decency come-back

beigbedelleLectures inhabituelles pour moi cette semaine. Elle, avec Beigbeder. Et Martine Aubry[1]. Pour Martine, j’y ai sacrément mis du mien pour lire sa tribune du quotidien vespéral et son fleuve discours de La Rochelle, à l’école oratoire castriste.

Outre le caractère inhabituel de ces lectures, Martine et Beigbeder font billet commun en raison de l’agacement pavlovien qu’ils suscitent chez moi, peut-être, mais surtout parce que l’un et l’autre semblent remettre au goût du jour des petites musiques qui me sont familières. Et agréables.

Je crois voir un frémissement, percevoir une brise dans les feuilles, cette idée que l’on assisterait peut-être à un contre-pied de l’Histoire (laissez-moi y croire), avec un retour en grâce des « valeurs », de la décence ordinaire.

Et tout ça, grâce à Nicolas Sarkozy !

*

Martine Aubry a attiré mon attention en se prononçant pour une « offensive de civilisation« . Parce qu’elle rappelle la  « politique de civilisation » de Nicolas Sarkozy. Et parce que le fait que l’un et l’autre s’intéressent ainsi à notre « civilisation » peut signifier qu’il s’agit là d’une attente identifiée des français.

« Ce n’est pas un simple bug, c’est une société en panne de valeurs, de cohérence et de promesses »

Un reste de pudeur et de laïcité l’aura-telle retenue d’évoquer le sens et l’espérance ? Mais c’est bien une demande de sens, et ça soulage. Non que je néglige la légitime demande de pouvoir d’achat mais qu’il ne me semble pas incohérent de penser que le premier peut avoir un impact sur le second. J’ose espérer que Martine Aubry n’a pas soudainement découvert que « l’argent ne fait pas le bonheur« , et qu’elle ne fait que céder à des figures rhétoriques. Elle emploie néanmoins des formules qui sonnent comme une remise au goût du jour.

Ainsi, dans sa tribune :

« Désormais, nous savons que l’abondance n’est pas synonyme de bonheur. »

Et, dans son discours :

« Avec une idée centrale, qui secoue nos habitudes et nos certitudes : nous savons maintenant que l’abondance ne rend pas mécaniquement la vie meilleure. »

Martine Aubry tente de aussi de donner un contenu à son offensive de civilisation, autour d’une « civilisation de la dignité » :

« Je revendique, comme horizon de ce nouveau modèle de développement, une civilisation de la dignité. « La société décente« , depuis Orwell, est celle qui n’humilie pas les personnes. Une réponse globale à la question sociale doit être reconstruite ».

Ah, l »aimable invocation de la « décence ordinaire » d’Orwell ! Je suis loin d’avoir épuisé les richesses de la pensée d’Orwell, et je pressens confusément que je n’en partagerais pas toutes les conclusions, mais l’évocation d’un « sens moral inné » qui pousserait les gens à bien agir m’intéresse. Par idéalisme et par réalisme. Qu’il existe un sens moral inné ne souffrant pas les études comparatives, les bilans coûts / avantages, qui ne s’encombre pas d’une analyse prétendument fine qui finit surtout pas abolir le bon sens. Un sens moral qui tient, donc, du réflexe. Et, tiens, un sens moral qui, pour évoquer une discussion récente, n’exige pas une longue réflexion pour concéder que jouer à la tragédie des autres est indécent.

A en croire ce développement sur la « décence ordinaire »,

« Disons-le clairement : ce n’est pas par simple intérêt que l’homme ordinaire répugne à faire le mal (l’éthique ne relève pas d’un calcul), mais parce qu’il a en lui certaines dispositions morales qui l’incitent à prendre soin spontanément de ses semblables. »

Est-ce naïf ? Doit-on préférer à cette vision celle d’une organisation pragmatique de la société tirant parti des égoïsmes additionnés de chacun ? Bien sûr, il ne faut pas se reposer sur une confiance immodérée dans la bonne volonté de chacun. Mais existe-t-il une seule idée sur laquelle on puisse se reposer totalement, entièrement ? Il faut du réalisme, pas du cynisme.

