux articles 432-10 à 432-15 (…) du Code pénal, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d’une grande complexité, en raison notamment du grand nombre d’auteurs, de complices ou de victimes ou du ressort géographique sur lequel elles s’étendent »).

  • Merci pour cet article et pour tous ces commentaires construits et intéressants.

    Un petit témoignage suite à la révélation de la vidéo de l’entretien avec PF. J’ai recherché sur google « entretien Pénélope Fillon » et j’ai attendu le 46ème résultat de google pour tomber sur un commentaire de l’avocat de FF. Les 45 premiers étaient à charge sans aucune mesure…

  • Lib a écrit :

    Si le candidat favori est empêché de se présenter à l’élection, alors effectivement son résultat est faussé, même si le système électoral demeure intègre par ailleurs. Dire cela n’a rien de factieux ou scandaleux, c’est juste une évidence.

    Si des révélations, même tardives, font changer d’avis un nombre suffisant d’électeurs pour que le favori cesse de l’être, alors le processus électoral n’est pas faussé pour autant. Simplement, les électeurs sont mieux informés sur la réalité du candidat. C’est le cas ici. Après, si le résultat de cette perte de crédit est de forcer le candidat à renoncer, c’est juste la réalité de la politique. François Hollance a renoncé parce qu’il n’était plus crédible, personne n’a dit que cela faussait l’élection.

    Clinton n’a pas été mise en examen (ou l ‘équivalent US) mais les attaques démocrates contre le FBI allaient largement plus loin que celles de Fillon avant (et même après) sa mise en examen.

    Pour être si affirmatif, c’est que tu peux me retrouver une citation d’un démocrate parlant d' »assassinat politique », n’est-ce pas?

    Au fait, on ne parle plus trop des affaires judiciaires de Sarkozy depuis qu’il n’est plus susceptible d’être élu. A ma connaissance il n’a jamais été condamné.

    Il est encore susceptible de l’être, étant toujours mis en examen. N’étant plus candidat, il est normal que les projecteurs se concentrent ailleurs.

    Euh, je ne me souviens pas que Clinton ait « suspendu » sa campagne pour se consacrer à sa défense parce que l’apparence suffisait. Pour ma part, je m’en réjouis. Un système où il suffit d’une smear campaign pour shooter un candidat n’a plus rien de démocratique.

    Ce n’est toujours pas comparable. Les problèmes d’emails de Clinton ont été révélés longtemps avant les primaires, et les électeurs ont largement eu le temps de se faire une opinion avant de choisir. Il n’y a jamais eu de mise en examen (indictment aux US). Le FBI a annoncé une enquête, puis a annoncé qu’il l’arrêtait, n’ayant rien trouvé qui puisse permettre une accusation formelle. Puis, deux semaines avant l’élection, il a rouvert l’enquête, avant de la refermer quelques jours plus tard. C’est là l’ensemble des actions officielles qui ont eu lieu sur le sujet à ma connaissance.

    Les accusations à l’égard de François Fillon ne sont pas une simple campagne de rumeurs. L’enquête est peut-être précipitée, mais elle a mis au jour des faits qui ne sont guère contestés. Il est très frappant de voir qu’après une défense peu soutenue sur le fond, M.Fillon a rapidement choisi de concentrer plutôt sa riposte sur les juges et sur la presse.

    Tu as réussi à traverser les 8 années d’Obamania sans les remarquer, chapeau! Au fait, as-tu fini par comprendre pourquoi il a reçu le prix nobel de la paix?

    Voilà une remarque qui prête à sourire, tant tes lunettes sont franco-françaises. De ce côté-ci de l’océan, l’Obamania est oubliée depuis longtemps, voir ici. L’état de grâce d’Obama n’a pas duré un an, et de toute façon il n’a jamais été considéré comme le monarque républicain que les Français ont la mauvaise habitude de voir dans leur président.

    J’ai peur de comprendre ce que tu veux dire. Je te rappelle que si la procédure aboutit à un non lieu, c’est que la personne est innocente. Pas seulement présumée, innocente après verdict de la justice Tu semble regretter que des innocents soient innocentés et propose de détruire leur carrière préventivement malgré tout.

    Cette objection me semble déjà plus sérieuse. Est-ce que ma perspective est excessivement rigoriste? C’est possible. Cependant, je crois vraiment que la balance est, aujourd’hui, et contrairement à ce que M.Fillon essaie de faire croire, ajustée en faveur des politiques accusés de corruption. L’accusation doit être prouvée au-delà de tout doute raisonnable (ce qui est normal et n’a pas à être remis en cause). Les politiques sont défendus non seulement par les meilleurs avocats (ce qui n’a pas à être remis en cause non plus) mais aussi par la clameur de leurs partisans et la solidarité de leurs camarades de parti (il est d’autant plus frappant de voir que ce n’est pas ici le cas pour M.Fillon). La justice est extraordinairement lente, de par ses lourdeurs propres, mais aussi grâce à l’usage efficace de moyens de recours permettant de retarder les procédures. Cela permet de faire oublier les aspects les plus scandaleux et finalement d’arguer que tout cela est une bien vieille affaire, n’est-ce-pas…

    Résultat de tout cela: le sentiment de « tous pourris » est extrêmement prégnant, depuis de trop nombreuses années. Je constate qu’il est particulièrement fort en France. C’est pourquoi je crois qu’une approche moins partisane, moins tolérante des abus est aujourd’hui nécessaire.

    Au passage: merci pour le lien vers l’article de François Sureau; une perspective rationnelle, calme et dépourvue d’esprit partisan est plus que bienvenue. Il pointe les limites du raisonnement des accusateurs, qui consiste selon lui à mettre la justice au-dessus de tout. Il n’a pas tort. Cependant, symétriquement, le raisonnement des partisans de M.Fillon consiste à mettre le président au-dessus de tout; et, par extension, le candidat, et notamment le résultat la primaire qui l’a désigné, au-dessus de tout. Les deux excès me paraissent également dangereux.

    L’arbitraire n’est pas illégal, il résulte de l’application sélective de la loi.

    Exemple pris au hasard : la violation du secret de l’instruction est un grave délit qui met à mal la confiance dans la justice, socle de l’état de droit. Ce secret est systématiquement violé, notamment dans l’affaire qui nous occupe. Hier le JDD publiait l’intégralité des PV d’audition de FIllon (enfin, ce qu’il prétendait comme tels ; quand tu en es là, tu peux aussi réécrire les PV, personne ne peut vérifier, c’est magique). Eh bien, ça va sans doute te surprendre, mais aucune enquête n’est jamais diligentée, pas d’audition de greffiers, pas de juge mis en examen, rien.

    C’est effectivement une autre grave anomalie de notre système, jamais résolue. Car il est impossible de tracer la source des violations, sauf à remettre en cause le secret des sources, et donc la liberté de la presse. J’avoue ne pas savoir comment d’autres pays résolvent ce problème.

    Non, le scandale, la menace pour les institutions et la démocratie, c’est François Fillon (dénué du moindre pouvoir exécutif) qui trouve qu’il est traité plus durement qu’il ne devrait et le dit publiquement.

    Se serait-il contenté de cela, qu’on pourrait encore en débattre. Mais il est allé beaucoup plus loin: jusqu’à remettre en cause la légitimité du système judiciaire à enquêter. Il a décrété que l’élection doit passer avant la justice, et, à l’intérieur de l’élection, que les voix recueillies à la primaire lui donnent une légitimité qui lui permet de se mettre au-dessus de toute accusation, comme au-dessus de l’avis du parti qui le présente (« c’est au peuple français et à lui seul que je m’en remets »). Cette posture pseudo-gaullienne met à mal et la confiance dans les institutions, et son propre parti. La rencontre de l’homme et du peuple est une figure classique, surannée mais adaptée aux moments de crise. Mais du temps de de Gaulle, la crise menaçait le pays, et non pas juste sa petite personne; et jamais de Gaulle n’en aurait appelé au peuple pour échapper aux conséquences d’une enquête.

    Ceci me permet de faire une transition pour en revenir à l’aspect politique de l’affaire. Cela semble approprié, puisque M.Fillon semble avoir forcé son parti à continuer à soutenir vaille que vaille sa candidature. D’un point de vue strictement politique, que venons-nous de voir? Un candidat qui a perdu son sang-froid. Une campagne, c’est aussi un moyen de tester la solidité du caractère de ceux qui prétendent diriger la nation. De mon point de vue, François Fillon a raté ce test. Ramenant tout à son propre problème, incapable de s’élever au-dessus du scandale pour porter son projet et ses idées, il a divisé son parti en s’accrochant au soutien du noyau dur de ses partisans, ceux qui l’ont mis en tête au premier tour de la primaire de novembre. Ce n’est pas là un comportement de futur président. S’il était élu, il porterait cette faute originelle pendant cinq ans, sans parler des conséquences judiciaires pour sa famille, qui ne disposerait pas d’immunité. D’autre part, le constat politique demeure: il est en contradiction, visible, personnelle, irrémédiable, avec le coeur de son programme. Peut-être la droite va-t-elle tenter un rassemblement autour de lui, mais il sera factice. Alors que pourtant son projet est probablement le plus sérieux de ceux proposés, je ne vois pas comment je pourrais de nouveau voter pour lui.

  • Gwynfrid a écrit :

    Ramenant tout à son propre problème, incapable de s’élever au-dessus du scandale pour porter son projet et ses idées, il a divisé son parti en s’accrochant au soutien du noyau dur de ses partisans, ceux qui l’ont mis en tête au premier tour de la primaire de novembre. Ce n’est pas là un comportement de futur président.

    Cette lecture est possible.

    On peut en faire une autre : les vaincus des primaires se sont empressés de saisir l’occasion de reprendre le contrôle, et leur souci n’était sûrement pas de trouver un candidat motivé à défendre le programme de Fillon, programme qu’ils n’aiment pas, et par ailleurs mieux placé pour l’emporter. Réduire la réaction de Fillon à un entêtement personnel, je ne dis pas que cette dimension était absente, est un jugement un peu rapide.

    Fillon n’est pas un saint. Mais en ce qui me concerne, les relations de Macron avec Drahi me posent plus de questions que les relations de Fillon avec Ladreit de Lacharrière. L’impact médiatique de BFM TV et de l’Express est autre que celui de la Revue des deux Mondes ! La surmédiatisation des erreurs de Fillon ne vaut pas jugement de moralité relative : est-on vraiment sûr que la victoire d’une des alternatives politiques plausibles, Macron ou Le Pen, serait une victoire de la moralité ?

    Enfin, si d’aventure Fillon l’emportait au final, sa légitimité serait, du fait de l’épreuve, difficilement contestable. Y compris vis-à-vis de ceux de ses « amis politiques » qui renâcleraient aux réformes annoncées.

  • Gwynfrid a écrit :

    Les problèmes d’emails de Clinton ont été révélés longtemps avant les primaires, et les électeurs ont largement eu le temps de se faire une opinion avant de choisir.

    Si le FBI avait « indict » Clinton pour destruction de preuve, ça ne m’aurait pas paru très surprenant. Il ne l’a pas fait. Je pense qu’il aurait pu le faire, quitte à aboutir à un non-lieu 6 mois plus tard. Imagine s’il l’avait fait.

    Gwynfrid a écrit :

    Car il est impossible de tracer la source des violations, sauf à remettre en cause le secret des sources, et donc la liberté de la presse. J’avoue ne pas savoir comment d’autres pays résolvent ce problème.

    Impossible? Je ne suis pas un enquêteur, mais à première vue il y a deux façons de tracer une transaction illégale : par l’émetteur et par le récepteur. Si la loi protège les sources des journalistes, elle n’interdit pas que je sache d’enquêter sur les personnes susceptibles d’avoir transmis les documents : greffiers, juges, policiers etc… A ma connaissance, aucune enquête n’est jamais diligentée.

    Par ailleurs, et pardon de rappeler cela; mais le secret de la correspondance entre un avocat et son client est également protégé en droit. Cela n’a pas empêché les enquêteurs de mettre sur écoute l’avocat de Sarkozy. Et tout le monde trouvait ça très bien.

    Gwynfrid a écrit :

    Mais il est allé beaucoup plus loin: jusqu’à remettre en cause la légitimité du système judiciaire à enquêter. Il a décrété que l’élection doit passer avant la justice, et, à l’intérieur de l’élection, que les voix recueillies à la primaire lui donnent une légitimité qui lui permet de se mettre au-dessus de toute accusation, comme au-dessus de l’avis du parti qui le présente (« c’est au peuple français et à lui seul que je m’en remets »).

    Ton interprétation est très partisane. Pour moi, il ne remettait évidemment pas en question la légitimité du système judiciaire mais sa prééminence sur l’élection. La procédure judiciaire suit son cours et personne ne remet en cause cela. En revanche, elle ne doit pas décider des candidatures à l’élection.

    Sur le judiciaire, la justice tranchera (ce qui n’empêche pas de trouver qu’elle est dure avec lui). Sur l’élection, les électeurs trancheront; pas les juges, pas le parti.

