Être ou ne pas être

berne
Hier matin, quelques deux heures avant que mon pays ne soit frappé, sur le chemin d’une église, je suis passé devant la Une de Charlie Hebdo. Elle était composée d’une représentation de Marie, jambes écartées, et proclamait « la véritable naissance de Jésus ». J’ai pensé que je devais porter mon regard sur plus important, qu’en s’abaissant de la sorte, ce n’est pas moi qu’ils diminuaient.

Ce matin, il a fallu trouver les mots pour expliquer aux enfants, avant que la cour de récré ne s’en charge. Expliquer, à peu près en ces mots, que des hommes fanatisés essaient d’imposer leur façon de voir par la terreur, et que la seule réponse au terrorisme est de refuser de seulement ressentir cette terreur, expliquer aussi la liberté d’être primaire, bref la liberté d’opinion.

Entre-temps, il y a eu l’effroi absolu, il y a eu ces images de l’assassinat de ce policier, Ahmed Merabet (dont l’islam semble au passage avoir été compatible avec le sang versé pour sa mission au service de la France) que j’ai vues avant que l’on sache ce qu’elles montraient. Et cette image de son assassinat, dont je sais qu’elle ne me quittera pas. Il y eut la douleur pour toutes les victimes. Il y eut la sidération, face aux conséquences de cette attaque terroriste pour le pays, qui ne sera plus comme avant ce jour du 7 janvier 2015. Que va devenir la France ? Que va-t-elle être, ou ne pas être ? Sera-t-elle, ou ne sera-t-elle pas ?

Être ou ne pas être Charlie. Au risque conscient et assumé d’être mal compris, ou compris et conspué, j’ai essayé d’être Charlie et je n’y parviens pas totalement. Si être Charlie, c’est valoriser l’insulte aux convictions profondes de l’autre comme modalité du « vivre-ensemble », j’ai bien du mal à être Charlie. « Il ne suffit pas de refuser l’erreur pour penser juste » écrivait Mgr Jean Honoré, qui poursuivait ainsi : « la vérité est autre chose que la négation d’une négation »[1]. Et la vérité m’intéresse aujourd’hui encore plus que la liberté de dire des conneries. Aux Etats-Unis, dont on connaît l’attachement viscéral à la liberté d’expression, peut-être plus fort encore qu’en France, les journaux n’ont pas publié les caricatures contrairement à ce que tout le monde semble réclamer sur les réseaux en France – signe que l’on peut être partisan de la libre expression comme de son bon exercice. Les attaques terroristes révèlent parfois le meilleur des Hommes, mais nous sommes aussi habitués à ce qu’elles ne suscitent pas toujours les bonnes réactions. C’est généralement sur le plan sécuritaire, en l’occurrence il serait préférable que ces attaques ne se traduisent pas par une sacralisation de l’agression, même par le dessin.

J’ai écouté Philippe Val, bouleversant. Pour autant, si ce qu’ils voulaient, c’était juste que l’on puisse vivre heureux, comme il le dit, le chemin qu’ils ont choisi en pratiquant trop souvent l’injure, au-delà de la seule dérision, m’interpelle. Je suis conscient toutefois qu’au-delà du seul Charlie Hebdo, les hommes qui ont mené l’attaque d’hier veulent abattre ce que nous sommes, et la liberté d’expression avec, même lorsque l’on réprouve la façon de l’exercer. Si c’est cela, être Charlie, je peux être Charlie.

Toute réserve cède en tout état de cause devant l’ignominie de l’assassinat abject de simples dessinateurs. Et je n’ai aucun doute sur un point : je suis le frère de Wolinski, de Charb, de Tignous, de Cabu, de Philippe Honoré, des hommes que leurs amis décrivent comme pétillants, chaleureux et facétieux et qui pouvaient, aussi, se montrer respectueux. Et je suis le frère des autres victimes des terroristes. J’imagine que j’étais les leurs, ils étaient à tout le moins les miens. Je suis le frère d’Ahmed Merabet, et celui de Frank Brinsolaro, policiers tués dans l’exercice de leurs fonctions. Le frère de cet homme de la maintenance, qui n’est pas identifié. Je suis frère de leurs familles. Je suis le frère des dessinateurs de Charlie. Frère en humanité, frère dans la douleur et dans le deuil de ce jour, frère parce que Français, aussi, et porteur d’une part de ce que les terroristes ont voulu abattre. Dans quelques instants, à midi, les cathédrales de France sonneront le glas pour les victimes de cette attaque et je m’associerai à la minute de silence de la République comme à la prière pour tous. 

Être ou ne pas être la France. Ce que je craignais face aux événements de décembre est en train de se produire. A Montrouge, une autre attaque s’est produite. Mais au Mans, c’est une mosquée qui a été visée. Des coups de feu ont été tirés vers une salle de prière dans l’Aude. Dans le Vaucluse, la voiture d’une famille musulmane a été visée par des tirs. Certains se réjouiront, des matamores fanfaronneront. Personne ne peut regarder l’enchaînement de la violence sans en être profondément préoccupé.

Le terrorisme vise à instiller la peur, c’est étymologique. Il vise à importer le chaos chez l’ennemi que l’on s’est donné, et que l’on ne peut attaquer autrement. Y céder est une première victoire des terroristes. La victoire de la France est de continuer à vivre sans égard pour la barbarie, continuer à prendre les transports en commun, à se rendre à son travail. Continuer d’être.

Plus encore peut-être que d’autres actions terroristes, celle-ci vise directement et globalement la France, sa culture et ses valeurs. C’est la démocratie, c’est la liberté, c’est le respect de l’autre. Les abandonner ou les entacher serait, là également, rendre les armes, aussi faibles soient-elles.

Mais continuer d’être, et d’être la France, suppose aussi de savoir ce que nous sommes. Parce que nos valeurs se veulent universelles, certains en viennent à contester que l’on puisse les revendiquer comme Français. C’est voir une contradiction là où il n’y en a pas. Je ne suis guère optimiste sur la possibilité qu’il advienne, mais un travail profond devrait être mené pour retrouver le sens de la France, qui ne peut pas persister dans les dérives individualistes, dans un vivre-ensemble ersatz de société, une tolérance qui n’est qu’indifférence, et la dérision comme absolu. Cela doit aussi passer par l’arrêt des querelles ridicules comme nous venons à peine d’en connaître. 

Être ou ne pas être chrétien. Pour ceux qui se reconnaissent dans la foi chrétienne, c’est aussi le moment de se montrer fermes dans leur foi. Fermes pour s’opposer aux conceptions de certains musulmans qui contredisent nos convictions, comme l’égalité hommes-femmes[2]. Fermes dans la recherche d’une réponse juste, fermes dans la demande de l’explicitation et de la proclamation du rejet de la violence par les musulmans, comme beaucoup, déjà, l’ont fait. Fermes dans le refus de cet engrenage de la violence.. Ce n’est pas en cessant d’être chrétiens que l’on défendra le christianisme. Le chrétien ne distingue pas les purs et les autres : il sait que le péché originel, plus qu’un événement, signifie que la tentation du mal guette tout Homme, et que la barbarie est tapie quelque part chez tous. En cela, il sait qu’il est aussi le frère des bourreaux d’hier, quelle que soit l’horreur qu’ils nous inspirent.

Si le chrétien tend l’autre joue, ce n’est pas pour sourire au martyr, ou pour en redemander. C’est précisément pour ouvrir une autre voie, aussi ardue soit-elle, que la violence en retour. Il a fallu que cet attentat intervienne le jour où quatre imams de France étaient en visite au Vatican, au nom du dialogue entre les religions, contre l’affrontement, et le lendemain de cette intervention du Cardinal Tauran dans La Croix, qui se concluait par cette phrase d’Edmond Rostand : « C’est la nuit qu’il est beau de croire à la lumière« .

Comme croyant, je veux aussi m’accrocher à ces mots d’Etty Hillesum comme à un viatique pour les temps difficiles qui s’annoncent. Je les ai beaucoup cités ces derniers jours, mais ils supportent la répétition. Signe de communion, ce sont les mots d’une jeune femme juive très proche du christianisme. Nous ne pouvons qu’être fidèle à ces mots, écrits dans une douleur incomparable à celle que nous pouvons ressentir aujourd’hui, et auxquels Etty Hillesum a su, elle, être fidèle :

Prière du dimanche matin. Ce sont des temps d’effroi, mon Dieu. Cette nuit pour la première fois, je suis restée éveillée dans le noir, les yeux brûlants, des images de souffrance humaine défilant sans arrêt devant moi. (…) Je vais t’aider, mon Dieu, à ne pas t’éteindre en moi, mais je ne puis rien garantir d’avance. Une chose cependant m’apparaît de plus en plus claire : ce n’est pas toi qui peux nous aider, mais nous qui pouvons t’aider – et ce faisant nous nous aidons nous-mêmes. C’est tout ce qu’il nous est possible de sauver en cette époque et c’est aussi la seule chose qui compte : un peu de toi en nous, mon Dieu.[3]

Il n’est pas innocent que cette attaque se soit produite en France, à Paris. Contre la liberté d’expression. Contre nos valeurs aussi. Contre la France, qui est aussi l’un des berceaux du christianisme, lui-même berceau de nombre de ses valeurs. Le monde entier nous regarde, nous devons faire honneur à la France, et être pleinement Français.

Addendum – Je suis Français : dimanche, je marche

  1. La pensée de John Henry Newman, éd. Ad Solem []
  2. que cela en surprenne certains ou pas []
  3. pour ceux qui veulent lire le passage en entier : voici la page 1, et la page 2 []

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165 commentaires

  • Excellent, vraiment excellent; rempli de sens chrétien, en particulier dans les quelques mots très justes et très nécessaires sur le péché originel. Merci!

  • Merci Koz pour avoir exprimé avec justesse et délicatesse ce que je ressentais dès hier profondément en lisant les nombreuses réactions après cette atrocité : « Être ou ne pas être Charlie. Au risque conscient et assumé d’être mal compris, ou compris et conspué, j’ai essayé d’être Charlie et je n’y parviens pas totalement. Si être Charlie, c’est valoriser l’insulte aux convictions profondes de l’autre comme modalité du « vivre-ensemble », j’ai bien du mal à être Charlie. « Il ne suffit pas de refuser l’erreur pour penser juste » écrivait Mgr Jean Honoré, qui poursuivait ainsi : « la vérité est autre chose que la négation d’une négation ». Et la vérité m’intéresse aujourd’hui encore plus que la liberté de dire des conneries. »
    Merci à vous et à Mgr Honoré.

  • Merci Koz pour ces mots, nécessaires au regard de la vérité, même s’ils sont difficiles à poser dans de telles circonstances.

    Merci pour ces mots aussi car ils disent ce que nous refusons profondément, tuer l’homme, et tuer Dieu en l’homme. Nous savons que l’humanité est blessée, de mille façons. Mais nous ne pouvons nous y résoudre, même face à la violence pure qui se sert de Dieu, s’arrogeant avec orgueil le droit de faire ce que Dieu se refuse à faire.

    L’image de ce policier, Ahmed, abattu comme un chien et celles de cette attaque sont mille fois terrible, sans rapport possible avec les caricatures de Charlie Hebdo, quand bien même certaines ont pu blesser et heurter, ce qui a pu être mon cas.

    Et face au tragique, à l’absurde, une prière silencieuse monte.

  • Globalement d’accord, en particulier sur les deux aspects à tenir ensemble : respect de la liberté de parole et désapprobation de son exercice irrespectueux (le mot est faible…). Par contre, je trouve un point plutôt maladroit, et pour tout dire hors sujet :

    « Pour ceux qui se reconnaissent dans la foi chrétienne, c’est aussi le moment de se montrer fermes dans leur foi. Fermes pour s’opposer aux conceptions qui la contredisent, à l’instar de l’égalité hommes-femmes »

    Je présume que vous ne visez pas l’égalité des droits, mais une égalité qui nierait les différences anthropologiques… quand même, c’est un peu trop vite dit, surtout lié de cette façon à la Foi chrétienne, comme si cette affirmation en découlait naturellement et logiquement…

    Ceci dit, merci pour vos articles réguliers, intelligents et pondérés : un plaisir et une bouffée d’oxygène que de vous lire.

  • un très bel article. Merci de me conforter dans l’idée de ne pas être Charlie, de ne pas me reconnaitre complètement dans ce Je Suis Charlie mais d’être effectivement frère de Charlie. Je n’arrivais à trouver les mots justes, les voici écrits pr moi.

  • @ Paul : j’étais en train de vous répondre, mais reprenez le passage. Je l’ai reformulé puisqu’il semble que vous n’étiez pas le seul à comprendre l’inverse de ce que je voulais dire. Votre question tient-elle toujours ?

    @ Salamito : merci. Je suis sensible à toutes les appréciations mais à la vôtre en particulier.

    @ Blogblog : oui, c’est en effet saisissant de voir comme on lui a cherché querelle par réflexe, sans prendre le temps de la réflexion sur ce texte terriblement ajusté.

    P.V. a écrit :

    L’image de ce policier, Ahmed, abattu comme un chien et celles de cette attaque sont mille fois terrible, sans rapport possible avec les caricatures de Charlie Hebdo, quand bien même certaines ont pu blesser et heurter, ce qui a pu être mon cas.

    Oui, et je ne veux pas penser à ce qui s’est passé dans les murs de Charlie Hebdo, et qui n’a pas pu être moins odieux.

  • J’assume, je suis CHARLIE l’insulte passe pour un instant de colère, ce qui m’insupporte c’est quand la loi me dit ce qu’il faut dire ou ne pas dire penser ou ne pas penser la loi devient liberticide. L’insulte est instantanée la loi est pérenne alors si j’ai envie de dire merde à l’islam, à Moïse ou au pape je veux pouvoir le faire même si je ne le fais pas car je suis bien élevé.

  • Comme je l’ai écrit : je suis partisan de la libre expression, et de son bon exercice. Bref, avoir le droit de dire des conneries, et ne pas le faire.

  • Je crois me souvenir que ce ne sont pas tant les caricatures (bien légères au regard de celles subies par les cathos ou la famille Le Pen) qui ont choqué les musulmans, mais le fait qu’on n’a pas le droit de représenter Mahomed.
    La question n’est donc pas tant la liberté d’expression que la liberté de parole sur l’Islam.

  • Le début de la première lecture de la messe de ce jour est tout à fait de circonstance:

    « Bien-aimés, nous aimons parce que Dieu lui-même nous a aimés le premier. Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas. Et voici le commandement que nous tenons de lui : celui qui aime Dieu, qu’il aime aussi son frère. » (1 Jn 4, 19 – 5, 4)

  • Je ne connaissais pas « KOZ », mais quelle écriture! et quelles belles paroles! J’admire! MERCI pour tant de clairvoyance alors que je suis un peu aveuglée par tant de violence!

  • Quand tu dis qu’il faut être « Fermes pour s’opposer aux conceptions qui la contredisent [la foi chrétienne], à l’instar du refus de l’égalité hommes-femmes », tu voulais en fait dire « refus de l’EGALITARISME homme femme ». Nous sommes égaux en dignité, le pape l’a bien dit , n’est-ce pas ? Une femme n’est pas moins qu’un homme jute parce qu’elle est née femme. A part cette phrase qui m’ attriste profondément, c’est un bon article. Espérons que tu te sois juste trompé de mot à ce moment-là.

  • Merci de cet article qui reflète tout à fait ce que je ressens et que je n’aurais pas su expliquer aussi clairement.

  • L’agent d’entretien s’appelait Frédéric Boisseau. Il laisse derrière lui une femme et deux enfants. Cet article fournit une petite biographie de toutes les victimes :

    http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/01/07/les-dessinateurs-et-journalistes-tues_4550767_3224.html

    Merci pour ce billet, Koz. En particulier, j’espère qu’il m’aidera à trouver les mots pour me faire comprendre de proches qui eux aussi, avaient du mal à « être Charlie ». Et à les associer à notre deuil à tous.

  • dont l’islam semble au passage avoir été compatible avec le sang versé pour sa mission au service de la France. Je ne comprends pas le sens?

  • Hé bien non, je me permets de dire que le billet un peu à côté de la plaque pour une fois, même si le ton est mesuré. Si vos convictions se trouvent choquées par de – souvent – bêtes dessins sur la Vierge, j’en serai presque à vous dire qu’elles ne doivent pas être bien profondes. Je ne suis pas (plus, à vrai dire) un admirateur de Charlie je précise, ca me saoulait depuis longtemps, d’autant que cet esprit gaulois avait sombré dans les moqueries tous azimuts : croyants, femmes, homo, etc. Mais c’étaient malgré tout des descendants de l’esprit des Lumières, à déboulonner les institutions, les idoles. Au-delà de dessins, il y avait du contenu (ah oui, pardon, du féminisme, de l’économie alternative, de l’écologie, que du mis à l’index). Mais Je préfère un monde avec eux que sans eux. Et je précise qu’hier à République, la majeure partie des gens n’étaient pas spécialement des lecteurs de Charlie non plus. Les argentins, péruviens, albanais qui ont manifesté leur solidarité non plus il me semble. La CEF et son magnifique communiqué non plus. Et les cloches à Notre-Dame ont sonné fort ce midi. Je travaille dans une organisation catholique, pas très loin, et tout le monde était sur le trottoir à midi à partager le recueillement, même si dans les couloirs beaucoup disent qu’ils n’étaient pas lecteurs et que certainement la plupart étaient aussi dégoutés que vous par les dessins. Mais tout le monde était Charlie. Il se passe quelque chose de bien plus grand en France que la somme de vos petites vapeurs devant des caricatures souvent débiles, et je trouve dommage, avec vos posts habituellement empreints de plus de fraternité, que vous passiez vous et vos lecteurs, à côté de cet aspect.