Il ne s’agit bien sûr pas de donner quitus à quiconque pour le seul emploi d’un mot magique. Martine Aubry évoque la « civilisation de la dignité« , et ça plaît à mon logiciel. Parce que, figurez-vous que, pour ne prendre qu’un exemple, Benoît XVI déclarait que « la dignité de la personne est toujours au cœur même de toute vraie civilisation« . Martine Aubry affirme découvrir que l’abondance de biens ne comble pas l’homme, et c’est une musique qui ne m’est pas étrangère. Pour autant, je n’ignore pas quelles divergences surgissent dès lors que l’on met en application les belles idées.

*

Frédéric Beigbeder est un homme complexe. Vous me direz : l’Homme est complexe. Il n’y a pas de raisons que Beigbeder y échappe. Il est le noctambule impénitent. Il est aussi l’interlocuteur de Mgr Di Falco dans Je crois, moi non plus. Il est le critique complice d’un monde superficiel. Et puis, il nous fait cette interview. A l’entendre, deux jours au frais lui ont remis quelques idées en place.

Et il nous dit que

« Finalement, je préfère me définir par mes racines que par mes marques de vêtement. Je préfère avoir une famille, un passé même douloureux, plutôt qu’être un homme qui serait un peu l’idéal actuel, mondialisé, vivant sur Internet, avec un profil facebook pour toute identité[2]. C’est un peu le personnage d’Octave de mes livres précédents, un type dont on ne sait pas d’où il vient et où il va, qui vit dans un présent perpétuel. J’ai imaginé ce personnage pour m’en moquer, et les gens ont cru que c’était moi. Aujourd’hui, j’ai envie de dire : je ne suis pas Octave, je m’appelle Frédéric et voilà d’où je viens »

Repentance rapide et surfaite d’un people toxico ? J’accorderais tout de même une présomption de sincérité à celui qui a dialogué avec un Di Falco qui n’était déjà plus en odeur de sainteté médiatique.

Je lis surtout cette volonté de s’ancrer dans un passé, dans des racines, dans une famille, pour mieux habiter le présent. Et puis, je m’étonne aussi de cette formulation un peu naïve qui me rappelle celles de Martine Aubry. Beigbeder serait-il un grand (re)découvreur du fil à couper l’eau chaude ?

*

« Désormais », « maintenant », « finalement », « aujourd’hui »… D’où vient cette urgence à redécouvrir ces valeurs fondamentales ? Réflexe de crise, peut-être. Libèrerait-elle la parole de ceux qui s’abstenaient[3] de proposer autre chose que de « partager les fruits de la croissance » ? Ou serait-ce un bénéfice de la présidence Sarkozy ? Comprenez : face à l’indécence alléguée de Nicolas Sarkozy, la gauche se placerait sur le créneau de la décence. Face au style Sarko, la gauche en regretterait presque la droite classique, celle qu’elle conspuait et conspuerait encore.

Cela étant, rassurez-vous aussi. Je ne suis pas tombé subrepticement sous le charme notoire de Martine. Je ne suis pas dupe d’une gauche qui a lourdement contribué à ringardiser cette « décence ordinaire », et jusqu’au mot même de « valeurs », renvoyé au conservatisme – presqu’à Vichy – tout comme elle a fustigé ce « patron paternaliste » qu’elle aimerait bien retrouver.

Mais comprenez que je prenne ce qu’il y a de bon à prendre.