    Je t’accorde bien sur qu’il est en grande partie responsable de la confusion, ayant lui-même déclaré qu’il se retirerait en cas de MEE.Gwynfrid a écrit :

    D’un point de vue strictement politique, que venons-nous de voir? Un candidat qui a perdu son sang-froid.

    Moi j’ai vu un candidat qui a résisté à une épreuve de force exceptionnelle, qui a renversé une situation qui paraissait perdue, qui a fait preuve de beaucoup de sang froid et a su utiliser la seule arme qui lui restait : la légitimité populaire.

  • Lib a écrit :

    Moi j’ai vu un candidat qui a résisté à une épreuve de force exceptionnelle, qui a renversé une situation qui paraissait perdue, qui a fait preuve de beaucoup de sang froid et a su utiliser la seule arme qui lui restait : la légitimité populaire.

    J’ai vu la même chose.
    D’une façon générale, sur les reproches d’acharnement de la part de FF (qui « aurait dû » se retirer depuis longtemps), de perte du sang-froid, de mauvaise défense, pour moi, cela témoigne de ce qu’il fait face à ceux qui étaient censés le soutenir : on comprend que ça puisse le déstabiliser un temps ; il est toujours plus douloureux et difficile d’affronter la trahison des siens que les coups de l’adversaire. Pour moi ça ne préjuge pas de la capacité à tenir bon sans s’énerver face à des problèmes notamment extérieurs au pays, mais aussi à des corps constitués du pays ouvertement hostiles (certains syndicats…) Là dessus je dirais au contraire : solide, le gars. Entêté, limite psychopathe, disent certains de ses adversaires ? Je me rappelle une étude d’il y a 6 ou 8 mois qui liait le caractère de grand psychopathes à celui des chefs d’Etat, pour montrer que Trump était à un haut niveau selon l’indicateur construit par le chercheur – et Clinton pas beaucoup plus bas, au reste…
    Alors, qu’il ait un caractère peu commun, ça fait pour ainsi dire partie des exigences du poste !

    Au final, j’ai trouvé (je crois que personne ne l’a encore citée ici) très bonne la tribune de FX Bellamy (sur sa page FB), samedi soir. En résumé (sans, je crois, en trahir l’esprit même si ses nuances sont importantes bien sûr) : on peut être déçu par FF mais l’enjeu aujourd’hui c’est le projet qu’il peut seul porter.

  • Lib a écrit :

    On peut en faire une autre : les vaincus des primaires se sont empressés de saisir l’occasion de reprendre le contrôle, et leur souci n’était sûrement pas de trouver un candidat motivé à défendre le programme de Fillon, programme qu’ils n’aiment pas, et par ailleurs mieux placé pour l’emporter.

    Allons. La motivation des ténors de LR n’est pas dans une oppostion au programme: ils sont d’accord sur presque tout, et surtout, le problème n’est pas là. Il est bien sûr, comme toujours, dans l’impératif de gagner, qui prime sur absolument tout le reste. Il n’ont commencé à renâcler vraiment que lorsqu’ils ont vu M.Fillon s’enferrer, et surtout, chuter nettement dans les sondages. D’où la recherche désespérée d’un plan de secours. Dès qu’il est apparu qu’il n’y en avait définitivement aucun, ils se sont résignés à un rassemblement de façade et par défaut.

    Le suicide électoral par division idéologique, c’est un truc de gauche. Quand la droite se suicide, c’est toujours sur une question de chefs.

    Réduire la réaction de Fillon à un entêtement personnel, je ne dis pas que cette dimension était absente, est un jugement un peu rapide.

    Je vous l’accorde. La réaction de Fillon est émotionnelle, mais pas seulement. Pour lui aussi, la nécessité de la victoire l’emporte sur le reste. Il l’a dit, il reste persuadé d’être le seul à pouvoir l’emporter pour son camp. Il n’a pas entièrement tort d’ailleurs, car un remplaçant de dernière minute aurait eu de graves difficultés. Pour ma part, je crois qu’il s’illusionne sur ses chances, après avoir perdu, par sa seule faute, le plus fort de ses atouts. Rien ne peut être exclu, bien sûr. Mais la probabilité de l’élection de Marine Le Pen est moins basse qu’il y a un mois. Bravo, l’artiste.

    Enfin, si d’aventure Fillon l’emportait au final, sa légitimité serait, du fait de l’épreuve, difficilement contestable. Y compris vis-à-vis de ceux de ses « amis politiques » qui renâcleraient aux réformes annoncées.

    Dans cette hypothèse, sa légitimité résulterait du suffrage populaire. Rien d’autre. L’idée que l' »épreuve » lui donne une sorte d’onction tel un héros passé par l’épreuve du feu et y ayant survécu est trop romantique pour ne pas me sembler suspecte. Là aussi, on est encore dans un esprit de type monarchique de droit divin, la religion en moins.

    Lib a écrit :

    Si le FBI avait « indict » Clinton pour destruction de preuve, ça ne m’aurait pas paru très surprenant. Il ne l’a pas fait. Je pense qu’il aurait pu le faire, quitte à aboutir à un non-lieu 6 mois plus tard. Imagine s’il l’avait fait.

    Je n’ai pas assez d’imagination pour ajouter des situations virtuelles à la réalité de l’élection américaine, qui a déjà dépassé toutes les limites de la fiction…

    Lib a écrit :

    Ton interprétation est très partisane. Pour moi, il ne remettait évidemment pas en question la légitimité du système judiciaire mais sa prééminence sur l’élection. La procédure judiciaire suit son cours et personne ne remet en cause cela. En revanche, elle ne doit pas décider des candidatures à l’élection.

    Les juges ne lui ont pas demandé de se retirer. Par contre, il n’ont pas accepté de ralentir leur enquête sous prétexte d’élection. Certains dans l’entourage de François Fillon, et aussi de Marine Le Pen, ont eu l’audace de réclamer une « trêve judiciaire » en période électorale: pas mal, pour des gens qui se plaignent de ne pas être traités comme des justiciables ordinaires.

    On peut, par contre, reprocher aux juges d’avoir été anormalement vite dans leurs investigations. Sauf que c’est M.Fillon lui-même qui a demandé une enquête la plus rapide possible. Si les juges avaient pris leur temps, les aurait-il accusés de faire traîner pour alimenter le soupçon?

    Lib a écrit :

    Moi j’ai vu un candidat qui a résisté à une épreuve de force exceptionnelle, qui a renversé une situation qui paraissait perdue, qui a fait preuve de beaucoup de sang froid et a su utiliser la seule arme qui lui restait : la légitimité populaire.

    Cette victoire a été remporté contre et au détriment de son camp politique, et en le prenant en otage. Elle l’a été au prix du reniement, comme tu le notes toi-même, de sa promesse de se retirer en cas de mise en examen. Quant à la légitimité populaire, elle est gravement affaiblie: comment savoir si ceux qui ont voté pour lui à la primaire lui auraient conservé leur confiance si cette affaire avait été connue en octobre?

    La leçon à tirer de cette affaire, je crois, est une fois de plus dans l’excès d’importance et de pouvoir accordés à un seul homme sous prétexte de son élection personnelle au suffrage universel. D’où la mise sur un piédestal, puis au pilori, d’un homme qui ne peut jamais être ni un sauveur, ni un génie, ni un saint, mais qui se sent obligé de de promettre des solutions à tout; de combattre toute mise en cause personnelle par tous les moyens; et de ne jamais, jamais renoncer. L’argument « il est le seul à pouvoir porter le programme », asséné comme une évidence, alors qu’en réalité il ne reflète que la confiance de ses partisans les plus indéfectibles, est le résultat de cette quasi-divinisation présidentielle.

  • Lib a écrit :

    Impossible? Je ne suis pas un enquêteur, mais à première vue il y a deux façons de tracer une transaction illégale : par l’émetteur et par le récepteur. Si la loi protège les sources des journalistes, elle n’interdit pas que je sache d’enquêter sur les personnes susceptibles d’avoir transmis les documents : greffiers, juges, policiers etc… A ma connaissance, aucune enquête n’est jamais diligentée.

    Entièrement d’accord avec cela. La justice ne trouve pas, parce qu’elle ne veut pas trouver. Dans un Etat de droit, le secret des correspondances entre un avocat et son client n’est pas mois important que le secret des sources des journalistes. Or, ce secret là n’a pas empêché la justice d’écouter beaucoup de conversations avocat/client ces derniers temps.

    humpty-dumpty a écrit :

    Au final, j’ai trouvé (je crois que personne ne l’a encore citée ici) très bonne la tribune de FX Bellamy (sur sa page FB), samedi soir. En résumé (sans, je crois, en trahir l’esprit même si ses nuances sont importantes bien sûr) : on peut être déçu par FF mais l’enjeu aujourd’hui c’est le projet qu’il peut seul porter.

    Cette tribune est très bien. J’aimerais néanmoins être convaincu de la capacité de F. Fillon à porter ce projet. J’ai de gros doute.

  • Un autre point à prendre en compte : les attaques du camp Fillon contre la justice et les medias ont beaucoup choquées. Pour ma part j’ai été très frappé par le décalage de ton entre ces attaques telles que je les percevais via les médias et ce que j’ai entendu au Trocadero dimanche.
    Je ne peux pas m’empêcher de penser que les médias ont fortement amplifié le côté choquant qui , bien que présent, n’avait peut-être pas l’ampleur qu’on lui a donné

  • Je reviens d’un petit meeting avec Xavier Bertrand Valérie Pecresse et David Douillet, je crois que les atermoiements sont enfin finis car les enjeux sont nettement plus graves que les probables ou sois disantes corruptions . Si nos questionnement moraux sont légitimes, maintenant il faut tourner la page , on a plus le temps de tergiverser. Il faut choisir en votre âme et conscience : le programme de Macron ou Fillon, leurs equipes et la majorité à l’assemblée qu’ils pourront fédérer. L’enjeu ça n’est plus ces manipulations politiques mais Le pen. Jospin a raté le premier tour en 2002 à trois voix près par bureau de vote. Alors engagez vous pour la combinaison qui vous semble la moins pire.

  • Avons-nous tout perdu ? Sur les 50 ans dernières années écoulées nous avons perdu beaucoup d’ouvriers qui votaient plutôt à gauche et beaucoup de paysans qui votaient plutôt à droite. Nous vivions plutôt à la campagne. Nous vivons plutôt en ville. Les mégapoles se multiplient. Les campagnes se désertifient. Sur le plan politique la situation de notre pays me paraît être la suivante: 1. A droite il existe désormais une droite Le Pen, une droite Fillon, une droite Sarkozy, une droite Juppé et plusieurs droites centristes avec plusieurs chefs peu charismatiques. 2. A gauche il existe une gauche Macron, une gauche Hamon, une gauche Mélanchon, une gauche Poutou, les anarchistes existent encore mais ne sont pas visibles médiatiquement parlant et ils sont ultra minoritaires, les écologistes une fois encore ne parviennent pas à exister politiquement parlant dans notre pays. 3. Les Royalistes n’apparaissent pas dans le débat politique. Les deux tours des présidentielles terminés quelle majorité va se dégager pour diriger le pays à court terme, à long terme?

  • @ Etienne : à cet égard, je peux avoir raté quelque chose, mais je ne crois pas qu’un seul responsable LR ait appelé à manifester contre les juges, comme cela a été complaisamment relayé par la presse. Le seul élément sur laquelle ils s’appuyaient étaient un sondage (!) en ligne (!) de Valeurs Actuelles (!) retiré en 1/2h !

    Comme à chaque présidentielle, une certaine presse s’applique à dépeindre le candidat de la droite en néo-fasciste. Elle devrait prendre garde au fait de relativiser ainsi. Quand les mêmes procédés sont utilisés contre la droite classique et le FN, nombre d’électeurs finissent par se dire qu’ils sont peut-être tout aussi illégitimes à l’égard des seconds. Si manifester dimanche au Trocadéro, c’est être un factieux antirépublicain, cela en conduit certains à regarder des extrémistes authentiques avec un autre regard.

  • Merci Koz, comme d’habitude.

    Je partage l’amertume, je la tourne différemment : faute d’espoir, nous avons gagné le désespoir. Il peut s’avérer être un moteur à double tranchant. Moteur du vote Le Pen, de la passivité, du désintérêt, du dégoût pour certains…

    Ou moteur de quelque chose de plus fort, de l’engagement, comme vous le dites justement.
    Où signe-t-on pour être candidat aux législatives ? (vous qui êtes avocat vous avez déjà 50% du CV…)

  • Un petit point d’incompréhension dans cette affaire.
    Il me semble que les juges doivent prouver qu’il y n’a pas eu un contrat de travail entre lui et sa femme càd d’après la définition légale pas de « convention par laquelle une personne s’engage à mettre son activité à la disposition d’une autre sous la subordination de laquelle elle se place, moyennant rémunération »
    D’après wikipédia, la mise en examen signifie qu’il existe des indices graves ou concordants.
    J’ai du mal à comprendre comment les juges pourraient disposer de tels indices?
    Sur internet, j’ai vu des cas cocasses de licenciement du mari par sa femme où le critère de subordination n’était même pas nécessaire.

