Nous, fidèles, si nous le sommes…

Douloureuse ironie : en cette année sacerdotale et en plein carême, les prêtres, nos prêtres, pourraient dire qu’ils vivent une vraie montée au calvaire. Eux qui se sont engagés dans cette mission par amour du Christ et des hommes se voient collectivement suspectés du crime le plus ignoble qui se puisse concevoir : abuser de l’innocence, souiller l’enfance, ruiner des vies entières, tromper ses frères.

Le père de trois enfants que je suis n’oublie certainement pas que cette mise au pilori répond au martyr silencieux des enfants. Il voit ces scènes que l’on rapporte. Il imagine ses fils, il pense à sa fille.

Mais il voit aussi passer devant ses yeux les visages de tant de prêtres. Et parmi eux, des amis précieux. Arnaud, Laurent, Sylvain, Hugues, Armel, Pascal, Antoine, David, Yves, Emmanuel, Antoine, Jacques…

Combien sont-ils à parler si abondamment d’eux, sans seulement les connaître ?

Moi, je vois leurs visages, visages souriants, visages priants, visages de frères, visages de pères. Les visages d’hommes qui se sont mis au service entier de leurs frères et sœurs, des hommes qui ont fait le don intégral de leur vie. Ces hommes devraient porter le poids d’un insupportable soupçon, collectivement et individuellement ?

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Nous, fidèles, si nous le sommes…

Je le concède, le procédé est un peu déloyal mais, franchement, vous pensez que j’ai le temps d’écrire trois billets ?

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16 commentaires

  • « Le célibat questionne. Il dérange, probablement. On le remet en cause parce qu’il renvoie à notre propre rapport à la sexualité, parce qu’il semble, à tort, incarner un jugement moral latent… »

    Pour ma part, le célibat imposé me questionne mais ce n’est pas parce qu’il renvoie à ma propre sexualité.

    Simplement parce que je ne comprends pas les fondements théologiques de cette règle à géométrie variable (applicable aux prêtres Latin mais pas aux Maronites).

    Evidemment je respecte profondément les prêtres qui acceptent ce mode de vie (qu’ils croient ou non en sa justification) et qui par conséquent sont entièrement dévoués à leur communauté.

  • Le mystère de l’Eucharistie est également difficile à comprendre, la Trinité également. Faut-il abandonner tout cela pour autant ?

  • Parfois j’ai aussi du mal à comprendre cette différence de traitement et pourtant je comprends ce célibat, non pas imposé, mais appelé, puisque la prêtise est un appel.

    Je pense qu’on ne peut pas servir deux maîtres et qu’on ne peut pas s’engager envers une femme et envers l’Eglise. Quand je vois le rythme de vie de quelques amis prêtres, ou celui d’un oncle prêtre, pourtant « curé de campagne », je ne vois pas comment il pourrait accomplir correctement non pas son travail mais son devoir, s’il était marié.

    De plus, un argument souvent entendu est que le mariage soutiendrait moralement le prêtre au quotidien. Mais tous les mariages ne sont pas heureux, et peut-être la femme aurait aussi besoin de soutien. Or le prêtre marié, en rentrant chez lui aura peut-être envie de souffler? Je crois beaucoup plus aux presbytères partagés par plusieurs prêtres, avec plus ou moins d’expérience, où ils pourront partager ce qu’ils vivent en tant que prêtre.

