Acte IV

Acte 4, puisqu’il paraît acquis que nos prochains week-ends seront de nouveau scandés par les « mobilisation à venir », les cortèges et les décomptes. Acte 4, et peu importe que l’on soit, comme moi, vacciné volontaire et convaincu que le passe sanitaire soit un mal nécessaire, on ne peut se contenter de fustiger les pancartes abjectes, l’irrationalité péremptoire des antivax parmi les manifestants et l’irresponsabilité misérable de ceux qui, depuis longtemps en mal d’avenir politique, accourent à leur tête… même si c’est vrai, et même si cela soulage.

Or, après quatre mobilisations estivales, le mouvement emprunte suffisamment aux Gilets Jaunes pour y entrevoir la poursuite des actes antérieurs et cet acte 28, souligne une faiblesse structurelle de ce quinquennat. Car on ne peut oublier les promesses de 2017. Promesses électorales, mais promesses qui disaient assez d’un diagnostic auquel Emmanuel Macron s’est abstenu d’apporter la réponse qu’il annonçait. Car lui (aussi) devait changer la façon de faire la politique. En Marche devait partir de la société civile et porter les aspirations soufflées par le peuple, ou la base. Dans la méthode et sur le fond, il n’en a rien été. Les réformes adoptées n’ont guère brillé par leur originalité et l’exercice du pouvoir s’est inscrit dans le plus pur style académique de la Vème République. Les parlementaires ont été ringardisés, les corps intermédiaires ignorés. Quant aux consultations scénarisées, elles sont restées très classiquement de façade, l’ensemble culminant dans la confiscation du résultat du « grand débat national » et l’escamotage définitif des cahiers de doléance, paroxysme de mystification participative.

Et il semble bien que, tout à sa réélection et sa verticalité, Emmanuel Macron ait fait le choix tactique de s’installer dans la confrontation. « La rue ou moi », c’est un classique qui marche mais dont les présidents sous-estiment les revers à long-terme, dont la radicalisation et le divorce démocratique, pour ne pas dire la sécession. Sans confondre le bruit et le nombre, il faut ajouter cette fois, à ce risque ordinaire, le risque sanitaire si l’opposition se cristallisait. Nous aurons besoin d’adhésion plus que de confrontation, de pédagogie présidentielle plus que de démonstrations d’autorité. Le virus a déjà joué les rappels par deux fois, revenant quand on le croyait évanoui : il est là pour durer, il est donc encore temps de s’y mettre.

Chronique du 17 août 2021 – Photo by Daniel Schludi on Unsplash