Lecanuet, Poher, Bayrou…même combat (perdu ?)

Les français rêvent d’être gouvernés au centre. Enfin c’est ce qu’affirment les centristes ! Au fait, le « Centre » en politique, qu’est-ce que c’est au juste ?

Après la deuxième guerre et la désapprobation générale envers Vichy, plus personne n’ose se dire de droite. Il est alors politiquement correct de se dire « centriste » pour cacher que l’on est de droite.

Sous la IVe République les partis conservateurs, pour ne pas effaroucher leurs électeurs, donnent le change en plaçant le mot « centre » dans leur intitulé, en y accolant si possible les mots « républicain » ou « démocrate ». Qu’on ne s’y trompe pas, le « Centre National des Indépendants et Paysans » d’Antoine Pinay est très à droite, le « Centre Républicain » du Dr Bernard Laffay aussi. D’ailleurs, après avoir rompu avec Poujade, c’est sous la double investiture de CNI et du Centre Républicain que Le Pen se fait élire au Quartier Latin.

Il faut beaucoup chercher pour trouver de vrais centristes à l’époque. De Gaulle se veut au-dessus des partis. Son RPF est un mouvement populaire qui échappe d’autant plus aux étiquettes habituelles qu’il n’est pas aux affaires et s’ingénie à brouiller les cartes. Le MRP issu de la démocratie chrétienne pourrait correspondre à l’idée que l’on se fait d’un « centre » sauf que dans ces années où il réunit 30% des voix, on surnomme ses cadres et militants « les rouges chrétiens ». C’est dire qu’ils ne sont guère perçus comme centristes. Quant aux radicaux ils sont de gauche lorsqu’ils sont dans l’opposition et largement réactionnaires lorsqu’ils sont au gouvernement. Point de vrais centristes donc.

En fait les centristes de la IVe République croient l’être parce que leurs chefs sont des notables aux propos modérés même si leurs idées sont de droite.

Au début de la Ve République le CNI reste un grand parti avec de nombreux élus locaux ou nationaux et peu d’adhérents ou de militants. Il est toujours aussi conservateur et se brouille vite avec De Gaulle, surtout à cause de la politique algérienne du Général, mais pas uniquement. Lors du référendum d’octobre 1962 sur l’élection du président de la république au suffrage universel, les députés CNI combattent le projet âprement et se retrouvent battus, laminés, éclatés. Un nouveau centre fait son apparition, les « Républicains Indépendants » de Giscard d’Estaing qui marginalisent rapidement le vieux CNI devenu ringard. La vieille droite centriste n’a cependant pas dit son dernier mot et regroupe dans une féroce opposition de droite à De Gaulle ceux des éléments du CNI ou de la Démocratie Chrétienne qui ne supportent pas le style du Général. Ces « centristes d’opposition » mènent une guérilla active contre l’état UNR et le président de la République.

Ce harcèlement atteint un sommet lors de la candidature de Jean Lecanuet en 1965. Malgré son style résolument moderne et une excellente maîtrise de l’outil télévisuel, ce qui est nouveau, il échoue en dépit de ses 3 millions d’électeurs. On voit déjà cette année-là les limites du centrisme.

Qui sont les électeurs de Lecanuet ? Essentiellement des opposants ou des déçus du gaullisme, ou encore des électeurs qui trouvent que De Gaulle n’est pas assez à droite. Ces centristes sont devenus le poil à gratter du régime sans pour autant pouvoir ambitionner de diriger la France.

Après la démission de De Gaulle, Alain Poher pense pouvoir réunir sur sa candidature tout ce que la France compte de centristes. Entendez par là les anti-gaullistes de droite, y compris les électeurs de Giscard qui s’est permis d’admonester vertement le gouvernement en Mai 68 (« ce que les gens veulent c’est un peu de considération »). Les résultats du premier tour montrent, comme en 1965 pour Lecanuet, que les centristes ne peuvent gagner seuls. Poher sollicite les voix des communistes au deuxième tour, « des français comme les autres » dit-il, et se fait battre largement par Pompidou.

Les Républicains Indépendants de Giscard remplacent la vieille garde centriste, louvoient, rêvent de beaux maroquins et se proclament « cactus de la majorité ».

On le voit bien le centrisme n’est jusque là qu’une force d’appoint pour la droite, ou un empêcheur de tourner en rond, selon l’humeur de ses dirigeants.

Lorsque Giscard est élu président en 1974, il sait qu’il a été élu grâce aux voix des gaullistes et non pas grâce à sa famille d’origine. Ce constat biaise d’emblée ses relations avec Chirac qu’il ne peut faire autrement que de nommer Premier Ministre. « Dis-moi qui t’a fait roi » semble dire sans cesse le chef du gouvernement à son président.

Il faut rendre cette justice à Giscard qu’il a été actif au début et qu’il a fait passer des réformes audacieuses (ou calamiteuses, c’est selon) que l’on n’attendait pas d’un président de droite : avortement, majorité à 18 ans, regroupement familial des immigrés… La gauche applaudit, sans pour autant voter pour lui. Giscard se rend vite compte que les partis du centre, bientôt regroupés dans l’UDF, ne représentent qu’une force somme toute secondaire à côté du puissant RPR dont il a besoin et qui lui mène la vie dure jusqu’à sa défaite contre Mitterrand.

Si on analyse les idées développées par les centristes tout au long des années que nous venons de passer en revue on n’y trouve pas une grande originalité, tout au plus un style différent, moins à l’emporte pièce. Les idées du centre sont des idées de droite. Et que demandent les électeurs centristes ? Une gestion des affaires calme et sereine, sans trop de chamboulements ni d’agitation. L’électorat de Giscard se sent ainsi quelque peu floué par l’activisme réformateur du président, il le lui signifie parfois par l’abstention alors que toutes les voix centristes sont nécessaires faute d’autres soutiens.

Il est toutefois chez les centristes une grande constante dont ils peuvent se glorifier. C’est leur attachement à l’Europe et leur lutte inlassable pour faire passer les idées de Robert Schuman et Jean Monnet. Ce n’est pas rien, il faut l’admettre.

Ajoutons néanmoins que puisque la plupart des partis se sont ralliés à l’idée européenne, tous les partis de gouvernement en tout cas, les centristes ont perdu leur principale originalité.

Et aujourd’hui ? On peut légitimement se demander si le « centre » ne reste pas une utopie, le « marais » où l’on s’enlise.

François Bayrou a d’abord fait les yeux doux aux modérés de droite, mais qu’est-ce qu’un modéré de droite sinon un électeur qui veut être gouverné à droite, sans excès. Bayrou entend désormais ratisser large à gauche. Il se veut ni de droite ni de gauche, ou plutôt à la fois de droite et de gauche. Il apparaît ainsi comme un digne continuateur des ambigüités du passé. Il a peut-être raison contre tous. Au comptoir du café du commerce on rêve souvent d’avoir un gouvernement qui réconcilie droite et gauche, qui allie le meilleur de la droite et le meilleur de la gauche.

Sarkozy aussi a dû écouter ce qui se dit quand les français moyens refont le monde politique puisqu’il a voulu des ministres d’ouverture dans le gouvernement Fillon, sans qu’on lui en sache gré pour le moment.

En fait le mariage de la carpe et du lapin prôné par Bayrou a ses limites. Discuter devant un vichy fraise (ou un ballon de rouge) c’est une chose, gouverner c’en est une autre. On ne peut vouloir tout et le contraire de tout. Qu’y a-t-il d’original dans le programme de François Bayrou ? Des tas de choses probablement mais je suis bien persuadé que les électeurs du MoDem n’en savent fichtrement rien, de même que nul ne savait quelles étaient les idées de Lecanuet ou de Poher. On votait pour eux contre De Gaulle, ou contre Pompidou, de même que la plupart des électeurs du MoDEm ont voulu exprimer leur mécontentement contre Sarkozy sans pour autant voter socialiste.

Et Bayrou, sait-il lui-même ce qu’il veut ? Prendre le pouvoir bien sûr, mais pour quoi faire ?

Si une bonne fée lui permettait d’arriver à ses fins en 2012, sur quelles forces, sur quel appareil, pourrait-il s’appuyer ? Ses récentes déconvenues aux municipales montrent les limites de son entreprise. Le MoDem seul ne l’a emporté au premier tour que dans deux communes, c’est peu.

En définitive Bayrou, comme Lecanuet et Poher avant lui, dispose d’un réel pouvoir de nuisance. C’est à peu près tout. Il peut être dangereux pour le gouvernement en place. Quand Lecanuet recrutait à la droite de De Gaulle, Bayrou peut priver Sarko du bénéfice de l’ouverture en séduisant la gauche boboïsée. Cependant s’allier, comme ce fut le cas récemment, tantôt avec l’UMP, tantôt avec le PC, ce qui rappelle les pires moments de la IVe République, même si Bayrou fait mine de désapprouver, ne peut tenir lieu de doctrine.