  • Je pense comme vous à nombre de prêtres qui n’ont plus déjà la reconnaissance qui leur serait due: de donner toute leur vie pour nous guider; qui invite et est honoré d’inviter son curé ? Sait-on que certains prêtres n’ont pas de quoi se nourrir ? Alors maintenant s’ils ne peuvent plus sourire à un enfant, s’ils ne peuvent partir en pelerinage sans qu’on les regarde avec suspicion quelle épreuve !
    Certes les brebis galeuses font un mal inouï. Longtemps les accusations de pédophilie souvent exprimées par des laîcards m’ont semblé méprisables et elles s’avèrent exactes. J’approuve totalement la sanction religieuse et civile qu’a décidé l’Eglise
    en ne cherchant plus à cacher ce qu’elle savait honteux mais qui pour beaucoup semblait « réparable » entre soi !!!
    Mais je demande maintenant que l’Education Nationale fasse preuve de la même diligence, que ses victimes soient aussi encouragées par des associations, des personnalités etc…. dans leur plaintes et demandent de réparations, que les clubs sportifs, en particulier ceux qui forment de futurs champions et championnes ( de tennis par exemple) qui sont en quelque sorte soumis à leurs entraineurs avec obligations de résultats et chantages parfois, soient inspectés avec autant de zèle !!! Ce qui est loin d’être le cas ! Que les medias rapportent ces scandales avec autant d’insistance ….
    La pédophilie est une déviance, un jeune (ou vieux) célibataire sain risque d’être tenté par une relation avec un adulte mais pas avec un enfant.
    Priver ces hommes (les prêtres) ou ces femmes (les religieuses) d’une famille, d’enfants , par le célibat dans ce monde où la famille est souvent le seul refuge sûr , est sans doute TRES exigeant (voire trop) . Le regret de ne pas avoir d’enfant peut entrainer le désir de s’en occuper et de les rencontrer mais pas d’en abuser !
    L’Eglise fait (enfin) ce qu’il faut que TOUS en fassent autant et que l’immense majorité de nos prêtres soient remerciés d’être là ! Espérons qu’en cette période douloureuse ils LE ressentent près d’eux ! N…

  • « Le mystère de l’Eucharistie est également difficile à comprendre, la Trinité également. Faut-il abandonner tout cela pour autant ? »

    A ma connaissance, les Maronites et les Latins, tous les chrétiens qui reconnaissent l’autorité du Pape, partagent la même croyance dans ces 2 mystères. C’est la raison pour laquelle je ne les mets pas sur un même plan que la règle du célibat imposée aux seuls prêtres de rite latin.

  • Je ne sais pas si les chrétiens d’orient reconnaissent l’autorité du Pape. Or il me semble que le célibat des prêtres « remontent » à celui des apôtres à qui Jésus avait demandé de tout quitter. Le lien? Saint Pierre, premier Pape. De mémoire, les chrétiens d’orient ne reconnaissent pas l’autorité de rome depuis le schisme orient/occident (au 5ème siècle si je ne m’abuse, mais pour quelles raisons??)
    Conclusion, les directives du Saint Pierre auraient perdurées uniquement en Occident, dans l’église catholique.

  • Les maronites respectent tout à fait l’autorité du pape – je le sais parce que le prêtre de ma paroisse est un frère maronite. Je ne suis pas assez expert en histoire de l’Église pour vous expliquer pourquoi les règles sont différentes chez les maronites, mais Google est votre ami…

  • Le fait même que ces règles soient différentes d’une communauté à l’autre démontre qu’elles sont relatives , qu’elles n’ont pas le caractère de vérités absolues, intemporelles et définitives.

  • Dans les églises catholiques de rites orientaux (maronites, greco-catholiques, syriaques), on peut ordonner des hommes déjà mariés.

    Une fois ordonné, un prêtre ne peut par contre pas se marier (s’il est célibataire) ou se remarier (si son épouse décède). Et un prêtre marié ne peut être ordonné évêque.

    (Ce qui est d’ailleurs la situation des diacres dans l’Église catholique de rite latin).

    Lors d’un voyage en Roumanie, j’avais pu en discuter avec un prêtre et un séminariste roumain.

    Selon eux, cette situation pose un certain nombre de problèmes.

    Tout d’abord, les séminaristes qui souhaitent se marier ont un temps limité pour le faire, ce qui conduit parfois à précipiter les choses, et peut tourner à l’obsession pour le séminariste qui a dans l’optique de concilier vie de famille et prêtrise.

    Ensuite, certains séminaristes choisissent de ne pas se marier pour pouvoir éventuellement devenir évêque, ce qui n’est pas très sain.

    Dernière chose : un prêtre marié doit trouver un équilibre entre vie familial et ministère sacerdotal, et peut avoir la tentation de faire profiter sa famille de son statut de notable (il faut garder à l’esprit que dans les campagnes roumaines, après l’effondrement du communisme, le prêtre a retrouvé un statut social important, qu’il a largement perdu en France par exemple).

    Bref, prêtre et séminariste étaient tous deux plutôt favorables au célibat imposé, qui avait l’avantage d’être une règle claire : le prêtre se consacre entièrement à son ministère sacerdotal.

    Pour autant, bien qu’à mon sens justifié, le célibat des prêtres n’est clairement pas un point central de la foi chrétienne (ne serait-ce que parce qu’il dépend des rites).