  • Merci.
    Mon fils me disait hier être extrêmement choqué par ces couvertures
    Je lui ai dit que l’important était aussi de garder la liberté de pouvoir l’exprimer
    Pas sur que cela soit très facile désormais

  • Pingback: Attentats du 7 janvier 2015 | Pearltrees

  • vraiment Koz,
    Je partage en général vos idées, souvent même vous apaisez Ma colère et finissez par me convaincre tant vos propos sont mesurés, réfléchis et J ose dire saints . Cependant aujourd’hui dans votre réflexion, je ne partage pas tout à fait votre opinion. Partout sur la toile les gens se réclament ou non de Charlie, mais qu’est ce que ça peut bien faire, des polémiques qui divisent les français et qui ne sont pas constructives . Être ou ne pas être, on s’en fiche. Je préfère cette remarque sur radio ND de Gérard Leclerc : mon contraire est mon frère. Même si nous détestons ce journal, ce sentiment doit rester en arrière plan dans nos réflexions aujourdhui .
    Qu’on aime ou pas Charlie H, là n’est pas la question… Restons unis et combattons lE mal-le terrorisme .
    Sinon merci, je me régale de vos écrits (qui servent ma réflexion, ma foi et mes débats)

  • @ Ju : non, reprenons :

    Pour ceux qui se reconnaissent dans la foi chrétienne, c’est aussi le moment de se montrer fermes dans leur foi. Fermes pour s’opposer aux conceptions qui la contredisent, à l’instar du refus de l’égalité hommes-femmes

    Il s’agit de se montrer fermes face aux conceptions qui contredisent la foi chrétienne, comme le refus de l’égalité hommes-femmes la contredit. Cela me semble clair.

    @ mouette : nombreux sont ceux qui expliquent que l’islam est incompatible avec la démocratie / la République. Lui, musulman, est mort à leur service. Il ne devait pas avoir le même avis.

    Stephanos a écrit :

    Le début de la première lecture de la messe de ce jour est tout à fait de circonstance:

    « Bien-aimés, nous aimons parce que Dieu lui-même nous a aimés le premier. Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur. En effet, celui qui n’aime pas son frère, qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu, qu’il ne voit pas. Et voici le commandement que nous tenons de lui : celui qui aime Dieu, qu’il aime aussi son frère. » (1 Jn 4, 19 – 5, 4)

    Incroyablement à propos.

    @ EMILE [chut] c’est juste une appli, qui permet de réaliser une aquarelle à partir d’une photo : waterlogue [/chut]

    Ducellier a écrit :

    Être ou ne pas être, on s’en fiche. Je préfère cette remarque sur radio ND de Gérard Leclerc : mon contraire est mon frère. Même si nous détestons ce journal, ce sentiment doit rester en arrière plan dans nos réflexions aujourdhui .

    Et vous n’avez pas lu ça ici ?

  • Bravo pour cette analyse si juste…
    J’ai eu exactement la même réaction que vous en voyant la une ce lundi de Charlie Hebdo qui montre la Sainte Vierge et l’enfant Jesus…
    Je n’arrive pas non plus complètement à « être Charlie »…

  • Si j’ai été immédiatement frappé par la violence de l’attentat, je n’ai pas été surpris qu’il vise Charlie Hebdo.

    Ce journal a toujours eu sa propre « liberté d’expression » et les religions ont toutes fait partie de ses cibles préférées. Cet attentat abominable s’inscrit certainement dans une stratégie de terrorisme mais a été délibérément ciblé, pour assouvir une vengeance. Cette vengeance suppose qu’une violence ait été commise auparavant par Charlie Hebdo contre les auteurs de l’attentat. Les mots et l’humour peuvent en effet être une arme qui s’ils ne tuent pas, n’en demeurent pas moins une forme de violence.

    Hier, la violence des armes a répondu à la violence des mots. L’une et l’autre sont condamnables. On ne peut pas accepter que des terroristes tuent, même au nom de l’Islam. On ne peut pas non plus accepter que des personnes soient humiliées, même au nom de la liberté d’expression, même au nom de l’humour.

    Moi aussi j’ai bien du mal à être Charlie. En revanche, je m’associe sans réserve aux victimes innocentes, aux proches des disparus et surtout aux policiers qui ont fait leur devoir.

  • Non seulement j’apprécie ce que vous écrivez dans ce billet, mais je le partage. Il explique, mieux que je saurais le faire, pourquoi moi non plus je ne peux pas adhérer pleinement à ce logo « je suis charlie hebdo ». Par contre, je partage pleinement la peine des familles de ceux qui ont été assassinés lâchement… un crayon, un stylo pour seules armes ! Grande est la responsabilité de ceux qui inculquent un tel message qui aboutit à cette déviance abominable…

  • @ mouette:
    IL est demandé trop souvent aux français de confession musulmane, même indifférents et non pratiquants de prouver qu’ils sont bien intégrés (y compris à la 2ème ou 3ème génération) !

  • Très bon article.Merci. Effectivement je ne me sentais pas  » Charlie » à 100% , mais avec une certaine culpabilité, car complètement horrifiée en même temps et comme tout homme, par ce qui vient de se passer, qui est absolument INHUMAIN, barbare, inqualifiable. Merci de nommer tout cela, et de l’analyser, sans avoir peur d’être jugé par ceux qui se laissent prendre par le côté rassurant d’être réunis sous une même bannière. C’est plus fin que cela et vous le décryptez très bien .. »La vérité vous rendra libres », libres de penser par soi-même, c’est aussi important que la liberté d’expression, car il n’y a pas de véritable expression sans une pensée juste. Merci.

  • Bonsoir Koz,

    je partage en grande partie le ton de votre billet. L’assassinat de personnes qui n’ont pas de sang sur les mains est chocant, probablement encore plus choquant que les autres meurtres d’innocents par « omission », dont les victimes sont beaucoup plus nombreuses que celles de ces attentats qui nous choquent tant (le crétin qui prend la route après avoir bu et fauche des enfants, l’industriel qui continue à commercialiser un produit défectueux…).

    Je ne vais par contre pas me tatouer « je suis Charlie » sur la poitrine. Malgré l’assassinat, Charlie Hebdo est pour moi une publication de peu d’intérêt que je trouve vulgaire et dont je ne partage pas les opinions.

    Je peux comprendre par contre que l’on se mobilise pour défendre la liberté d’expression « absolue », c’est à dire pouvoir exprimer son profond désaccord et mépris pour les institutions, les opinions ou les croyances d’autres personnes, et pouvoir le faire de la façon que l’on juge adéquat. Ce système a ses défauts: il doit forcément autoriser les provocations vulgaires « à la Charlie » justement, mais il permet à mon avis aussi un débat plus vigoureux que l’alternative.

    L’alternative, c’est un débat poli et respectueux des opinions « officielles » (car il y a toujours des opinions officielles). Ce n’est pas forcément le culte de la personalité des dictatures modernes, mais peut-être l’ancien régime, où l’on pouvait exprimer beaucoup de choses, mais en faisant attention à mettre les formes, et aussi à avoir un protecteur bien placé (pas de Molière sans la protection de Monsieur…), ou encore le débat tel qu’il existe dans les « dictatures locales » que sont les entreprises, les associations et les partis politiques. Le problème du débat poli, c’est que l’on peut très vite toucher les limites de la politesse jusqu’à interdire tout débat ou presque. Cela permet à des idées fausses de rester la vérité établie beaucoup plus longtemps que nécessaire.

    Pour conclure, je ne suis pas très optimiste sur la liberté d’expression en France, mais je ne suis pas sûr que le terrorisme (d’ailleurs pas très organisé) soit la principale menace: il me semble que la société française ne soit pas si gourmance que cela de débats qui remettent en cause ses acquis et ses convictions. Charlie, par exemple, dans toute sa provoc, ne s’attaquait qu’à une toute petite partie des convictions de notre société française. Qui osera taper avec la même vigueur sur nos plus grosses « vaches sacrées » ?

  • Article très juste qui amène à une réelle réflexion.
    Merci de nous aider à avancer, en gardant une vision balancée, dans un souffle de paix et non d’excitation journalistique!
    Bravo!

  • NP a écrit :

    Hier, la violence des armes a répondu à la violence des mots. L’une et l’autre sont condamnables. On ne peut pas accepter que des terroristes tuent, même au nom de l’Islam. On ne peut pas non plus accepter que des personnes soient humiliées, même au nom de la liberté d’expression, même au nom de l’humour.

    C’est là une fausse équivalence, et elle est d’autant plus douteuse en ce moment tragique. La violence du mot et du dessin est sans commune mesure avec celle des balles.

    De même que Koz, je ne me sens pas naturellement proche de Charlie. Mis aujourd’hui face à l’horreur, je suis Charlie, car ce qui me rapproche de Charlie – la France, l’amour de la liberté, la fraternité, l’humanité la plus élémentaire – est infiniment plus grand et plus beau que ce qui nous divise.

  • Merci pour ce beau texte qui pose les questions comme il faut et met les idées en ordre. Personnellement, j’avais hésité à suivre ce mouvement de « je suis Charlie » parce que j’avais parfois été blessée par leurs unes assez dures envers les chrétiens et que même si je me sentais, comme vous le dites si bien, leur soeur, je n’étais pas d’accord avec leur ligne éditoriale. J’ai fini par le faire, parce que j’étais révoltée par cette violence, par ce non-sens horrible, parce que je crois à la force et la légitimité de la plume, par le dessin comme par l’écriture.
    Parce que j’ai réfléchi aussi, et que je me suis rendue compte que leur droit à la critique religieuse, à l’expression de « l’irreligion », même s’il est parfois douloureux dans une France si laïcarde, c’était aussi mon droit à ma religion, mon droit à l’expression. Et qu’ils auraient peut-être bien ris devant une satire de l’athée convaincu.

    Nous formions avec eux, tous, chrétiens, juifs, musulmans, athées et agnostiques, nous formions un monde où nous avions le droit de ne pas être d’accord. Demain je l’espère nous formerons encore un monde de paroles, contraires parfois mais nécessaires. Il faut de tout pour faire un monde, il faut de toutes les opinions. Demain, je l’espère, nous continuerons de discuter, de nous engueuler un peu aussi parfois, de rire ensemble ou de ne pas comprendre. Aujourd’hui je prends la plume parce que je ne sais pas dessiner, je prends la plume pour dire: je suis Charlie parce ma liberté c’est d’abord la leur, je suis Charlie parce je n’étais pas d’accord avec eux, je suis Charlie parce que je déteste Voltaire et pourtant je le cite: « Je n’aime pas vos idées mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez les exprimer. » Je me battrai pour écrire partout non seulement « liberté » mais « fraternité ».

    Je suis Charlie parce que vous et moi formons un monde qui restera debout, un monde où l’on peut parler sans s’accorder, un monde où l’on peut rire. Je suis Charlie parce que je me battrai comme vous pour un pays sans fanatisme ou extrémisme.
    A leur suite, nous dirons à ce monde de rester grand ouvert pour que le dialogue puisse en jaillir, et nous essayerons de comprendre qu’on peut dire non, qu’on peut ne pas accepter, et que c’est ça la liberté, mais que jamais on ne doit faire taire les gens.

  • C’est juste la polémique être ou ne pas être Charlie qui m’agace . Il me semble que telle n’est pas la question aujourd’hui..
    b>@ Koz:

  • Faire passer quelques idées aussi tranchées d’une manière aussi « douce », n’est-ce pas plus hypocrite que de les clamer aussi haut et fort comme le faisaient les journalistes qui sont morts ?

    Vous le reconnaissez, ils étaient tout sauf des haineux avides de conflits, alors pourquoi, mais pourquoi parler d’insultes aux convictions, et d’agression ? De la provocation, toujours, assurément, de la vulgarité, hé oui (mais par rapport à celle qu’on nous livre au quotidien, vous ne pensez pas qu’elle se trouve plus justifiée ?). Alors il est tout à fait légitime que chacun ait pu se sentir un peu froissé dans son amour-propre et ses convictions par certains dessins ou articles, mais même quand ça picotait, ils n’ont jamais dépassé les bornes (parce que soit ils touchaient juste soit ça ne portait pas à grandes conséquences.) Ils n’avaient pas et on n’a pas à se taire sous prétexte que c’est sacrilège ! Heureusement qu’il existe des gens qui nous provoquent, et souvent de façon moins bête et irréfléchie que vous semblez le supposer, qui nous mettent mal à l’aise parce qu’ils mettent sur le tapis ce qu’il n’est pas convenable de voir.
    D’autre part ils ne travaillaient pas seulement chez Charlie, alors c’est vraiment déplaisant de les faire passer pour des inconscients vulgaires, si c’est ce que représente pour vous ce journal.
    Je m’emporte peut-être, mais ce journal sert justement de mesure aux autres, il incite à ne pas être timoré.

    Pour finir, personne n’a besoin d’adhérer à un quelconque slogan (même s’il est signe de solidarité) pour manifester son soutien, donc je ne crois pas qu’il soit nécessaire de pinailler sur « être ou ne pas être Charlie ».

  • Encore un bel article, merci. Si seulement, non pas vos idées, ce serait trop demander, mais votre bon sens était un peu plus partagé dans ce pays, on n’en serait pas réduit, 24h après, à exclure un parti de l’union nationale. Nous sommes Français, nous manifestons notre attachement à la liberté d’expression de dessinateurs, et on la refuserait à un parti ?

    Le mépris et l’injure sont les premiers degrés de violence. J’aime autant Charlie que le FN, c’est à dire que je m’en passe autant que je peux, mais je leur reconnais le droit égal d’exister et de s’exprimer. Etant donné la tournure des évènements, j’aime d’autant moins être Charlie, je m’en sens d’autant plus Français, fidèle à la liberté et à la République, ouvert aux idées des autres tant que je peux (et c’est un combat contre soi-même !), pauvre témoin de la célèbre maxime que Voltaire n’a jamais dite :
    je hais vos idées, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez les exprimer.

  • @ Koz:
    Ok, je n’avais pas compris cela, c’était tout de même un peu ambigu selon moi. Mais je suis rassurée (il faut dire que je connais tellement de gens « cathos » qui pensent que le rôle de la femme est de rester à la maison…). Merci de m’avoir répondu.

  • Il est plus que temps de relire Leon XIII http://w2.vatican.va/content/leo-xiii/fr/encyclicals/documents/hf_l-xiii_enc_20061888_libertas.html

    Merci Koz d’avoir mis le doigt sur ce qui me chiffonnait

    « Il ne suffit pas de refuser l’erreur pour penser juste » écrivait Mgr Jean Honoré, qui poursuivait ainsi : « la vérité est autre chose que la négation d’une négation »1. Et la vérité m’intéresse aujourd’hui encore plus que la liberté de dire des conneries. « 

  • Merci Koz même si je ne vois pas la chose de la même manière que vous car le fait d’être Charlie ou pas ne m’intéresse pas plus que ça.
    Je trouve que l’Eglise catholique a été magnifique dans son action.
    Quant au policier Ahmed, comment savez vous qu’il était musulman ? Cela n’a pas une grande importance mais tout de même je crois que c’est la vérité qui doit prévaloir. Quand Merah avait tué des militaires à Toulouse, on avait dit qu’il y avait trois musulmans parmi les victimes alors que c’était faux. L’un d’entre eux, Abel Chennouf, malgré son nom à consonance maghrébine, était catholique. Ce qui n’a pas empêché tout le monde de le classer chez les musulmans, cela faisait mieux pour le discours. Ne recommençons pas avec Ahmed. Cet homme mérite mieux que ça.

  • Discerner ce qui se passe en ces temps d’épreuve, c’est aussi s’interroger sur la place de l’image dans notre monde souffrant. Ces images qui prolifèrent, caricatures, photos, émoticônes, dans la continuité d’une culture chrétienne – catholique, orthodoxe – iconodule, qui n’a pas hésité à représenter le divin, du fait de son incarnation en Jésus-Christ. Mon non plus, je ne me réjouis pas de voir un dessin de Marie dans Charlie Hebdo. Mais je n’oublie pas que tout image de Dieu est fausse, et doit être détruite quand on tend à l’idôlatrer. Je suis tout aussi gêné de voir, dans certaines églises, des représentations du Père en vieux barbu, ce Père dont Jésus nous a dit que Lui seul l’avait vu. La débauche d’images qui s’étale en ce monde est, aussi, un fruit de la culture chrétienne, tout comme la liberté de s’exprimer sans être inquiété. Mesure-t-on assez que l’Islam, surtout sunnite, a interdiction de dire sa foi par l’image? Que les musulmans ont, dans un monde qui communique par l’image, un handicap dont ils peinent à sortir? L’attentat contre Charlie, c’est l’exécution en images de ceux qui ont osé représenter le sacré. C’est la riposte par balles de ceux qui ne peuvent dessiner. Pour sortir de cette guerre de l’image, voir en tout homme, en toute femme, la seule image de Dieu qui vaille. Image défigurée, floutée, mais image de Dieu quand même. Ce matin, je regardais sur internet les photos de Cabu et de Charb, puis celle des suspects. Notre devoir de chrétien, c’est voir l’image de Dieu en tous ces hommes, victimes comme bourreaux. Notre devoir de chrétien, c’est aussi de se méfier de toute autre représentation de Dieu qui ne soit pas l’homme. Qu’elle soit dans un journal satirique ou dans une église.

  • Merci beaucoup Koz, mon frère dans le Christ. Parfois, on a des choses importantes dans le coeur qu’on ne parvient pas à exprimer clairement et complètement. j’ai bien essayé dans mon statut facebook mais c’était fade et il restait un goût d’inachevé. Vous avez su mettre les mots justes et juste les mots qu’il faut sans rien de superflu. Je communie pleinement à tout et ne vais donc pas répéter inutilement chaque réflexion. Juste dire que je garde précieusement dans mon coeur les appels à l’humilité, à la responsabilité et à l’exigence chrétienne. Que Dieu nous donne la grâce de prendre chacun et ensemble ce chemin, résolument. Et comme le dit saint Jean dans la lecture de ce jour : « La victoire remportée sur le monde, c’est notre foi. »

  • S’il y a un reproche à faire à CH, ce n’est pas d’avoir dit des conneries. C’est l’incohérence d’une position qui consiste à tourner systématiquement en ridicule toutes les valeurs, quelles qu’elles soient, tout en présupposant la permanence autour de soi d’un monde où perdureraient les valeurs requises pour la survie de CH, et d’abord celle infiniment précieuse de la liberté d’expression.