    Quelle triste ironie au final. Fillon était très heureux de montrer l’image d’une bonne famille avec ses traditions et sa femme discrète voir au foyer (cf l’image du château ds Paris match). Le voilà le conservateur à devoir prouver le contraire, une femme énergique qui travaille comme les femmes modernes.

  • Et maintenant va commencer le difficile avant le premier tour des élections présidentielles:
    « Va d’abord te réconcilier avec ton frère »

    Puis après le deuxième tour viendra le très difficile:
    « Mets-toi vite d’accord avec ton adversaire »

    C’est pas gagné car « Rien n’est jamais acquis à l’homme sauf sa peine. »

  • M. Fillon use de son identité de catholique lorsqu’il s’agit de s’allier avec sens commun, cela je ne peux l’ignorer. Par contre, j’aimerais savoir si « nous n’avons pas tout perdu » ( ce qui supposerait qu’auparavant nous ayions gagné ou tout au moins que nous étions possesseurs des votes, des intentions, de la victoire ?)) : oui, j’aimerais savoir ce que M. Fillon a fait de la Doctrine Sociale de l’Eglise ; où l’a t-il cachée ? où l’a-t-il égarée ? Je ne la trouve plus (pas) dans ses déclarations et son programme.

    Quant à la manifestation du Trocadéro, je suis choquée de la captation du drapeau tricolore afin de défendre un candidat ; imiter les pratiques du parti de l’exclusion est une manière de dire qu’il est possible de voter pour lui. Par son comportement M. Fillon favorise incontestablement ce parti que je ne veux pas voir arriver au pouvoir et de cela il est entièrement responsable.

  • @ camille-madeleine:

    Fillon dit avoir comme priorité la lutte contre le chômage. On peut bien sûr être en désaccord avec les moyens qu’il propose, mais il me semble que l’objectif n’est pas en contradiction avec la doctrine sociale.

    Quant à faire du drapeau tricolore un marqueur du FN, voilà qui va fâcher de nombreux citoyens attachés à leur patrie. Il me semble au contraire bienvenu de ne pas en laisser l’exclusivité à MLP.

    Et en politique, à la fin, il faut choisir. Si vous pensez qu’un autre candidat défend mieux la doctrine sociale de l’Église, dites-le nous et pourquoi.

  • On se souviendra qu’en 2007, c’est Ségolène Royal qui invitait les Français à réhabiliter le drapeau national. Depuis le temps qu’on se demandait qui donc avait bien pu faire le lit du FN. C’était donc elle…

    Sans compter qu’entretemps, nous n’avons pas été mécontents de retrouver le drapeau quand il nous a fallu nous retrouver autour d’un signe commun.

    Quant à la DSE, elle n’est pas là pour fournir un programme précis. Comme le dit Aristote, son objectif est de relancer l’économie française. On peut estimer que ses méthodes sont mauvaises, mais cela ne suffit pas à en faire un projet contraire à la DSE.

    Maintenant, faut-il se prévaloir de ses convictions religieuses en politique ? Je suis très généralement peu convaincu par ceux qui le font. De Boutin à Fillon en passant par Poisson, le résultat n’a jamais été très convaincant.

  • @ Aristote et Koz
    Mme Royal souhaitait réhabiliter le drapeau ; comme d’autres, et vous sans doute, je suis attachée à ce symbole, j’ai dû mal m’exprimer, ce que je conteste c’est l’utilisation du drapeau national à des fins partisanes
    Pour la DSE j’aurais effectivement aimé que le candidat qui affirme son appartenance à l’Eglise y fasse clairement référence puisqu’il avait fait le choix de mettre en avant sa religion. Même si, j’aurais préféré qu’on me pose la question : « pourquoi est-il si attentif aux autres ? » et d’avoir à répondre « parce qu’il est chrétien ! »

  • @ Jean-Luc:

    Je suis tombé sur ce rapport du déontologue de l’AN daté de novembre 2016 qui éclaire d’un jour intéressant les pratiques en question. Il apparaît que la confusion sur la nature de l’IRFM a duré jusqu’en 2013 voire 2015. Ainsi tel parlementaire a été redressé par le fisc qui souhaitait le voir intégrer le solde non-consommé de l’IRFM dans son patrimoine. Ainsi tel autre, lors de son divorce, s’est vu imposer une pension alimentaire calculée sur un train de vie incluant l’IRFM.

    Ainsi, en haut de la page 27 : « Au
    sens du droit fiscal, l’I.R.F.M. est « réputée utilisée conformément à son objet » et n’est donc pas contrôlable par
    l’administration fiscale.
    Les modalités de versement et de contrôle de cette
    indemnité ont été
    profondément revues au cours de cette législature,
    avec des avancées indiscutables
    sur le plan déontologique ; il s’agissait de mettre
    fin aux critiques récurrentes sur le
    fait que, l’usage de l’I.R.F.M. n’étant soumis à au
    cun contrôle, elle pouvait être
    détournée au profit d’un usage personnel. »

    Tout cela suggère un flou artistique sur l’utilisation de ces sommes jusqu’à très récemment. C’était évidemment critiquable tout comme sont louables les initiatives de 2013 et 2015 visant à préciser et encadrer l’utilisation de ces sommes.

    Cela suggère aussi le caractère arbitraire de la procédure engagée contre un parlementaire et un seul, sur des faits largement antérieurs à ces réformes. Et quand il se trouve que le parlementaire en question est favori à l’élection présidentielle, il faut vraiment avoir chevillé au corps le dogme de l’infaillibilité de l’Etat pour ne pas penser à un assassinat politique.

  • Mais, Lib, le problème n’a pas grand-chose à voir avec l’IRFM, si ? La rémunération des collaborateurs se fait sur une autre enveloppe, dont une partie seulement (6000 € annuels) peut être reversée sur l’IRFM. De plus, il s’agit de soupçons d’emplois fictifs, et donc de détournements de fonds, pas de contrôle fiscal.

    Par ailleurs, des faits potentiellement répréhensibles ayant été portés à la connaissance des juges, comment voulez-vous qu’ils procédassent ? « Ne faisons rien, cela pourrait nuire à la validité de l’élection » ? Quant à moi, « Faisons vite la lumière sur cette affaire, il en va de la validité de cette élection » est une doctrine judiciaire qui me convient, je dois dire. Que direz-vous si l’enquête aboutit rapidement à un non-lieu ?

    Enfin, pensez-vous que le président de la République devrait être, dans l’idéal, a. Moins exemplaire que la plupart, b. ni plus ni moins exemplaire ou c. Plus exemplaire ?
    Emmanuel Macron, malheureusement, n’a jamais été parlementaire, mais Benoît Hamon, oui (au parlement européen), Marine Le Pen aussi, tandis que Jean-Luc Mélenchon est sénateur. Ont-ils rémunéré des membres de leur famille au titre de collaborateurs parlementaires sans évidente contrepartie de travail ? La réponse semble être oui, s’agissant de Marine Le Pen, bien que ce soit au profit de son parti plutôt que de sa famille, et non s’agissant des deux autres. Parfait. Nous voilà à même de les juger sous ce rapport. Qu’y a-t-il de mal à cela ? Par quel procédé magique l’électeur perdrait-il des capacités de jugement en gagnant de l’information ? Et comment passez-vous de là à l’assassinat ?

  • Sur ce point, vous auriez raison s’il y avait une chance qu’une décision judiciaire tombe avant l’élection, ce qui n’est pas le cas. C’est bien en cela que le calendrier est problématique : l’élection se déroulera sous le soupçon porté contre François Fillon, et le résultat de la présidentielle sera connu sans que l’on sache si François Fillon est coupable ou innocent. S’il est innocent, on ne le saura que trop tard. Votre hypothèse « faisons vite la lumière sur cette affaire » ne fonctionne pas, en l’occurrence.

    Or, c’est tout de même là que le bât blesse. Dans un calendrier normal – et, comme avocat, je suis un peu renseigné – il était hautement improbable que François Fillon puisse être mise en examen avant l’élection. On est tout de même un peu en droit de se demander si la célérité toute particulière du parquet – qui s’est auto-saisi dans un délai record – et du juge d’instruction est vraiment disjointe de ses propres déclarations.

    Et ce d’autant plus que cette célérité va s’arrêter justement au moment de savoir de quoi il ressort. François Fillon sera jugé par les électeurs avant de l’être par la Justice, qui le condamnera peut-être, mais l’innocentera peut-être aussi. Il n’y a qu’à songer au nombre de procédures ouvertes contre Nicolas Sarkozy qui se sont soldées par un non-lieu pour constater qu’il ne suffit pas de détester férocement quelqu’un pour qu’il soit reconnu coupable. Ou, si vraiment c’est trop dur avec Nicolas Sarkozy, aux cinq ans de procédure imposés à Eric Woerth, que tous avaient jugé coupable, avant sa relaxe.

    Fallait-il parler d' »assassinat politique » ? Je ne sais pas. Mais lorsque l’on est vraiment attaché à l’Etat de droit, il faut l’être jusqu’au bout.

  • Koz a écrit :

    Ou, si vraiment c’est trop dur avec Nicolas Sarkozy, aux cinq ans de procédure imposés à Eric Woerth, que tous avaient jugé coupable, avant sa relaxe.

    mais, sauf erreur de ma part, une relaxe ou un non lieu ne signifie pas que vous êtes innocent, simplement que la justice n’avait pas assez d’éléments pour vous condamner (ce qui est normal, dans un état de droit, et que je ne conteste pas du tout) . mais je crois que tout avocat est bien placé pour le savoir.

    cet article l’illustre : http://libertes.blog.lemonde.fr/2015/05/29/proces-bettencourt-19-pourquoi-eric-woerth-est-relaxe/

    et, comme le demande tcheni :

    tcheni a écrit :

    Par ailleurs, des faits potentiellement répréhensibles ayant été portés à la connaissance des juges, comment voulez-vous qu’ils procédassent ?

    que ce soit un complot ou non, que la justice soit rapide ou lente, je crois que dans tous les cas, les soutiens de F. Fillon auraient trouvé à y redire (sauf peut, être, en créant une « immunité de candidat à la présidence », assez complexe à mettre en œuvre)

  • Mais si les procédures peuvent durer cinq ans, soit précisément la durée qui sépare deux présidentielles, que faire ? De quelle durée, la trêve judiciaire ? Surtout, de quel droit ?

    *

    Si j’étais dans le cas de François Fillon, à supposer qu’il est innocent, je souhaiterais comme il l’a fait que la justice aille le plus vite possible. Ce souhait est d’ailleurs à mettre à son crédit.

    *

    Je suis attaché à l’État de droit jusqu’au bout. Où lisez-vous le contraire ? Ma préférence va simplement à une justice rapide et efficace, surtout en période électorale. Si quelque chose sortait sur messieurs Macron, Hamon ou Mélechon, je voudrais exactement la même chose (pour Madame Le Pen, c’est déjà fait). C’est ainsi que j’informerai mon vote.

    *

    Pour faire bonne mesure, j’ajoute que si des pressions indues, de quelque forme que ce soit, ont été exercées à l’endroit des juges dans cette procédure (ou dans d’autres), je serai le premier à crier au scandale et réclamer des sanctions. La justice est indépendante, et nous sommes dans un État de droit, ou elle ne l’est pas. Pour l’instant, rien ne l’indique ou, à tout le moins, le faisceau d’indices me paraît plus maigre que, par exemple, celui qui pointe vers une culpabilité de François Fillon.

    PS : désolé pour les petites étoiles, mais mes sauts de paragraphe ont été refusés dans le précédent commentaire. Je me méfie.

  • @Koz

    C’est bien en cela que le calendrier est problématique

    L’aspect judiciaire me paraît moins important que les doutes réels sur la personnalité de Fillon, mais pour bien vous comprendre: quel aurait été le bon calendrier?

    J’ai entendu plusieurs professionnels de la profession estimant que dans 80% des affaires le calendrier suivaient à peu près le même rythme observé pour FF. Des menteurs?

  • Bien sûr, nous n’avons pas ici les compétences ni les informations nécessaires pour donner une opinion définitive sur la culpabilité ou l’innocence de M.Fillon. Cela dit, c’est son propre discours qui pose problème, par la quantité extraordinaire d’incohérences qu’il contient. Sa femme n’a jamais participé à sa carrière politique – mais elle était en fait une collaboratrice indispensable et présente. Il demande une enquête la plus rapide possible – mais maintenant c’est la hâte des juges qui est suspecte. Il est impensable de rester candidat tout en étant mis en cause par la justice – ah, non, en fait c’est aux électeurs de trancher la question. Pour gouverner, il faut être irréprochable – sauf qu’apparemment, des excuses dans un discours sont désormais suffisantes, à condition d’avoir suffisamment de partisans prêts à manifester pour leur champion.