  • Je viens de lire la très belle lettre de Benoit XVI adressée à l’Eglise d’Irlande. Il présente ses excuses, tance sévèrement les prêtres coupables et les évêques qui ont laissé faire, il demande que les responsables collaborent avec la justice civile, exprime son désir de rencontrer personnellement les victimes…et pourtant (on aurait pu s’en douter), ce n’est pas encore assez,les victimes -ou du moins les personnes qui assurent les représenter mais on ne peut douter qu’elles expriment un sentiment général- disent leur déception: elles attendaient une demande de pardon plus manifeste, que l’Eglise reconnaisse sa responsabilité. Il ne m’appartient pas de leur contester ce droit, je n’ai rencontré que des prêtres exemplaires dans ma vie. Merci à Benoit XVI!

  • Petite précision ici : Benoît XVI n’a à s’excuser de rien, bien au contraire. Il fait part, au nom de l’Eglise, de sa « honte », de ses « remords », et exprime sa profonde désolation envers les victime (6).
    La gravité la situation pour l’Eglise est abordée avec des mots forts :
    « Il faut agir avec urgence pour affronter ces facteurs, qui ont eu des conséquences si tragiques pour les vies des victimes et de leurs familles et qui ont assombri la lumière de l’Evangile à un degré que pas même des siècles de persécution ne sont parvenus à atteindre. » (4)
    Le texte complet :
    http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/letters/2010/documents/hf_ben-xvi_let_20100319_church-ireland_fr.html

  • Bonjour Koz,

    il y avait ce matin un débat sur le sujet sur Radio Notre-Dame avec Jean-François Colosimo qui expliquait que, selon lui, le célibat en tant que tel n’était pas à mettre en cause, mais qu’en revanche, le parcours affectif d’hommes célibataires devenus prêtres pouvait poser problème. Il soulignait notamment qu’en l’absence de maturation spirituelle, ils pouvaient être restés à un stade affectif proche de l’enfance qui ne leur permettait pas d’avoir un rôle social ou d’éducateur sans poser de sérieux problèmes. Bref, sans arriver à des équations aussi réductrices que fausse (célibat=pédophilie), il disait qu’il ne faut pas pour autant évacuer l’occasion de se remettre en question, ce que fait, toujours selon Colosimo, le cardinal Shönborn. J’espère ne pas déformer trop ses propos (entendu ce matin).

  • Il n’y a pas besoin d’une grande maturation spirituelle pour savoir qu’abuser d’un enfant/mineur est une infâmité contraire à en crever les yeux à tout ce qu’annonce l’Evangile.
    Le problème ici, au-delà de la libido, est que visiblement certains religieux ou prêtres continuent leurs activités pastorales tout en ne croyant plus : c’est donc bien la période de discernement initiale qui est le pivot du problème, ou comment ne pas faire entrer les pasteurs galeux.
    Enfin, au-delà de l’effet de loupe médiatique (aussi bien dans l’espace que dans le temps : des vieilles affaires de 30 40 ans refont curieusement surface) n’oublions pas que cela ne concerne qu’une infime proportion de prêtres et religieux en exercice. Dans une interview donnée à la BBC, l’archevêque de Westminster Nichols indique que sur les 40 dernières années, moins de 0,4% de prêtres en Angleterre et Pays de Galles ont été accusés de pédophilie, et bien moins encore condamnés. (http://news.bbc.co.uk/2/hi/uk_news/8588394.stm)
    Si 80% des prêtres étaient derrière les barreaux, je comprendrait qu’il faille sérieusement réformer voire abroger l’Eglise catholique. En l’occurrence, s’il faut donc revoir certainement quelques points, rien ne justifie une révolution.

  • @ Nicolas: ça, tu vois, à la rigueur, je suis tout à fait prêt à l’entendre. Je n’accepte pas l’explication « structurelle » (structure de l’Eglise, « structure » du prêtre) et le déterminisme qu’elle suscite. En revanche, qu’il y ait des efforts à faire dans la formation des prêtres, se montrer spécialement vigilant sur leur recrutement, leur maturité, éventuellement les « recruter » moins jeunes ou encore mieux les suivre pendant leur vie pour accompagner leur « maturation spirituelle ». Pourquoi pas, à la rigueur. Il faut effectivement être responsable et ne pas se mettre des œillères. Le risque est trop grand.

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