    Ce qui bien sûr n’enlève rien à la barbarie abjecte de l’attaque dont a été victime CH.

  • Assez d’accord: Ce qui s’est passé est atroce, inqualifiable, inexcusable…
    Ceci dit on peut s’interroger connaissant maintenant la folie de ces monstres s’il est opportun de continuer à publier des caricatures dénonçant l’Islamisme.
    Par là je ne dis pas qu’il faudrait maintenant se soumettre mais plutôt développer des arguments pour expliquer l’inhumanité de ces actes et éviter la moquerie qui attise trop souvent la haine.

    Notons que les caricatures heurtent non seulement les fanatiques dangereux mais aussi dans une moindre mesure les musulmans pacifiques.
    Elles peuvent donc parfois inciter les uns à rejoindre les autres.

    Quand un rottweiler s’échappe d’un chenil il n’est pas utile de s’amuser à l’énerver, il vaut mieux appeler la fourrière.

  • Je suis sans doute plus indulgent à l’égard de Charlie hebdo, mais je partage l’essentiel de vos interrogations. On sent dans ce texte une vérité, évidente dans vos tiraillements qui sont ceux de nombreux chrétiens.

  • Bonsoir Koz,

    Merci pour cet excellent billet.
    Charlie Hebdo m’indifférait. Leurs outrances desservaient plus que ne servaient leur cause mais aucunes des victimes d’hier ne méritaient le sort qu’elles ont eu. J’y ajouterai cependant ceci, que j’ai également mis chez Corto (http://corto74.blogspot.fr/), écrits à partir des dernières évolutions de l’actualité. Si l’exclusion du FN (qui n’est pas ma tasse thé) de la soi-disante manifestation « d’unité nationale » de dimanche est confirmée demain après la réception par le nullissime de MLP, les idéologues, de quelques bords qu’ils soient, responsables de cette décision imbécile pourront se dire qu’ils ont allumés la mèche qui conduira à la guerre civile, la vraie, dans ce pays. Mépriser ainsi plus de 25% du corps électoral, outre que cela témoigne d’un autisme élevé, va accentuer les clivages que cette société connait depuis plus de deux ans maintenant et conduit inéluctablement à une rupture sociétale lourde de conséquence. La Liberté ne se séquence pas, cette valeur n’appartenant pas à la droite et encore moins à la gauche.
    Les crise sont toujours révélatrices de l’état de décrépitude d’un corps social. Ce que ces assassinats révèlent n’est pas beau à regarder, à sentir et à entendre.
    Hier, je ne pouvais qu’être Charlie et j’en étais fier. Ce soir, par la bêtise de nos dirigeants et de nos merdias, je ne suis plus Charlie. J’ai simplement honte pour mon pays.

    Bonne soirée

  • Votre texte est très beau, mais j’ai vraiment du mal avec votre paragraphe « Etre ou ne pas être Charlie ». Le slogan en lui-même importe peu. Mais ce qui m’ennuie, c’est que certains lecteurs puissent retenir ce paragraphe en priorité, comme une sorte de prétexte à rogner un peu, même à la marge, en représailles mesquine aux vexations passées, sur la charité due à ces hommes assassinés. Je sais que ça n’est pas votre cas, mais je crains, peut-être à tort, que ça ne suscite des tentations dans ce sens chez vos lecteurs.

    Et quand vous dites : « il serait préférable que ces attaques ne se traduisent pas par une sacralisation de l’agression, même par le dessin », vous m’inquiétez, parce que vous semblez mettre côte à côte la violence d’un dessin et celle d’une mitrailleuse, et ce parallèle, même si c’est pour constater la disproportion entre les deux éléments, me paraît illégitime. Violence symbolique et violence physique n’ont le même nom que par métaphore: elles ne sont pas faites de la même matière. La douleur infligée par un dessin, je la maîtrise entièrement. Si je ne veux pas qu’elle existe, elle n’existe pas. Pas la douleur d’une rafale. Et c’est bien ce raisonnement faux, ce parallèle oiseux qu’il faut dénoncer, pour moi.

    Vous écrivez par ailleurs: « la vérité m’intéresse aujourd’hui encore plus que la liberté de dire des conneries ». Je ne vois pas en quoi les deux s’opposeraient nécessairement. Et je n’ai pas peur de le dire: même si je ne lisais pas ce journal, même si ses dessinateurs m’apparaissaient comme des dinosaures figés dans les 70s, l’anticléricalisme à la Charlie Hebdo ne m’a non seulement jamais fait de mal, mais il m’a sans doute aidé à devenir un meilleur chrétien. En me contraignant à l’humilité, en m’obligeant à examiner les fondements de ma foi, à consolider ce qui pouvait l’être, en m’empêchant de me perdre dans l’adoration de l’image et de l’identité.

    Et soyons honnêtes: l’Eglise ne serait pas l’autorité morale lumineuse qu’elle est redevenue si les anticléricaux ne lui avaient pas un peu forcé la main par le passé… Ca n’a pas été le seul ressort, certes, mais pour moi, ils font clairement partie du dessein divin, ils y jouent un rôle, et un rôle plutôt positif. Et il ne faut pas oublier que la violence verbale des anticléricaux a pu être libératrice, qu’elle répondait à de véritables errements de l’Eglise, à une époque où le message du Christ a pu être utilisé de façon oppressive. Bien sûr, ils ont continué à se la jouer redresseurs de tort longtemps après la disparition de ladite oppression, mais est-ce un si grand péché? Les baba cools façon Charlie, c’est un peu un mouvement de « réforme » de l’Eglise, qui serait un peu parti en vrille dans le décor…

    Et puis enfin, des gens qui ne peuvent pas regarder des caricatures sans souffrir ont quand même un problème. Que ça gêne, que ça agace un moment, ok… Mais si on en souffre, il faut consulter. Ces dessinateurs sont morts d’avoir traité l’Islam comme ils traitaient les autres religions. D’avoir dit ce qu’ils pensaient aux personnes qui professent cette religion, de leur avoir parlé le même langage qu’à n’importe qui, avec leurs convictions, pour moutonnières, faussement provocatrices et mal informées qu’elles soient. Pour eux, nos croyances sont des insultes à l’intelligence. Je crois qu’ils avaient tort. Mais je leur sais gré de m’avoir traité comme un égal, et de traiter les musulmans comme des égaux. Et je pense qu’à leur manière, ils respectaient davantage les musulmans, en tant que personnes, que la plupart de leurs congénères de gauche.

    Alors je l’avoue, si j’ai du mal à afficher « je suis Charlie » par pudeur ou peur du ridicule, je n’ai pas de vraie bonne raison de ne pas le faire.

  • Olivier83 a écrit :

    Discerner ce qui se passe en ces temps d’épreuve, c’est aussi s’interroger sur la place de l’image dans notre monde souffrant

    Et l’image comme force politique ! Nos médias, en rendant célèbres ces terroristes, sont leur arme, leur publicité gratuite, c’est cela le plus horrifiant ! Mon interrogation : n’entrons-nous pas dans le jeu terroriste ? D’ailleurs comment en sortir ? On fait de cette horreur un événement diffusé partout, d’autant mieux que l’horreur fascine ! Vouloir regarder ces images d’horreur, c’est du voyeurisme, non ? En parler, c’est faire de la publicité gratuite pour ces bourreaux, non ? Le terrorisme n’existerait pas s’il n’était pas médiatisé ! Pourquoi alors diffuser… ? même s’il est difficile de camoufler cet attentat, ce qui fait sa force, ne tombons pas dans le piège : il y a accord entre tous pour éviter la publicité-incitation à ce que cela recommence, non ? Un deuil, ce n’est pas ça. Pour une vraie liberté d’expression, il faudrait libérer l’image de l’horreur ; les Etats-Unis ont sans doute été sages en bloquant les images.

  • Koz a écrit:

    Aux Etats-Unis, dont on connaît l’attachement viscéral à la liberté d’expression, peut-être plus fort encore qu’en France, les journaux n’ont pas publié les caricatures contrairement à ce que tout le monde semble réclamer sur les réseaux en France – signe que l’on peut être partisan de la libre expression comme de son bon exercice.

    Ayant regardé les médias américains, je vois que l’essentiel des titres traditionnels, en effet, n’ont pas publié de caricatures de Charlie Hebdo. Plusieurs sites en ligne importants (Gawker, Slate, Vox) l’ont fait. Un point important, cependant, fait une différence avec la réaction française: le débat ne porte pas sur le soutien à apporter, ou non, à Charlie Hebdo. La réaction des journalistes américains n’est pas militante: ceux qui publient le font uniquement au nom de l’information, en estimant nécessaire de montrer les images afin d’expliquer ce qu’est Charlie Hedbo, et pourquoi ce journal a concentré la colère des extrémistes. Ceux qui ont évité de publier invoquent leur charte éditoriale: ils s’imposent comme règle de ne pas choquer les sensibilités, notamment religieuses, de leur public. C’est surtout le cas des publications mainstream dont l’audience est très large et diverse.

    H. a écrit :

    Si l’exclusion du FN (qui n’est pas ma tasse thé) de la soi-disante manifestation « d’unité nationale » de dimanche est confirmée demain après la réception par le nullissime de MLP, les idéologues, de quelques bords qu’ils soient, responsables de cette décision imbécile pourront se dire qu’ils ont allumés la mèche qui conduira à la guerre civile, la vraie, dans ce pays.

    Ne vous laissez pas embarquer dans ce débat purement politicien. Marine Le Pen prend une posture de victime, comme d’habitude; elle le fait avec habileté afin de faire croire que ce n’est pas elle qui refuse l’unité nationale, alors que par ailleurs elle ne peut pas s’afficher aux côtés de l’UMP et du PS. Pour faire bon poids, elle appelle au rétablissement de la peine de mort (récupération assez répugnante) afin d’être bien sûre que l’hypothèse de sa présence soit rejetée. En face, il y a aussi des postures tactiques diverses. Tout cela est sans grand intérêt: il est bien évident dès le départ que la notion d’unité nationale ne résiste pas longtemps, dès lors que les politiques s’en emparent. L’unité nationale ne peut pas être le fait des partis, elle doit être le fait des Français. Que viennent ceux qui le souhaitent et le peuvent, et nul n’a titre à les en empêcher, à supposer que cela soit possible.

  • Et si au lieu de faire une marche de protestation, de soit disant « unité nationale », tous les gens qui se sentent concernés se rendaient à la messe, se serait sûrement un bel hommage rendu à ces policiers assassinés pour protéger les personnels d’un journal satirique.

  • @ Aristote:

    Mais non, pourquoi? Je ne dis pas qu’il faut s’interdire de faire des caricatures des dessinateurs de Charlie Hebdo. Je ne comprends pas ce que vous voulez dire.

  • @Gwynfrid: bien sûr que Marine Le Pen se réjouit de son exclusion, et a sans doute plus ou moins manoeuvré pour. Raison de plus pour inviter son parti, dans une manif où on invite les partis. Etre pour la peine de mort, c’est une opinion. Partagée par plein de gens. Quand il faudra militer contre cette opinion, il faudra se mobiliser. Mais en attendant, ce qu’on fait là, c’est une manif pour la liberté d’opinion où on exclut un parti pour une opinion. C’est grotesque.

  • Nous n’aurions pas dû protéger, soigner et renvoyer en Iran l’ayatollah Khomeiny. Nous n’aurions pas dû intervenir militairement en Afghanistan, en Irak, en Libye. Parmi les abandonnés du système capitaliste, parmi les déçus du christianisme, du commnunisme, du socialisme, il y a des personnes qui choisissent l’intégrisme musulman avec les conséquences désastreuses que l’on sait. D’autres chemins de vie sont pourtant possibles. Voir lien suivant: http://luluencampvolant.over-blog.com/article-a-aurait-pu

  • Merci pour cet article. C’est le premier que je lis qui distingue la liberté de l’exercice qui en est fait, et je me posais posais beaucoup la question de ce que cache « liberté d’expression ». Rien n’est sans doute interdit dans l’exercice de la liberté mais tout n’est pas profitable à sa véritable construction, ni a fortiori à celle de notre société.

  • » Parce que nos valeurs se veulent universelles »
    Rien que ça! ça décrédibilise le texte!
    .
    Il n’y a PAS de « valeur universelle ». Il y a les lois de la biologie, et les lois de la physique, qui, ensemble, compose les lois de al nature.
    .
    Je SAIS que mes valeurs morales ne sont PAS celle d’autres personnes.
    .
    Et je SAIS que une communauté ne peut PAS exister à long terme si ses membres ne partagent PAS les mêmes valeurs.
    .
    Plusieurs communeautés peuvent vivrent à distance avec des valeurs différentes.
    .
    Si des communeautés avec des valeurs différentes existent en étant très accessible l’une à l’autre, alors l’une disparaîtra, et ses valeurs disparaîtront avec elle.
    .
    Et parfois, les valeurs « pacifistes » doivent être mise en veilleuse pour sauvegarder la culture qui permet à ces valeurs « pacifistes » de simplement exister à plus long terme.
    .
    Et je ne veux PAS que mes enfants/petite_enfants soient en Europe comme les Coptes en Egypte, ou une autre minorité en pays musulman.
    .
    Les turcs ont virés toutes personennes de relirion orthodoxes dans les annéEs 50, pour conserver l’unicité culturelle. Peronne ne leur en veux aujourd’hui.
    Les algériens ont laissé comem choix « la valise et le cercueil » aux français et leurs amis.
    Et ça a marché, car c’est compatible avec les Lois de la Nature. Froidement. Réellement. Le plus fort, et le plus violent, le plus envahissant l’emporte. Et efface le reste.

  • Je viens de lire qu’Anne Hidalgo allait proposer que « Charlie Hebdo » soit Citoyen d’honneur de la ville de Paris… Je ne savais pas qu’une entreprise morale pouvait devenir « citoyen » mais bon, là n’est pas vraiment le problème. Le problème, c’est que Charlie Hebdo est devenu l’icône de la liberté d’expression, de la République, etc. Nul ne s’émeut de la violence de ce journal satirique. Car insulter gratuitement ce qu’il y a de plus cher à certaines personnes (la foi), c’est de la violence. Voire de la haine. Mais pourtant nul ne semble vraiment s’en émouvoir, et voilà qu’on en vient à faire l’éloge de ce journal. Et voir des chrétiens communier à ce délire me chagrinne profondément.

    Donc non, je ne communierai pas au mouvement « Je suis Charlie ». Car je ne conçois pas le respect et la liberté d’expression comme ce journal la conçoit. Et que si ceux qui ont été tués sont des victimes, ils ne sont pas pour autant totalement innocents et purs. Je me contenterai donc de prier pour le Salut de leur âme, pour celle de leurs meurtriers, et pour la paix.

    L’autre question à se poser, selon moi, serait celle de l’islam (ouh là, le mot qui fait peur !). J’entends les nombreux musulmans qui dénoncent le terrorisme et je rends grâce à Dieu pour cela. Mais enfin, faut pas non plus nous prendre pour des billes. Les djihadites et extrêmistes musulmans font ce qu’ils font au nom de l’islam. Peut-être se trompent-ils dans leur interprétation, mais si les textes sacrés et la tradition islamiques n’enseignaient que la paix et l’amour, je vois mal comment l’islam pourrait enfanter des terroristes de ce genre. A titre de comparaison, il ne me semble pas qu’on ait déjà vu un chrétien égorger un homme en criant « Gloire à Jésus-Christ ».
    Hier soir, dans le groupe de néophytes adultes que j’accompagne, un pakistanais ex-musulman baptisé à Pâque 2014 témoignait que chez lui, des centaines de personnes étaient tuées chaque année sous prétexte qu’elles avaient insulté le « prophète » de l’islam. Apparemment, là-bas, il suffit que deux personnes se mettent d’accord pour dire que vous avez insulté Mahomet pour être pendu haut et court. Alors, je veux bien que les frêres qui ont attaqué Charlie Hebdo n’aient rien compris à l’islam, mais enfin…

    Bref, redoubler d’efforts face au terrorisme islamique – ce qui ne manquera pas d’être fait devant l’émotion suscitée par l’attaque de Charlie Hebdo – soignera au mieux quelques symptômes. Mais est-ce que ça suffira à guérir la maladie qui ronge l’islam, à savoir son incapacité à questionner ses textes sacrés (depuis que les portes de l’itjihad ont été fermées au Xème siècle) ? Pour lutter contre le terrorisme, je pense que la seule solution est la relativisation voire l’abrogation des textes invitant clairement les musulmans à la violence. Mais impossible de faire cela sans nier des dogmes devenus fondamentaux dans la foi musulmane, comme le caractère incréé du Coran, la perfection (au sens de « absence de péché ») de Mahomet, etc. Grand écart à mon sens impossible à faire. De mon point de vue, l’islam n’est pas doctrinalement assez solide pour dialoguer avec la modernité. Du coup, reste le refuge dans le fondamentalisme le plus extrême qui, en islam, peut conduire tout droit à la violence. Et l’Occident, dans son aveuglement et son refus de se poser les bonnes questions sur l’islam, n’aidera pas les musulmans à faire ce travail.

    Bref, nous n’avons pas fini d’en entendre parler.