  1. Pour Elle, ma mère dit que c’est la banque qui lui offre. Donc elle me le refile. Je voulais qu’il soit clair que je ne l’ai pas acheté []
  2. que les petits malins qui croiraient pouvoir faire un lien avec moi se dénoncent ! []
  3. par électoralisme ? []

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32 commentaires

  • Je me permets de me gausser (ou je garde en réserve du vocabulaire idoine pour commenter ce blog j’espère qu’on m’en sait gré) un tantinet de Mr Beigbeder. Cela fait au moins depuis depuis 99 francs que ce charmant garçon au demeurant nous fait le couplet d’un abandon à la civilisation du paraître et de l’apparence. bon je doit dire que dans 99 francs çà me faisait rire mais çà commence un peu à faire rengaine quand il nous le ressort à chaque fois. Même les poissons rouges finissent par le voir.Alors ou bien quelqu’un l’envoie dans un refuge de trappiste pour de bon avec la tonsure qui convient ( si personne ici n’a l’adresse c’est à désespérer) ou il est établi qu’il est perdu pour la cause.

  • « Cela étant, rassurez-vous aussi. Je ne suis pas tombé subrepticement sous le charme notoire de Martine. »

    Je n’en serais pas inquiet du tout si c’était le cas, Martine n’est ni Marine ni Olivier.

  • Mon cher et estimable (si, si, quand même) Koz, je redoute de devoir vous accuser (quel bonheur que d’accuser quand même, l’accusation est la plus belle des valeurs de gauche !) au mieux d’avoir la mémoire courte, au pire d’être un peu naif. Je serais même tenté de cumuler l’être et l’avoir : seriez-vous un grand naïf qui n’a plus que son amnésie ?

    L’abus de confiance, envers les autres, y mène parfois. Une tendance presque féroce au pardon un peu trop rapide, toujours définitif et donc à l’oubli irrémédiable – bref en bon catholique assumé et respectable (tous le sont-ils ?) que vous êtes, dans ce billet, je crois que vous déconnez un peu, à peine, subrepticement mais quand même.

    Revenons à nos moutons. En effet, comment pouvez vous accorder encore un tant soit peu de crédit à Aubry et Beigbeder ?
    Aubry fut bien la Madonne (la vraie me pardonnera cet abus de langage) de la gauche plurielle (Ère Jospin).
    Beigbeder, grand sniffeur de cocaïne sur capot de voiture il me semble (quelle honte pour les capots de nos plus belles berlines!), reste cet acteur de la grande société du spectacle.

    Sur celui-là, je reprendrais mot pour mot le commentaire de Jp.guedas à 21.13. Je n’écrirais donc rien de plus. Beigbeder en défenseur de la civilisation décente ? C’est même pas drôle. Le drôle peut être crédible, pas lui. Il reste ce petit publicitaire, récupérateur en tout : « une pub développement durable » pour un V6 16 L/100 ? Pas de problème, il vous le trouvera votre slogan.

    Sur celle-ci, Martine, souvenons nous de la grande époque de SO-LI-DA-RI-TE de l’époque Jospin. Rarement un mot, aussi noble, fut aussi vite usé par la Machine. Importé de Pologne (gloire à Solidarnosc), le mot fut récupéré, dénaturé, tordu, transexualisé, diversifié, socialisé, vidé. Après 5 ans de gouvernement Jospin, la définition du mot solidarité pouvait se résumer à la phrase suivante : « (n.f) action d’augmenter des taxes, cotisations et impôts afin de préserver un système fictif de défense des travailleurs.

    Alors, aujourd’hui, la même Martine, nous vend de la décence. Plus d’essence ? Mais de la décence.
    Plus de pain ? qu’ils mangent de la brioche.

    La Common decency est au PS ce que la taxe carbone est à l’UMP. L’attrape nigaud du moment.

    Bref, Martine est aussi crédible sur Orwell (très à la mode, très tendance ces temps ci) que Xavier Bertrand sur l’écologie et Cohn Bendit sur l’éducation.

    Tout ça écrit en vrac et à la va-vite.
    Vous restez estimable quand même bien sûr. Je vous accorde encore du crédit, à vous, pas à eux.