Tout au plus Bayrou et le MoDem permettront-ils aux électeurs mécontents d’exprimer dans les urnes et non dans la rue leur mauvaise humeur. Après tout ce n’est pas si mal pour la démocratie. Est-ce à dire que si le MoDem n’existait pas il faudrait l’inventer ? On serait presque tenté de dire oui ! A condition que ces électeurs centristes soient bien conscients que ce n’est pas en fédérant des mécontentements que l’on peut gouverner et réformer un pays malade d’immobilisme.

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49 commentaires

  • Article intéréssant mais la problématique est, selon moi, bien plus simple.
    La situation de la classe politique est catastrophique, la salle des 4 colonnes est un carrefour à crétins. Désolé, y’a pas d’autres mots, la dernière soirée électorale en a encore été une éclatante démonstration.

    Une refondation de cette classe politique est urgente. Ca passe par l’ablation de l’aile gauche de l’assemblée, devenue complètement stérile et la recomposition de la droite et du centre.

    Or je ne vois aujourd’hui que très peu de monde capable de s’engager dans cette démarche.

    Bayrou qui, s’il s’attèle vraiment à la construction du MoDem , peut donner naissance à un vrai parti « de gauche » quand la France aura enfin abandonné le socialisme. Attention, pas de mélange, ici « de gauche » veut dire simplement « occupant la partie gauche de l’assemblée » une fois les socialistes dégagés dans une France rencentrée vers la droite. C’est clair ?

    Et… Dupont-Aignan qui s’il se bouge et construit un vrai parti indépendant avec DLR peut faire imploser l’UMP et effacer cette blague qu’est le sarkozysme (et en même temps faire disparaitre la génération copé-devedjian-estrosi-morano et autres beaufs de la république). Ce n’est pas une blague, NDA surclasse la totalité des politiques de sa génération, allez voir ce qu’il fait à Yerres ca vaut le détour.

    Enfin, on aurait un vrai débat avec des partis aux positions claires et des différences visibles, nottament sur l’Europe.

  • oui dang, tout à fait d’accord, belle rétrospective, qui au passage, ne me rajeunis guère, sauf pour  » Tout au plus Bayrou et le MoDem permettront-ils aux électeurs mécontents d’exprimer dans les urnes… », d’abord en raison de leur score en général(plus que moyen), et puis surtout car, comme je l’ai déjà exprimé ici, les français ne votent pas « pour » quelqu’un, mais essentiellement « contre ».

  • @ effigy,
    Tu trouves qu’aux dernières présidentielles l’essentiel des votes a été « contre » ?
    J’ai le sentiment inverse. Et j’y ai même vu une relative nouveauté.

    @ Dang,
    Je n’ai pas les connaissances nécessaires pour juger des précédents leaders centristes. Pour ce qui est de Bayrou par contre, son absence de programme est-elle donc dûe selon toi à sa seule nature de centriste ?

  • Comme vous Dang je pense que si le MoDem n’existait pas il faudrait l’inventer. Il y a un vrai sens à avoir un Centre dans notre système politique, mais, de mon point de vue, plus au plan parlementaire que comme force gouvernementale : on n’a pas besoin de flou quand on tient le gouvernail, on a par contre certainement besoin de plus de sincérité et d’application dans le débat parlementaire. Devoir séduire au delà de sa propre famille politique est une forme d’exigence salubre.

    L’ambiguïté pour le Centre vient du paradoxe suivant : elle est potentiellement utile à l’Assemblée, et probablement nuisible aux manettes. Or, la double réalité du quinquennat et du calendrier des législatives interdit l’épanouissement d’une telle force.

    Elle serait utile comme force modératrice, de rappel à la raison et à l’équilibre, pour acquérir un certain poids elle a besoin d’un projet fort ou d’un leader charismatique.

    Bayrou n’est certainement pas l’homme de la situation, l’animal est infiniment trop politique; il n’empêche que son discours fut entendu l’an dernier, ça veut dire qu’il y a une demande.

    Ceux qui ont fait l’effort d’écouter ses idées ont pu y trouver sinon du clinquant, du bon sens et de la raison : sa proposition de doctrine budgétaire, sa relance économique par les PME, la reconquête des zones sensibles par le service public ets … Quand j’entendais ça, j’y voyais une utilité certaine à l’Assemblée.

    Mais bon, quinquennat + calendrier législatif = mort programmée du Centre, ce n’est qu’une question de temps.

    Reste à voir si cette sensibilité pourra s’exprimer au sein d’un pays bipolarisé. A cet égard, il va être intéressant de suivre si le récent appel de vingt députés d’obédience centriste pour « plus de justice » sera suivi d’effet.

  • @Cilia : il n’y a pas absence de programme chez Bayrou,Michel B. cite d’ailleurs plusieurs des idées chères à l’ex-futur maire de Pau, dont certaines en effet portent le sceau du bon sens.
    En revanche on pourrait dire qu’il n’y a pas un projet nouveau qui démarquerait radicalement le « centre » de la droite ou de la gauche.
    Je ne sais pas si c’est dans la nature du centre de ne pouvoir élaborer un projet tellement réformiste qu’il en serait révolutionnaire, mais on est bien obligé de constater en regardant l’histoire que le centre lorsqu’il était puissant était un parti (ou une union de partis) gestionnaires.
    Le CNI, le parti radical (que certains n’hésitent pas à présenter comme un authentique parti centriste) furent des partis de gouvernements qui administrèrent la France avec plus ou moins de bonheur dans une période difficile, plutôt bien en fait si on oublie la triste aventure des guerres coloniales, mais sans lui apporter le souffle dont elle avait besoin et par conséquent sans pouvoir éviter les soubresauts de 1958 et la fin de la IV e République.
    Jb imagine un MoDem qui occuperait la place laissée vacante par un parti socialiste devenu moribond. L’idée est plaisante mais il faudrait que Bayrou ou d’autres donnent libre cours à leur imagination pour proposer aux français un projet enthousiasmant. Bayrou et ses adjoints en sont-ils capables? Rien n’est moins sûr. Le MoDem peut-il devenir une pépinière de futurs dirigeants? Pourquoi pas, encore faudrait-il que ceux qui représentent déjà la vieille garde laissent les jeunes s’épanouir. Quand on connaît les ambitions de Bayrou, ce n’est pas pour demain.

  • @ Michel B,
    Pourquoi pensez-vous que le Centre, ou sans ambiguité (?), serait probablement nuisible aux manettes ?
    Cela rejoint finalement un peu ma question à Dang, pourquoi le fait d’être « centristes » signifierait par définition une absence de programme ?

  • « Pourquoi pensez-vous que le Centre, ou sans ambiguité (?), serait probablement nuisible aux manettes ?
    Cela rejoint finalement un peu ma question à Dang, pourquoi le fait d’être “centristes” signifierait par définition une absence de programme ? »

    @ Cilia

    Le Centre au pouvoir aurait plusieurs défis à relever : faire vivre un projet « raisonnable » avec la même intensité qu’un projet plus idéologique (droite-gauche), maintenir dans une durée secouée par les aléas conjoncturels la cohérence de coalitions par essence fragiles. Cela me paraît handicapant pour maintenir la lisibilité d’une ligne directrice dont le pays a besoin.

    Observez ce que fait aujourd’hui la majorité UMP dans une passe difficile : elle resserre les rangs de sa famille politique, réaffirmant sa ligne directrice, elle mise sur le maintien de sa cohésion. C’est sans doute plus difficile à opérer pour un pouvoir centriste, d’où potentiellement des pertes d’efficacité ou, plus grave, de cohérence.

    Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas la place pour un projet centriste. Mais le problème n’est pas au niveau des idées, mais de la constitution d’une majorité cohérente pour les porter.

  • @ Dang & Michel B,
    Je comprends.
    Juste quelques remarques :
    – concrêtement, dans le cadre de cette réflexion, ne devrions-nous pas parler du Nouveau Centre autant que du Modem ?
    – il m’est encore difficile de pleinement admettre qu’un projet politique gouvernemental doit être enthousiasmant, voire révolutionnaire, je le reconnais.
    – pour pouvoir siéger à l’assemblée, il faut bien être élu. La vingtaine de parlementaires (me semble-t-il) NC a pu être élue parce que UDF, enfin anciennement, mais pas anciennement au point de ne plus représenter de valeurs auprès de son électorat.
    – finalement, comment dans notre système binaire faire exister, même si ce n’est qu’à l’échelle parlementaire, cette conscience centriste ?

  • @Cilia : tu as parfaitement raison, il ne faut surtout pas dissocier le Nouveau Centre du MoDem, c’est exactement la même famille, mais qui a choisi d’être à droite. Si le NC a eu davantage de succès aux élections c’est parce que ses députés sont bien implantés localement et aussi et surtout parce qu’ils on eu l’appui de l’UMP, ce qui démontre à quel point le Centre a du mal à exister par lui-même.

  • @Cilia : une phrase a sauté dans mon comm. : « en fait le NC est au MoDem ce que les Républicains Indépendants étaient au CNI, sauf que le CNI était encore plus à droite que les RI, sinon l’histoire est un éternel recommencement ».