  • Comment en effet concilier liberté d’expression et tolérance ? La nécessaire liberté d’expression autorise-t-elle à tourner en dérision les croyances d’autrui ? Jusqu’à présent cette question ne se posait pas, les assassinats sordides du 7/01 la mettent en lumière.

    Pour un français lambda, les caricatures sont parfois amusantes, révélatrices de sens, pour un croyant elle peuvent-être blessantes et donc signifier un manque de tolérance et de respect.

    Les lois de la République sont là pour permettre le vivre ensemble, en particulier entre ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, entre les violents et les pacifiques.

  • Évidemment nous sommes tous effondrés parce qui s’est passé. Sur un plan général, c’est bel et bien un acte de guerre contre nos démocraties.

    Ce n’est donc pas le bon moment pour aborder le sujet plus général : où est la limite de la liberté d’expression ? Néanmoins, il faudra y réfléchir.

    J’ai entendu hier une interview qui date d’un an ou deux de l’un des journalistes assassinés qui déclarait péremptoirement que ceux qui « croyaient » étaient des cons. Ce n’est plus de la liberté d’expression. C’est une insulte, donc une agression verbale.

    Beaucoup plus grave sur le plan éthique : dans les années 70, un grand patron de presse s’est tué en tombant de cheval en forêt. Il était honni des syndicats, semble t-il. Un journal satyrique (Charlie Hebdo n’existait pas encore) titra en substance : « Amaury a eu un accident. Le cheval est vivant ». Ce titre était immonde. Vous imaginez ce qu’à ressenti la famille.

    Jamais une Loi ne pourra empêcher ce type de dérapage, mais un code éthique des journalistes ne nuirait pas, puisque l’éducation individuelle donnée par les parents ne suffit plus.

  • Sérieusement, vous pensez vraiment que les caricatures anti-religieuses publiées dans Charlie Hebdo expriment de la haine? Que les gens qui les ont dessinées voulaient dire « je hais les gens qui professent ces religions, j’appelle à la violence contre eux et je souhaite qu’ils disparaissent »?

    Ces caricatures étaient motivées par le rejet d’opinions, pas de personnes. Ce rejet était convenu, mal informé, largement fondé sur l’ignorance et même, à mon sens, une forme de bêtise. Mais de la haine, non. Je pense même qu’il y a une certaine mauvaise foi à vouloir absolument en voir dans tout ce qui nous déplaît, du FN à l’extrême gauche.

  • Pingback: Attentat du 07/01/12 contre « Charlie Hebdo » : face au drame, comment réagir ? | PEP'S CAFE !

  • @Logopathe,
    Sérieusement, je crois que le même dessin montré à des personnes de culture différente est compris et interprété de manières diverses et imprévisibles. Surtout quand ce dessin se veut humoristique et qu’il touche aux croyances. Quelques uns auront interprété le message conformément à la pensée de l’auteur, d’autres lui prêteront des intentions qu’il n’avait pas.

  • @ Hervé: Donc la solution est dans la formation, l’éducation non dans l’interdiction.
    L’humour, la haine, comme la beauté est plus dans l’oeuil de celui qui regarde que dans le trait de celui qui dessine.

    @ Xavier: Pourquoi les musulmans d’aujourd’hui ne seraient pas capables du même état d’esprit que ceux du Xème siècle ? Regarder dans l’histoire, il y a des massacres qui ont été perpétrés pour « la gloire de Jesus et de son Eglise ». Le problème a toujours été plus dans l’usage « politique » du fait religieux que dans le fait religieux lui-même et je pense que Koz ne me contredira pas là dessus.
    En tant que chrétiens, nous sommes plus efficaces en « témoignant » par nos actions qu’en « enseignant » par nos paroles. Mais le premier est infiniment plus difficile que le second…

  • @logopathe : quand BenoitXVI était caricaturé en nazi, vous croyez qu’on n’avait pas atteint les limites de l’éthique? c’était de la diffamation, ni plus ni moins. Nous ne sommes plus dans le domaine de l’humour gras et débile.

    J’entend beaucoup de gens déclarer qu’ils sont choqués par les caricatures, mais qu’il y aurait un « droit au blasphème » type caricatures, parce que en fait, le vrai blasphème, si on s’appuie sur l’Epitre de St Jacques c’est ce que l’on fait au plus petit et qu’il est nécessaire que CH puisse publier tout ce qui leur parait drôle.

    Je souscris totalement à cette notion du blasphème, mais alors, pourquoi oublier aussi que l’illettré, l’inculte ou l’étranger est un petit, perdu dans un monde culturel qui n’est pas le sien?

    Pourquoi oublier Mathieu et Luc, quand ils parlent de malheur sur ceux par qui le scandale arrive?

    Les journalistes de CH revendiquaient « l’irresponsabilité »

    Mais en tant que chrétiens nous ne vivons pas dans un monde désincarné. Nous savons que notre liberté de parole ou d’écriture est aussi limitée par la charité qui nous permet d’essayer de se mettre à la place du « récepteur » , et que nous devons être d’autant plus attentif à ne pas blesser nos frères que nous ne partageons pas la même culture.

    Nous prions pour l’âme des journalistes lâchement assassinés. Mais avons nous le droit d’écarter par incantation un vrai débat sur la liberté d’expression si nous aimons vraiment nos frères? Je pense qu’on doit pouvoir dire aux artistes qui jouent sur la provocation systématique, qu’ils peuvent avilir leur âme en ne posant pas des limites éthiques à leur art.

    Et je suis bien d’accord avec Aristote sur le constat: c’est aux valeurs chrétiennes qu’ils devaient de pouvoir provoquer sans autre réaction qu’un procès éventuel.

  • Logopathe a écrit :

    Mais en attendant, ce qu’on fait là, c’est une manif pour la liberté d’opinion où on exclut un parti pour une opinion. C’est grotesque.

    Tout à fait d’accord. Il serait temps que les adversaires du FN intègrent le fait que MLP est une femme très intelligente et cessent de lui offrir des occasions en or pour mettre en scène sa posture.

  • Hervé a écrit :

    Quand un rottweiler s’échappe d’un chenil il n’est pas utile de s’amuser à l’énerver, il vaut mieux appeler la fourrière.

    Ce ne sont pas des rottweilers, ce sont des êtres humains. Nos frères, comme le dit si bien Koz.

    Logopathe a écrit :

    Et je pense qu’à leur manière, ils respectaient davantage les musulmans, en tant que personnes, que la plupart de leurs congénères de gauche.

    Exactement. Les mecs de Charlie n’ont jamais voulu faire de différence. Ils ne se sont jamais résigné à considérer les musulmans comme une bande de sauvages irrécupérables. D’une certaine façon leurs insultes étaient inclusives. Vous faites partie de la grande famille humaine alors on vous traite comme tout le monde, comme les juifs, les cathos, les pédés, les flics, les noirs, les pauvres, les sportifs, les fachos, les cons, les patrons, les politiciens…

    D’une certaine façon ça rejoint une phrase qui m’a touchée dans le beau texte de Thierry Dussautoir : « mes premières années de primaire m’ont vite appris que j’étais plus bronzé que les autres, que j’avais un drôle d’accent […] Mais mes copains de Périgueux, ils en rigolaient avec moi. Comme on rigolait du maladroit, du grand, du gros, du timide ». Le rire est social. Celui avec qui, de qui on refuse de rire est exclu du groupe. Ce dessin terrible publié par TheOnion il y a 2 ans est une gifle magistrale pour les musulmans précisément parce qu’il ne les cite pas. Nombreux sont les musulmans qui disent qu’aucune caricature ne saurait les choquer plus que de voir des gens massacrés au nom de l’islam. Si on ne fait pas de différence entre eux et les islamistes, on les condamne tous à la barbarie.

    Nos media se sont autocensuré sur l’islam. Une des pires illustrations est ce journal américain qui a publié la couverture de Charlie « Les Intouchables 2  » en pixelisant le musulman mais pas le juif. On a laissé Charlie Hebdo prendre tous les risques en étant le seul à inclure l’islam dans les cibles légitimes de moquerie. Il y a un coté « petit cheval blanc, tous derrière et lui devant » (même si cette image un peu mièvre les aurait sans doute fait ricaner). Comme dit cet article très fin : Je suis Charlie, it’s a bit late.

    Charlie a servi de révélateur, sur notre conception de la liberté d’expression, mais aussi et surtout sur notre perception des musulmans. Sont-ils nos frères humains ou sont-ils des rottweilers?

  • Il devrait quand même être possible de condamner sans réserve aucune les assassins sans sanctifier les victimes. Ce n’est pas la vertu supposée de CH qui rend le crime scandaleux et à l’inverse, les réserves qu’on peut avoir vis-à-vis de CH ne diminuent en rien l’horreur du crime.

  • @ eczistenz:

    Je suis bien d’accord avec ce commentaire, merci !
    Moi non plus, sans être un fan de Charlie Hebdo, je préfère un monde avec eux que sans eux.
    C’est pour cela que je suis Charlie aujourd’hui.
    Ce n’est pas parce qu’ils sont satyres qu’ils ont raison. Ils auront eu le mérite de faire réfléchir et de bouger les dogmatiques. Parfois à raison, parfois à tort, c’est selon, mais toujours par le rire.
    Si on aime le débat et la liberté, on ne peut être que Charlie aujourd’hui, même si on ne cautionnait pas forcément leurs positions.

  • @egdltp,
    J’aimerais bien que l’on puisse former à l’humour de CH les 7 milliards de nos semblables afin qu’ils puissent l’interpréter correctement, cela me semble toutefois inatteignable.

    Avec les réseaux sociaux, il est impossible de maîtriser la diffusion d’une image. Une caricature drôle dans un contexte français peut très bien être utilisée comme instrument de propagande pour fanatiser des assassins potentiels et les amener à haïr l’occident dans un autre contexte.

    @Lib,
    Contrairement à vous peut-être, je ne pense pas que CH s’adressait à tous les musulmans dans ses caricatures. CH ciblait sa charge sur la minorité des Islamistes très violents qu’il ne confondait évidement pas avec l’immense majorité pacifique.

  • Je pense que Koz touche assez juste avec ce questionnement sur être ou ne pas être. Ce que je comprend de cet article, c’est que ce que nous sommes n’importe qu’assez peu, aujourd’hui. Bien sûr que Koz, et beaucoup d’entre nous »ne sont pas Charlie » ! Tapez « Charlie » dans l’outil de recherche de ce blog et vous trouverez un petit historique de la désapprobation de Koz.

    Ces désaccords peuvent paraître anachroniques au vu de ce qui vient de se passer, mais on comprend mal pourquoi ils devraient s’évanouir à tout jamais sous le coup de l’émotion, même intense. Parce qu’ils ne sont pas fondés sur l’émotion, mais sur la réflexion et des conceptions différentes de notre société.

    Mais ce qui importe aujourd’hui, c’est d’être unis, c’est de savoir si l’on peut être frères. Paradoxalement, à trop vouloir que tous « soient Charlie », on risque de rater le coche de cette communion et de cette fraternité.

  • Je partage grosso modo l’avis de Logopathe.
    Bien évidemment les dessins de Charlie Hebdo concernant le pape et les catholiques étaient tout à fait déplaisants. Après avoir été choquée, je me suis détachée et efforcée de ne pas être blessée. Tout d’abord, ce ne sont que des dessins créés par des gens qui se disaient eux-mêmes « bêtes et méchants » dans le précurseur de Charlie Hebdo, Hara Kiri. Ensuite, je me suis dis qu’en tant que chrétienne, il était hélas fatal de subir des attaques. Si ces attaques se limitent à des dessins débiles, cela devrait être supportable. Ce n’est pas comme si on me persécutait comme en Orient. Et puis, la plupart du temps, il est facile d’éviter de les voir. Si on tombe dessus, on peut toujours fermer les yeux ou détourner le regard.
    Ces dessins sont donc devenus pour moi tout à fait dérisoires. J’avais fini par ne leur accorder aucune importance. Et à chaque fois que j’y étais confrontée, je me rappelais les paroles de Jésus « Pardonnez-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font ».

    La réaction de l’Eglise a été tout à fait à la hauteur. Et pour ceux qui ont encore de la rancœur contre les dessinateurs, l’idée que Notre-Dame a fait sonner le glas pour ces bouffeurs de curés devrait les apaiser.

  • @ Hervé:
    Pour l’objet de la formation, je vous renvoie à la réaction de Florence :

    Bien évidemment les dessins de Charlie Hebdo (…) étaient tout à fait déplaisants. Après avoir été choquée, je me suis détachée et efforcée de ne pas être blessée. Tout d’abord, ce ne sont que des dessins créés par des gens qui se disaient eux-mêmes « bêtes et méchants » dans le précurseur de Charlie Hebdo, Hara Kiri. Ensuite, je me suis dis qu’en tant que … (chrétienne/musulman), il était hélas fatal de subir des attaques. Si ces attaques se limitent à des dessins débiles, cela devrait être supportable. (…). Et puis, la plupart du temps, il est facile d’éviter de les voir. Si on tombe dessus, on peut toujours fermer les yeux ou détourner le regard.
    (…)

    En espérant que cela a éclairé ma pensée.

  • Logopathe a écrit :

    @Gwynfrid: bien sûr que Marine Le Pen se réjouit de son exclusion, et a sans doute plus ou moins manoeuvré pour. Raison de plus pour inviter son parti, dans une manif où on invite les partis.

    C’est une idée, mais elle n’est pas très réaliste. Ce serait possible si la gauche était un bloc monolithique. Mais ce n’est pas le cas: si le PS « invitait » (et quelle autorité aurait-il à le faire?) la patronne du FN, il y aurait aussitôt des protestations dans ses rangs. La bonne réponse, si tant est qu’elle existe dans une situation pareille, serait plutôt sur le mode: on ne demande à personne sa carte d’adhérent pour venir à notre rassemblement, si Mme Le Pen veut s’en exclure, c’est son affaire. Car, notez-le bien: personne ne lui a dit de rester chez elle, c’est de sa propre inititiative qu’elle a déclaré ne vouloir venir que si on l’invitait.

    … Mais ce qui précède, de toute façon, n’est que petite politique politicienne. Dans un moment pareil, nos réactions devraient, je crois, se situer au-delà de tout ça: je crois qu’au coeur des Français, qu’ils votent FN ou pas, il y a une tristesse et une horreur unanimes.

    MadeInCH a écrit :

    Si des communeautés avec des valeurs différentes existent en étant très accessible l’une à l’autre, alors l’une disparaîtra, et ses valeurs disparaîtront avec elle.

    Trois cents millions d’Américains sont là pour démentir ce préjugé. Leur système fonctionne depuis plus de deux siècles, et a même survécu à une épouvantable guerre civile (dont les causes n’étaient ni religieuses ni culturelles).

    @ Lib:
    +1 sur l’ensemble de tes remarques, et merci pour les liens.

  • @ Aristote:

    Je ne sanctifie pas le moins du monde Charlie Hebdo. L’exemple cité par Bertrand de Kermel plus haut me paraît en effet choquant: ça visait une personne précise, et la façon qu’ils avaient de faire parfois de l’humour avec des malheurs individuels juste pour avoir l’air cool ne me plaisait pas du tout. En revanche, le raisonnement qui consiste à dire « on insulte mes croyances donc on s’en prend à moi personnellement » me semble clairement pernicieux et liberticide.

    L’affiche de « Amen » (qui disait en gros du catholicisme la même chose que les caricatures danoises sur l’Islam) m’a semblée grossièrement racoleuse, fausse, mensongère. Mais ça ne me serait jamais venu à l’idée de me sentir visé, blessé personnellement, et d’en appeler à la justice (même si certains l’ont fait). L’espace public est partagé, c’est comme ça. Et personne ne trouve le partage équitable, ce qui n’est pas si mauvais signe que ça.

    @Lib: 100% d’accord.

  • Bonjour
    Quelques réflexions
    N’oublions pas les autres victimes de cet attentat : les deux policiers et l’agent de maintenance, celui qui a pris la première balle, qui était marié avec deux enfants.

    La liberté d’expression ne se divise pas, même si certains s’en servent mal, sinon, vous risquez d’arriver très rapidement à ça :
    Beaumarchais, Le Mariage de Figaro (V, 3), 1784
    « il s’est établi dans Madrid un système de liberté sur la vente des productions, qui s’étend même à celles de la presse ; et que, pourvu que je ne parle en mes écrits ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs. »
    Même si certains dessins de CH ont pu me choquer, tout comme ils vous ont choqués , il ne m’est jamais venu à l’idée de vouloir les faire interdire. Je n’achète pas, je regarde ailleurs et je me disais aussi qu’ils auraient un jour à s’expliquer devant le Seigneur.
    Plus que moi, c’est leur propre relation à Dieu qui est blessée.

    Napoléon avait réunit le Grand Sanhédrin en 1807 pour qu’il adapte la loi mosaïque aux exigences de la citoyenneté française, et le résultat fut au delà des espérance, faisant des juifs des citoyens français comme les autres.
    Pourquoi ne pas réunir tous les imams et dignitaires musulmans pour leur faire écrire que
    – l’apostasie n’est pas punie de mort, mais est libre, car la liberté de conscience ne se discute pas
    – on ne lapide pas la femme adultère
    – la femme a une dignité égale à celle de l’homme
    – le djihad est un effort intérieur pour approcher Dieu
    – on a autant le droit de critiquer l’islam que la religion catholique ou l’ump, même de façon bête et méchante.
    Je crois aussi qu’il est indispensable que les fidèles musulmans fassent eux mêmes le ménage dans les mosquées en expulsant les imams « intégristes » et en dénonçant les jeunes en voie de radicalisation

  • Pingback: Après Charlie | Des hauts et débats

  • Logopathe a écrit :

    Je ne sanctifie pas le moins du monde Charlie Hebdo.

    Mon commentaire ne s’adressait pas particulièrement à vous ! Sur le fait qu’il faille reconnaître à CH la cohérence de traiter l’islam comme il traite toutes les religions, je suis en accord avec vous. Et je suis partisan de la liberté de blasphémer.