  • Aubry fut bien la Madonne (la vraie me pardonnera cet abus de langage) de la gauche plurielle (Ère Jospin).

    Maintenant que vous nous le faites remarquer, c’est en effet extrêmement savoureux cette contradiction de ces gens de droite qui se servent du nom de la mère du dieu des chrétiens comme insulte politique a caractère sexiste.

    Sur celle-ci, Martine, souvenons nous de la grande époque de SO-LI-DA-RI-TE de l’époque Jospin. Rarement un mot, aussi noble, fut aussi vite usé par la Machine. Importé de Pologne (gloire à Solidarnosc), le mot fut récupéré, dénaturé, tordu, transexualisé, diversifié, socialisé, vidé.

    SO-LI-DA-RI-TE, un mot importe de Pologne ? Au moment de la chute du mur de Berlin, aka le moment ou le capitalisme s’est libéré de tous ses complexes avec les conséquences qui s’étalent aujourd’hui sous nos yeux ebahis ?

    Orwell, éveillé par le billet de Koz, aurait savoure la encore cette réécriture néo-libérale de l’histoire.

    Ouvrons notre dictionnaire :

    Que chacun soit respecté par tous et aidé s’il en a besoin. Nous voulons que cette guerre, qui affecte au même titre le destin de tous les peuples et qui unit les démocraties dans un seul et même effort, ait pour conséquence une organisation du monde établissant, d’une manière durable, la solidarité et l’aide mutuelle des nations dans tous les domaines (DE GAULLE, Mém. guerre, 1954, p. 679).

    Solidarité de fait; solidarité humaine, mutuelle, naturelle; solidarité des hommes, avec les hommes, des âmes; solidarité dans le mal; solidarité étroite, profonde, réciproque; lien, sentiment de solidarité. Des âmes privilégiées ont surgi qui se sentaient apparentées à toutes les âmes et qui, au lieu de rester dans les limites du groupe et de s’en tenir à la solidarité établie par la nature, se portaient vers l’humanité en général dans un élan d’amour (BERGSON, Deux sources, 1932, p. 97

    PS: il ne manque pas un ‘s’ dans le titre ?

  • Avec toute l’estime que je dois au moindre de mes commentateurs, robespierre, je vous emmerde. Cordialement. Vous, les cyniques, les donneurs de leçons, les myopes, les je-sais-tout, ceux qui sont trop certains d’eux-mêmes. Ceux qui ne sont même pas capables de constater, même chez ceux dont ils ne partagent pas les idées, un frémissement dans le bon sens, même s’il ne s’agit pas d’adhérer à leurs idées.

    jmf a écrit:

    PS: il ne manque pas un ’s’ dans le titre ?

    Présume plutôt que, dans un titre de trois mots, pour une règle de grammaire anglaise si simple, je sais ce que je fais.

    @ Hervé: je n’avais aucune crainte de ce côté.

  • Parfois, on n’est pas tout à fait compris….

    Koz, je n’accorde plus aucune crédit à la gauche, à la droite et à l’ensemble (ou presque) du monde politique UMPS. Martine Aubry nous ressort la Common Decency pour les mêmes raisons que S. Royal s’oppose à la taxe carbone: ça paie !

    Je ne pose pas la question de la justesse des propos, je pose celle de leur sincérité. Croyez vous franchement que Beibeger ira demain s’habiller en grande surface de banlieues n’ayant plus aucune attirance pour les marques ? Va-t-il vendre sa rolex pour les restos du coeur ? Je poufferais.

    Martine Aubry nous vend de la common decency justement pour ne pas remettre en cause le modèle mondialiste, libéral dont elle est elle-aussi un élément actif.

    Civilisation de la dignité, dit-elle ? les ouvriers de Continental se contentaient de quelques jours de vacances au bord de la mer avec leurs enfants (comme dans la chanson de Michel Jonaz). Dignement et simplement. Martine Aubry est décidée à remettre en cause par exemple le traité de Lisbonne, le libre échangisme tel qu’il EST concrètement ? Des nêfles.
    Des lamentations, des voeux, c’est tout.