  • « finalement, comment dans notre système binaire faire exister, même si ce n’est qu’à l’échelle parlementaire, cette conscience centriste ? »

    Cilia, on peut quand même observer que la conscience centriste ne se porte pas si mal dans le pays, et qu’elle a une influence certes indirecte mais non négligeable dans l’atmosphère politique. Bayrou a déroulé le tapis rouge de l’ouverture à Sarkozy, et, même si c’est sans doute moins vrai depuis les municipales, on voit bien qu’il peut conditionner la structure du débat à venir au PS (projet penchant plutôt à gauche ou au centre). C’est pas neutre comme bilan.

    Je suis tout autant satisfait d’entendre la voix du NC s’exprimer librement sur un ton responsable. Autant de bonnes nouvelles pour la vitalité démocratique et le sens des responsabilités du pays.

    Votre question est difficile ! 🙂

  • Point de vue intéressant, mais vous faites de sacrées impasses. Vous ne dites rien du MRP que vous ravalez au rang de chrétiens rouges, et rien également de la deuxième gauche, qui a pourtant bien des points communs avec le centrisme.
    Rien non plus du personnalisme qui a certainement influencé pas mal de têtes du centre actuel.

    Cela dit, vos critiques sont intéressantes, parce qu’elles rendent compte de l’idée que se font pas mal de personnes du MoDem, et elles pointent en effet, sur des travers presque congénitaux du centre en général.

    Attention, Koz, vous vous intéressez beaucoup au centre depuis quelques temps. Vous pourriez mal finir. Je ne sais pas moi…adhérer au MoDem, par exemple…

  • @Michel B, mais vous y avez très bien répondu 🙂

    @l’Hérétique, l’auteur du billet est Dang (redde Caesari etc..)

  • @L’Hérétique : ne vous faites pas trop de soucis pour Koz. L’auteur du billet est Dang et non pas Koz.
    Je maintiens que le MRP n’était pas perçu par l’opinion sous la IV e République comme un parti du Centre mais plutôt comme un parti de gauche. Que le MRP représente à nos yeux une force centriste, je veux bien vous l’accorder mais analyser la situation en 1950 avec notre mentalité de 2008 biaise un peu les conclusions.

  • « Il est alors politiquement correct de se dire « centriste » pour cacher que l’on est de droite. »

    Ce politiquement correct a duré pour moi jusqu’à Sarkozy ! Pendant plus de 30 ans de ma vie d’adulte j’ai toujours affirmé être centriste pour ne pas dire que j’étais de droite 🙂 tout en exécrant l’extrême-droite pour les outrances des ses représentants, mais trouvant certaines de leurs analyses réalistes.

    FB a fait un très mauvais calcul politique en s’opposant à la droite depuis 2002. Il n’a pas prévu le changement que provoquerait NS avec son programme d’une droite décomplexée et sa victoire à la fois sur les chiraquiens et sur les lepénistes. Entre 2002 et 2007 quand, sous l’impulsion de NS, un glissement plus à droite s’effectuait il y avait une place non négligeable pour un centre de droite libérale modérée.

    Je pense que Bayrou a tablé sur ces échecs d’une droite et d’une gauche déchirée entre sociaux-démocrates et marxistes. Rappelez vous 2006 et les primaires socialistes et la guerre fratricide entre les chiraquiens et les sarkozystes. Bayrou pensait pouvoir tirer les marrons du feu et n’a pas cru que NS réussira l’exploit de se défaire de l’opposition intérieur des chiraquiens et autre gaullistes de la vieille garde et de gagner les élections avec un programme bien à droite.

    Le futures chances du Modem et de Bayrou dépendent de l’évolution de la politique du gouvernement et de sa réussite. Il ne pourra prospérer que sur un échec de NS.

    Quant aux socialistes, je ne crois absolument pas à un éclatement du PS et à la fin de ses alliances avec l’extrême gauche, donc même de ce coté là les chances de prospérer sont à mon avis très limitées.

    Le centre ne peut prospérer que sur des désunions, scissions au sein de la gauche ou de la droite.

    Bayrou est à mon avis un piètre stratège, un second couteau qui devrait réfléchir sur son niveau et le principe de Peter …

  • Les analyse politiques je laisse cela à d’autres plus calés mais l’idée de la place du centrisme est vraiment interessante ! merci Dang ! Elle me fait penser à l’idée de fonctionnement des entreprises en « mode projet » (transversal) car cela permet :
    – de dépasser le clivage des partis (service ou département dans les entreprises)
    – de fédérer les meilleures compétences pour aboutir
    – de trouver la meilleure adéquation possible entre objectifs et moyens
    – de mieux cerner les limites car la diversité des champs de compétence implique une vision plus large et plus réaliste.
    – au plus grand nombre de s’approprier le projet.

    Mais cette déclinaison en mode projet n’est réalisable que si :

    – le projet est cerné, identifiable et mesurable
    – si il est conduit avec énergie, justesse et ouverture d’esprit
    – si l’objectif du chef projet est la réussite du projet, son aboutissement et non la réalisation d’un projet d’ ambition personnelle.

    Le centre pourrait tout à fait remplir cette fonction d’initiateur de projets, de déclinaison d’idées hors des clivages habituels (revendiqué haut et fort), de booster de réformes, de fédérateur de compétences (j’y ai cru à un moment) mais les conditions de réalisation (que je cite plus haut) ne sont pas remplies.

    Je remarque juste que c’est NS qui a impulsé cette méthode de travail (pas comprise par tous y compris dans ses rangs).
    De même que beaucoup d’entreprises ont compris l’intérêt de fonctionner en mode projet, NS a compris que cette méthode de gouvernance était efficace et a dépossédé le centre de son fonds de commerce ; Et finalement, je crois que les Français s’accomodent assez de ce découpage vertical dans les structures et horizontal dans la gouvernance.

  • @Thais

    Arrête de prendre des précautions concernant tes compétences, tu viens de faire une analyse politique absolument brillante et exacte. Totalement de ton avis et c’est exactement ce qui n’est pas compris dans la politique de NS et exactement ce qui fait l’illisibilité de Bayrou du fait du manque des conditions de réalisation que tu cites. Enfin bref, je n’ai rien à rajouter sauf s’il fallait développer dans les détails les application multiples du principe.

  • Oui, merci Thais pour ce brillant parallèle.
    J’ajouterais qu’il faut aussi une totale adhésion de chacun pour que la gestion en mode projet fonctionne:
    N.S. beware !

  • à Dang

    Excusez-moi : reddo caesari caesaris
    Le MRP était perçu comme étant à gauche, parce que c’était tout l’échiquier politique français qui s’était déplacé sur la ligne gauche-droite.
    Et d’ailleurs, ce déplacement est resté. Les gouvernements de droite passeraient certainement pour des ramassis d’affreux gauchistes si on les replaçait tels quels dans le contexte.

    Parce que si le MRP n’était pas le centre, à la Libération, qui était le centre, dans ces conditions ?

  • Le centre, à l’instar d’Isaac Newton et de la pomme, est victime des lois de la physique…
    Hier encore, il avait sa place dans l’espace énorme qu’il y avait de la gauche de la gauche à la droite de la droite…
    Malgré la « vague rose » des municipales, le nouveau parti social démocrate qui devrait surgir des ruines du PS devra abandonner les alliances contre nature avec l’extrême gauche, jusqu’à la marginaliser… Quant à l’extrême droite, elle vivra sans doute quelques soubresauts Lepéniens, avant de revenir aux moins de 5% d’avant l’ère Mitterand…
    En fait on se dirige, du moins je l’espère vers un bi-partisme davantage basé sur des sensibilités que sur des doctrines du passé. Et la place entre la droite de la gauche et la gauche de la droite ne permettra, même plus aux opportunismes, de s’insérer… faudra choisir, mon beau gascon! Mais n’est-ce pas là la première et grande faiblesse du centre ? A force de revendiquer sa liberté et de ne pas choisir, on reste sur place.
    Un autre scénario, c’est celui de l’homme providentiel, tel Clémenceau ou De Gaulle, qui peut « sublimer » les français au-delà des partis… Pour celà il faut d’une part les circonstances, ce qui n’est pas impossible, et d’autre part la carrure pour endosser le costume… ce qui serait déjà beaucoup plus dur à trouver et sans doute impossible pour Bayrou…
    Finalement le système actuel est le seul qui permette à un Bayrou d’exister… Pourvou qué çà douré!