    Ma réserve vis-à-vis de CH est l’incohérence que je ressens entre pisser pratiquement sur toutes les valeurs et revendiquer la protection de certaines d’entre elles.

  • @Koz. Personne n’a revendique qu’etre Charlie etait d’etre d’accord avec leurs caricatures… etre Charlie c’est lutter contre l’obscurantisme qui les a assassines.
    Etre pour la liberte d’expression et vivre ensemble c’est accepte les opinions differentes des siennes, y compris celles qui nous heurtent et repondre a l’ecrit par la justice et l’ecrit mais non par le meurtre.
    Qui plus est vous vous targuez de ne tenir que des propos qui n’offensent les convictions profondes de personne, qu’en savez vous? Croire en un autre Dieu que le leur offense dans leur conviction profonde beaucoup de gens. L’image que vous donnez des dessinateurs qui viennent d’etre assassines m’offense sincerement. Devez vous vous censurez? Dois je me rejouir si quelqu’un vous assassine? Pensez vous qu’il y ait une reference universelle de ce qui offense ou ce qui n’offense pas?
    Enfin puisque vous vous referez aux medias americains, vous pouvez aussi lire the Newyorker en plus de regarder Fox News:
    http://www.newyorker.com/news/news-desk/blame-for-charlie-hebdo-murders?intcid=mod-most-popular
    Sincement je pense que plus nous serons dimanche (ou samedi pour les NYkais)plus les victimes et familles de victimes se sentiront soutenus. Ce serait dommage de propager de fausses bonnes raisons de ne pas le faire.

  • Merci à vous d’écrire ces choses si justes. C’est exactement ce que je ressens, j’ai du mal à me positionner sur le fait d’être ou ne pas être Charlie, merci pour ce billet très éclairant.

  • C’est agaçant…, y’a rien à redire , pas de critiques à faire, pas de bémol à emettre … Si , juste une chose à dire : vraiment merci

  • Aristote a écrit :

    je suis en accord avec vous. Et je suis partisan de la liberté de blasphémer.

    En tant que citoyen je comprends ce point de vue.
    En tant que chrétien, sachant que le blasphème blesse certains croyants il faut s’en abstenir.

    J’ajoute en tant que citoyen d’une république qui a introduit dans sa Constitution le principe de précaution, qu’il conviendrait d’éviter d’exacerber les fanatismes assassins.

  • @ Hervé: eh bien on vit dans une république laïque et non dans un État chrétien. Ce serait déjà prendre les croyants pour des imbéciles (ou des gens uniformément dangereux) que de s’abstenir de publier des dessins outranciers. Quant au principe de précaution… Alors déjà il s’applique dans des domaines techniques et scientifiques, non envers une des libertés les plus fondamentales de notre pays, et c’est encore une fois faire passer les journalistes de Charlie, soit pour des inconscients, soit pour des dangereux agitateurs (un peu comme plus haut en fait, n’est-ce pas ?) et c’est véritablement odieux, je n’ai pas d’autre mot. Vous croyez vraiment que s’il n’y avait pas eu Charlie, la France n’aurait jamais eu affaire avec le fondamentalisme islamique ? Vous pensez vraiment que les Français n’auraient pas été des ennemis attitrés de Daech ? Peut-être vaudrait-il mieux faire passer son pays avant sa foi, en règle générale et particulièrement en ce moment.

  • @ Hervé:

    Considérer que des propos ou des dessins peuvent « exacerber des fanatismes assassins », c’est déjà céder du terrain à ces fanatismes.

    Appeler à ne pas blasphémez pour ne pas blesser les gens, ça je comprends.

    Appeler à ne pas blasphémer pour ne pas « exacerber les fanatismes assassins », ça je ne comprends pas du tout.

    A titre personnel, je ne blasphème pas délibérément devant des croyants. Non que je prenne vraiment au sérieux la « blessure » qu’ils en ressentiraient. Mais je ne vois pas l’intérêt ni le courage qu’il y a à affronter les gens de face sur leurs faiblesses (car c’en est bien une).

    Pour autant, je pense qu’il est nécessaire qu’à un niveau plus collectif, des gens le fassent. Parce qu’il ne faudrait pas se laisser aller à prendre au sérieux les « souffrances symboliques ». Et on commence à le faire beaucoup trop à mon goût. La considération des véritables souffrances qui affectent encore l’humanité devrait conduire tout individu à s’interdire ce genre de petit luxe autocomplaisant.

  • Quand on lit ce genre de choses, notamment, je pense que nos questions métaphysiques sur « dire ou ne pas dire Je suis Charlie » (c’est plutôt de ça qu’il s’agit) deviennent largement oiseuses: http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/01/10/a-saint-denis-collegiens-et-lyceens-ne-sont-pas-tous-charlie_4553048_3224.html

    « C’est dangereux. S’ils ont tué Charlie, c’est parce qu’il ne respectait pas la religion. Ils ont attaqué l’islam, et là, ils voient un autre aspect de l’islam, la colère. Si Charlie continue, les jeunes ici vont bouger. »

    « Je l’ai fait pour ceux qui ont été tués, mais pas pour Charlie [Charb], le mec qui a dessiné. Je n’ai aucune pitié pour lui. Il a zéro respect pour nous, les musulmans. Mais ce n’était pas la peine de tuer douze personnes. Ils auraient pu ne tuer que lui. »

    Bien sûr, ce sont des gosses, et les gosses ça dit des bêtises. Mais je pense qu’il faudrait être un tout petit peu plus tranché sur le message, et laisser les nuances pour plus tard.

  • Je ne le crois pas. On veut leur demander à toutes forces de s’identifier à ceux qui leur crachaient au visage. Je crains que ce soit le meilleur moyen de l’empêcher. Les propos que vous citez sont totalement inacceptables, d’autres dans le même article traduisent davantage un malaise, tout en condamnant l’attentat. Mais aujourd’hui, je veux surtout que ces enfants-là soient Français, pleinement Français, c’est-à-dire conscients de faire partie d’une communauté nationale et, pour cela, refonder la France.

    Qu’on abandonne les nuances ailleurs, si vous voulez – et encore. Mais qu’on les abandonne ici, je n’en vois pas la nécessité.

    Soit dit en passant, dans la colonne des Brèves – que certains ont peut-être vue passer, et qui va remplacer le Tumblr dans son rôle de revue de web – j’ai aussi précisé pourquoi je marcherai demain : Je suis Français : dimanche, je marche

  • @ Koz:

    « On veut leur demander à toutes forces de s’identifier à ceux qui leur crachaient au visage. »

    Et alors, j’y arrive bien, moi. Et n’est-ce pas l’objectif? Comprendre que « celui qui nous crache au visage », il est nous? Mais vous n’avez pas tort, c’est sans doute irréaliste de faire passer le message quand on part de si loin. Ca reste pourtant le but à atteindre, à mon sens.

  • @Anna et logopathe
    Logopathe a écrit :

    Considérer que des propos ou des dessins peuvent « exacerber des fanatismes assassins », c’est déjà céder du terrain à ces fanatismes.

    Pour moi, c’est simplement faire le constat d’une réalité pour essayer de la prendre en considération avec pragmatisme. En France on préfère trop souvent agir par idéologie.

    Charb citait le cas d’un chauffeur de taxi qui avait « viré » de son véhicule un de ses camarades en le traitant de raciste apprenant qu’il était de CH. Cela le perturbait et je comprends ce trouble.

  • Je suis Française, je suis libre de mes opinions, j’ai conscience d’avoir une conscience que personne ne pourra jamais s’approprier.
    Je condamne le crime odieux.
    Mais Je ne suis pas charlie ! Ni charlie ni personne je suis une femme LIBRE !!
    Dimanche je réciterai le Rosaire pour mon pays la France.

  • Comment ne comprenez-vous pas, que « Je suis Charlie », ça ne signifie pas approuver forcément le contenu de « Charlie Hebdo ». Ça signifie être pour la liberté de la presse, pour la liberté d’expression, pour le droit à l’irrévérence, même quand on n’est pas d’accord avec ce qui est publié ou dessiné. « Je suis Charlie », ça signifie : je suis pour qu’on ait le droit de critiquer les religions, comme tout système de pensée et de croyance, et même d’en rire, sans craindre pour sa vie, pour un article ou un dessin. Croyez-vous vraiment qu’il suffise d’un dessin choquant pour faire douter un vrai croyant ? D’innombrables personnes en France et dans le monde entier se sont mobilisées au nom de la liberté de la presse attaquée par des tueurs, comme si nous vivions dans la première dictature religieuse venue. Et vous, qui avez la chance de vivre dans un pays démocratique, vous vous proclamez fièrement contre la liberté d’expression.

  • @ Mary… merci pour son commentaire. Beaucoup d’hésitations aussi à être ou ne pas être Charlie. Je le suis pour les raisons évoquées. Martine Abidjan sur FB

  • Hervé a écrit :

    En tant que chrétien, sachant que le blasphème blesse certains croyants il faut s’en abstenir.

    Bien sûr. Mais être partisan d’une liberté, c’est aussi se préparer à la voir abuser, même si soi-même on essaie tant bien que mal de rester dans les clous du bon sens.

  • @ Bertand de Kermel:
    Le patron de presse était Emilien Amaury, patron du Parisen Libéré; C’est Libération qui a titré en première page: « Le cheval d’Amaury sort indemne d’un accident »

  • « Pardonnez-nous nos offenses, comme nous les pardonnons à ceux qui nous ont offensé »
    Je ne suis pas du tout lectrice de Charlie hebdo, mais je me sens faire partie de la fratrie, en tant qu’humaine, de ces personnes abominablement massacrées et en cela je serai sans doute « charlie » pour le coup.
    Quant à pardonner aux trois lâches qui ont exécuté ces dix sept innocents,c’est très très dur,mais je m’efforcerai de prier pour leur salut,et c’est la justice de Dieu qui aura le dernier mot.

  • Je suis catholique romain et français depuis ma naissance moi aussi, mais est-on vraiment obligé de balancer à la figure des gens ce nationalisme exagéré? Ne peut-on pas seulement marcher pour des victimes innocentes au lieu de profiter des événements pour ses conforter dans ses idées sans se remettre en question ou même faire une petite trêve?
    Je vous en prie, on croirait voir un américain défendre et justifier le port d’armes dans son pays, suite à une tuerie.

  • Hervé a écrit :

    J’ajoute en tant que citoyen d’une république qui a introduit dans sa Constitution le principe de précaution, qu’il conviendrait d’éviter d’exacerber les fanatismes assassins.

    Bonjour,

    suis je le seul à penser que si, comme cela me semble probable, notre pays rentre dans une phase de déclin prononcé, le meilleur symbole de ce déclin sera le principe de précaution ?

  • Bonjour,

    après deux jours, mes réflexions sur les évènements ont un peu changé.

    Je crois que ces évènements sont d’abord un problème de sécurité public qui risque de rester avec nous à long terme, car les ingrédients qui pousent à la radicalisation sont largement répandus. Des centaines d’évènements de ce type peuvent encore se produire, et il n’est pas évident de faire du préventif: il semble assez extrême de construire un guantanamo à la française sur les iles khergelen pour y parquer tous les radicaux français revenus du Jihad en Syrie ou au Yémen même s’ils n’ont pas commis de crime, mais je ne suis pas sûr qu’il y a beaucoup d’autres mesures efficaces (peut-être une petite NSA locale). L’insécurité qu’apporterait une série d’attentats de ce type aurait des conséquences significatives, dont l’émigration très probable d’une grande partie de la communauté juive de France vers Israel (ce que, pour être clair, je regretterais profondément), et aussi probablement une recompositon du paysage politique français.

    Je ne suis pas sûr que toutes les bonnes leçons aient été tirées de ces attentats, en particulier sur le besoin d’un minimum de politesse et d’estime pour tous les citoyens respectueux des lois, et sur un minimum de consensus social (autour de la démocratie, des libertés individuelles, probablement aussi d’un minimum de solidarité). Le gauche radicale que représente Charlie est pour moi un des premiers coupables de cet absence de consensus, et quand je vois certaines réactions après cet attentat (de Willem, de SOS racisme…), je ne suis pas sûr que nous allons progresser beaucoup, ce qui est dommage.

  • @ Jb : les événements actuels nous invitent à respecter plus encore la liberté d’expression, y compris celle de dire des bêtises. Et, franchement, si mon propos vous paraît être non seulement du nationalisme mais encore du nationalisme exagéré, alors nous avons un problème. Le reste de votre commentaire, sur le port d’armes, est tout simplement ridicule. Mais vous avez le droit de l’être.

    @ Uchimizu : nous n’en tirerons les leçons qu’avec les semaines, les mois et les années et seulement parce que certains s’attelleront à le faire.

    @ Logopathe : pour le coup, en effet, je pense qu’il faut partir de l’existant, du niveau d’instruction voire d’élévation relatif d’un certain nombre d’entre eux. Sans compter tout simplement l’âge de certains.

  • Par rapport à la liberté d’expression est-il possible sur internet de bloquer les appels aux meurtres, à la haine de certains? Est-il possible de mettre sur internet des limites comme il en existe pour la presse écrite, la radio, la télé et les propos et les écrits de chacun d’entre nous?

  • jfsadys a écrit :

    Par rapport à la liberté d’expression est-il possible sur internet de bloquer les appels aux meurtres, à la haine de certains?

    En théorie, oui. Il est légalement possible de poursuivre les auteurs identifiés d’appel au meurtre sur Internet.

  • Anna a écrit :

    n vit dans une république laïque et non dans un État chrétien. Ce serait déjà prendre les croyants pour des imbéciles (ou des gens uniformément dangereux) que de s’abstenir de publier des dessins outranciers.

    En effet, une République laïque qui a 3 principes forts : Liberté, égalité, fraternité.

    La Fraternité devrait conduire à ne pas blesser autrui inutilement.
    C’est à dire à trouver un juste équilibre entre le respect de la liberté et de la fraternité.
    Il doit-être possible de dénoncer les crimes sans se moquer des croyances et de l’ensemble des croyants.

  • Aristote a écrit :

    jfsadys a écrit :

    Par rapport à la liberté d’expression est-il possible sur internet de bloquer les appels aux meurtres, à la haine de certains?
    En théorie, oui. Il est légalement possible de poursuivre les auteurs identifiés d’appel au meurtre sur Internet.

    Bonjour,

    avec un peu d’organisation, je crois que l’on peut obtenir sur internet un anonymat qu’il coûte très cher de rompre.

  • @ Uchimizu:

    Oui, mais en fait sur twitter comme sur facebook, il y a beaucoup d’appels à la haine ou au meurtre de la part d’internautes qu’il ne serait pas très difficile d’identifier. En fait, la justice n’a jusqu’ici pas montré beaucoup d’ardeur à poursuivre. Parce qu’il y en a trop? Parce que beaucoup de ces « appels » ne sont pas réfléchis, plus des signes d’immaturité qu’autre chose ? Parce qu’on n’a pas vraiment de sanctions adaptées ?

    Cela changera-t-il ?

  • Devant une des entrées de mon église paroissiale, un tag rouge sur le sol : « Je suis Charlie », en lettres majuscules.

    Comment faut-il le comprendre ?

    Je ne vais pas nier mon malaise.

  • Merci pour ce long et très bon article. Au moins un point de désaccord tout de même : « J’ai pensé que je devais porter mon regard sur plus important, qu’en s’abaissant de la sorte, ce n’est pas moi qu’ils diminuaient ». Ils s’abaissent, dites-vous ? En fait, je crois qu’ils ont toujours éssayé de nous élever. Ils ont la distance qui nous manque malheureusement chaque jour pour examiner en vérité, nos vies … ils ont l’humour que nous n’avons pas, plus, ou qui nous fait parfois défaut. Y compris dans nos vies chrétiennes. Nous sommes trop souvent idolâtres, collés à nos croyances, bourrés de certitudes, comme l’étaient leurs bourreaux. Les dessins de Charb, Cabu et des autres de Charlie rejettent toute forme d’idolâtrie, ils s’en moquent et en cela ils ont mille fois et toujours raison. L’idolâtrie est une forme d’obscurantisme qu’il faut combattre. Ils devraient nous inspirer en fait, un peu plus d’humilité. C’est pour leur regard lucide sur nos faiblesses qu’ils ont toujours (les caricaturistes) été indispensables à la société. Aujourd’hui leur mort est odieuse, révoltante et tragique. L’humour, c »est malheureusement, ce qui a manqué à leurs tortionnaires et qui manquera toujours aux idolâtres, à ceux qui voient un blasphème dans un dessin humoristique.

  • Aristote a écrit :

    @ Uchimizu:

    Oui, mais en fait sur twitter comme sur facebook, il y a beaucoup d’appels à la haine ou au meurtre de la part d’internautes qu’il ne serait pas très difficile d’identifier. En fait, la justice n’a jusqu’ici pas montré beaucoup d’ardeur à poursuivre. Parce qu’il y en a trop? Parce que beaucoup de ces « appels » ne sont pas réfléchis, plus des signes d’immaturité qu’autre chose ? Parce qu’on n’a pas vraiment de sanctions adaptées ?

    Cela changera-t-il ?

    Bonjour,

    c’est vrai qu’il faut pouvoir trier: à chaque match de football, il y a 20.000 coupables d’appels au meurtre et d’apologie de la violence.

  • Gilles a écrit :

    En fait, je crois qu’ils ont toujours éssayé de nous élever.