    Si la confiance n’est plus de mise, ce n’est pas par le fait des juges.

  • tcheni a écrit :

    La justice est indépendante, et nous sommes dans un État de droit, ou elle ne l’est pas. Pour l’instant, rien ne l’indique ou, à tout le moins, le faisceau d’indices me paraît plus maigre que, par exemple, celui qui pointe vers une culpabilité de François Fillon.

    Je pense qu’il y a des nuances de gris. Et le gris s’est assombri ces dernières années. Voir toutes ces procédures ouvertes à l’encontre de leaders de l’opposition me laisse un sentiment amer dans la bouche. Ca se passerait en Turquie, tout le monde y verrait la marque d’une dérive autoritaire.

    Le conflit d’intérêt (au minimum) entre le pouvoir et une certaine presse est malheureusement bien établi. J’ai déjà parlé des liens contre-nature entre le Président et le Monde. Il y a aussi le cas de Mediapart qui décide de ne pas payer sa TVA et se fait voter par le parlement une ristourne rétroactive. (Pour comparaison, L’Opinion ne bénéficie pas des aides à la presse et s’est pris un contrôle fiscal 2 mois après sa création)

    La violation systématique du secret de l’instruction dans les affaires mettant en jeu des politiques, précisément par les mêmes organes de presse, est un élément supplémentaire. On est face à un véritable loophole juridique puisque la collusion entre des journalistes et le pouvoir peut permettre à ce dernier de nuire à son opposition en toute impunité, grâce à la protection des sources. Triste ironie, les lois supposées garantir l’indépendance de la presse face au pouvoir servent (peut-être) le pouvoir.

    Pour qu’un faisceau d’indices émerge, il faut que quelqu’un enquête. Qui peut enquêter? La presse ou la justice. Elles ne le font pas, c’est en soi un indice.

    tcheni a écrit :

    Par ailleurs, des faits potentiellement répréhensibles ayant été portés à la connaissance des juges, comment voulez-vous qu’ils procédassent ?

    La violation du secret de l’instruction est patente, pourtant personne ne procède. Pourquoi? Cela n’intéresse aucun journal. De même le PNF a été créé pour instruire des affaires financières d’une grande complexité. Pourquoi s’est-il saisi d’une banale affaire d’emploi fictif? Comment ses membres ont-ils été nommés? Quelle est leur indépendance par rapport au pouvoir exécutif?

    tcheni a écrit :

    PS : désolé pour les petites étoiles, mais mes sauts de paragraphe ont été refusés dans le précédent commentaire. Je me méfie.

    Il faut mettre 2 sauts de paragraphe, pour une raison obscure.

    Gwynfrid a écrit :

    Sa femme n’a jamais participé à sa carrière politique – mais elle était en fait une collaboratrice indispensable et présente.

    Ce n’est pas lui qui a dit que sa femme ne participait pas à sa carrière politique mais sa femme, dans une très vieille interview, ou elle ne dit pas les choses exactement comme ça.

    Gwynfrid a écrit :

    Il demande une enquête la plus rapide possible – mais maintenant c’est la hâte des juges qui est suspecte.

    A l’évidence il a été surpris par cette hâte. Peut-être avait-il confiance en la justice de son pays.

    Gwynfrid a écrit :

    Il est impensable de rester candidat tout en étant mis en cause par la justice – ah, non, en fait c’est aux électeurs de trancher la question.

    S’il y a un effet positif à cette triste histoire, c’est bien l’abandon (j’espère définitif) de cette stupide règle (que l’on doit à Balladur, je crois) qui viole clairement la séparation des pouvoirs entre exécutif et judiciaire. Le judiciaire doit être indépendant (on aimerait être sûr qu’il le soit) et ne doit pas avoir la possibilité de révoquer l’exécutif.

    Sur la contradiction, c’est le même point que le précédent. A l’évidence, Fillon ne pensait pas une seule seconde qu’il soit possible de le mettre en examen avant l’élection. Il a eu tort. La célérité de la justice semble directement liée à l’intervention du PNF, assez loin de ses attributions. Deux fois plus de raisons de s’interroger sur cette décision. I don’t hold my breath.

    Gwynfrid a écrit :

    Pour gouverner, il faut être irréprochable – sauf qu’apparemment, des excuses dans un discours sont désormais suffisantes, à condition d’avoir suffisamment de partisans prêts à manifester pour leur champion.

    Suffit-il d’être accusé pour ne plus être irréprochable?

  • @ Gatien : je ne fais pas plus de judiciaire-fiction que de politique-fiction et vos insinuations en fin de commentaire me suffisent à penser que votre objectif n’est pas de « bien me comprendre ». Quant aux professionnels de la profession que vous mentionnez, il est assez parfaitement stupide de parler de « 80% des affaires », alors que les affaires pénales sont d’une rare diversité. Il est en outre faux de dire que dans 80% des affaires, on aboutit à une mise en examen en moins de deux mois. Au demeurant, les juges eux-mêmes ont éprouvé le besoin, hier, de justifier leur décision par le calendrier de la présidentielle.

    psam a écrit :

    sauf erreur de ma part, une relaxe ou un non lieu ne signifie pas que vous êtes innocent

    Celle-là, je me l’encadre. Elle en dit assez long sur l’acharnement de certains, dont vous.

  • psam a écrit :

    mais, sauf erreur de ma part, une relaxe ou un non lieu ne signifie pas que vous êtes innocent, simplement que la justice n’avait pas assez d’éléments pour vous condamner (ce qui est normal, dans un état de droit, et que je ne conteste pas du tout) . mais je crois que tout avocat est bien placé pour le savoir.

    cet article l’illustre : http://libertes.blog.lemonde.fr/2015/05/29/proces-bettencourt-19-pourquoi-eric-woerth-est-relaxe/

    Un petit chef d’oeuvre d’hypocrisie celle-là.
    C’est bien connu, il n’y a pas de fumée sans feu. D’ailleurs pourquoi organiser des procès ? Mais nous sommes rassurés de savoir que vous considérez comme normal dans un Etat de droit de ne pas être condamné à défaut de preuves suffisantes.

    L’article de Franck Johannès illustre le niveau de bassesse auquel est parvenu ce journal (celui-là même qui, en d’autres temps, avait fait plusieurs centaines de unes sur Roland Dumas, suivi d’un entrefilet pour annoncer sa relaxe.)

  • Lib a écrit :

    Ce n’est pas lui qui a dit que sa femme ne participait pas à sa carrière politique mais sa femme, dans une très vieille interview, ou elle ne dit pas les choses exactement comme ça.

    Cette interview est loin d’être le seul moment où l’indépendance de Mme Fillon par rapport à la carrière politique de son mari a été mise en avant. Le qualificatif de « discrète » lui est systématiquement accolé, depuis toujours. Tu me diras, certes, qu’on a le droit de participer discrètement…

    A l’évidence il a été surpris par cette hâte. Peut-être avait-il confiance en la justice de son pays.

    Il a été surpris que les juges fassent exactement ce qu’il a demandé?

    Il est impensable de rester candidat tout en étant mis en cause par la justice – ah, non, en fait c’est aux électeurs de trancher la question.
    S’il y a un effet positif à cette triste histoire, c’est bien l’abandon (j’espère définitif) de cette stupide règle (que l’on doit à Balladur, je crois) qui viole clairement la séparation des pouvoirs entre exécutif et judiciaire. Le judiciaire doit être indépendant (on aimerait être sûr qu’il le soit) et ne doit pas avoir la possibilité de révoquer l’exécutif.

    Je comprends où se trouve notre différence: tu es d’accord avec le François Fillon de 2017 et en désaccord avec celui de 2016… moi, c’est l’inverse (et j’ai voté pour lui en 2016, en bonne part parce que j’étais d’accord avec lui sur ce point particulier).

    Suffit-il d’être accusé pour ne plus être irréprochable?

    La meilleure réponse à cette question n’est pas de moi.

    En novembre 2016, François Fillon a dit :

    Cela veut dire que les ministres, les présidents de la République a fortiori, ne doivent pas être mis en examen et doivent avoir une attitude irréprochable. Je sais que ce n’est pas juste, je sais qu’il y aura toujours des gens pour m’expliquer qu’il y a la présomption d’innocence, mais l’expérience qui a été la mienne me montre qu’on ne peut pas sereinement diriger un ministère quand on a sur le dos une suspicion qui a entraîné une procédure judiciaire.

    […]

    On est des hommes politiques, on n’est pas des citoyens comme les autres. Les citoyens ont le droit à la présomption d’innocence, les hommes politiques ont comme responsabilité de montrer le chemin et de prendre des décisions difficiles.

    +1. Non seulement je pense que cela exprime très exactement mon point de vue, mais de plus, je suis convaincu que M.Fillon était sincère à ce moment précis.

  • @ Gwynfrid:

    Vous faites passer Filon devant le tribunal de vos exigences éthiques, et, pour aller vite, vous le condamnez au nom de votre haute idée de la morale.

    Peut-être avez-vous raison.

    Moi, j’ai un autre problème. je dois bientôt voter et choisir un candidat. Bien entendu la dimension éthique compte. Mais la question que je me pose est alors : un autre candidat crédible est-il mieux placé que Fillon dans cette dimension. ? Cela me paraît en rien évident.

    Ne parlons pas de MLP. Macron .Fait organiser en urgence un déplacement à Las Vegas, alors qu’il sait déjà qu’il va être candidat, pour se faire voir et conforter son image d’homme moderne. Coût pour le contribuable, 500 000 € la journée. C’est parfaitement légal, il est ministre, il peut le faire. Est-ce au fond plus moral que le Pénelopegate, alors que l’emploi d’une épouse est lui aussi légal. La réalité de la justification « ministérielle » du déplacement de Macron à Las Vegas me semble aussi questionable que celle du travail de Pénélope.

    On reproche à Fillon d’accepter des faveurs (prêt sans intérêt, costumes) qui conduisent à soupçonner que les amis de Monsieur Fillon espèrent avoir un jour un retour, même si aucun deal n’est passé. David de Rothschild a organisé une réunion sur invitation où il a invité le gotha de la finance parisienne pour avoir l’occasion de rencontrer Macron. Réunion classique de fund raising. David de Rotschild fait-il cela uniquement par amour de la patrie ? Et ceux qui répondent à l’invitation ?

    Je ne m’étends pas sur les relations de Macron avec Drahi (BFM TV, L’Express).

    Je n’accable pas Macron. C’est le monde tel qu’il va et il n’est certainement pas un des pires dans cette dimension. Mais je ne vois pas en quoi voter Macron peut se justifier en réaction aux « erreurs » de Fillon. Celles de Macron les valent bien.

    Je me déciderai donc sur le programme. Je voterai Fillon. Je comprends très bien qu’on ne vote pas Fillon en raison d’un désaccord avec son orientation politique. En raison des « affaires », cela me paraîtrait injustifié, sans pour autant me bercer d’illusions sur FF, homme que je ne crois pas une seconde être corrompu, mais pas suffisamment désintéressé pour refuser des arrangements peut-être légaux mais aujourd’hui de moins en moins acceptés.

  • Aristote a écrit :

    Est-ce au fond plus moral que le Pénelopegate

    Pour respecter la comparaison, il eût fallu que Macron empochât les 500.000€ sans se rendre à Las Vegas.

  • Juste un nouveau passage pour dire, sans souci d’exhaustivité :

    • merci encore une fois à koz pour ce blog

    • et à tous ses commentateurs qui apportent presque toujours quelque chose – que l’on soit d’accord ou pas

    • et une fois de plus : assez d’accord avec notre hôte,

    • en accord sur à peu près tout avec Lib (les rares fois où je ne l’ai pas suivi c’est quand le tropisme libéral apparaissait même hors sujet bien que je ne désapprouve pas le fond ; sur le présent fil ce n’est pas le cas) ;

    • en accord sur tout avec Aristote (même si en une occasion depuis que je suis ce blog je me rappelle l’avoir trouvé limite… sur la forme, quoique toujours valable sur le fond).

    Je fais partie de ceux qui maintiennent le choix FF : je ne nierai pas une part de désappointement, mais je suis loin d’être tombé du mur ; car je n’ai jamais considéré qu’il ait été un saint, parce que je sais ce que sont les hommes ; et a fortiori les hommes politiques, et ceux qui durent et montent assez haut. Donc, pas d’illusion à briser. Et un choix parmi ceux qui sont possibles… Et dans ce cadre (que je ne choisis pas, et suis conscient de n’avoir pas les moyens de choisir), je n’ai aucune hésitation sur le meilleur (même s’il n’est que le moins mauvais) choix.

    Et quant au fonctionnement de nos institutions et au dévoiement non démocratique de certaines de celles-ci, je pleure… (Non, le traitement des « affaires » Fillon n’a rien d’impartial, et n’est très manifestement pas fait dans la noble visée de moraliser la vie publique).
    Mais, tout en oeuvrant pour le mieux à la très très humble mesure, tant de mes propres moyens intellectuels et moraux, que de ma position dans le monde, je fais comme je peux avec ce dont je dispose. Le Royaume que j’attends n’est pas de ce monde. Mais je suis dans ce monde et je dois partir de ce qu’il est.