  • @L’Hérétique : à la Libération entre les partis qui se disent du Centre et qui sont de droite et le MRP qui est perçu comme étant de gauche, on se demande bien en effet où est le Centre.
    Je suis tout à fait d’accord pour dire que par rapport à nos critères actuels le MRP est bien un parti du Centre mais l’important, je trouve, est ce qu’en pensaient les électeurs de l’époque.
    Mais surtout la question qui se pose est « qu’est-ce que le Centre »?
    Que veut le Centre à part gérer les affaires?
    Hier comme aujourd’hui il est difficile de donner une définition claire du Centre.
    C’est Jean-François Kahn qui dit que les radicaux et le MRP étaient des partis du Centre sous la IV e République. Je veux bien mais qu’entend-il par là?
    Quand je regarde l’histoire de la IV e République et celle des débuts de la V e, je vois comme originalité de ce que l’on peut appeler le Centre essentiellement l’engagement en faveur de la construction européenne.
    C’est énorme mais insuffisant pour faire un projet de gouvernement original.
    Je vois aussi une manière de concevoir la politique, moins brutale, plus consensuelle.
    J’admets que le style a son importance mais ce n’est pas assez pour asseoir un projet.
    Quand tous les partis se disent peu ou prou européens et entendent gérer la France sans l’entraîner dans une quelconque aventure je me demande si le Centre ne sert pas, comme le souligne Margit ci-dessus, à cacher qu’on est de droite ou à canaliser les mécontentements sans risquer de faire basculer la démocratie.
    En fait c’est un peu le rôle qui est dévolu en Grande-Bretagne aux parti Libéral qui n’a aucune chance d’accéder un jour aux affaires en dépit de l’apport des sociaux-démocrates séparés du parti travailliste mais qui n’ont pas entraîné un mouvement de fond en leur faveur dans l’opinion. Lors des élections partielles les libéraux ou leurs alliés sociaux-démocrates font de beaux scores parce qu’ils permettent aux électeurs de donner un avertissement sans risques.

  • Bonjour,

    J’aimerais évoquer le cas particulier des écologistes, des environnementalistes, ayant rejoins le Modem et sans doute plus particulièrement, je penses, Corinne Lepage. Il est peut être un peu rapide de les identifier à un sorte de clientélisme bobo.

    Le message des écologiste est passé, ils ont réussi bien au delà des propres intérêts de leurs appareils politiques aujourd’hui en déliquescence, puisque la quasi-totalité de leurs thèmes a été récupérés par les partis de gouvernement et parfois au delà. Quel avenir peut-on envisager pour eux ?

    On parlait aussi plus tôt d’une deuxième gauche, ne serait pas là une possibilité d’émergence d’un pôle dirons-nous de centre gauche, rétif à la discipline d’appareil, mais de quelle discipline parle-t-on encore ?, d’un parti socialiste qui n’a plus guère de socialiste que le nom.

    L’émergence certes toujours aussi difficile, que du temps du PSU, d’une deuxième gauche, d’une gauche « alternative » assagie, qui ne voudrait pas se perdre dans les errances de ses extrêmes.

    L’alliance de cette « nouvelle gauche » avec ces « nouveaux écologistes » ne représentera-t-elle pas un des axes majeurs, « central » dirons-nous en référence au Modem, de la politique de demain ?

    Le bipartisme restant pour moi la meilleur façon de ne pas faire de politique, au sens noble du terme, mais juste une façon d’organiser une compétition manichéenne pour un pouvoir politique avant tout gestionnaire et prisonnier des contingences des différents pouvoirs économiques et sans véritable pouvoir d’influence sur la marche des choses.

    Le politique réduit au rôle de vigile, de gérant au mieux, de supermarché pour organiser tant bien que mal les flux consuméristes,voilà-t-il une perspective réjouissante et inévitable ?

  • Il est, j’imagine, inutile de dire que je partage le point de vue de Dang. Je n’ai malheureusement pas sous la main l’ouvrage de René Rémond, Les droites aujourd’hui, qui évoquait le cas du centre, et de François Bayrou. S’il l’évoquait avant la présidentielle de 2007, qui a un peu modifié la perception du personnage, il l’évoquait dans une dimension plus large que la simple droite, et son analyse était prémonitoire. L’échec de Bayrou était déjà écrit dans cet ouvrage, publié en 2005 (si je n’m’abuse).

    Par ailleurs, je suis aussi d’accord avec Dang pour dire que le « discours sur la méthode » de Bayrou est bien insuffisant pour faire un programme, ou un corpus idéologique. On ne se décide pas en fonction d’une manière d’entretenir le débat, au demeurant empreinte d’un peu trop de simples bons sentiments : « nous allons faire émerger une nouvelle génération », « il y a des talents dans chaque camp », « il faut travailler ensemble »…

  • Merci à Dang pour rappeler, avec cet article, que le Centre n’est pas né de l’année dernière. Il remonte d’ailleurs à bien plus loin que Poher ou Lecanuet – on l’appelait classiquement, sous la Vème, le parti « girondin ».

    Tout de même, Dang fait une confusion grosse comme une maison (peut-être est-elle révélatrice d’une opinion commune ?) en tissant dans une même histoire la droite conservatrice française (pour commencer en 1945 : CNIP, CNI, RI, Parti républicain, Démocratie libérale) et le centre (successivement MRP, Centre démocrate, CDS, Force démocrate, Nouvelle UDF, Mouvement démocrate).

    Certes, ces deux familles politiques se sont coalisées de 1978 à 1998 dans un cartel électoral anti-chiraquien : l’UDF de l’époque. Mais ça ne justifie pas d’associer ces partis dans la période 1945-1978… ni après 1998.

    Dang estime que le MRP était qualifié de « rouge chrétien ». D’autres auteurs estiment qu’il était considéré comme un parti de droite, que son projet au « centre » n’a en tout cas pas tenu plus de quelques années (disons de 1944 à la fin des années 40).

    Mais le plus intéressant serait de regarder son propre programme à la Libération, et de comparer à l’inspiration de celui de Jean Lecanuet en 1965 ou de François Bayrou en 2007. C’est en substance le même – au changement du monde près.

    Par exemple, un point souvent évoqué ces temps-ci du programme du CNR (dont le MRP était l’une des composantes) est l’indépendance de la presse…

    Ces dernières années, l’aspect le plus cité de ces politiques de la Libération, c’était la création des grands services publics nationaux, économiques (SNCF) ou sociaux (Séc Soc). Quand la droite d’affaires parle de démanteler l’héritage du CNR, c’est de cela qu’elle parle. Quel a été l’apport du MRP dans cette architecture ? De lui donner une gouvernance tripartite : non seulement État (ou employeurs) et salariés (syndicats), mais aussi représentation des usagers.

    Dans la société de l’époque – pauvre en communication horizontale entre les gens – ça n’a pas marché, on n’a pas trouvé de mécanisme fiable pour représenter les usagers. Dans la société d’aujourd’hui, celle des ONG de plaidoyer avec leurs campagnes médiatiques, celle d’internet, l’intervention de représentants des usagers dans la gouvernance des services publics redevient imaginable. Et selon les démocrates, selon François Bayrou en tout cas, elle est nécessaire pour que les services publics soient au service du public – vous retrouverez cette proposition sur une dizaine de sujets, de la retraite aux PME.

    L’idée constante du Centre en France, depuis plus de deux siècles, c’est une « nouvelle gouvernance » dont le moteur ne soit plus ni un parti supposé moteur de l’histoire (comme le fait la gauche française), ni une coalition entre grands intérêts économiques et technocratie d’État (comme le fait la droite française), mais les citoyens eux-mêmes et leurs façons de s’organiser – les associations, les communes, les cultures régionales, les entreprises, les blogs 😉 …

    Pour Koz (et beaucoup), c’est là un « discours de la méthode » alors que les citoyens attendent des réponses sur le fond, sur les politiques qui seront conduites.

    C’est toute la difficulté du Centre, et pas seulement dans la sphère politique (même problème par exemple pour les CFTC/CFDT dans la sphère syndicale, et depuis des décennies aussi !).

    Mais où sont les déterminants des politiques conduites ? Dans les programmes électoraux et les slogans médiatiques (« Tout est possible », proclamait celui du candidat élu en 2007…), ou dans la façon dont les parties prenantes sont représentées et influent sur les décisions, au fil des législatures ?

    Mon expérience de consultant pour les pouvoirs publics m’a conduit à penser que « tout est dans les institutions », et presque rien dans les étiquettes et les promesses. Si les institutions permettent aux citoyens de faire valoir leur point de vue, alors, décision par décision, leurs intérêts seront servis. Sinon… non. C’est pourquoi j’ai adhéré en 2002 à ce qui me semblait être le futur « Parti démocrate » – l’UDF.

    Ceci dit, si le Centre me semble avoir raison de mener ce combat contre le sectarisme de parti et l’éco-technocratie d’État, j’ai bien compris que c’est un produit médiatiquement invendable à l’état brut. Pour que l’électeur s’y intéresse, il faut le décliner, en tirer des conséquences plus concrètes (p.ex. présenter un programme équilibré en recettes et dépenses), ou le montrer en vrai (p.ex. : faire constater que le cumul de mandats avec celui de député est interdit dans les 26 autres États d’Europe), ou l’incarner en chair et en os.

    Jusqu’à maintenant, ça n’a jamais assez bien marché pour que les démocrates soient au pouvoir à l’échelle nationale. Mais je crois qu’il le faudra bien si notre pays veut remonter dans le train du XXIème siècle, rejoindre la marche de l’Europe. Suspense !

  • J’ai beaucoup aimé cet article, et aussi le parallèle de Thaïs. C’est amusant, je croyais lire autre chose, au vu du titre : en commençant ma lecture, je m’attendais à quelque chose sur les perpétuelles résurrections et petites morts de la tentation centriste en France.
    Au final, ça revient un peu au même.