    Franchement, je n’ai jamais vu un commissaire politique se changer en bonne soeur. La rédemption ?

    Il n’y a pas de Saint François d’Assise au PS, ni à l’UMP et encore moins sur canal+.

  • Martine AUBRY, comme beaucoup de « politiques » de haut niveau est partagée entre idéalisme, réalisme et ambitions personnelles. Selon le positionnement du curseur sur ces trois dimensions, le discours fluctue quelque peu.

  • @ robespierre: j’ai remarqué ça, aussi. Mais dites vous bien, robespierre, que le cynisme est finalement une attitude convenue, et très facile à adopter. Elle ne demande pas beaucoup d’effort. J’ai lu le discours de Martine Aubry, et je n’y adhère pas. Je ne pense pas davantage que Begbeider soit un prophète. Mais sans croire que ni l’un ni l’autre ait vu la Vierge, je note en revanche que la thématique semble être tendance. C’est juste ça, mais c’est déjà ça.

  • Cher Koz,

    C’est la rentrée, on est lundi et je n’ai pas plus envie que ça de m’y mettre. Sale temps, les mouches pètent (Mao Tsé Tsé Tung), comme le résumait si finement Desproges. Occasion rêvée de te fais partager mon inextinguible enthousiasme.
    Cette ardeur à bloguer… Ce style… Ce goût extrêmement sûr qui t’a amené à choisir le Cotentin pour tes dernières vacances…. Et (Rhââaâ Lovely !!!!!!) tous ces clichés d’aimables jeunesses qui ornent la colonne de droite, la mamelle ferme, le regard humide…

    Courageux (et très pro) de ta part de te faller du Martine dans le texte et de bien vouloir nous en faire une petite resucée… Ce pauvre Orwell à toutes les sauces, c’est bien triste… Contre le gloubiboulga, j’ose une suggestion : « Les contes de l’arbalète » de Gilbert Keith Chesterton (L’âge d’homme), le très british auteur des enquêtes du Père Brown. Un bon siècle avant Martine, Ségolène, José, Dany et les autres, le style, la sincérité et l’humour en plus…

    L’automne bientôt, les feuilles mortes et les bouquins qu’on ramasse déjà à la pelle. Quelques titres encore, c’est de saison. Pas le dernier Beigbeder, je n’ai pas encore réussi à le trouver d’occasion. C’est ainsi que je trie les zauteurs contemporains : avec ou sans droit d’auteur, faudrait quand même pas se foutre éternellement de la gueule des lecteurs. En plus, c’est légal et Hadopi n’y changera rien. Alors, tant que les joyeux escrocs des pages livres de nos beaux journaux continueront de se débarrasser de leurs exemplaires « presse » chez un grand libraire parisien… Sur le thème de la famille, de l’enfance, de l’introspection, de l’identité familiale, de ses tares, de ses grandeurs, de ses drames, de ses fatalités, voilà du lourd, du « qui ne laisse pas intact » et remue les tripes : « Rêveuse Bourgeoisie » de Pierre Drieu La Rochelle (L’Imaginaire Gallimard). Drieu quoi ?! Oui, vous avez bien lu, mais nous sommes des adultes pas trop idiot, tout à fait capable d’opérer la distinction entre l’œuvre et les idées de l’auteur etc etc (soulignons au passage qu’il n’est nulle part question de politique dans ce roman).