    Pour tout vous dire, au-delà même de leur sujet, j’ai surtout généralement trouvé leurs dessins faciles et mauvais (enfin, surtout leurs Unes, n’ayant jamais acheté leur journal – dont j’ai malgré tout vu passer quelques exemples). Représenter Marie les jambes écartées, avec Jésus entre les jambes. Oui, bon. Luz disait, dans les Inrocks, qu’ils n’étaient qu’un « putain de fanzine », un « fanzine de lycéens », bref, un truc juste pour se fendre la poire. Dans ce cas, ils doivent choisir : soit ils portent un message politique (ce que Charb semblait vouloir) soit ils sont juste un gros truc de déconnade. Trop souvent (pas toujours), j’ai eu l’impression d’avoir affaire à des adolescents qui réclament le droit de dire « bite » et « trou du cul » et n’importe quelle connerie sur tous les sujets sensibles. C’est une liberté, mais je ne peux pas dire qu’elle m’élève.

    @ jfsadys : juridiquement, c’est le cas. C’est sur la technique que cela coince. Les autorités elles-mêmes ne peuvent pas surveiller tout ce qui passe et déléguer cette tâche aux fournisseurs d’accès ou aux hébergeurs est délicat. C’est un équilibre que la législation française (et les autres législations) tente de trouver mais qui est difficile à atteindre.

  • @ Koz: Merci de votre réponse. A chacun de nous alors à sa manière de mettre de l’antidote et de l’antivenin sur internet. En attendant que techniquement cela soit possible de faire appliquer les lois existantes contre le racisme, la haine, l’appel au meurtre..

  • @Gilles,
    Quand les citoyens ne doivent pas afficher sur la voie publique des signes ostentatoires de leurs croyances, il semblerait équilibré de demander aux non-croyants de ne pas afficher sur cette même voie publique ce qui peut être compris comme l’expression de leur mépris, ou de leurs sarcasmes (même s’ils le font avec talent et humour). Cela n’empêcherait pas les auteurs de publier et les amateurs d’acheter.

    Ce serait le signe d’une laïcité équilibrée.

  • Koz a écrit :

    Il s’agit de se montrer fermes face aux conceptions qui contredisent la foi chrétienne, comme le refus de l’égalité hommes-femmes la contredit. Cela me semble clair.

    Justement non, je ne trouve pas que cela soit clair. On ne comprend pas si pour vous l’égalité hommes-femmes c’est l’idée selon laquelle il n’y a aucune différence entre un homme et une femme, à part des mamelles et des hanches un peu plus proéminentes chez cette dernière, ou si ça désigne autre chose. Excusez-moi, mais dans le contexte actuel, le mot « égalité » est piégé et l’employer sans précision (puisque votre note de bas de page n’en donne aucune) ne fait que créer de la confusion.

  • Koz a écrit :

    Ahmed Merabet (dont l’islam semble au passage avoir été compatible avec le sang versé pour sa mission au service de la France)

    Cela invalide l’idée selon laquelle il n’y a pas un seul musulman en France qui fasse honnêtement et courageusement son travail. Mais qui défend cette idée? Oh, on peut sans doute trouver quelques énergumènes dont c’est la thèse, mais franchement est-il nécessaire de prendre le temps de leur répondre et y a-t-il lieu de tirer satisfaction du sentiment d’avoir prouvé qu’ils ont tort?

    La grande question semble être de savoir si les musulmans, dans leur majorité, approuvent ou désapprouvent les attaques de la semaine dernière. Beaucoup de gens semblent se contenter de la certitude que la grande majorité des musulmans les condamnent pour être tout à fait rassurés. Pour ma part, je ne suis pas certain que la grande majorité des musulmans auraient été prêts à risquer leur vie, comme M. Merabet l’a fait, pour protéger les journalistes de Charlie Hebdo. Mais je n’ai pas besoin de cette certitude pour savoir qu’il y a un problème. Je veux bien faire l’hypothèse que 99% des musulmans sont pacifiques. On nous dit qu’il y a quatre millions de musulmans en France. A vrai dire, je pense qu’en comptant toutes les personnes issues d’une culture musulmane et susceptibles d’y retourner dans le cadre d’une quête identitaire ou spirituelle, il y en a bien plus que quatre millions. Mais peut importe. Admettons qu’il n’y en ait que quatre millions. Nous disions donc qu’un pour cent des musulmans ne serait pas pacifique. Ca nous amène à 40 000 personnes présentes sur le territoire français, qui peuvent à un moment donné s’armer d’une machette ou d’une kalachnikov et marcher dans les pas de Merah ou de Kouachi.

    Il faut garder à l’esprit que la présence musulmane en France n’est pas une fatalité, contrairement aux tempêtes qui emportent parfois des Bretons et aux avalanches qui tuent à l’occasion des Savoyards. Elle est entièrement due à des choix politiques effectués tout au long de ces cinquante dernières années. Il va donc falloir expliquer aux Français (de souche) ce que les musulmans leur apportent pour compenser le fait que parmi eux un certain pourcentage (quand bien même serait-il faible) ait pour projet de les dézinquer à coup de kalash.

    Vous l’aurez compris, il ne s’agit pas de dire que tous les musulmans sont des menteurs qui attendent le bon moment pour nous sauter à la gorge. Il s’agit de dire que la présence d’une communauté musulmane en France implique qu’un certain nombre de Français soient tués au nom d’Allah, que de très nombreux Français vivent dans la peur et que les contribuables français doivent payer des millions pour financer des opérations anti-terroristes en tout genre. Et tout cela c’est la conséquence de l’immigration. Il faut donc condamner la politique migratoire de ces dernières décennies et en changer radicalement. Du moins c’est mon avis.

  • Merci pour ces réflexions qui mettent en lumière des réflexions intéressantes. Ces évènements ont eu aussi l’intérêt de créer des débats de fond, ce qui est essentiel dans une société.
    Maintenant, il faudrait sans doute que la presse rédige un code déontonlogique pour se prendre elle-même en main et s’interdire de blasphémer ou de choquer. Personne n’en a parlé, mais une profession peut combler un vide juridique et avoir une règle de conduite, comme cela a été fait dans d’autres métiers.

  • Encore un billet où j’apprécie la nuance et la mesure de ce blog. Je marche à fond pour les libertés fondamentales, et en même temps, je n’arrive pas à me débarrasser d’un léger malaise par rapport au consensus « Je suis Charlie ».

    Je crois que ma gêne vient de ce que la Liberté à la façon « Charlie » piétine un peu trop la Fraternité. Sur le fronton de nos mairies, il y a trois mots qui prennent leur sens ensemble, et toute la vie civique, y compris la publication de caricatures, doit pouvoir conjuguer les trois intentions. C’est comme ça que je comprends les valeurs de la république française.

    Je vois bien la difficulté de discerner à partir de quelle limite l’humour commence à bafouer la fraternité. Mais par exemple, je ne mets pas exactement dans la même rubrique le dessin où Mahomet se plaint d’être « aimé par des cons », et ceux où il est représenté avec obscénité. Dans le premier, je vois non pas une offense gratuite mais un trait dont chaque musulman peut se sentir exempt. Alors que dans le deuxième, tout croyant est indifféremment insulté. L’obscénité systématique concernant les symboles forts me laisse un doute sur l’intention fraternelle.

    Je veux défendre Liberté Égalité Fraternité. La liberté seule, j’en ai un peu peur.

  • @ Hervé:
    Je vous esquisse rapidement un brin de réponse (ainsi qu’à @adam et @nathmonfort. La fraternité n’équivaut pas à un respect immodéré. Ou alors faut-il distinguer deux conceptions, celle d’une fraternité républicaine -pour un « vivre-ensemble » de concitoyens-, et celle d’une « fraternité chrétienne » -qu’il ne m’appartient pas de définir- ?

    Encore une fois, CH n’a jamais fonctionné sur la haine de l’autre en visant toute une population ou un groupe. Pour ce qui est de caricatures de personnages saints, relisez-donc le commentaire de Gilles. Au passage quand vous parlez de voie publique, il me semble que les journaux ne tombent pas du ciel : au pire, vous pouvez malencontreusement apercevoir la une d’un Charlie dans un kiosque, et les autres obscénités resteront bien au chaud à l’intérieur de l’hebdo, loin de votre regard, non ?

    Alors vraiment, où est l’obstacle à la fraternité ? En quoi la critique et la provoc devraient être abolies en son nom ? On peut d’ailleurs estimer une personne, la « regarder » comme son frère, sans adhérer à tout ce qu’elle croit et pense, et sans avoir à s’en cacher. CH n’a jamais caché son credo dans la lignée de Hara-Kiri, « journal bête et méchant » (et hilarant). Ah et puis Koz, si, je vous assure, on peut déconner sur la politique sans délivrer de message politique (je parle des dessins, et les déclarations de Charb relèvent -relevaient, pardon- de son opinion propre.
    Et si la fraternité s’exerce entre des êtres humains ,alors en quoi s’attaquer à des symboles (ah ça oui, le propre de Charlie, c’est même pour ça qu’il a été fondé) c’est faire fi de la fraternité ?

    Pour finir, encore une fois je trouve qu’il est aberrant de voir des gens qui veulent une déontologie afin de ne pas blasphémer ni choquer, là n’est pas le problème (dur, dur de savoir où s’arrêter si en plus on s’éloigne de l’affront des croyants pour élargir à tout ce qui choque. Personnellement, le mot n’est pas de trop, j’ai été choquée à la fois par l’article, et par de nombreux commentaires, mais voyez-vous, vous aviez envie de vous exprimer et ça ne m’empêche pas de vous répondre).

    Cette querelle sur les mots fait des premières victimes, les caricaturistes, des coupables/responsables, je n’en reviens toujours pas. J’espère que vous consulterez le Charlie de demain.

  • Effectivement, cité doublement par TF1 dans le journal de 20h du 13 janvier !

    « Etre ou ne pas être Charlie » choisi par TF1 comme titre du sujet.

    A un moment donné référence est faite aux blogs catholiques et apparaît la page du site Koztoujours et :

    « Si être Charlie, c’est valoriser l’insulte aux convictions profondes de l’autre comme modalité du « vivre-ensemble », j’ai bien du mal à être Charlie. »

  • Anna a écrit :

    Personnellement, le mot n’est pas de trop, j’ai été choquée à la fois par l’article, et par de nombreux commentaires

    Là je suis un peu perdue : rien qui soit susceptible de choquer sur les Unes de CH, non vraiment, tandis que là, ici sur ce blog, on risque de choquer maladroitement. Aïe.

    Anna a écrit :

    Encore une fois, CH n’a jamais fonctionné sur la haine de l’autre en visant toute une population ou un groupe.

    Sans doute, sans doute. Je l’admets mieux depuis que j’ai lu et entendu les témoignages de ceux qui connaissaient la personnalité des dessinateurs. Mais vous pensez que beaucoup de gens comprenait ainsi les unes de CH ? Quand on exerce un métier de communiquant, n’est-il pas léger de ne juger que de l’intention de l’émetteur du message, sans se préoccuper de ce qui pourra être compris à la réception ? Je voulais seulement souligner qu’à mon avis un communiquant ne peut pas faire l’économie du concret, même s’il est humoriste.

    Anna a écrit :

    La fraternité n’équivaut pas à un respect immodéré

    On peut couper les cheveux en quatre pour multiplier les définitions de la fraternité, ou pour évaluer les degrés de la notion de respect jusqu’à son niveau le plus « immodéré ». Mais plus simplement je crois au bon sens partagé pour discerner avec bonne volonté. Et pour ce qui est de la nuance, je donnais un exemple à la fin de mon commentaire.

    Anna a écrit :

    Cette querelle sur les mots fait des premières victimes, les caricaturistes, des coupables/responsables, je n’en reviens toujours pas

    Non, ce n’est pas du tout cela. Ils sont victimes, point. Le billet évoque les limites du slogan « je suis charlie », c’est tout. Je m’unis aux actions pour la liberté de la presse et en mémoire des victimes de cet horrible attentat. Mais reconnaissez qu’il reste permis de réfléchir aux formes d’humour qui paraissent les meilleures.

    A ce propos, je viens de voir un dessin que je trouve correct : Jésus y interpelle Mahomet au sujet d’une nécessaire « suite » à donner au coran. Et ce dessin vient en contrepoint parfait à l’excellente « lettre ouverte » que Danette nous signale dans son commentaire du 10 janvier à 10h01. Voici le lien du dessin : http://www.europe1.fr/faits-divers/une-caricature-de-mahomet-dans-un-journal-australien-2340207. Ça interpelle mais ça n’insulte pas. Nuance. Pour reprendre les mots de Koz, on n’est pas tenus de « sacraliser l’agression et l’insulte » pour défendre la liberté de critiquer ou d’interpeler. Et je voudrais donner du poids à la fraternité, comme une clé pour bien décliner cette liberté.

  • Anna a écrit :

    Cette querelle sur les mots fait des premières victimes, les caricaturistes, des coupables/responsables, je n’en reviens toujours pas.

    Non.

    Je défends sans réserve aucune la liberté de CH de dire ce qu’il veut. Les terroristes n’ont aucune excuse.

    je suis le frère de Charlie.

    Je ne suis pas Charlie.

    J’ai le droit de critiquer Charlie et même, comme il le fait régulièrement à mon égard, le « droit » de l’insulter. Non, je ne veux pas user de ce dernier droit.

  • Anna a écrit :

    La fraternité n’équivaut pas à un respect immodéré.

    Juste un respect des croyances de l’autre, cela ne me semble pas immodéré, (ce qui ne signifie pas de les partage)r.

    Je viens d’écouter une interview de Geluck, pourtant proche de CH qui développe la même idée. On peut très bien dénoncer les atrocités des Islamistes intégristes sans représenter le Prohète. Non pas pour se soumettre mais simplement pour ne pas blesser l’immense majorité des musulmans pacifiques de par le monde.

    Pour votre info, un article de Jacques-Allain Miller ( Le Point), un grand psychanalyste athée:

     » le sacré n’est pas un archaïsme, …,c’est une fiction, …mais celle qui fait tenir ensemble les signes d’une communauté, la clé de voute de son ordre symbolique. Le sacré exige révérence et respect… » « …nulle part …., il n’a été licite de tout dire ».

  • Anna a écrit :

    Peut-être vaudrait-il mieux faire passer son pays avant sa foi, en règle générale et particulièrement en ce moment.

    Cette hiérarchie n’a pas lieu d’être, du moins dans un pays tel que le nôtre, qui respecte la liberté de religion et sépare État et Église.

    Par ailleurs, vos remarques me frappent par la demande d’alignement général que vous manifestez. Vous êtes choquée que l’on émette en ce moment des réserves sur Charlie Hebdo. C’est votre droit, bien entendu. Mais l’esprit Charlie, c’est justement le contraire de ce genre d’unanimité.

  • « Le blasphème n’existe pas dans le droit français et n’existera jamais » (Manuel Valls). Les seules limites à la liberté d’expression sont la diffamation et les incitations à la haine. Et c’est très bien ainsi. La laïcité est une force, nous le mesurons encore plus aujourd’hui. « Je suis Charlie », il faut le prendre comme un message fédérateur de partage de ces valeurs (liberté et laïcité), évidemment pas comme « je suis abonné depuis 20 ans à Charlie Hebdo et j’adore ce qu’ils font ». Sinon, il n’y aurait pas eu 4 millions de personnes dans la rue dimanche.

    En ces temps dramatiques et troublés, il faut effectivement se concentrer sur l’essentiel et ne pas mégoter sa solidarité ni exprimer des réserves sur des victimes qui ne seraient pas si « innocentes » que cela (la pente serait vraiment trop glissante vers l’innaceptable « après tout, ils l’ont bien cherché »).

  • Pingback: Etre ou ne pas être Charlie, là est donc la question | La Plume d'Aliocha

  • Bon, je réponds encore, au risque d’être un peu longue ou de me répéter. Lira qui voudra mais au moins ce sera clair.

    D’abord je n’ai jamais dit que les unes ou le journal en général n’étaient pas susceptibles de choquer (cf mon premier commentaire). J’ai exprimé mon point de vue, ma lecture de cet article, et oui son fond me déplaît comme je l’ai exprimé. Pour autant je n’ai jamais remis en cause l’horreur et l’effarement que vous aussi avez ressentis, mais j’ai voulu dire pourquoi votre mise à l’écart du Je suis Charlie me gênait d’après les justifications fournies. Au départ c’était bien une discussion sur une expression, un slogan, même si elle fait surgir bien d’autres implications. Soit dit en passant, je ne suis pas non plus très attachée à ce slogan, mais pour des raisons différentes…

    Enfin bref au moins en tirant mon propos par les cheveux, on en vient aux questions de lecture et d’interprétation. Tous les textes autres que purement pratiques peuvent se lire selon différents angles, il me semble. Ce que savaient les dessinateurs de Charlie, et oui sans aucun doute savaient-ils alors qu’ils faisaient ce que certains d’entre vous ont considéré comme des entorses à la fraternité. Oui, on peut mal le prendre (vraiment, où voyez-vous que j’en ai douté ?), mais la ligne de conduite de Charlie n’a jamais été préoccupée de préserver les sensibilités des uns et des autres. Le parti pris fondamental était bien de dézinguer tout ce qui bouge, si vous me permettez, que ce soit en politique ou au plan religieux.

    J’ai bien compris que c’est cela qui vous dérange. Mais, pour moi, comme pour d’autres (comme certains commentaires l’ont montré), cette liberté « destructrice » doit s’exercer, même si elle blesse, choque, et blasphème, parce que je ne pense pas qu’il y ait des formes d’humour qui soient meilleures que d’autres simplement parce qu’elles épargneraient ce qui vous exaspère et vous offense. Pour moi comme pour d’autres, cette forme-là est légitime, et j’espère qu’elle ne s’éteindra pas en France (qui effectivement dispose de lois moins restrictives que dans d’autres pays sur la liberté d’expression) .