    Dang répond lui-même sur le programme. Pour moi Bayrou était le seul à en avoir un, notamment parce qu’il était le seul à partir d’options économiques de départ réalistes. Cela impliquait une certaine modestie dans les propositions, en effet, qui a été assumée. Qu’elle soit mal passée médiatiquement, voire peu appréciée des français, est autre chose.

    A propos du MRP : parti de gauche, effectivement, et qui s’est retrouvé déporté sur sa droit à partir du moment où le choix droite/gauche a été fondé sur le critère suivant : acceptez-vous ou non de travaillez avec les communistes?
    Clivage qu’à ma grande surprise on a vu ressurgir pendant les municipales, mais c’est vrai que c’était prévisible. Toute notre vie politique a été marquée par ce clivage, et manifestement ce n’est pas encore mort aujourd’hui. Ségolène Royal en a fait les frais, pour le PS (du SMIC à 1500 euros et l’alliance avec Bayrou)

    A propos du mode projet : très juste, vraiment. A propos de ses conditions de réalisations : notre argumentation (à l’époque) était que l’élection présidentielle DONNE ces conditions. Elle emporte tout sur son passage, crée une majorité, de ceux qui adhèrent ou se rallient, et une opposition, avec les autres. Elle donne, étant donné le calendrier, une majorité parlementaire. (ambition personnelle : je suis trop cynique!)

    Dans le fond, je ne pense pas que le « centre », en tant que « centre », et se positionnant comme tel dans la vie politique française, « au milieu », ait une chance de jamais l’emporter.
    Se dire « du centre », c’est accepter la bipolarisation, et s’enfermer intellectuellement dans cette alternative, actuellement représentée par l’opposition PS/UMP.
    La seule chance de survie du centre est à ce compte la proportionnelle, le centre devenant alors ce Marais méprisé par certains, nécessaire pour obtenir certaines majorités, mais pas enfermé dans des alliances nécessaires et des votes obligatoires… et du coup, capable de faire avancer la réflexion sur des projets de lois.
    J’en conviens, pour le moment, on s’en fout un peu de tout ça. (ca va peut-être changer, notez)

    Le changement de vocabulaire amorcé par Bayrou en 2007, et confirmé par la création du mouvement démocrate, était très important : nous ne nous disions plus « centristes » (margit, réjouis-toi!)
    Nous nous disions « démocrates » (ce qui peut être perçu comme étant d’un traditionnalisme affligeant au vu de l’histoire de nos avatars successifs). C’était une façon de revendiquer une place dans l’échiquier politique. De revendiquer de prendre la place du PS dont le simple nom « socialiste » n’est plus qu’un pin’s un peu rétro accroché aux cols de vestes.
    Balèse. Et foiré, pour l’instant.
    Mais vous me laisserez la liberté de penser que ce n’était pas foireux pour autant.
    Et même, que ça vaut toujours carrément le coup.

    En attendant, on est partis sur une réthorique « centriste ». Ca a été ça l’information principale du discours de Bayrou après son échec à Pau. Il a dit « centre fort ». Et j’ai soupiré : « nous voilà en mode survie », tentant de respirer dans l’étau du bipartisme.

    A part ça, en Moselle, j’ai eu un Pâques blanc, j’en suis pas revenue. Comme quoi, des fois il peut arriver des choses inattendues 😉 La crise du PS n’est pas finie, allez…

  • @ Twoo Moon : l’exemple que vous donnez des écologistes est tout à fait intéressant et montre, si besoin en était, la difficulté qu’ont les partis « en marge » à exister une fois que la revendication qui fait leur principale originalité est prise en compte.
    Comme je le disais plus haut, la Démocratie Chrétienne (disons le MRP pour faire bref mais c’était plus compliqué que cela) et toute la mouvance centriste a perdu sa principale originalité dès que l’idée européenne a été intégrée par les grands partis de gouvernement.
    La droite vient enfin d’intégrer l’idée écologiste après des décennies de mépris, même s’il faut rendre cette justice à Pompidou d’en avoir parlé avec brio, mais sans rien faire. Du coup les verts perdent leur cheval de bataille qui les intéressait d’ailleurs moins que d’autres problèmes de société (mariage gay par exemple).
    Il sera difficile pour le MoDem de bâtir un projet de société qui ne recoupe pas ce que les autres ont déjà dit.
    Ou alors il prendra comme vous le suggérez la place laissée vacante par un parti socialiste ringardisé par Sarkozy. Il peut en effet donner un coup de jeune à des idées largement dépassées et réconcilier la gauche avec l’entreprise.
    Bayrou comme rénovateur de la gauche, lui qui vient de la droite catholique, ce serait curieux mais pas impensable et, pourquoi pas, salutaire pour les institutions. A condition de ne pas retomber dans les erreurs du petit PSU (qui était à la gauche de la gauche d’ailleurs) : parti d’intellectuels sans assise populaire, miné par ses dissensions (un député et sept tendances).
    Si telle est l’ambition de Bayrou, qu’il le dise et qu’il le dise très fort au lieu de faire croire qu’il veut prendre la place de la droite et de la gauche à la fois.

  • @Lisette : merci pour votre commentaire.
    Il est intéressant d’avoir sur ces questions l’avis d’une spécialiste. J
    e crois ne pas trop m’avancer en disant que dans le fond vous faites à peu près la même analyse que moi :
    le Centre peut avoir un programme mais pas vraiment de projet d’une nouvelle société, il peut canaliser les mécontentements mais pas accéder seul au pouvoir, il peut faire pencher la balance d’un côté ou de l’autre mais a bien du mal dans ce cas à garder une quelconque originalité.
    Au final le Centre ne peut exister comme alternative.
    Le MoDem devra donc trouver autre chose et son avenir se situe peut-être bien à gauche.
    Je ne sais ce que vous pensez de la comparaison que j’ai faite avec les centristes en Grande-Bretagne, à savoir les libéraux et leurs alliés sociaux-démocrates.
    Le système anglais ne leur laisse aucune chance d’accéder un jour aux affaires, sauf si les deux grands partis étaient à égalité.
    Il en irait autrement si la proportionnelle était appliquée outre-Manche.
    Les libéraux ont un fond de clientèle électorale de 2 millions et demi de voix, disons un peu plus de trois millions et demi avec leurs alliés sociaux-démocrates ( mais il leur arrive de monter à quatre millions). Ils dépassent rarement les 15 députés mais gagnent souvent haut la main les partielles. Avec un système à la française (deux tours) ils pourraient prétendre à une bonne soixantaine de sièges sinon plus.
    A la proportionnelle ils représenteraient une force d’au moins 120 ou 150 députés et seraient incontournables.
    Mais les britanniques qui n’avaient que sarcasmes pour notre IV e République et ses alliances contre nature ne sont pas près de renoncer à leur système électoral.Là-bas non plus l’existence d’un Centre ne va pas de soi

  • FrédéricLN, je em souviens bien de notre discussion lors d’une République des blogs il y a probablement deux ans. Et je me souviens qu’effectivement, pour toi, tout est dans les institutions. J’y ai repensé et je continue de considérer que cela ne peut être central dans la proposition politique d’un parti. Je ne donnerai pas mon vote à un parti qui se contente de m’indiquer comment il veut agir.

    D’autant que j’ai une assez faible confiance dans la persistance de la volonté de consultation du responsable une fois élu. En tout cas, il n’y aucune chance que je lui donne un chèque en blanc pour 5 ou 6 ans sous prétexte qu’il me promet la concertation.

    La manière d’exercer les responsabilités n’est qu’une composante du message politique.

    Et il ne s’agit pas seulement d’un problème médiatique. C’est surtout une question de responsabilité politique.

  • @Dang : Dire que la démocratie chrétienne a perdu toute son originalité à partir du moment où l’idée européenne a fait son chemin, c’est :
    1. dire que tout le monde a la même vision de l’Europe : ce n’est pas parce qu’il reste des anti-européens que tous les pros européens voient les choses de la même façon.
    2. sous-entendre que les centristes sont tous chrétiens, (et donc tous ringards), or two moons parlait justement d’une autre composante (dont il se trouve c’est vrai que Rome s’inspire pas mal ces temps-ci)
    3. dire que le MRP (pour résumer), ce n’était « que » l’Europe : je renvoie au commentaire de FredericLN
    4. laisser de côté pas mal de penseurs

    @Koz : au fait, à propos de R. Rémond.
    Relis le dernier chapitre, il me semble que c’est un démontage en règle de l’opposition gauche-droite « à la française » qui n’a plus AUCUN sens autre que politicien (il démonte une à une toutes les anciennes lignes de clivage quand même)…

  • @ FrédéricLN : je ne crois vraiment pas faire de confusion entre des partis qui se disent du « centre » et qui sont de droite et le MRP dont je dis qu’il était perçu comme étant de gauche et que l’on qualifie aujourd’hui comme étant le vrai Centre? L’important à mes yeux c’est la perception que les contemporains avaient. Lorsque le MRP s’est disloqué certains sont allés plus à gauche d’autres plus à droite. c’est peut-être cela qui nous fait dire que c’était un authentique aprti du Centre. C’est ce que soutient Jean-François Kahn pour qui le Centre est à la fois de droite et de gauche. Mais croyez-vous franchement que le Centre Démocrate n’était pas un parti de droite?