    Il est souvent question sur ce blog des journalistes, de la presse, des agissements des uns et des autres. Signalons donc la sortie d’ « Amerak » d’Adrien Jaulmes (Editions des Equateurs). Ceux qui ont encore en mémoire ses papiers du Figaro sur la guerre Israël / Hezbollah, l’Irak ou l’Afghanistan savent que, des grands reporters, et bien, il en reste encore quelques-uns. Alors, quand l’un d’entre eux se donne le mal de sortir un bouquin, je l’achète (et pas d’occas’ c’est promis). Très bonne critique sur Secret Défense de Jean-Dominique Merchet (pas fichu capable de mettre le lien, mais c’est facile à trouver).

    Loin de moi l’idée de vouloir faire de la pub ou de squatter indûment l’espace mis à la disposition de tes lecteurs, mais lire et parler des livres, n’est-ce pas contribuer (un peu) au débat ?

    Moult salutations et toutes ces sortes de bonnes choses

  • Oui, je ressens aussi un tel frémissement. Une sorte de « déringardisation » de certaines valeurs. Et je me permets d’espérer, timidement.

    Même si Robespierre a raison (je n’en suis pas sûr), le fait que des girouettes choisissent de rejoindre le train en marche est un indice. Ces gens-là ont généralement un flair imparable pour sentir le sens du vent. Beigbeder ne tiendrait vraisemblablement jamais des propos qui risqueraient de lui restreindre l’accès aux plateaux de Canal+.

    « Disons-le clairement : ce n’est pas par simple intérêt que l’homme ordinaire répugne à faire le mal (l’éthique ne relève pas d’un calcul), mais parce qu’il a en lui certaines dispositions morales qui l’incitent à prendre soin spontanément de ses semblables. »

    Il y a les 2, Koz. Les dispositions morales et les incitations. Si on ignore la morale, on sombre dans une espèce de cauchemar ultralibéral et relativiste. Si on ignore les incitations, on sombre dans le cauchemar communiste et administratif.

    jmf a écrit:

    PS: il ne manque pas un ’s’ dans le titre ?

    Le boss a raison. C’est soit « decency come-back », soit « decency comes back » (sans trait d’union).

  • ça me donnerait presque l’impression qu’elle serait allé lire la dernière encyclique sociale… (je me permets parce que d’abord ça me donne vraiment cette impression, et puis parce qu’il y a B16 dans les tags…). Si c’était le cas, mon espoir agonisant daignerait peut-être avoir un soubresaut…

    Mais d’un autre côté, dire, face à la pauvreté, que l’argent ne fait pas le bonheur, je me demande si ce n’est pas la solution de facilité: Nicolas nous avait fourgué de la « politique de civilisation » dès que son leit-motiv sur la croissance et le gagner-plus était tombé à l’eau -cause crise-; il n’en a pas trop reparlé depuis, et la loi sur le dimanche ne va pas précisément dans ce sens là.

    Le PS sait qu’il est en panne de valeurs, alors ils cherchent des valeurs: très bien. S’ils y adhèrent, c’est encore mieux.
    Mais j’ai du mal à placer de l’espoir en ces gens là; tout est tellement un feu de paille!

    Et puis surtout, que fera-t-on avec un discours sur la dignité de l’homme, sur une civilisation de la solidarité et du respect, dans le même parti qui promeut l’avortement le plus tard possible et sans assistance parentale, le suicide assisté, la négation de la famille, la sexualisation précoce des jeunes…
    Un parti qui dit lutter pour la liberté de conscience et d’expression, mais dont l’ex-leader (L Jospin), après 10 années à lutter en interne contre le mariage et l’adoption homosexuels, a eu cette phrase terrible avant les dernières ou avant dernières élections(de mémoire, désolée): « Mon parti est pour le mariage homosexuel, alors je suis pour. »!

    J’aimerais arriver à y croire, mais je comprends qu’on puisse être, sinon cynique, du moins sceptique! Pour moi, ça ressemble encore trop à des niches commerciales juxtaposées. Bref, je demande à voir.

  • Decency come back: « reviens décence! » ou « (que) revienne la décence » ?