  • Aristote a écrit :

    Vous faites passer Filon devant le tribunal de vos exigences éthiques, et, pour aller vite, vous le condamnez au nom de votre haute idée de la morale.

    Vous vous méprenez sur mon point de vue, doublement.

    1) Je ne condamne pas M.Fillon au nom de mes exigences. Je le condamne au nom des siennes.

    2) Je ne porte pas un jugement d’ordre moral, mais un jugement d’ordre politique. Je juge que par son comportement, M.Fillon a gravement affaibli sa candidature, son parti, et son projet. Partant, il a affaibli notre pays. La morale n’a rien à voir là-dedans.

    Je n’accable pas Macron. C’est le monde tel qu’il va et il n’est certainement pas un des pires dans cette dimension. Mais je ne vois pas en quoi voter Macron peut se justifier en réaction aux « erreurs » de Fillon. Celles de Macron les valent bien.

    Dans un débat de ce type, quand on en arrive à l’argument suivant lequel les autres ne sont pas mieux, c’est qu’on a renoncé à défendre son candidat. Je le comprends, tant je le trouve indéfendable. Pour autant, je trouve votre raisonnement profondément désolant. Non seulement il verse dans le « tous pourris », ce qui est malheureusement banal. Mais, par surcroît, il renonce à l’idée même d’intégrité en politique, qui était il y a seulement deux mois (!) au coeur de la candidature de François Fillon.

  • Gwynfrid a écrit :

    Dans un débat de ce type, quand on en arrive à l’argument suivant lequel les autres ne sont pas mieux, c’est qu’on a renoncé à défendre son candidat. Je le comprends, tant je le trouve indéfendable.

    Je ne défends pas le comportement de Fillon, mais je ne l’accable pas parce que je sais faire la différence entre Cahuzac et Fillon. Élevé par les jésuites, affreux casuistes, je me pose toujours la question du discernement.

    Et la question reste. Pour qui vais-je voter ? Et là, que cela plaise ou non, il me faut bien me demander si en votant pour un autre, je servirais vraiment la cause de la morale.

  • @ Aristote:

    Nous avions hier, pour représenter la droite de gouvernement, un candidat qui, en matière d’intégrité personnelle, prenait pour modèle le Général de Gaulle, et c’était crédible. Aujourd’hui, vous êtes réduit à le comparer à Jérôme Cahuzac. Le constat est aussi triste que cruel.

  • Gwynfrid a écrit :

    Je comprends où se trouve notre différence: tu es d’accord avec le François Fillon de 2017 et en désaccord avec celui de 2016… moi, c’est l’inverse (et j’ai voté pour lui en 2016, en bonne part parce que j’étais d’accord avec lui sur ce point particulier).

    Je prends acte du peu de cas que tu fais de la séparation des pouvoirs. Cela me peine.

    Gwynfrid a écrit :

    Mais, par surcroît, il renonce à l’idée même d’intégrité en politique, qui était il y a seulement deux mois (!) au coeur de la candidature de François Fillon.

    C’est marrant. Tout le monde dit cela aujourd’hui, mais je ne me rappelle pas avoir été noyé, avant les affaires, par des articles vantant l’honnêteté de Fillon.

    Bien sûr il a dit qu’il était honnête; ils le disent tous, et il continue à le dire aujourd’hui. Bien sûr il a marqué quelques cheap shots contre Sarkozy et Juppé, chacun dans son style empêtré dans des affaires; mais c’est très exactement ce que font aujourd’hui les autres campagnes contre lui. Ca ne fait pas de l’intégrité le coeur de la candidature de Hamon ou de Macron.

    Gwynfrid a écrit :

    Non seulement il verse dans le « tous pourris », ce qui est malheureusement banal.

    Peut-être faut-il envisager de cesser de rejeter des idées seulement parce qu’elles sont désagréables. Pour ma part, je suis malheureusement convaincu que notre système public est profondément malsain et qu’il se nourrit notamment de ce refus, très humain, d’envisager le pire.

    Je suis convaincu que Friedman, avait raison quand il disait “I do not believe that the solution to our problem is simply to elect the right people. The important thing is to establish a political climate of opinion which will make it politically profitable for the wrong people to do the right thing. Unless it is politically profitable for the wrong people to do the right thing, the right people will not do the right thing either, or if they try, they will shortly be out of office.”

    Je pense qu’aucun des candidats n’est un « right people ». Ce qui m’a attiré dans la campagne de Fillon c’est précisément qu’il était le seul à prôner une réduction franche de l’influence publique, condition selon moi pour « make it politically profitable for the wrong people to do the right thing ». D’autres ont apprécié ses positions sociales conservatrices. D’autres enfin, le courage calme dont il a fait preuve pour défendre avec talent ces positions tellement minoritaires médiatiquement. Sur ces critères, Fillon demeure très solide. Pour ma part, je regrette qu’il ait lâché du lest sur son programme « libéral », mais je suis impressionné par sa résistance dans la tourmente et la façon dont il a tué le pustch des crapules de l’UMP.

    Si ton critère principal est l’honnêteté (bon courage), alors choisis ton candidat sur son honnêteté, pas ses discours sur l’honnêteté.

    Macron a probablement truandé son ISF (comme tout le monde, ça me le rend plutôt sympathique) et financé sa campagne via son ministère (comme tout le monde) . Il semble avoir fait montre d’un certain courage et a pris certaines positions à contre-pied des doctrines les plus criminellement connes du PS.

    Ceci dit, son immense talent pour dire à chacun ce qu’il veut entendre est inquiétant. Il est énarque candidat des énarques et des media. Il est sans hésitation, mais sans illusion mon choix numéro 2. Le plus probable est qu’il soit une forme d’Obama, jeune, beau, qui présente bien. Il satisfera notre coeur de midinette et nous conduira à Trump. Le scenario du pire est qu’il soit le Medvedev de Hollande.

  • Moi ce qui me désole, c’est qu’on se focalise sur de « présumés » délits (car je rappelle que pour l’instant nous n’en sommes qu’aux suppositions), voire aux affaires de « chiffons » : personnellement je me moque comme de l’an 40 du prix des costumes de F. Fillon. J’aimerais beaucoup, en revanche que l’on parle de son programme et qu’on le compare à ceux de ses concurrents. Cela permettrait au moins de se faire une idée sur ce qui est quand même le sujet primordial de la présidentielle, non ?

  • @ Gwynfrid:

    Vous êtes déçu.

    Moi aussi bien sûr.

    Mais la seule question qui me tracasse vraiment, c’est pour qui voter en avril.

    Je vote toujours Fillon.

    Maintenant si vous avez des arguments solides pour me persuader, qu’il s’agisse de programme ou de moralité, qu’un autre candidat est clairement préférable à Fillon, je vous écoute.

  • Quelle hypocrisie, quel cirque médiatique, que cirque sécuritaire surtout !

    Le ministre de l’intérieur, nommé il y a 4 mois pour des raisons politiciennes, démissionne 1 mois avant le terme du mandat.

    Ca nous fera 3 ministres de l’intérieur en 5 mois. Il paraît qu’on a des problèmes de sécurité en ce moment. Il paraît même que ça justifie de mettre les libertés entre parenthèses indéfiniment (aka état d’urgence permanent).

    Ainsi on désorganise la sécurité intérieure pour donner l’illusion qu’on est honnête. Remarque, l’opération sentinelle ne sert qu’à donner l’illusion qu’on est protégés. Pour une fois qu’on trouve une cohérence dans ce quinquennat interminable…

  • Je dois dire que je me demande comment ceux qui voient un complot du gouvernement dans l’affaire Fillon vont réagir au fait que Le Roux, pourtant ministre du bord du taulier, est suspecté pour le même type de pratiques que Fillon, et que Moscovici, pourtant nommé par le sus-évoqué taulier, s’est fait également offrir des costumes.

    Ah, si, je sais. Il s’agit de noyer le poisson. Logique. La pensée complotiste est cohérente : tout ce qui correspond au complot le prouve, et tout ce qui ne cadre pas le prouve encore plus, puisqu’il est bien connu que la justice et les médias sont à la solde du gouvernement. Si ça colle, nickel ; si ça ne colle pas, c’est qu’il y a un marionnettiste.
    Il n’y a que moi qui vois le problème du raisonnement ?

  • En fait, c’est 4 ministres de l’intérieur en 6 mois. Cazeneuve, Le Roux, Fekl puis celui qui sera nommé en mai !

    Heureusement que la période est calme !

  • @ Armand017:

    Si complot il y a, il n’est nullement nécessaire qu’il soit téléguidé par le gouvernement, ou ce qui fait office de gouvernement. Il y a suffisamment de personnes qui ont tout à perdre à une présidence Fillon et qui ont accès aux informations requises, aux médias, etc., pour organiser au moins une dizaine de complots !

    En fait, ce qui est vraiment inquiétant, c’est qu’un complot n’est même pas nécessaire pour que la machine s »emballe. Souvenez-vous de Baudis, de Woerth, etc. Avec 85 % des journalistes qui disent voter à gauche et une magistrature qui dans son ensemble a refusé de condamner comme elle aurait du le faire l’épisode du mur des cons, la caisse de résonance médiatique comme la collaboration éhontée entre le PNF et Le Monde se mettent en place sans besoin d’instructions particulières.

    Quand au pauvre Monsieur Le Roux, il a été sacrifié pour mettre de la pression sur Fillon. Une différence cependant : les faits reprochés à Fillon ont cessé en 2013, on avait quatre ans pour en parler, ceux reprochés à Le Roux ont couru au moins jusqu’en 2016.

  • Aristote, je trouve que vous mélangez un peu tout et n’importe quoi… et que du coup vous prouvez a posteriori la justesse de l’argumentation d’Armand017
    Baudis : mis en cause par 2 ex prostituées lors du procès Allègre. Mise en cause mensongère certes, et elles ont été condamnées pour dénonciation calomnieuse. Un journaliste suit un procès important, il fait part des débats. Où est le complot là-dedans ?
    Woerth : c’est un peu différent. Une relaxe, mais dans laquelle l se fait étriller notamment qu’existe « une forte suspicion de remise d’argent ». La légion d’honneur à De Maistre, les retraits d’argent juste avant ses visites… et il se goberge de cette relaxe en prétendant que son innocence a été démontrée, tout en se maintenant en politique.
    Quand au Mur des cons, ce n’est pas très heureux certes, mais la présidente du SM a été mise en cause pour injure publique, mais non jugée car prescription. Vous vouliez quoi ? le bagne de Cayenne ?
    Je ne sais pas d’où vous tirez vos statistiques de 85 % des journalistes qui votent à gauche.

  • @ eczistenz:
    en fait, d’après un sondage Harris, c’est 74% qui ont voté Hollande

    « Les journalistes ayant pris part à cette consultation déclarent un vote beaucoup plus marqué à gauche que le corps électoral français, aussi bien au premier tour qu’au second tour. 39% déclarent ainsi avoir voté pour François Hollande dès le premier tour et 74% au second. »

    http://harris-interactive.fr/opinion_polls/les-journalistes-presents-sur-twitter-et-la-campagne-presidentielle-de-2012-consultatio

    à rapprocher d’un autre sondage sur les couples journalistes hommes/femmes politiques
    http://harris-interactive.fr/opinion_polls/le-regard-des-francais-sur-les-couples-entre-journalistes-politiques-et-responsables-politiques-sondage-harris-interactive-pour-le-site-2012etvous-fr-gere-conjointement-par-m6-msn-actualites-rtl/

  • eczistenz a écrit :

    Je ne sais pas d’où vous tirez vos statistiques de 85 % des journalistes qui votent à gauche.

    Voilà :

    http://h16free.com/2017/02/19/57409-redite-de-lindependance-des-journalistes

    eczistenz a écrit :

    Quand au Mur des cons, ce n’est pas très heureux certes, mais la présidente du SM a été mise en cause pour injure publique, mais non jugée car prescription.

    Comparez avec ce qui arrive à Fillon ! Le mur des cons, c’est moins grave que Pénélope ???

  • Un livre vient de paraître qui met en cause François Hollande et Michel Sapin.

    Les deux hommes auraient violé tous les principes fondamentaux de l’état de droit, séparation des pouvoirs, indépendance de la justice, égalité des droits, indépendance de la presse. Ils auraient utilisé les pouvoirs de la police et de la justice contre l’opposition.

    C’est extrêmement grave, quoique malheureusement peu surprenant.

    Personne ne demande la démission du président de la république et du ministre des finances.

    Personne ne s’attend à ce qu’une enquête indépendante soit diligentée.

    Surveillance généralisée de la population, état d’urgence permanent, privatisation de la police et de la justice, les rues sillonnées de patrouilles de soldats en armes, le candidat de l’opposition empêché de faire campagne…

    Ce quinquennat aura vu un recul catastrophique de l’état de droit. Le plus grave depuis Pétain, même la guerre d’Algérie et le putsch des généraux ne sont pas comparables.