  • @ Dang

    Désolé, mais le Centre (en la circonstance le MoDem) a un programme :
    http://www.bayrou.fr/opencms/opencms/propositions/
    Il a aussi une philosophie, qu’expose d’ailleurs très bien Frédéric, qui est une défiance d’un côté face à l’Etat, et de l’autre face aux coalitions d’intérêt.
    Il y a une base commune avec le libéralisme, qui est la foi en l’individu, mais, contrairement au libéralisme, l’individu du MoDem n’est pas d’abord un individu « concurrentiel ». L’idée de concurrence est une base fondamentale dans le libéralisme de droite aujourd’hui
    Le MoDem accepte cette concurrence, mais seulement si elle est équitable, et cherche des solutions pour ceux qui ne rentrent pas dans des schémas concurrentiels.

    Faire travailler ensemble des talents (et non des partis !) procède de cette logique. Ainsi, s’il est vrai que le slogan peut paraître simpliste , il recèle une philosophie personnelle, qui n’est d’ailleurs pas étonnante chez Bayrou, tant il est pétri de Péguy, or, Péguy est clairement l’un des pères, au moins dans le domaine spirituel, du personnalisme.

    Je vous fais remarquer que les personnalités de gauche qui ont accepté l’ouverture de Sarkozy, ce sont souvent des individus issus de la seconde gauche, or, le personnalisme a joué un rôle non-négligeable dans la constitution de la deuxième gauche.

    Je les crois, au global, plutôt de bonne foi. En revanche, je ne pense pas que Sarkozy et eux aient le même objectif. Sarkozy aime surprendre, et pour cela, il n’hésite pas à faire bouger les lignes, mais cela n’a pas grand chose à voir avec l’idée de faire travailler ensemble les talents.

  • @ L’Hérétique : je n’ai jamais dit que Bayrou n’avait pas de programme, au contraire j’ai cité l’existence d’un programme dans mon billet puis de nouveau dans ma réponse à Cilia. Le problème c’est que peu d’électeurs ont voté sur ce programme, qu’il est mal connu et pas suffisamment original pour avoir fait la une des journaux.

  • @ Dang 1 : c’est amusant de poser avec certitude que le MRP de 1945 était un parti de gauche et le Centre démocrate de 1967 un parti de droite, alors qu’ils avaient exactement la même ligne politique. C’est, du moins, reconnaître que les mots de droite et gauche ont un sens variable et flou, alors que la tradition démocrate (-chrétienne, s’agissant de ces deux partis) est d’une grande solidité.

    @ Dang 2 : « peu d’électeurs ont voté sur ce programme » = pas d’accord, mais c’est intéressant. C’est une idée reçue, que les gens ne lisent pas les programmes, « donc » ils ne votent pas pour cela.

    On pourrait aussi bien dire que les gens ne lisent pas les fiches techniques des ordinateurs, « donc » ils ne les achètent pas pour leurs performances. Et là tout le monde répondrait : bien sûr que si, à quoi servirait un ordinateur sans performances ? Il n’y a pas que le mode d’emploi pour connaître les performances techniques. Il y a ce que vous en dit le voisin ou le vendeur, il y a votre propre impression en magasin, les tests comparatifs dans les journaux, la réputation de la marque qui fait toujours un peu le même genre de produits…

    Pareil pour les personnalités politiques et les partis !

    @ Koz : j’ai bien noté que c’est un point de désaccord entre nous. Mais il n’est pourtant décidément pas clair.

    Je ne prétends nullement que la manière de gouverner soit une question de personnes, de « persistance de la volonté de consultation du responsable une fois élu ». Je prétends au contraire (et pour ce qui le concerne, François Bayrou affirme de la façon la plus claire) que tout détenteur de pouvoir tend à en abuser, aussi démocrate soit-il. Que seul le rapport de forces, canalisé et organisé par un dispositif institutionnel, permet aux intérêts du citoyen d’être pris en compte dans les décisions publiques.

    Je ne vote pas François Bayrou pour une supposée vertu du gouvernant Bayrou, même attestée par ses années de président de Conseil général ou de ministre. Je vote François Bayrou pour les changements structurels qu’il a annoncés (suppression de l’ENA, découplage système de santé / travail, pleine responsabilité des partenaires sociaux sur le système de retraites, obligations de transparence sur le nucléaire et autres sujets, non-cumul du mandat de député et proportionnelle à l’Assemblée, interdiction aux grands fournisseurs de l’État de contrôler des médias, responsabilité des Maires sur les forces de sécurité dans leur commune, etc etc.) qui toutes me semblent converger pour que les intérêts des citoyens soient respectés et que la société française puisse collectivement réussir, dans le monde post-industriel…

  • On admet qu’il y a une nuance entre le centrisme de notables provinciaux et le modem aujourd’hui plus divers dans le fond, emprunt de boboisme par là, d’opportunisme ou de réalisme ça et là.
    Le MoDem tout à la fois veut profiter de l’assiette électorale centre-droit dont il est issu mais ne veut pas assumer la vassalité qui allait de soit pour la droite. A l’inverse il pourrait afficher une indépendance totale et subir de plein fouet la fatalité du scrutin majoritaire. Alors c’est selon, soit on lui reproche la schizophrénie, soit on lui reproche le ridicule d’une troisième option dans un système de facto binaire. Dans les deux cas ça relève de la première réaction face à l’adversité: en contester son existence.
    Parce qu’en réalité cette bataille de la binarité contre le pouvoir au marais n’est autre qu’un relent de l’opposition IVème/Vème républiques, scrutins proportionnels ou majoritaires, avec toute la virulence qu’on connait.
    Les carences de la IVème sont évidentes et on a traité les symptômes en s’assurant que les majorités seraient absolues. Le remède a été efficace, mais qui nous dit qu’il n’a pas outrepassé ses objectifs? Expression manifeste de l’opposition dans la rue, remise en question systématique du pouvoir national aux élections intermédiaires, obstination caricaturale de l’opposition face à la majorité, pauvreté des débats dans les assemblées, régulières dérives de l’électorat vers les extrêmes…
    Et du bout des lèvre @Dang concède au « centre » cette qualité qui serait de passer des rues aux urnes.
    Evidemment les partis de gouvernement d’ordinaire opposés l’un à l’autre unissent leurs forces pour peser contre ce qui représenterait une menace pour cette binarité qu’ils ont obtenus des français grâce au général et à la dégénérescence parlementaire; sauvegarder l’assurance panurgiste d’être au pouvoir à la prochaine alternance.

    A propos des idées -c’est encore l’essentiel- @Dang a évoqué l’Europe et l’absence d’originalité de cette position. C’est très juste.
    En revanche il y a un champ politique qui paraît évident lorsqu’on situe la politique française sur les deux axes que sont les questions d’économie, des dirigistes aux libéraux, et les questions de sociétés, des conservateurs aux progressistes.

    Je vais prendre mon exemple. De nature libérale il m’est difficile de voter pour une politique économique qui tend vers le socialisme (on sait que le PS en est très loin, c’est un autre débat), par ailleurs, de nature progressiste, je ne peux pas voter pour ceux qui sont prudents (pour ne pas dire contre) sur l’avortement, la laïcité, les unions homosexuelles, l’abolition de la peine de mort, l’immigration, la redistribution des chances de générations en générations. En revanche il m’est tout naturel de soutenir un mouvement qui, en plus d’être européen est libéral et progressiste.
    Et comme je n’ai aucune raison de manifester un attachement particulier pour un système rigide à deux entrées qui voudrait que si l’on est libéral on est conservateur ou si l’on est socialiste on est progressiste et bien je le fais.

  • @Dang : je ne suis spécialiste de rien, et même très apathique comme militante depuis le mois de septembre. FredericLN est, lui, un spécialiste (et l’Hérétique aussi, plus que moi)

    Dans mon esprit, il y a en effet deux choses différentes : La tentation du centre, et l’aventure du mouvement démocrate.
    Ces deux choses ne sont différentes qu’en terme de stratégie, mais partagent la même philosophie, et font le même diagnostic de la société.

    La tentation du centre est vouée à l’échec tant que le parlement n’est pas représentatif. Cela vaut pour toutes les élections, sauf peut-être la présidentielle où tout peut changer.
    L’aventure du mouvement démocrate est en effet une tentative de reconstruction de la vie politique française sur des clivages qui nous paraissent porter du sens pour l’avenir du pays : quelle Europe? quel rôle pour l’Europe dans le monde? quelle gouvernance efficace pour la France et pour l’Europe? quel équilibre aux contre-pouvoirs? Comment faire émerger (comme contre-pouvoirs ou pouvoirs d’équilibre) la société civile? En ce sens, nous espérons la fin politique du PS comme nous constatons sa fin idéologique.