    Alors là oui, on n’est pas forcément d’accord, mais je tenais à le dire, sans chercher à recueillir votre unanimité ! Au passage, Charlie hebdo ne faisait pas toujours dans le vulgaire ou le blasphème (à la façon du dessin partagé par nathmonfort), mais je ne nierais pas que je ne ressens pas vraiment d’indignation quand ils dépassent ces limites, et je n’ai pas l’impression d’être particulièrement méprisante à l’égard d’une communauté quelconque si ça me fait rire, certainement parce que je n’accorde pas la même valeur aux symboles religieux que d’aucuns.

    Je reviens là-dessus, mais si je cherchais l’alignement général, je ne m’escrimerais pas à commenter un blog chrétien et n’émettrais aucune réserve sur le slogan -ou la marche à Paris- Je suis même bien contente d’avoir cliqué sur le lien qui m’a conduite ici, de voir ces questions soulevées. Pas sûre que l’esprit Charlie ait à voir, sinon j’aurais posté un vilain dessin en guise de réponse !

    Merci pour l’article italien (je ne me lance pas en revanche dans son commentaire) Je n’ai pas écouté Geluck, mais je ne pense pas qu’il condamne d’une manière ou d’une autre des gens qu’il qualifie « d’amis ». Je l’écouterai plus tard, et je vérifierai dans Le Chat la façon dont il traite les sujets religieux (je crois me souvenir que les femmes voilées sont un thème assez récurrent). Quant à l’article du Point, je l’ai sous les yeux en fait. Il me semble que Miller fait bien le constat de la force du sacré, sans pour autant trancher. « la question -question de vie ou de mort- sera de savoir si le goût du rire, le droit de ridiculiser, l’irrespect iconoclaste, sont aussi essentiels à notre mode de jouir que l’est la soumission à l’Un dans la tradition islamique ? » Question dont nous débattons nous-mêmes.

    Vous l’aurez compris, je verrais une régression dans l’apparition de loi, ou d’une déontologie, ou d’une auto-censure, proscrivant l’atteinte au sacré, quand d’autres y trouveraient du réconfort et une marque due de respect. Je lis dans le Canard enchaîné du jour (journal satirique que je lis comme d’habitude), à propos de Canard et de Charlie, « Ils se sont affirmés, l’un et l’autre, comme des défenseurs virulents de la laïcité, un mot trop peu prononcé ces derniers jours » . C’est en vertu de cette laïcité que j’ai tenu mes propos.

  • @ Hervé:
    Vous parlez du « Prophète ». De quel prophète parlez-vous ? De Mahomet ? Je vous rappelle que Mahomet n’est pas le Prophète. Mahomet est le prophète des musulmans.

  • Jeff a écrit :

    « Le blasphème n’existe pas dans le droit français et n’existera jamais » (Manuel Valls). Les seules limites à la liberté d’expression sont la diffamation et les incitations à la haine. Et c’est très bien ainsi.

    C’est bien ce que j’attends de la loi. Ensuite, celui qui désire communiquer peut user de cette permission en ajustant ses choix au résultat qu’il escompte. L’équipe de CH veut passer des messages par le rire. C’est bien, c’est utile. Mais peuvent-ils y parvenir lorsqu’ils choisissent l’obscénité ? C’est la question. Certains de leurs dessins interpellent, d’autres insultent. Je cherche ici la nuance, sûrement mince, entre l’efficacité d’un dessin qui prétend ‘secouer’ utilement les tabous des uns ou des autres, et celle d’un dessin qui va ‘outrer’ toute une communauté indifféremment. C’est le choix d’un moyen en fonction d’un objectif. Contrairement à @Anna je ne verrais pas là une auto-censure (qui relèverait de la peur ou de la gêne), mais une intelligence des moyens. Parce que qu’est-ce qu’on veut, au fond ? Braquer tout le monde ou promouvoir une ouverture ?

    La Une de CH d’hier me parait très bonne (chapeau à eux!): elle n’est pas obscène, elle se contente d’interroger sur le degré de tolérance à prêter au prophète. Elle ne peut blesser que ceux des musulmans qui refusent cette question (et il y en a eu plein). Ce qui fait que la caricature n’est pas gratuitement insultante mais utilement impertinente.

    Hervé a écrit :

    On peut très bien dénoncer les atrocités des Islamistes intégristes sans représenter le Prohète.

    C’est vrai mais je trouve quand même acceptable d’oser bousculer cette interdiction faite au croyant musulman. Le prophète est sacré pour ceux qui y croient, on ne peut étendre l’injonction aux autres. Je m’agenouille devant le st Sacrement parce que je crois à la Présence réelle, je ne demande pas à un non catholique le même geste. C’est là que la laïcité entre en ligne comme gardienne ‘diktat proof’. En me mettant à la place d’un musulman je pense que ce blasphème est surtout une ‘insolence’ qui fait appel à son bon sens et son intelligence, à sa capacité de comprendre que le monde est multiple. Mais pas une représentation obscène: cela gâcherait l’intention d’interpeler.

    Jeff a écrit :

    En ces temps dramatiques et troublés, il faut effectivement se concentrer sur l’essentiel et ne pas mégoter sa solidarité ni exprimer des réserves sur des victimes qui ne seraient pas si « innocentes » que cela (la pente serait vraiment trop glissante vers l’innaceptable « après tout, ils l’ont bien cherché »).

    Vraiment d’accord avec vous. J’ai participé et communiqué à mon niveau pour exprimer ma solidarité sans réserve pour notre culture de liberté. Les questions et nuances ne concernent que notre lendemain. Le drame a eu lieu, le crime est odieux, les assassins n’ont pas d’excuse. Que faire maintenant pour que soit efficace notre message au monde musulman ; y a-t-il une réflexion possible ? L’échange d’idées va dans ce sens.

    Ceci dit, votre remarque sur ‘la pente glissante’ de nos éventuelles réserves m’interpelle. Peut-être, en effet, aurait-il fallu attendre quelques jours ou quelques semaines, le temps de cicatriser ensemble deuil et traumatisme, avant de passer à la réflexion sur le style de CH. On a peut-être eu l’air de blanchir un crime odieux. Et si c’est ce que la colère de @Anna veut nous dire, je comprends mieux. Je ne sais pas.

    Anna a écrit :

    Le parti pris fondamental était bien de dézinguer tout ce qui bouge, si vous me permettez, que ce soit en politique ou au plan religieux. J’ai bien compris que c’est cela qui vous dérange. Mais, pour moi, comme pour d’autres (comme certains commentaires l’ont montré), cette liberté « destructrice » doit s’exercer,

    Pourquoi serait-ce si utile de ‘détruire’ tout ce qui bouge ? L’idée me dérange pas mal en effet. Mais vous avez raison de souligner que les dessins de CH n’étaient pas tous outranciers. Et de rappeler que leur intention n’était pas vraiment la haine.

  • @ Ju:
    Bonjour, je pense qu’en disant que les hommes et les femmes ne peuvent pas être égaux, KOZ veut dire qu’ils sont complémentaires. C’est aux femmes de porter les bébés, aux hommes que reviennent les gros chantiers du fait de leur musculature plus développée… Il y aura toujours des inégalités contre lesquelles nous ne pouvons rien car c’est la nature qui l’a voulu ainsi. Ça ne veut pas dire que l’homme doit manquer de respect envers la femme, ni inversement. Il est normal qu’ils aient tous deux les mêmes droits et devoirs, mais être totalement égaux, ce n’est pas possible.

  • Depuis que je suis enfant, on m’a répété que ma liberté s’arrête là où commence celle des autres. Oui il y a des limites à la liberté de chacun de nous. Mais les limites sont difficiles à fixer. Chacun a souvent sa propre conception des limites. On peut perdre très vite le sens des limites individuelles et collectives. André Maurois, écrivain français, membre de l’Académie française, disait « L’abus de liberté tue toujours la liberté. »

    Notre devise républicaine c’est aussi l’ égalité… en droits. Coluche disait « Oui mais il y en a qui sont plus égaux que d’autres ». Il y a des personnes dans notre pays qui ont le sentiment de ne pas être égaux en droits, qui ont le sentiment d’être moins libres que d’autres.

    Le troisième mot de notre devise républicaine, à mon avis c’est le plus difficile à mettre en pratique, c’est le mot fraternité. C’est celui qui nous pose le plus de problèmes, même en famille; il nous est parfois difficile d’établir des relations fraternelles avec nos proches alors quand il s’agit d’étrangers, quand il s’agit des autres, d’autres cultures, c’est souvent très dur. Pourtant ce mot de fraternité c’est lui qui devrait nous guider dans l’exercice de notre liberté individuelle et nous aider à fixer nos limites à l’égard des autres et de nous-mêmes quand nous parlons, quand nous écrivons, quand nous dessinons, quand nous caricaturons, quand nous faisons de l’humour au dépens des autres. Il ne peut pas y avoir de liberté sans fraternité respectueuse des autres.

    Nous quittons l’Afghanistan. Pas en vaincus. Mais pas en vainqueurs. Nul ne sait vraiment ce qui va s’y passer à l’avenir. La guerre du Golfe numéro 1 numéro 2 numéro 3 a brisé ce pays en trois morceaux. Un Irak chite, un Irak sunnite, un Kalifha. En Syrie c’est l’enfer. Et l’enfer sur terre ce n’est pas de la faute à Dieu mais aux hommes. En Libye il n’y a plus d’Etat. C’est le chaos.

    Je souhaite que les chrétiens, les juifs, les musulmans se parlent librement et utilisent leur influence sur leurs fidèles respectifs pour calmer le jeu. Je souhaite aux palestiniens et aux israéliens de mettre fin au conflit qui les oppose depuis maintenant 60 ans. Soit en faisant comme ont fait les Français et les Allemands après deux guerres mondiales. Soit en faisant comme ont fait les Sud-Africains. Soit à leur manière qui pourrait être un exemple pour les autres conflits qui existent ici et là dans le Monde. Je souhaite que l’Europe ne laisse pas les Italiens seuls devant l’arrivée massive des réfugiés fuyant les zones de guerre et de grande pauvreté. Je souhaite que l’Europe, les Etats-Unis et leurs alliés lancent un grand plan Marshall pour faire décoller l’Afrique. La misère est une arme de destruction massive. Il faut faire la guerre à la misère. Je souhaite que l’Europe, les USA, l’Iran, la Turquie, la Syrie se parlent pour de vrai. Nous allons avoir besoin de tout le monde pour nous sortir de l’état de guerre dans lequel nous nous trouvons actuellement. Tout ne va pas se régler avec des drones, des avions, des satellites espions.

    Plus de six milliards d’êtres humains ne se font pas la guerre. Ils nous observent. Ils nous jugent. Ne les décevons pas. Ne nous décevons pas. La guerre ce n’est pas l’avenir. C’est notre présent actuellement, c’est une réalité de maintenant mais l’avenir appartient aux bâtisseurs de ponts et de passerelles entre les continents, entre les cultures, entre les êtres humains. Pas aux faiseurs de guerre. Parlons nous, écoutons nous, serrons nous les coudes. « Les temps sont mauvais, soyons bons. » a dit Saint Augustin. Plus que jamais nous devons construire un monde plus juste, plus fraternel, plus solidaire.

  • Juste un petit commentaire en passant, sur la représentation de Mahomet. Peut être nous revient il de rappeler les leçons de l’histoire de l’art. La non représentation de Mahomet n’est pas inscrite dans le coran, et beaucoup d’enluminures et de miniatures persanes notamment illustrent sa vie aux XII eme et XIII eme siècle. Cet interdiction qui a réussi à s’imposer au monde musulman à partir du XVIII eme siècle est déjà une interprétation, qui nous rappelle d’ailleurs l’épisode des iconoclastes pour le monde chrétien.(lutter contre les risques d’idolâtrie attribués aux images figuratives )

    Dans les pays chiites on trouve encore des images de Mahomet.

    http://ifpo.hypotheses.org/4445

  • Anna a écrit :

    Alors là oui, on n’est pas forcément d’accord, mais je tenais à le dire, sans chercher à recueillir votre unanimité !

    OK. Mettons, alors, que lorsque vous avez paru sommer vos contradicteurs de choisir entre leur pays et leur foi, ces termes ont dépassé votre pensée: dont acte.

    Au passage, Charlie hebdo ne faisait pas toujours dans le vulgaire ou le blasphème (à la façon du dessin partagé par nathmonfort), mais je ne nierais pas que je ne ressens pas vraiment d’indignation quand ils dépassent ces limites, et je n’ai pas l’impression d’être particulièrement méprisante à l’égard d’une communauté quelconque si ça me fait rire, certainement parce que je n’accorde pas la même valeur aux symboles religieux que d’aucuns.

    Tout cela, je le partage sans trop de mal, et je conclus que nous sommes moins éloignés que vos propos ne me le donnaient à penser. Une réserve, toutefois: autant je me sens le droit de rire librement de l’humour Charlie, ou (plus souvent) de le trouver pas drôle, autant je reconnais aux autres le droit de se sentir agressés par lui; pas au point de vouloir interdire, mais certainement au point de souhaiter plus de retenue.

    Vous l’aurez compris, je verrais une régression dans l’apparition de loi, ou d’une déontologie, ou d’une auto-censure, proscrivant l’atteinte au sacré, quand d’autres y trouveraient du réconfort et une marque due de respect.

    Une loi, une auto-censure, non. Une certaine forme de respect, oui, me semble souhaitable, même s’il est difficile à délimiter précisément. De ce point de vue, j’apprécie la couverture du Charlie de ce mercredi, par exemple.

    Je lis dans le Canard enchaîné du jour (journal satirique que je lis comme d’habitude), à propos de Canard et de Charlie, « Ils se sont affirmés, l’un et l’autre, comme des défenseurs virulents de la laïcité, un mot trop peu prononcé ces derniers jours » . C’est en vertu de cette laïcité que j’ai tenu mes propos.

    Là, voyez-vous, je ne suis plus tellement d’accord. J’ai entendu et lu le mot laïcité à toutes les sauces depuis une semaine. Il y a même eu un chef de parti politique pour proposer qu’on l’ajoute à la devise de la République (une grossière erreur, de mon point de vue). De plus, ce qu’on entend par « laïcité » est ambigu. Le terme signifie, historiquement et légalement (loi de 1905), que l’État s’interdit d’intervenir en faveur ou contre une religion. Mais il s’est répandu une autre acception, suivant laquelle laïcité signifie l’exclusion de la religion de toute manifestation publique: une vision qui rend le rassemblement impossible.

    Jeff a écrit :

    En ces temps dramatiques et troublés, il faut effectivement se concentrer sur l’essentiel et ne pas mégoter sa solidarité ni exprimer des réserves sur des victimes qui ne seraient pas si « innocentes » que cela (la pente serait vraiment trop glissante vers l’innaceptable « après tout, ils l’ont bien cherché »).

    Cet unanimisme n’est ni réaliste, ni, à mon avis, souhaitable. Si je suis Charlie, c’est aussi parce que Charlie représente une part fondamentale de l’esprit français: l’irrévérence, la gauloiserie , la dissidence, la dispute politique à l’infini… Jamais nous ne sommes capables de nous rassembler sans réserves, et quand d’autres le font (les Américains après le 11 septembre par exemple) nous les regardons avec étonnement et incompréhension. Nous sommes ainsi, et au bout du compte c’est ainsi que je préfère la France, même lorsqu’elle m’agace. Je suis bien certain que Charb et les autres auraient été les premiers à moquer une manifestation de solidarité unanime, et leurs amis survivants le disent bien: ce qui les a fait rire, c’est que les cloches de Notre-Dame sonnent en l’honneur de Charlie.

  • nathmontfort a écrit :

    La Une de CH d’hier me parait très bonne (chapeau à eux!): elle n’est pas obscène…

    Mouais, n’était cette forme décidément bien étrange du turban attirant l’œil sur un symbole phallique assez évident (évident en ce qui me concerne, peut être ai-je trop fréquenté les graffiti des collèges et lycées ?), on serait tenté de vous suivre…

  • La Une de CH d’hier me parait très bonne (chapeau à eux!)

    Je la trouvais excellente au départ, du même calibre que la couverture de Cabu « c’est dur d’être aimé par des cons », voir encore mieux car les lectures sont multiples. Charlie pardonne les assassins, ou Charlie est pardonné des ses outrances, ou les deux? On ne sait pas. La forme globale du turban et de la tête, un hasard? On ne sait pas plus. Un côté « joue gauche » improbable, un doigt pointé vers des soutiens massifs en partie hypocrites, et une bite. Tout ceci en dessinant un unique type avec une pancarte et un sur-titre. Une prouesse.

    Jusqu’à ce que le rédac chef douche mon enthousiasme: « c’est Charlie qui pardonne ». Bon, dans ce cas, décidément, l’humour « Charlie » me laisse froid (sauf si Luz est plus fin que le rédac chef, ce qui est loin d’être impossible). C’est plein d’amour. Mais pas drôle.

    Le strip de Riad Sattouf est excellent. Je ne savais pas qu’il dessinait pour Charlie hebdo.

    Le journal reste fidèle à sa ligne potache et continue à susciter chez moi un profond ennui, mais je suis prêt à payer pour qu’ils continuent: grâce à eux je peux passer pour un modéré.

  • BRAVO-RESPECT-MERCI aussi bien sur le fond que sur la forme. Entièrement d’accord avec vous. Merci encore. C’est toujours difficile de se faire entendre quand on se fait passer pour le mouton noir d’une « certaine république » qui encourage la pensée unique au détriment d’une liberté d’expression et d’un pluralisme qui ont de plus en plus de mal à se faire une place au soleil.

  • Flam a écrit :

    Mouais, n’était cette forme décidément bien étrange du turban attirant l’œil sur un symbole phallique assez évident

    Saperlipopette ! Je n’avais pas vu ça !!! Décidément, le style Charlie, c’est quelque chose …

    exilé a écrit :

    Juste un petit commentaire en passant, sur la représentation de Mahomet. Peut être nous revient il de rappeler les leçons de l’histoire de l’art. http://ifpo.hypotheses.org/4445

    Merci de ce lien très intéressant. Les folies actuelles au sein du monde musulman ne seraient donc ni unanimes, ni vouées à durer toujours. On respire.