    Koz a raison de s’interroger. Avons-nous tout perdu?

  • @ Lib:
    Avez-vous réagi au livre précédent des mêmes auteurs, décrivant de pires pratiques « L’espion du Président : au cœur de la police politique de Sarkozy » ?

  • Fillon est mis en examen.

    La probabilité qu’il soit sur écoutes est donc très élevée.

    Mais bien sûr, dormons tranquilles : les comptes-rendus ne quittent pas les bureaux des policiers chargés des écoutes…

    On comprend mieux l’urgence de la mise en examen.

  • Je reviens un peu tardivement (désolé) pour répondre sur certains points.

    Lib a écrit :

    Gwynfrid a écrit :
    Je prends acte du peu de cas que tu fais de la séparation des pouvoirs. Cela me peine.

    Bon, d’abord je n’essaie pas de traiter chacun des points de tous ces riches commentaires, ça ferait vraiment long et j’ai déjà pris beaucoup de place sous ce fil.

    Mais, puisque tu y prêtes une importance particulière, je te répondrai que je ne vois pas ici de souci avec la séparation des pouvoirs. M.Fillon est un candidat: il ne fait pas partie du pouvoir exécutif. Quand bien même il en ferait partie, la mise en examen ne constitue pas une révocation, ni une privation de liberté (sinon il faudrait d’abord lever son immunité parlementaire). L’idée de la démission exigée des ministres mis en examen est un concept purement politique, dans lequel la justice n’a pas son mot à dire.

    À l’inverse, une sorte de protection accordée à M.Fillon sous prétexte qu’il concourt à une élection serait une violation évidente de l’égalité des citoyens devant la loi.

    Je suis convaincu que Friedman, avait raison quand il disait “I do not believe that the solution to our problem is simply to elect the right people. The important thing is to establish a political climate of opinion which will make it politically profitable for the wrong people to do the right thing. Unless it is politically profitable for the wrong people to do the right thing, the right people will not do the right thing either, or if they try, they will shortly be out of office.”

    200% d’accord. Le cas qui nous occupe est un exemple parfait. Le climat de l’opinion (les mots mêmes de M.Friedman) est de punir politiquement ceux qui se comportent de façon douteuse avec l’argent public. C’est une excellente chose. Malheureusement, ce climat n’est pas encore suffisamment fort pour forcer M.Fillon à renoncer, car il a n’a pas trouvé politiquement profitable de faire, justement, the right thing. Ses partisans (y compris, à mon grand regret, toi-même) lui ont donné la permission de traiter avec légèreté (pour employer un terme indulgent) l’argent du contribuable, sans conséquences politiques. Ils le soutiennent, non pas parce qu’il est innocent, mais parce que les autres sont pires, ou parce qu’on « sait bien qu’il n’est pas un saint »: il est récompensé alors qu’il a fait the wrong thing, c’est très exactement l’inverse de ce que préconise Friedman.

    Pour ma part, je regrette qu’il ait lâché du lest sur son programme « libéral », mais je suis impressionné par sa résistance dans la tourmente et la façon dont il a tué le pustch des crapules de l’UMP.

    Je suis impressionné aussi… sauf que j’en tire la conclusion exactement inverse: un homme capable de violer ses engagements pour sauvegarder sa personne plutôt que ses idées, d’écarter toute critique en se posant en victime, et qui ne rassemble que par défaut (« pas de plan B ») n’est pas le président qu’il nous faut.

    Aristote a écrit :

    Maintenant si vous avez des arguments solides pour me persuader, qu’il s’agisse de programme ou de moralité, qu’un autre candidat est clairement préférable à Fillon, je vous écoute.

    Hélas, cela fait déjà plusieurs élections que mon choix se fait strictement par élimination, dès le premier tour. J’avais cru un moment pouvoir voter par adhésion, au moins partielle – pour M.Fillon. Celui-ci s’est disqualifìé à mes yeux et est donc rayé de la liste (sauf en cas de 2e tour face à Mme Le Pen). Je ne considère pas comme sérieux les différents petits candidats, car ils visent à promouvoir des idées, et non à gouverner – or le rôle de l’éclection est d’abord de choisir un dirigeant (les idées desdits candidats sont d’ailleurs incompatibles avec les miennes, ça simplifie la question). Je suis radicalement en désaccord avec la posture politique et avec la plupart des propositions de M.Mélenchon, particulièrement celles qui ressemblent tant à celles de Marine Le Pen. M.Hamon est un jeune homme d’apparence sincère, mais qui ne fait pas le poids politiquement, et ne pourrait pas gouverner. Il essaie vaillamment d’avancer des idées un brin nouvelles – que je ne suis pas prêt à suivre, dommage.

    Reste M.Macron, qui ne m’inspire pas d’enthousiasme. Pour le moment, je ne lui vois rien d’éliminatoire (ce qui me conduirait, alors, au vote blanc). Mais bon, très peu d’expérience politique (et bien peu probante), une campagne fondée sur sa personne, un approche très marketing-communication (une version XXIe siècle de la campagne VGE en 74), des propositions avec une grande part de banalités, une petite part d’idées intéressantes, et quelques gadgets discutables pour assaisonner le tout, et une attitude qui relève souvent de l’eau tiède pour ne fâcher personne. Les points positifs: une expérience, rare, dans le privé; des soutiens extraordinairement variés, y compris un certain nombre de gens pour qui j’ai du respect; enfin, contrairement à tous les présidents depuis quarante ans, il n’est pas redevable d’habitudes politiques bien françaises comme le cumul des mandats, le début de carrière dans les syndicats étudiants ou l’appartenance à une écurie présidentielle.

    Bref: il se peut que je vote pour M.Macron, parce qu’il n’y a rien de présentable ailleurs. S’il est élu, le risque, pointé par Lib plus haut, est qu’il ne parvienne pas à faire bouger les choses, et amène Mme Le Pen en position encore plus forte dans cinq ans. Cela dit, ce risque existe aussi, et à mon sens, il est bien plus grand encore, avec M.Fillon.

    Comparez avec ce qui arrive à Fillon ! Le mur des cons, c’est moins grave que Pénélope ???

    Comparaison bizarre. Le mur des cons, c’était une connerie. Pénélope Fillon est accusée d’un délit. Il y a une petite différence juridique… D’autre part, le mur des cons était une connerie collective – personne n’a eu le courage de mettre son nom dessus… François Fillon est accusé nommément, personnellement, et ne peut pas se défausser sur quelqu’un d’autre.

    L’impression générale laissée par les commentaires du genre « voyez la déclaration patrimoniale de Macron » ou « voyez le mur des cons » ou encore « voyez l’histoire du livre de Davet et Lhomme » est celle d’une noyade de poisson, en effet – ce type de diversion est inopérant. Ce qui ne veut pas dire que ces turpitudes n’en sont pas, bien au contraire. Mais elles ne peuvent servir ni d’excuse ni de paravent.

  • Gwynfrid a écrit :

    L’idée de la démission exigée des ministres mis en examen est un concept purement politique, dans lequel la justice n’a pas son mot à dire.

    Bien sûr, mais si ça devient une norme, cela donne de facto à la justice (en fait à quelques juges) le pouvoir de révoquer l’exécutif. C’est pour ça que je pense que c’est dangereux.

    Gwynfrid a écrit :

    la permission de traiter avec légèreté (pour employer un terme indulgent) l’argent du contribuable, sans conséquences politiques.

    Tu n’es pas indulgent. Tu supposes qu’il est coupable, c’est ton droit, mais ne l’ignore pas. Par ailleurs, je ne sais pas comment tu peux parler d’absence de conséquences politiques quand on voit comment la campagne de Fillon a été flinguée par ces affaires. Bref, nul besoin de surpondérer la mise en examen, les dégâts politiques sont déjà bien assez dévastateurs. Encore une fois, imagine qu’il soit innocenté par la justice dans 18 mois…

    Gwynfrid a écrit :

    Bref: il se peut que je vote pour M.Macron, parce qu’il n’y a rien de présentable ailleurs. S’il est élu, le risque, pointé par Lib plus haut, est qu’il ne parvienne pas à faire bouger les choses, et amène Mme Le Pen en position encore plus forte dans cinq ans. Cela dit, ce risque existe aussi, et à mon sens, il est bien plus grand encore, avec M.Fillon.

    Ce qui est amusant, c’est que je suis très proche de ça. Mon virage pro-Fillon récent vient sans doute de mon côté contrariant; je n’aime pas trop que des « autorités morales » (elles-mêmes peu respectables) me disent ce que je dois faire.

    Gwynfrid a écrit :

    Ce qui ne veut pas dire que ces turpitudes n’en sont pas, bien au contraire. Mais elles ne peuvent servir ni d’excuse ni de paravent.

    D’accord avec ça. Maintenant, si on compare, l’instrumentalisation politique de la police, de la justice et de la presse n’est pas plus prouvée que l’emploi fictif de Pénélope (il y a des indices troublants dans les deux cas), mais les conséquences si c’est vrai sont infiniment plus graves.

    Jean-Luc a écrit :

    Avez-vous réagi au livre précédent des mêmes auteurs, décrivant de pires pratiques « L’espion du Président : au cœur de la police politique de Sarkozy » ?

    Jamais entendu parler. Maintenant, il y a quelques différences entre les deux quinquennats :

    Sarkozy n’a pas fait passer une loi permettant la mise sur écoute massive de la population (loi renseignement). Hollande, si.

    Sarkozy n’a pas mis la France en état d’urgence permanent ce qui fait sauter une foultitude de limitation aux pouvoirs des juges et des policiers. Hollande, si.

    Le leader de l’opposition sous Sarkozy n’a pas été l’objet de multiples procédures judiciaires. Sous Hollande, si.

    Le principal parti d’opposition à Sarkozy n’a pas été contraint de rembourser des millions d’euros de dépenses de campagne. Sous Hollande, si.

    Le leader de l’opposition sous Sarkozy n’a pas été mis sur écoute. Sous Hollande, si.

    L’avocat du leader de l’opposition sous Sarkozy n’a pas été mis sur écoute. Sous Hollande, si.

    Le garde des sceaux de Sarkozy n’a pas brandi en public un document montrant qu’il était informé des affaires spécifiques concernant l’opposition. Celle de Hollande, si.

    Les affaires judiciaires concernant l’opposition de Sarkozy n’ont pas systématiquement fait l’objet de violation du secret de l’instruction. Avec Hollande, si.

    Et les journalistes qui publient ces secrets de l’instruction pour nuire à l’opposition de Hollande ont/avaient leur rond de serviette à l’Elysée sous Hollande.

    Les déboires judiciaires des membres de la famille de l’opposition de Sarkozy (Taubira, Touraine, Fabius, j’en oublie sans doute…) n’ont pas systématiquement fait l’objet d’un « traitement de faveur » médiatico-policier. Sous Hollande, si.

    Et bien sûr, pour finir, le candidat de l’opposition sous Sarkozy n’a pas eu à subir un barrage d’artillerie juridico-médiatique deux mois après sa nomination. Sous Hollande, si.

  • Lib a écrit :

    il y a quelques différences entre les deux quinquennats :

    Très juste. Vous avez fort bien résumé les différences, entre les deux quinquennats, du niveau de menace terroriste et des pratiques financières du parti d’opposition et de ses leaders.

  • Gwynfrid a écrit :

    Reste M.Macron, qui ne m’inspire pas d’enthousiasme. Pour le moment, je ne lui vois rien d’éliminatoire (ce qui me conduirait, alors, au vote blanc).

    Si vous jugez que les reproches faits à Fillon, et je partage votre déception, sont éliminatoires, alors considérez par exemple ceci :

    Macron, juste avant de démissionner du gouvernement, a demandé à son cabinet d’organiser en urgence un déplacement au salon High Tech de Las Vegas. Coût de l’opération : 500 000 €. C’est parfaitement légal, Macron était ministre, tout comme employer son épouse est parfaitement légal. Le caractère fictif de la justification « ministérielle » de ce déplacement d’un candidat en précampagne est tout aussi avéré que le caractère peu contraignant des activités de Madame Fillon. 500 000 € de l’argent du contribuable dépensé en une journée au bénéfice du candidat Macron, c’est légal, tout le monde le fait, est-ce moins condamnable que ce qui est reproché à Fillon ?

    Le rachat de SFR par Drahi était bloqué par Montebourg, qui reprochait à Drahi d’être un exilé fiscal ne payant pas d’impôts en France. Bonne ou mauvaise raison, peu de temps après avoir remplacé Montebourg, Macron autorise la transaction. Drahi est aussi le propriétaire de BFMTV, la chaîne d’info en continue la plus regardée en France et de l’Express. Ces deux médias font ouvertement campagne pour Macron. Un deal explicite ? Probablement pas. Macron n’avait aucune arrière pensée quand il autorise la transaction ? Je vous laisse juge.