    Dans le cadre de l’élection présidentielle de 2007, la position centriste était particulièrement pertinente m’a-t-il semblé, lorsqu’on faisait (ce qui était mon cas) le constat que la crise de la France et ses difficultés sont d’abord liées à ce qu’on appelle des fois dans Elle ou Marie-Claire le « vivre-ensemble ». Le lien social, la démocratie, la représentativité, le lien entre les générations, la famille, l’entreprise, le syndicat.
    La nécéssité de réforme porte actuellement sur : les retraites, l’école, la laïcité et une certaine idée du service public. C’est à dire, tous les éléments sur lesquels a reposé notre pacte social depuis la guerre.
    Tout le monde partage le constat de ces crises, les solutions peuvent être différentes.
    La position centriste dans ce débat était précisément de voir cet ensemble nécessaire de réforme comme une refondation de notre pacte social, nécessitant des majorités larges dans un parlement véritablement représentatif des familles di’idées de la France. Notre idée était que la victoire d’un des deux « camps » allait inévitablement amener à des réformes :
    1. bâclées dans les textes à cause d’un calendrier trop rapide
    2. frileuses pour cause de crainte de mouvements sociaux. Les mouvements sociaux naissant plus facilement quand la société civile a l’impression que le débat est escamoté et que les « politiciens » vont une fois de plus s’en mettre plein les poches sur le dos des pauvres gens.
    3. remises en cause par l’opposition, qui menacera de tout changer dès qu’elle reviendra au pouvoir (y compris quand ces menaces sont absurdes : Ségo voulant remettre à plat la réforme Fillon des retraites, Sarko expliquant qu’il allait abolir les 35h)

    Cette idée, qui me semblait être la meilleure, et à vrai dire la seule possible, a été défendue pendant la campagne. Ca n’a pas marché, pour tout un tas de raisons.
    L’occasion en est donc manquée.
    En 2012, la situation sera complètement différente. Une crise économique sera passée par là, les enjeux écologiques auront probablement pris une place plus importante, l’Europe aura commencé à fonctionner… et le moins qu’on puisse dire c’est que la crise démocratique n’aura pas disparu par enchantement.

    C’est sur ce constat qu’a commencé l’aventure démocrate. Centre indépendant, certes, mais dans une tentative (révolutionnaire?) de recomposition de la vie politique.

    « l’existence d’un centre ne va pas de soi » : ce n’est pas parce qu’un courant d’idées n’a pas d’élus qu’il disparaît. Le centre EST une composante de la sensibilité politique française. On peut étudier sa cartographie, et l’évolution de celle-ci. On peut étudier son histoire, ses penseurs, ses alliances et ses revers.
    « L’existence politique d’un centre ne va pas de soi » : je suis d’accord. En disant « politique » comme on dit « politicien » (sans péjoratif : le jeu des partis dans les règles électorales en cours)

    L’originalité du programme de Bayrou, et le fait que les gens qui ont voté pour lui n’ont pas voté pour son programme. Elle est bien bonne!
    Petite remarque préalable : La capacité à porter un programme à la connaissance des français est directement liée à la puissance économique du parti qui porte ce programme. Le budget de l’UDF était deux fois moindre (?) que celui de l’UMP ou du PS. Même problématique pour chaque élection.

    Mais surtout : Je prétends que parmi les votants de 2007, 20% au maximum ont voté en connaissance des programmes, c’est à dire après les avoir lus. S’il y a quelque chose dont on se fiche pendant une présidentielle, c’est bien du programme. Le programme, c’est un truc qu’on se balance à la figure les uns les autres dans des émissions de télé. A part ça : « je suis de droite ». « je suis de gauche ». Eventuellement : « Je suis de gauche mais Ségolène m’agace ». « Je suis de droite mais Sarkozy est insupportable ». Peu de gens se définissent « centristes », mais j’imagine qu’on peut dire la même chose.
    Des fois, quand je lis Koz et ses exégèses de Sarkozy, je me dis que tout a été dit « avant »… mais qu’il fallait quand même tout bien avoir lu dans les petits caractères hein.
    Le type qui faisait « juste » l’effort de lire les documents de campagne, ou le programme sur le site du candidat… beh il en était pour ses frais. Je te raconte même pas pour Ségolène, vu que de toute façon son programme avait été concocté par une bande de gens qui faisaient rien qu’à lui en vouloir et avaient proposé (exprès) des trucs « peu crédibles ».

  • @ FrédéricLN : Quand, à la Libération, le MRP forme le gouvernement avec les communistes et les socialistes, est-il considéré de gauche ou de droite? Il serait intéressant de poser la question aux anciens.
    Quand on vote pour le Centre Démocrate en 1967 et dans les années qui suivent, j’ose dire qu’on ne vote pas à gauche. Que les programmes soient sensiblement les mêmes ne change rien à cette réalité.
    Vous partez du présupposé que les électeurs étudient les programmes et votent en conséquence.
    Je ne partage pas ce point de vue. C’est peut-être dommage pour la démocratie mais la plupart des gens sont influencés par bien d’autres paramètres.
    Les grandes questions que se posaient les électeurs sous la IVe puis au début de la Ve étaient plutôt du genre « pour ou contre De Gaulle », « pour ou contre les communistes », « pour ou contre l’Europe », « pour ou contre l’Algérie française », « pour ou contre la loi Barangé d’aide à l’enseignement catholique » etc…
    La même question se pose au sujet de la CFTC/CFDT. Je suppose que vous serez d’accord pour dire que la CFDT est perçue comme étant de gauche même si sa ligne a considérablement évolué sous Nicole Notta et Chérèque. Et la CFTC? Pas facile à dire mais on trouvait il y a peu nombre de RPR parmi ses cadres dirigeants.

    @Lisette : vous êtes bien d’accord pour dire avec moi que seule la représentation proportionnelle peut donner une chance au Centre. L’analyse que j’ai faite du Centre en Grande-Bretagne pourrait être reproduite à des détails près en France.
    Néanmoins le triste spectacle donné récemment d’un MoDEm s’alliant parfois avec l’UMP, parfois avec le PS, parfois avec le PC augure mal de ce qui se passerait dans une assemblée élue à la proportionnelle. Ou plutôt si, on retrouverait l’instabilité de la IVe avec le risque de voir l’extrême-droite troubler le jeu comme en 1956 et en 1986.

  • Dang : je réponds à votre réponse à FredericLN : vous parlez d’une droite et d’une gauche que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître…. (chute du mur de Berlin : 91)
    Quand au Centre Démocrate, vu la taille du parti, pardon d’être dubitative sur vos analyses a posteriori. j’ai connu un homme du centre démocrate moi.
    Un vrai.
    Mon grand-père, un ancien du MRP. Jamais de sa vie il n’a voté Chirac… et se définissait comme centre gauche. Quelque part au fin fond du Finistère.

    Dans la partie de votre réponse qui s’adresse à moi : vous parlez donc du centre, qui est une aventure dont nous essayons de sortir , depuis un paquet de temps déjà.
    Et le critiquez par une allusion à la IV, ce qui est très agaçant.
    1. notre référence à nous est en fait la IIIè.
    2. la quatrième, c’était pas la chienlit (même si elle était pas adaptée pour gérer la décolonisation)
    3. notre pacte social actuel a été créé sous la IV, au lendemain de la guerre, au moment de gloire du MRP : sécu, retraites, SNCF, Europe… toutes les conditions de possibilité de la Vè ont été rendues possibles sous la IVè… comme souvent en histoire, on constate que les ruptures sont beaucoup moins importantes que les continuités.
    4. Il faudrait créer un point godwin : quand on accuse le centre de parlementarisme, c’est qu’on a plus grand chose à dire… 🙂 le parlementarisme étant effectivement notre revendication. Pour moi, il s’agit d’une des façons de résoudre notre crise démocratique. Pourquoi autant d’abstention? Parce que les votes ne servent jamais à rien… personne ne peut voter contre ses idées.
    5. Mais peut-être pas de point Godwin, le centre étant ultimement accusé de faire le jeu de l’extrême droite… Pou moi, ce n’est pas en 86 que l’extrême droit a vraiment posé problème… mais en 2002. Après, chacun fait son analyse, s’pas. Que les partis extrêmes droite et gauche représentent ensemble environ 20% des votants du pays ne me semble pas complètement farfelu… et ils restent à ce niveau dans l’opinion quelle que soit la loi électorale. « Simplement » ils n’ont pas d’élus… ce que je trouve léger, démocratiquement parlant.