    Un paragraphe ajoute un élément à notre réflexion concernant les conséquences des caricatures occidentales du prophète. Je le cite :

    (Citation) :
    [ La question de la représentation figurée en général, et de celle du prophète de l’islam en particulier, a été diversement tranchée selon les périodes et les milieux. Si elle a parfois déclenché des débats animés, elle ne semble pas avoir posé un problème majeur ou permanent aux croyants musulmans ni à leurs juristes (Naef 2004). Les polémiques récentes, parmi les plus vives qu’aient connues l’histoire, sont attisées par le fait que les images qui les ont déclenchées sont des caricatures ; elles alimentent l’idée fausse et essentialiste que, « de tout temps », l’islam aurait interdit la représentation de son prophète, voire toute représentation humaine. ]

    Ainsi, la question reste toujours de décider ce qu’on veut finalement : durcir ou assouplir ? Nous n’échappons pas au concret.

  • @ cecilepad : bon, je vais reformuler ma phrase parce qu’il doit manifestement y avoir trop de négations. Je dis l’inverse : c’est-à-dire que l’égalité Homme/Femme est dans nos convictions, et que nous devons nous opposer aux conceptions qui la refusent.

    Là où nous nous rejoignons, c’est que je ne conçois pas l’égalité comme l’identité, contrairement aux conceptions contemporaines. Ce qui, au passage, n’autorise pas n’importe quelle conception sur un rôle qui serait spécifiquement dédié aux femmes.

  • Flam a écrit :

    Mouais, n’était cette forme décidément bien étrange du turban attirant l’œil sur un symbole phallique assez évident

    Ca c’est du n’importe quoi et ne pas savoir regarder un dessin.

  • Revenons au pertinent post de Koz sur « Je suis Charlie ». Ce qui me gène dans la formule, c’est son côté « attrape tout » béatement consensuelle. Ce slogan rassemble une majorité pleine d’empathie pour les victimes et leurs proches – qui n’ont jamais acheté le journal, les vrais amis du journal très peu nombreux, les nostalgiques et les suiveurs qui en l’arborant se sont sentis pour un temps appartenir au « bon côté » (les politiques par exemples).

    C’est sympathique, cela permet d’organiser une « grand messe », mais derrière ce slogan et ce rassemblement disparate, qu’est-ce qu’on fait ?

  • @ exilé:
    Bonjour exilé,
    C’est vrai et c’est faux ce que vous écrivez. Vrai parce qu’effectivement le Coran n’interdit pas explicitement la représentation de Mohammed. Faux parce que vous oubliez tout un pan de la foi musulmane : vous omettez les hadiths, la sîrah, etc. Pour ne parler que des hadiths, ceux-ci n’ont pas tous la même importance. Ainsi, 40 d’entre-eux sont d’origine divine (hadiths Qudsi ou hadiths sacrés), les autres étant classés selon la fiabilité de la transmission. C’est dans ces hadiths que l’on trouve cette interdiction de la représentation de Mohammed.
    Je crois qu’il ne faut pas réfléchir sur ce que l’on voudrait que la foi musulmane soit mais sur ce qu’elle est. Nos musulmans viennent du Maghreb pour la très grande majorité, or dans cette région, les hadiths sont très importants. De plus, je ne cesse de le répéter, l’Islam n’est pas qu’une religion, c’est aussi une culture. Je me souviens d’une discussion avec un arabe athée (si, si cela existe). Je lui demandais si le ramadan n’était pas trop dur à supporter pour lui. Et il a eu cette réponse qui m’a laissé rêveur : « je fais le ramadan pour deux raisons : la première c’est pour ne pas me faire casser la gueule, la seconde, parce que j’aime cette période où l’on se retrouve tous ». Même nos « musulmans athées » ont eu du mal à défiler sous la bannière « je suis Charlie ». Parler de l’Islam des chiites n’a aucun sens en France, ils sont ultraminoritaires. Si l’on veut comprendre ce qui se passe en France, on se concentre sur leur Islam et pas un autre.

  • @ Pepito : j’abonde dans le sens de Flam, et n’imagine pas que cette ressemblance soit fortuite. Compte tenu de l’esprit Charlie, ils sont les premiers à détecter une bite s’il y en a une dans un dessin. C’est également l’avis d’un sémiologue, précisément spécialisé dans la lecture des images, et ça me paraît évident.

  • Jeff a écrit :

    Les seules limites à la liberté d’expression sont la diffamation et les incitations à la haine.

    D’accord avec ça, avec une grosse nuance. Je préfèrerais qu’on parle d’incitation à la violence plutôt que d’incitation à la haine qui me paraît plus nébuleux. La violence est objective, pas la haine. Et on devrait aussi se restreindre aux incitations explicites à la violence.

    Pour ma part, je suis effaré qu’en France en 2015, on prenne 6 mois de prison ferme pour avoir dit « Ils ont tué Charlie, moi j’ai bien rigolé ». Ou que ce connard de Dieudonné soit mis en garde à vue pour avoir dit « Moi je suis Charlie Coulibaly ». Ces réactions délirantes montrent la fragilité de la liberté d’expression dans notre pays et brouillent totalement le message, notamment auprès des musulmans.

    Koz a écrit :

    je ne conçois pas l’égalité comme l’identité, contrairement aux conceptions contemporaines

    La seule égalité qui ait un sens, c’est l’égalité des droits. Chaque être humain est unique, mais nous sommes tous égaux devant la loi. Cette égalité-là est inséparable de la liberté, d’ailleurs elle est presque son équivalent logique. La liberté c’est la sanctuarisation des droits naturels. Chacun est libre de faire tout ce qui ne viole pas les droits d’un autre. La liberté n’a de sens que si tout le monde a les mêmes droits, sinon ma liberté dépendrait de la personne avec laquelle j’interagis.

    Pour une raison qui m’échappe, notre société considère que l’égalité est incompatible avec la différence. S’il y a une différence, elle doit être soit niée soit compensée par des droits différents. Cette conception est en contradiction frontale avec la liberté et l’égalité des droits, et nous conduit tout droit à la tyrannie.

  • Flam a écrit :

    Mouais, n’était cette forme décidément bien étrange du turban attirant l’œil sur un symbole phallique assez évident (évident en ce qui me concerne, peut être ai-je trop fréquenté les graffiti des collèges et lycées ?), on serait tenté de vous suivre…

    Hé hé, je n’avais pas vu, naïf que je suis. C’est en effet assez évident. Très réussi, mes compliments à Luz qui est vraiment un as du crayon.

    Bien sûr, cela change quelque peu mon jugement sur cette couverture. L’ambiguïté est à plus d’un niveau… En tant que Français, je l’apprécie à sa juste valeur. Du point de vue des personnes étrangères à notre culture, par contre… c’est difficile à digérer. Et j’admets volontiers qu’un musulman puisse se sentir agressé. On ne peut pas dire que Charlie cache son jeu : « journal irresponsable », c’est écrit en majuscules sur fond rouge pour le cas où nous n’aurions pas compris. Voilà qui confirme les remarques sur l’unanimisme que je faisais plus haut: Charlie refuse haut et fort de participer à un quelconque consensus de gens raisonnables.

    J’admire la constance de l’équipe de Charlie Hebdo dans la défense de son point de vue et de sa liberté. En même temps, je ne peux pas l’approuver. Si la diffusion de ces idées et leur mode d’expression se réduisait à la France d’avant la mondialisation, ce ne serait pas un problème, au contraire. Mais le monde entier regarde; qu’on le veuille ou non, ces provocations ont incité, et inciteront encore, une violence meurtrière; qu’on le veuille ou non, l’opinion du reste de l’humanité compte. L’esprit libertaire hérité de notre histoire, depuis bien avant mai 68, nous parle, même si nous ne sommes pas d’accord. Mais nous ne pouvons pas imposer son acceptation au reste du monde. Nous ne parvenons même pas à le faire admettre universellement aux enfants de nos propres écoles…

    Pour ceux que cela intéresse et qui lisent l’anglais, voici deux points de vue canadiens opposés sur la publication des caricatures: pour, et contre. L’opinion des gens raisonnables l’a emporté. C’est typique, c’est sans doute un facteur d’ennui. Mais c’est aussi un facteur de paix.

  • Lib a écrit :

    « Jeff a écrit : « Les seules limites à la liberté d’expression sont la diffamation et les incitations à la haine. » D’accord avec ça, avec une grosse nuance.

    J’en mettrais une autre : ce sont les seules limites légales. Fort heureusement, la loi n’épuise pas le sujet de notre responsabilité. Et en particulier de notre responsabilité morale. Qui peut, voire doit, nous conduire à poser nous-mêmes des limites. Et qui, dans les faits, nous en pose.

  • @ Koz:

    Un grand merci pour cet article.

    @ Gwynfrid:

    C’en est même une double, les yeux et le nez… (J’aurais manqué les deux si on ne me l’avait pas fait remarquer)

    Je note cependant qu’après cette Une si drôle, il aurait fallu lâcher quelques padamalgams au Nigeria.

    J’ai vraiment du mal à être Charlie…

  • Gwynfrid a écrit :

    Si la diffusion de ces idées et leur mode d’expression se réduisait à la France d’avant la mondialisation, ce ne serait pas un problème, au contraire. Mais le monde entier regarde; qu’on le veuille ou non, ces provocations ont incité, et inciteront encore, une violence meurtrière;

    En effet, ce que vous soulignez est dramatique. En disant que cette Une me paraissant de bonne facture (par rapport à d’autres dessins moins acceptables), je ne pensais pas que cette publication aurait de telles conséquences à l’étranger. Nous discutons entre nous, c’est intéressant, et pendant ce temps cela fait des morts ailleurs…

  • Et au Niger, on brûle des églises en réaction à une Une de Charlie, journal dont on sait que c’est un sous-marin du Vatican.

    Charlie, le christianisme, tout mis dans le même sac d’un Occident blanc honni ? Peut-être. On peut analyser dans tous les sens, m’est avis que la haine se contrefiche de la rationalité.

  • Koz a écrit :

    Lib a écrit :

    « Jeff a écrit : « Les seules limites à la liberté d’expression sont la diffamation et les incitations à la haine. » D’accord avec ça, avec une grosse nuance.
    J’en mettrais une autre : ce sont les seules limites légales. Fort heureusement, la loi n’épuise pas le sujet de notre responsabilité. Et en particulier de notre responsabilité morale. Qui peut, voire doit, nous conduire à poser nous-mêmes des limites. Et qui, dans les faits, nous en pose.

    Effectivement, c’était sous-entendu, je parlais des limites que pose la loi française (en simplifiant). Quant à la responsabilité morale, elle est nécessairement individuelle. Charlie Hebdo, c’est un peu le « zéro compromis » avec la liberté d’expression, c’est la liberté d’expression poussée à l’extrême, jusqu’au blasphème (qui n’entre pas dans le champ de la loi française, mais sur laquelle la charia se montre particulièrement sévère, pour ne pas dire barbare). C’est pour cela que cela peut être blessant ou de mauvais goût… Mais c’est aussi un symbole de la liberté d’expression, dans un pays où ce principe est particulièrement important et étendu.

    Lib a écrit :

    Jeff a écrit :

    Les seules limites à la liberté d’expression sont la diffamation et les incitations à la haine.
    D’accord avec ça, avec une grosse nuance. Je préfèrerais qu’on parle d’incitation à la violence plutôt que d’incitation à la haine qui me paraît plus nébuleux. La violence est objective, pas la haine. Et on devrait aussi se restreindre aux incitations explicites à la violence.

    Pour ma part, je suis effaré qu’en France en 2015, on prenne 6 mois de prison ferme pour avoir dit « Ils ont tué Charlie, moi j’ai bien rigolé ». Ou que ce connard de Dieudonné soit mis en garde à vue pour avoir dit « Moi je suis Charlie Coulibaly ». Ces réactions délirantes montrent la fragilité de la liberté d’expression dans notre pays et brouillent totalement le message, notamment auprès des musulmans.

    La loi parle d’incitations « à la discrimination, la haine ou la violence » envers des personnes « en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », ou encore « leur orientation sexuelle ou leur handicap ». Le racisme, l’antisémitisme, le négationnisme, entre autres, sont punis par la loi. La conception française sur ce sujet n’est pas la même que la vision américaine (et la vôtre), qui pense que les propos xénophobes, racistes, antisémites, négationnistes, homophobes, peuvent être mieux combattus si on les laisse s’exprimer. Je ne partage pas ce point de vue pour des raisons de pragmatisme – dans la société et le monde tels qu’ils sont aujourd’hui – mais je reconnais volontiers que c’est tout à fait discutable sur le plan philosophique.

  • Remarquons que le slogan « je suis Charlie » a rencontré un très grand succès.

    On peut se demander si un autre slogan « je suis juif Français » qui eut été tout autant légitime après les assassinats de l’hyper casher aurait connu le même succès.

  • @ François:

    Je n’ignore en rien ce que vous dites. mais c’est de notre responsabilité aussi de mieux connaitre la culture dont on parle, et la réduire à ce qu’elle est aujourd’hui, appauvrie, n’aidera pas au dialogue.

    Mon post vise à éclairer les non musulmans qui relayent aussi cette idée que représenter Mahomet est un blasphème.

    Les croyants aussi participent à la caricature de leur religion, souvent par ignorance.
    Pas la peine de s’y mettre nous aussi.

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  • Jeff a écrit :

    … la liberté d’expression poussée à l’extrême, jusqu’au blasphème …

    Jeff a écrit :

    … Le racisme, l’antisémitisme, le négationnisme, entre autres, sont punis par la loi …

    Jeff, je sais que le billet suivant est déjà sorti, mais je reviens quand même ici pour vous dire que je ne comprends pas bien votre dernier commentaire : que l’on envisage d’avoir de l’indulgence pour le blasphème d’un côté, « comme symbole de la liberté d’expression », et que de l’autre côté « pour des raisons pragmatiques » on puisse appliquer une grande sévérité aux propos qui insultent une communauté en particulier … Pour moi, on devrait traiter les deux situations avec le même barème, choisir soit la « philosophie » des États Unis, soit celle de chez nous, mais pas deux poids deux mesures. Sur ce point je comprends mieux le propos de @Lib, qui me paraît plus homogène. Pour moi, si l’on punit très sévèrement les actes violents, on peut se permette de faire moins de vagues sur les propos, les ignorer ou faire semblant. Mais il se peut que j’aie mal interprété votre commentaire. Et de toutes façons, il est déjà temps de lire le billet suivant…

  • @ Jeff:
    Ca se débat sur le plan philosophique mais aussi pragmatique. Je lis les limites fixées par la loi telles que vous les citez et je me demande comment on peut considérer que dire « ils ont tué Charlie j’ai bien rigolé » constitue une incitation « à la discrimination, la haine ou la violence » envers des personnes « en raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », ou encore « leur orientation sexuelle ou leur handicap ».

    Le problème concret, pragmatique de ces limites à la liberté d’expression, c’est qu’elles tombent tout de suite dans l’arbitraire. Ce n ‘est pas seulement par tropisme américanophile que je penche pour une interprétation maximaliste, c’est parce qu’un principe de liberté assorti d’exceptions arbitraires devient liberticide. Je peux comprendre qu’on veuille exclure les appels explicites à la violence car c’est (relativement) objectif. Je peux comprendre qu’on veuille exclure les appels à l’abrogation de la liberté d’expression, par une forme d’auto cohérence.

    Mais comment voulez vous que des gens ne ressentent pas une terrible injustice quand les plus hautes autorités affirment le droit de Charlie de publier une couverture intitulée « le coran c’est de la merde, ça n’arrête pas les balles » et qu’un gamin de 16 ans est mis en GàV pour avoir publié sur FB un détournement du même dessin intitulé « Charlie Hebdo c’est de la merde, ça n’arrête pas les balles »?

  • Lib a écrit :

    Mais comment voulez vous que des gens ne ressentent pas une terrible injustice quand les plus hautes autorités affirment le droit de Charlie de publier une couverture intitulée « le coran c’est de la merde, ça n’arrête pas les balles » et qu’un gamin de 16 ans est mis en GàV pour avoir publié sur FB un détournement du même dessin intitulé « Charlie Hebdo c’est de la merde, ça n’arrête pas les balles »?

    Cet exemple est particulièrement frappant.

  • J’ai partagé cet article dès que je l’ai lu, soulagée de trouver des mots qui expliquaient bien mon ressenti et la position indélicate dans laquelle je me sentais avec le JeSuisCharlie. Evidemment, je me suis faite « trashée » par des amis qui ne POUVAIENT PAS comprendre.
    Et je viens de lire dans La grande séparation d’Hervé Juvin la clé de cette incompréhension.

    Dans un chapitre qui s’appelle « Naissance de l’Homme de rien » où une mère répond à la question de sa fille rapport aux religions « et nous, nous sommes quoi? » un terrible « nous, nous ne sommes rien. » il dit :

    « Cet aveu interpelle tous ceux qui sentent bien qu’avec la sortie de la religion et le règne de l’indifférenciation, tout n’est pas joué. Il interpelle tous ceux qui se disent Français, Européens, catholiques, juifs, musulmans, ou laïcs, républicains, bretons, tous ceux qui pensent être quelqu’un parce qu’ils partagent quelque chose qui les distingue, qui les unis à leurs proches et qui les sépare des autres. Il provoque un choc chez ceux qui sont quelque chose et quelqu’un, de quelque part, et des leurs. »

    Et si, face à ce rien revendiqué, on doit combler le vide de notre identité commune par un Je Suis Charlie, pour nous qui avons déjà une identité, et ne souffrons pas de ce vide pour nous-même, l’étiquetage est difficile à accepter. D’où la proposition du Je Suis Français que vous faisiez au passage…

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