    Je n’accable pas Macron, je ne suis pas puceau, je sais bien que c’est la politique telle qu’elle se fait. Mais de là à lâcher Fillon, dont j’approuve le programme, pour un produit marketing survendu par une hollandie qui espère trouver ainsi son salut, et ce en raison d’une moralité supposée supérieure du camp macroniste, non.

  • @ Gwynfrid:
    Pour poursuivre sur Macron, il y a des éléments intéressants dans sa campagne.

    Sa réforme des allocations chômage ou celle des retraites sont prometteuses. L’une et l’autre virent les syndicats (salariés et patronaux) de la gestion des caisses; c’est la meilleure nouvelle qu’on puisse espérer sur le front de la lutte contre la corruption et celui de l’émergence d’un syndicalisme responsable rendant des comptes à ses adhérents.

    Maintenant, on ne peut pas dire que ce soit central dans sa comm de campagne, et j’ai peur que ce genre de combat nécessite la légitimité sans faille que confère le fait d’avoir été élu spécifiquement dessus.

    Ce qui est triste dans cette tempête médiatico-judiciaire, c’est qu’elle étouffe également les autres campagnes. Je ne compte plus les potes macronistes dont le seul argument semble être Fillon=escroc.

    On verra. Tant que Hamon et Mélenchon ne s’allient pas, rien de vraiment catastrophique ne peut nous tomber dessus.

  • Lib a écrit :

    Bien sûr, mais si ça devient une norme, cela donne de facto à la justice (en fait à quelques juges) le pouvoir de révoquer l’exécutif. C’est pour ça que je pense que c’est dangereux.

    Du point de vue démocratique, c’est moins dangereux que le fonctionnement normal du système poilitique français, dans lequel on étouffe les affaires, ou bien on les amnistie, ou bien on les fait traîner, ou on explique que ce sont des pratiques vénielles, ou traditionnelles… Si un jour la France finit par s’aligner sur les normes de la plupart de ses voisins, alors il sera temps de modérer l’intervention des juges. D’autant plus qu’elle perdrait, alors, de son importance dans le déroulement des affaires, puisque les conséquences politiques précéderaient les conséquences judiciaires.

    Tu n’es pas indulgent. Tu supposes qu’il est coupable, c’est ton droit, mais ne l’ignore pas.

    C’est une bonne remarque. Je pense qu’il est coupable, au vu des réactions initiales de ses partisans (personne pour le défendre sur le fond) et la sienne propre (dénoncer une manipulation, sans vraie réponse sur les faits reprochés). Cependant, il n’est pas entièrement impossible que cela soit simplement le résultat d’une défense maladroite. Donc, on ne peut exclure qu’il soit innocent.

    Et s’il est innocent… alors je n’ai pas grand-chose à changer à mon opinion de lui. Il a traité l’argent du contribuable avec légèreté, au minimum. Les faits qu’il a reconnus suffisent à le faire voir : le salaire accordé à son épouse était hors de proportion avec la norme pour un assistant parlementaire, notamment pendant la période où elle était assistante de Marc Joulaud (6000 euros net, d’après les chiffres publiés par M.Fillon lui-même, alors que la moyenne est de 1500 selon le Figaro). De même, le salaire accordé à ses enfants était au niveau d’un cadre supérieur, alors qu’ils étaient tout au plus qualifiés pour être stagiaires. Ceci n’est peut-être pas illégal, ce sera à la justice de le déterminer. Mais ce n’est pas un emploi rigoureux de l’argent public, c’est le moins que je puisse en dire. Le comportement personnel du candidat est en contradiction avec le fondement de son programme: même innocent sur le plan légal, il est politiquement disqualifié. Il le sait, d’ailleurs ( » «ce qui était acceptable hier, à défaut d’être accepté, ne l’est plus aujourd’hui », selon ses propres mots).

    Mais, surtout, je te renvoie à ce que j’écrivais plus haut sur l’apparence de corruption, ou de conflit d’intérêt. Le comportement de M.Fillon n’a pas besoin d’être judiciairement condamnable pour avoir des résultats dangereux pour la démocratie. Et, là aussi, je m’appuie sur ses propres déclarations pour affirmer cela: voir la citation que j’ai faite de lui dans un des commentaires précédents (15 mars).

    Par ailleurs, je ne sais pas comment tu peux parler d’absence de conséquences politiques quand on voit comment la campagne de Fillon a été flinguée par ces affaires. Bref, nul besoin de surpondérer la mise en examen, les dégâts politiques sont déjà bien assez dévastateurs.

    Il est encore tout à fait possible qu’il soit élu, donc pour les conséquences politiques, cela reste à voir. Mais surtout, il n’a pas subi de conséquences politiques de la part de son parti: c’est cela qui compte, à ce stade de la campagne. Ceux des dirigeants LR qui ont voulu tirer de telles conséquences (et que tu as traités de « crapules » plus haut…) étaient, eux, en cohérence avec ta citation de Friedman. Mais ils ont été désavoués par les militants et ont dû renoncer à leut tentative.

    Ce qui est amusant, c’est que je suis très proche de ça. Mon virage pro-Fillon récent vient sans doute de mon côté contrariant; je n’aime pas trop que des « autorités morales » (elles-mêmes peu respectables) me disent ce que je dois faire.

    L’esprit de contradiction est bien français… mais ne conduit pas toujours à des décisions d’une grande cohérence 🙂

    Maintenant, si on compare, l’instrumentalisation politique de la police, de la justice et de la presse n’est pas plus prouvée que l’emploi fictif de Pénélope (il y a des indices troublants dans les deux cas), mais les conséquences si c’est vrai sont infiniment plus graves.

    La comparaison me semble difficile, les deux n’étant pas sur le même plan. Mais, avant de toute instrumentalisation, c’est François Fillon et lui seul qui a choisi d’employer sa famille dans des conditions qui ne peuvent que conduire aux résultats que nous voyons, dès lors qu’elles ne sont plus secrètes.

    @ Aristote: Il est normal que le ministre aille faire un peu de com’ pour soutenir l’industrie française à l’étranger (le CES a un retentissement mondial dans le domaine high tech, et ce aussi bien auprès du grand public que des professionnels; je le sais car ce salon est central dans mon métier). Qu’il se fasse mousser personnellement au passage est normal aussi. Après, s’il y a de l’argent gaspillé dans le voyage, il y a lieu de le lui reprocher et de se demander si les procédures ont été respectées. De là à aller chercher une équivalence avec l’affaire Fillon, il y a un pas.

    Autrement, à propos de M.Drahi et de BFMTV: si vous étiez électeur de M.Mélenchon, je comprendrais que vous vous indigniez à propos d’amis milliardaires qui contrôlent des chaînes de télé. Mais de la part d’un électeur de la droite traditionnelle, franchement, ça ne fait pas sérieux.

    @ Lib: il serait bon, en effet, à ce stade, de commencer à regarder un peu les programmes. J’avoue moi-même ne pas l’avoir fait en détail, alors que le premier tour est dans quelques semaines. C’est la première fois que je suis autant en retard, pour une élection de cette importance. Mea culpa, mais là aussi, je blâme François Fillon – se serait-il retiré qu’on aurait passé beaucoup plus de temps sur les propositions de son parti.

    Toujours est-il que je crois avoir fait le tour du sujet « affaire Fillon », et je préférerais passer à la question de l’élection elle-même et de ses implications pour l’avenir du pays. J’ai bien noté les points que tu relèves dans le programme de M.Macron, et j’espère en parler dans un commentaire ultérieur.

  • @ Gwynfrid:

    Je ne blanchis pas Fillon.

    Moraliser la vie politique est un travail de Sisyphe, toujours à reprendre.

    Mais je n’arrive pas à me persuader que Macron est une oie blanche dont la vertu justifierait que je le choisisse contre Fillon, qui certes m’a déçu sur ce plan.

  • Lib a écrit :

    Sa réforme des allocations chômage ou celle des retraites sont prometteuses.

    Oui, et de plus le passage à un régime unique à points est clairement la voie de l’avenir. C’est le système suédois, dont les avantages sont bien connus.

    Cependant, l’amélioration du système, et techniquement et en équité, que représenterait un système à points n’enlève rien à la nécessité d’allonger l’âge du départ en retraite.

    Politiquement, ce qui est important, c’est de dire à l’avance que cet effort sera demandé. Fillon l’annonce clairement, alors que quand Macron parle des retraites, il insiste sur la dimension institutionnelle et se fait très discret sur l’équilibre global.

    Où est le courage ?

  • Gwynfrid a écrit :

    mais là aussi, je blâme François Fillon

    Attention à ne pas charger Fillon de tous les péchés du monde. N’oublie pas, c’est Macron qui se prend pour le Christ 🙂

    Aristote a écrit :

    Cependant, l’amélioration du système, et techniquement et en équité, que représenterait un système à points n’enlève rien à la nécessité d’allonger l’âge du départ en retraite.

    Oui et non. Dans un système à points, on n’est pas obligé d’avoir UN âge de départ en retraite. Là où je te rejoins c’est que toute cette tambouille financière et actuarielle autour des retraites (aka le ponzi actuel) a complètement brouillé la perception des gens. Le retour à la réalité sera forcément difficile.

    Sinon, Davet pérorait à la TV hier sur le « cabinet noir » qui n’existe pas.

    Putain le mec publiait dans le Monde les secrets volés de l’instruction contre Sarko depuis son bureau de l’Elysée ! Et des journalistes l’ont suivi et révélé qu’il passait aussi beaucoup de temps au ministère de la justice, à la brigade financière etc…

    Pourquoi un juge n’est-il pas saisi pour enquêter? On pourrait reconstituer ses déplacement par la géoloc de son portable. On pourrait obtenir les fadettes des personnes les plus susceptibles de lui avoir filé les infos et voir s’ils l’appelaient. On pourrait…

    Ce serait une belle preuve de l’indépendance de la justice.

  • Lib a écrit :

    Dans un système à points, on n’est pas obligé d’avoir UN âge de départ en retraite.

    Bien sûr.

    J’aurais du préciser : « pour bénéficier d’un même niveau de retraite, il faudra choisir, individuellement certes mais choisir quand même, de partir plus tard. »

    Sur le cabinet noir.

    Il n’y a certainement pas à l’Élysée de bureau avec une plaque « Cabinet noir », ni d’organigramme avec mention d’un « chef du cabinet noir ».

    Donc d’accord, il n’y a pas de cabinet noir.

    Mais dans ma vie antérieure de consultant j’ai appris à soigneusement distinguer dans les organisations entre les « descriptions de poste » et les « rôles effectifs » des personnes concernées…

  • Aristote a écrit :

    Mais je n’arrive pas à me persuader que Macron est une oie blanche dont la vertu justifierait que je le choisisse contre Fillon, qui certes m’a déçu sur ce plan.

    Je suis loin de voir en M.Macron une oie blanche. Mais pour lui, le jugement est neutre, d’abord parce qu’il n’a pas vraiment été mis en cause, et aussi parce qu’il n’a pas prétendu être ce qu’il n’est pas.

    Sur les histoires de « cabinet noir »: je n’ai pas envie de discuter sur la base des éléments de langage de la campagne Fillon. Je ne suis pas naïf: il est certain que l’exploitation politique existe, et les fuites multiples montrent que M.Fillon n’a pas que des amis dans le système judiciaire et policier. Mais cela ne change rien aux faits tels qu’ils ont été reconnus par le candidat.

    Plus intéressante est la discussion sur certains points de programme:

    Cependant, l’amélioration du système, et techniquement et en équité, que représenterait un système à points n’enlève rien à la nécessité d’allonger l’âge du départ en retraite.

    Politiquement, ce qui est important, c’est de dire à l’avance que cet effort sera demandé. Fillon l’annonce clairement, alors que quand Macron parle des retraites, il insiste sur la dimension institutionnelle et se fait très discret sur l’équilibre global.

    Je suis d’accord sur le relèvement inéluctable de l’âge moyen de la retraite. Par contre, sur le plan de la méthode, je pense, au contraire de vous, qu’il est politiquement plus malin de commencer par assurer l’équité entre tous. C’est une condition pour que des ajustements généraux sur le niveau et l’âge des retraites puissent être acceptés par la majorité. À l’inverse, l’approche de M.Fillon se présente comme ultra-austère, et est facilement caricaturée comme une punition: cela la rendra difficile à faire passer.

    Par ailleurs, je voudrais souveler d’autres propositions qui m’ont semblé intéressantes dans le programme de M.Macron:

    — L’ouverture du bénéfice de l’assurance-chômage aux démissionnaires; cela permettrait de fluidifier le marché du travail et aiderait à la mobilité.

    — La modification l’assiette de l’ISF pour n’en garder que les éléments qui ne peuvent pas être transférés à l’étranger; plutôt que de punir l’exil fiscal, on en réduit ainsi les motivations.

    — Diverses idées sur la fonction publique, la gestion des ressources humaines en particulier. Ce n’est pas évident d’en juger sans être à l’intérieur, et le diable sera toujours dans les détails. Mais il semble qu’il y a là-dedans un potentiel de modernisation de bon sens.