  • @ Lisette : je vais finir par être traumatisé (lol) par tous les points Godwin qu’on m’attribue par ci par là (cf les billets sur l’euthanasie).
    Je ne comprends pas ce que vous voulez dire sur le Centre Démocrate et son nombre d’électeurs.
    Ce que vous me dites du vote MRP de votre grand-père qui se considérait comme centre-gauche n’est pas en contradiction avec ce que j’affirme, à savoir que le MRP était considéré comme « de gauche », que les anciens MRP se sont dispersés vers la gauche ou vers la droite, que les Centristes du temps de Lecanuet étaient anti-gaullistes etc…
    Je suppose que votre grand-père bien que de centre-gauche préférait voter pour le Centre Démocrate parce qu’il ne trouvait rien correspondant à ses idées ailleurs. Mais franchement je n’ai jamais entendu dire que le Centre Démocrate était de centre-gauche.
    Je n’ai vraiment pas accusé les centristes d’être responsables des poussées d’extrême-droite, pas du tout. C’est la proportionnelle qui permet à l’extrême-droite d’entrer au parlement, pas les centristes.
    D’accord pour dire que toutes les tendances de l’opinion doivent être représentées mais si c’est pour arriver à la paralysie ou aux compromissions comme sous la IVe ou comme dans le système israélien, je préfère le système actuel. N’oubliez pas les 28 gouvernements en 13 ans de la IVe.
    Désolé de faire ces allusions à la IVe. Je sais qu’elles vous agacent, mais c’est encore assez récent dans nos mémoires. Je connais moins bien la IIIe République mais ce que j’en sais ne me convainc pas que c’était un régime idéal.

  • Mon accumulation de points godwins se voulaient humoristique.
    Encore une fois, je partage votre point de vue sur l’avenir du Centre. Je tiens juste à remarquer que le mouvement démocrate représente une tentative de s’extraire de cette histoire.

    Et, pour en rester à cette histoire, je tiens à signaler que nous parlons là d’une époque très particulière (que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître) où le clivage droite/gauche s’est fait en fonction des relations que les uns et les autres souhaitaient entretenir avec le PC.
    A l’époque, le socialisme, c’était de la blague.
    Les différentes composantes du centre se sont retrouvés obligées de choisir… et donc certains ont été poussés « à gauche » et d’autres « à droite ».
    Ce clivage faisait sens à l’époque, non seulement parce que le PC était fort et encore dirigé par Moscou, mais parce que les équilibres mondiaux étaient ainsi faits.
    Aujourd’hui, ça n’a plus aucun sens.

    Je ne sais pas ce que veut dire aujourd’hui, en terme de valeurs, de positionnements, de choix économiques fondamentaux, « être de droite » ou « être de gauche ». Et au fond, on a pu penser cela pendant toute la Vè. Donc certains ont pu continuer à se sentir « de gauche » selon les critères d’avant la guerre (voire de pendant la guerre), et ne jamais voter socialiste ou communiste de leur vie.

  • @ Dang

    Il y avait tout de même des idées pas idiotes dans le programme de Bayrou : par exemple, sur l’ISF, la taxation à 1 pour millle, mais aucune niche fiscale. C’était bien pensé.

    Ensuite, il fallait oser pour construire sa notoriété entre autres sur l’intention de lutter sérieusement contre la dette, en faisant ce que j’attends, pour ma part, d’un homme politique responsable, des arbitrages clairs.

    Bayrou aurait pu attaquer toutes les réformes, car il n’avait rien promis en dehors de les faire les réformes en question.

    Je pense qu’un certain nombre de ses propositions avaient tout de même été popularisées pendant la campagne. En tout cas, assurément la question de la dette.

  • @ Lisette : j’ai oublié de commenter un point intéressant de l’une de vos réponses plus haut : point 5, l’extrême-droite. Vous trouvez que c’est en 2002 que l’extrême-droite a posé problème. Je n’ai pas ce sentiment. Le Pen a dégommé Jospin et pour la droite c’était inespéré. Si Jospin s’était retrouvé au 2e tour les choses auraient peut-être été plus difficiles pour Chirac. Donc d’un point de vue de droite pas de problème, d’autant moins que Le Pen ne pouvait en aucun cas gagner. Pour la gauche c’est une autre histoire bien sûr.
    En revanche quand 30 ou 60 députés poujadistes ou frontistes arrivent dans l’hémicycle et qu’il faut faire avec pendant des années c’est nettement moins évident pour les partis traditionnels. Et si en plus il y avait le même nombre de LCR ou LO vous imaginez les difficultés de la démocratie parlementaire, les alliances contre nature etc…

  • Oui, mais je ne me suis pas vraiment réjouie de la réélection de Chirac, en fait.
    J’ai beau avoir l’air, comme ça, d’une bourgeoise catholique tradi à tendance versaillaise, au fond je ne suis pas une femme de droite. (qui ne s’en doutait?)
    J’ai même trouvé ça dramatique. De plus, les conditions de sa réélection, ont fait qu’il a eu les mains complètement liées pendant la durée de son mandat.
    30 ou 60 députés frontistes : on s’en fiche, d’abord, le nombre de députés peut être réglé par la loi électorale, le tout c’est d’assurer la création d’un groupe aux partis qui font plus de 10% de l’opinion. Il me semble que ce n’est pas extraordinaire, tant que la règle permet la constitution d’une majorité stable (c’est à dire une prime au vainqueur). Personne (je crois?) ne demande la proportionnelle intégrale.

  • En y regardant de + près, on voit bien que le programme économique de Bayrou est un programme vraiment à droite..
    On peut alors comprendre que le MODEM veillle à ne pas trop l’expliquer aux français, ils préfèrent jouer sur leur opposition à la personne de Nicolas Sarkozy.
    Ils comptent peut-être sur le désenchantement des français et sur l’explosion du PS, espérant alors que les électeurs se tourneront vers le centre ..
    Personnellement, je n’y crois pas trop .
    Bien qu’en politique, tout est possible, non ?

  • J’avais été frappé, durant la campagne, du fait que les références de bayrou étaient nettement plus libérales que celles de Sarkozy… tout en voulant se rapprocher de la gauche.

  • @ Koz
    Je vous rejoins , Bayrou est beaucoup plus libéral qu’il ne voudrait le laisser penser..
    Sa tactique est sûrement de faire exploser le Ps en en récupérant au passage les DSK, Moscovizi , etc, ceux qui sont plus prôche de lui sur les thèmes économiques que des Emmanuelli, Mélenchon, etc..
    Il aurait peut-être pu réussi son coup en acceptant de devenir le premier ministre d’une S. Royale entre les deux tours de la présidentielle..
    Mais comme tous les dirigeants sont tous plus égocentriques les uns que les autres, aucun ne veut être le n° 2 de qui que ce soit !
    En Faisant cette proposition à Bayrou , Mme Royale s’est complètement dévoilée, prête à tout pour gagner, avait-elle au moins lu le programme du Modem avant ?
    Je n’en suis même pas sûre, quand je pense qu’après la défaite du 6 mai, elle reconnaîssait qu’elle avait défendu du bout des lêvres le programme du PS, ne croyant pas à l’augmentation du SMIG à 1 500 €.
    Comme la plupart des dirigeants du Ps, Bayrou est complètement pro-européen, au moins lui il l’a dit clairement !
    Encore une raison pour laquelle je ne voterai jamais pour lui !

  • @ koz : Bien sûr que François Bayrou est plus libéral que Nicolas Sarkozy ! Mais Ségolène Royal (pas son programme… je sais) ou Daniel Cohn-Bendit aussi sont plus libéraux que Nicolas Sarkozy.

    Tu auras relevé qu’un libéral autoproclamé, François Léotard, avait voté François Bayrou et non Nicolas Sarkozy.

    Libéraux au sens politique, c’est-à-dire, à peu près l’inverse de ce qu’on appelle en France « ultra-libéral », c’est-à-dire (à mon avis) capitulard devant les monopoles financiers.

  • Avec six mois de recul, avec quelques libéraux de plus enregistrés (Bertrand Delanoë) et la crise financière passant par là, ces échanges sont particulièrement savoureux !

    Mais je me rends compte que quelques réponses-à-réponses de Dang méritaient réponse 😉

    Dang : « Quand, à la Libération, le MRP forme le gouvernement avec les communistes et les socialistes, est-il considéré de gauche ou de droite? Il serait intéressant de poser la question aux anciens. »

    -> C’était en l’occurrence un gouvernement De Gaulle !

    « Quand on vote pour le Centre Démocrate en 1967 et dans les années qui suivent, j’ose dire qu’on ne vote pas à gauche. »

    -> J’ose dire qu’on ne vote pas à droite ! Aux législatives de 1973, trois coalitions s’affrontaient : la droite (gaullistes + giscardiens + CDP, le « Nouveau centre » de l’époque), la gauche « Programme commun » (PC+PS+MRG) et le centre (centre démocrate + réformateurs). Ceux-ci ne sont arrivés que 3èmes avec 17% (et 13% des sièges) et ça a sonné la fin de leurs espoirs.

    « Que les programmes soient sensiblement les mêmes ne change rien à cette réalité. Vous partez du présupposé que les électeurs étudient les programmes et votent en conséquence. Je ne partage pas ce point de vue. »

    -> Moi non plus, et ce n’est pas ce que j’ai écrit, cf. commentaire 35. Ce que j’ai écrit, c’est que les projets politiques se manifestent à travers les événements d’actualité, le comportement des élus et des candidats, les avis d’experts ou de profanes qui circulent dans les médias ou les conversations ordinaires. En politique comme dans n’importe quel domaine – j’avais donné l’exemple des PC, dont personne ne lit le mode d’emploi !

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