  • Gwynfrid a écrit :

    je pense, au contraire de vous, qu’il est politiquement plus malin de commencer par assurer l’équité entre tous.

    Le problème c’est que commencer par assurer l’équité entre tous demande une certaine forme d’exhaustivité peu compatible par exemple avec l’annonce de ne pas toucher au régime des intermittents du spectacle. Difficile selon moi de frapper des privilégiés au nom de l’équité si on en épargne d’autres.

    Le résultat probable sera la continuité de ce qui existe aujourd’hui aka des privilèges liés au degré de sympathie ou de potentiel de nuisance politique des diverses corporations. Et comme on n’aura pas atteint l’équité, on ne passera pas à l’étape suivante.

    D’accord avec tes autres points positifs relatifs au programme Macron. Mon inquiétude est qu’ils sont trop peu mis en avant et trop dilués avec de la mélasse ou des points franchement négatifs pour me rendre optimiste.

    J’en arrive presque à considérer qu’une mise en examen n’est pas disqualifiante 🙂

  • Lib a écrit :

    Le problème c’est que commencer par assurer l’équité entre tous demande une certaine forme d’exhaustivité peu compatible par exemple avec l’annonce de ne pas toucher au régime des intermittents du spectacle. Difficile selon moi de frapper des privilégiés au nom de l’équité si on en épargne d’autres.

    Là, je crois que tu en demandes plus qu’il n’est raisonnable. Le système à points généralisé vise à l’équité en matière de retraites. Si en plus on demande que dans le même mouvement les inéquités en matière d’indemnisation du chômage soient éliminées, alors le sujet est tellement vaste qu’il ne peut plus rien se faire de concret.

    Sur un quinquennat, la remise à plat complète d’un des grands systèmes de protection sociale (retraites, assurance-chômage, santé) serait déjà un beau résultat, si on en juge par l’immobilisme et les réformettes des 20 dernières années et tous les blocages de notre société, qui ne sont pas uniquement du fait de nos politiciens. Si on peut faire les 3 à la fois, alors il y aurait lieu de crier au miracle…

    Le résultat probable sera la continuité de ce qui existe aujourd’hui aka des privilèges liés au degré de sympathie ou de potentiel de nuisance politique des diverses corporations. Et comme on n’aura pas atteint l’équité, on ne passera pas à l’étape suivante.

    Ceci est hélas le résultat le plus probable quel que soit le président élu. Nous sommes ici en train de juger les chances respectives des différents candidats de faire avancer les choses – au vu de leurs promesses, filtrées par leur capacité présumée à les mettre en oeuvre. L’élan politique, qui conditionne ce second aspect, est sans doute plus important que les promesses de réforme en elles-mêmes, tant la pesanteur du système est le principal obstacle.

    Sur ce plan, je juge la candidature de M.Fillon plombée, fatalement, par les affaires en cours. À supposer qu’il soit élu, à supposer qu’il essaie vraiment de tenir ses engagements, il n’aura pas le poids politique qu’exige le passage de réformes difficiles.

    En ce qui concerne M.Macron, il y a un énorme point d’interrogation. Il a beaucoup et de plus en plus de soutiens, très divers. Cela suffira-t-il à former une majorité présidentielle suffisante pour avancer? Très difficile à dire, il y a là une grosse incertitude. Il reste encore un mois pour en juger, mais cela restera sûrement un pari.

    D’accord avec tes autres points positifs relatifs au programme Macron. Mon inquiétude est qu’ils sont trop peu mis en avant et trop dilués avec de la mélasse ou des points franchement négatifs pour me rendre optimiste.

    Je suis encore loin d’avoir tout lu. Pour le moment j’ai vu des choses avec lesquelles je ne suis pas d’accord, et pas mal de trucs décoratifs (inévitables, puisqu’on demande au candidat de faire tout en tous domaines, mais ça c’est le résultat de nos mauvaises habitudes). Mais rien de vraiment rédhibitoire.

    J’en arrive presque à considérer qu’une mise en examen n’est pas disqualifiante

    Elle l’est selon François Fillon, m’a-t-on dit 🙂

  • Gwynfrid a écrit :

    Par contre, sur le plan de la méthode, je pense, au contraire de vous, qu’il est politiquement plus malin de commencer par assurer l’équité entre tous.

    C’est une position défendable. Cependant, la Suède a mis dix ans à faire la transition vers un régime à points unifié. L’équilibre du régime de retraite n’attendra pas dix ans.

    Sur les allocations chômage à ceux qui démissionnent, un peu de réalisme s’impose.

    Vous disposez de qualifications recherchées sur le marché du travail. Vous démissionnez et vous prenez trois mois de vacances, avec un risque infime de ne pas retrouver en revenant sur le marché, il ne vous sera pas très difficile d’inventer une histoire. J’ai même vu des vendeurs de fruits et légumes bien connus sur le marché où ils travaillaient, refuser les offres de reclassement qu’avait trouvées leur patron qui fermait boutique pour cause de retraite, toucher des indemnités pendant un an, puis réapparaître comme vendeurs. Personnes par ailleurs sympathiques et travailleurs efficaces, mais qui ont saisi l’occasion que leur offrait le système !

    Peu qualifié dans un secteur en déclin, vous ne prendrez jamais le risque de démissionner.

    L’ISF réduit à l’immobilier peut être vu soit comme un coup tactique intelligent pour limiter les effets pervers de cet impôt, soit comme encore une fois un manque de courage. C’est continuer à faire se réduire le parc locatif privé, est-ce une bonne idée ?

    Cela dit, loin de mois l’idée que toutes les propositions de Macron seraient mauvaises !

  • J’ai lu « Bienvenue Place Beauvau ».

    C’est un livre brouillon, mal écrit, dont l’objectif premier était sans doute de se faire trois sous en tirant à vue sur un Hollande devenu inoffensif. On n’y trouvera bien sûr aucune preuve de l’existence d’un cabinet noir.

    Ce livre narre cependant plusieurs épisodes qui donnent à réfléchir. Par exemple la rapidité, moins d’une heure disent les auteurs, avec laquelle le cabinet de Claude Bartolone a été averti de l’interpellation à l’automne 2016 du fils de Madame Pécresse, en possession de 4 grammes de cannabis. Le fils de Pécresse est majeur, n’habite pas chez sa mère, Claude Bartolone n’a aucun titre à disposer de cette information. À voir « l’efficacité » du système pour une affaire somme toute banale, on mesure à quel point la machine policière et judiciaire est sous contrôle du pouvoir.

    Pages 155 et suivantes, le livre raconte comment l’Élysée a instrumentalisé Davet et Lhomme pour mettre des bâtons dans les roues en la rendant publique prématurément, une enquête que le château ne souhaitait pas voir aboutir. C’est intéressant à double titre. D’abord il est rare de voir des journalistes confirmer ce secret de polichinelle que les journalistes enquêteurs n’enquêtent pas. Il n’y a pas de révélations fortuites ! Il est par ailleurs évident qu’il en est des « révélations » comme plus généralement des informations. Un journaliste peut être honnête au sens de ne jamais dire des choses fausses, mais le choix de ce qu’il met en avant lui suffit pour orienter fortement l’information à laquelle ses lecteurs ont accès.

    Plusieurs des exemples développés par les auteurs permettent aussi de comprendre l’intérêt de trouver le plus rapidement possible un prétexte, même assez bidon, d’ouvrir une enquête et mieux encore de mettre en examen. Cela ouvre toutes les possibilités d’écoutes, de perquisitions, etc., dont il est bien rare qu’elles ne ramènent pas sinon des éléments délictueux, du moins de quoi faire durer le feuilleton le temps voulu. Plus généralement, le rythme des instructions est manifestement encore largement sous le contrôle du pouvoir.

    Un autre élément intéressant est le suivant. D’après les auteurs, cela fait longtemps que les réseaux chiraquiens seraient proches des réseaux hollandais. Quand Hollande est devenu président, ayant peu de relais dans la police, il se serait appuyé sur les réseaux chiraquiens pour éliminer le plus rapidement possible les « sarkoboys », leurs ennemis communs. Si cela est vrai, cela éclairerait l’actualité la plus récente.

    Sur les « affaires » Fillon, il me paraît impossible de croire que le feuilleton soit spontané. Qui et où dans le système, je ne sais. Et à la lecture de ce livre, il n’est pas impossible d’imaginer que quelques « chiraquiens », plutôt que des « sarkozystes », aient prêté quelque assistance aux « hollandais ».

  • Bonjour,

    toute mon évaluation de la situation se base sur ma forte opinion que le passage à une sociale démocratie moderne et aussi libérale que possible est le sujet le plus important du débat politique actuel.

    Je ne sais pas si François Fillon a fait quoi que ce soit de techniquement illégal, ni si la sortie des affaires était téléguidée par le gouvernement actuel. Néanmoins, il s’est pour moi disqualifié en ne comprenant pas que sa candidature serait terriblement plombée par cette affaire, à la fois à cause de notre milieu médiatique, et aussi je crois du dégoût de la majorité des français à voir un notable détourner les deniers publics pour des montants considérables pour eux.

    Donc je ne voterais probablement par pour François Fillon malgré mes convictions « de droite » pour plusieurs raisons.

    Ma première priorité est d’éviter que trois candidats dangereux ne gagnent, et pour cela, Emmanuel Macron offre les meilleurs garanties aujourd’hui.

    Une victoire d’Emmanuel Macron offre également l’opportunité de recomposition politique la plus intéressante depuis 1958 en « tuant » un PS qui n’a jamais su choisir entre gauchisme et sociale démocratie.

    De plus, si François Fillon, qui a un programme très sérieux, arrivait au pouvoir, je doute fort qu’il soit suffisamment habile pour faire accepter son programme par l’opinion, les medias et les partenaires sociaux vu le manque de clairvoyance qu’il a eut selon moi pendant ces affaires. D’autant qu’il y a un précédent sur le chaos créé à l’UMP il y a quelques années.

    Pour conclure, si Emmanuel Macron est élu, si la recomposition politique se conclut avec un nouveau mouvement ouvertement social démocrate (dit autrement « centriste »), je pense que François Hollande, dont personne ne peut douter qu’il a en partie organisé tout cela, restera peut-être dans l’histoire comme l’homme politique le plus important en France depuis le Général de Gaulle et Georges Pompidou.

  • Gwynfrid a écrit :

    Elle l’est selon François Fillon, m’a-t-on dit

    Enfin Gwynfrid, à nos âges on sait ce qu’il faut penser de la parole des politiciens 🙂

  • Avec une durée d’assurance à 43 ans, l’âge effectif de départ en retraite va de toute façon s’élever. Il est déjà en train de le faire. Et les projections ont cessé d’être alarmantes, même s’il faudra sans doute encore ajuster. Un système à points est plus lisible et plus égalitaire : c’est une bonne réforme, même si effectivement il est déjà tard. Mais on a largement le temps.

    L’élévation de l’âge minimal de la retraite est un gadget pour faire rigoureux, mais ça n’a rien d’urgent.

  • Aristote a écrit :

    C’est une position défendable. Cependant, la Suède a mis dix ans à faire la transition vers un régime à points unifié. L’équilibre du régime de retraite n’attendra pas dix ans

    Bah. Il attend déjà depuis plus de trente ans. Je ne vois pas de menace d’effrondrement subit parce qu’un seuil ou un autre serait franchi. On est plutôt face à une érosion graduelle sous l’effet du changement démographique. Cette érosion a commencé il y a longtemps et a été combattue par plusieurs réformettes successives. Repousser l’âge effectif de départ (un paramètre plus pertinent que l’âge théorique de la retraite) restera possible à tout moment, et il vaut mieux que cela se fasse par le truchement de choix individuels, mieux acceptés qu’un couperet.

    Sur les allocations chômage à ceux qui démissionnent, un peu de réalisme s’impose.

    Vous citez deux extrêmes, l’un où il est si facile de retrouver de l’emploi qu’il devient possible de profiter du système pour s’offrir des vacances; l’autre où c’est entièrement impossible. On peut raisonnablement penser qu’une grande partie des cas se trouve dans une situation intermédiaire; d’ailleurs, dans le cas où retrouver un emploi est impossible, la proposition de M.Macron est à coût zéro. Et, oui, il y aura toujours des tentatives d’abus… je pense que c’est un risque limité, acceptable en échange d’un déverrouillage du système.

    L’ISF réduit à l’immobilier peut être vu soit comme un coup tactique intelligent pour limiter les effets pervers de cet impôt, soit comme encore une fois un manque de courage. C’est continuer à faire se réduire le parc locatif privé, est-ce une bonne idée ?

    J’ai bien conscience que du point de vue de la droite classique, rien d’autre que l’abolition complète ne sera jamais acceptable. Mais elle reste, à ce jour, inacceptable pour la société française – à plus forte raison si cette mesure était portée par un président compromis sur les questions d’argent.

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