    Dans l’hypothèse où Aubry et Beigbeder ne pensent pas ce qu’ils disent, on peut toujours se consoler avec le fameux « mentez, il en restera toujours quelque chose » : ils croient mentir – alors qu’en l’occurence ils disent la vérité – et il y aura toujours des gens pour croire à ce discours…

    …ça va c’est pas trop capillotracté ?

  • Liberal a écrit:

    Le boss a raison. C’est soit « decency come-back », soit « decency comes back » (sans trait d’union).

    En fait, par pur esprit de contradiction, le bon titre en anglais aurait été: decency’s come-back.

  • Pepito a écrit:

    le bon titre en anglais aurait été: decency’s come-back.

    Voire même, par pur esprit de pinaillage et pour faire assaut de science en linguistique anglo-américaine, le bon titre en anglais idiomatique US eut pu être « Decency is back with vengeance ».

  • Sur celui-là, je reprendrais mot pour mot le commentaire de Jp.guedas à 21.13. Je n’écrirais donc rien de plus. Beigbeder en défenseur de la civilisation décente ? C’est même pas drôle. Le drôle peut être crédible, pas lui. Il reste ce petit publicitaire, récupérateur en tout : « une pub développement durable » pour un V6 16 L/100 ? Pas de problème, il vous le trouvera votre slogan.

    Parfois on laisse de petites vannes presque drôle sur un blog hospitalier et on les retrouve après détourné par un fâcheux.

    . »Rarement un mot, aussi noble, fut aussi vite usé par la Machine. Importé de Pologne (gloire à Solidarnosc), le mot fut récupéré, dénaturé, tordu, transexualisé, diversifié, socialisé, vidé. Après 5 ans de gouvernement Jospin, la définition du mot solidarité pouvait se résumer à la phrase suivante : « (n.f) action d’augmenter des taxes, cotisations et impôts afin de préserver un système fictif de défense des travailleurs.

    Alors, aujourd’hui, la même Martine, nous vend de la décence. Plus d’essence ? Mais de la décence. Plus de pain ? qu’ils mangent de la brioche. »

    Il faudrait sans doute faire ici de la pédagogie . le souci c’est que quand quelqu’un use de propos aussi agressifs et confus ( » transexualisé »? c’est quoi ? on a fait un impôt PACS et je ne suis pas au courant ?) l’envie vous passe.
    Pour ma part je prétends que le propos de Mme Aubry s’inscrit dans une cohérence intellectuelle, qu’il suffit pour s’en rendre compte d’avoir lu ses ouvrages notamment « il est grand temps ».

    Il est possible que vous ayiez des arguments plus pertinents sur le sujet. Je vous recommande de les exprimer de façon plus compréhensible.

  • Bonsoir Koz,

    comme tu le sais déjà, je ne crois pas beaucoup au retour du sens. D’abord parce qu’il est facile de décréter que la société matérialiste ne suffit pas quand on vit soi-même dans un grand confort. C’est presque une posture d’intellectuel de la gauche caviar…

    Ensuite, je ne sais pas trop ce que cela veut dire, le retour du sens. Si c’est donner plus de choix aux gens d’avoir la vie qu’ils souhaitent, pourquoi pas. Si c’est préserver le folklore et la culture qui font la saveur de la vie, pourquoi pas. Si c’est construire un système politique et économique qui limite les frustrations et l’ennui, pourquoi pas. Si c’est faire mieux partager les arts et les techniques qui sont notre socle commun, pourquoi pas.

    Mais je ne pense pas que mes contemporains soient vides de sens. Ils ont comme tous leurs défauts et leurs faiblesses, mais il me semble qu’ils ont des buts respectables à leur vie: avoir une carrière intéressante, une famille heureuse, une communauté chaleureuse d’amis, et aussi vivre dans des conditions décentes, ce qui est tout à fait respectable, et peut coûter cher (médecine…). Peu d’entre nous vivent avec le seul but d’acheter une voiture de sport ou de devenir maitre du monde.

    Bref, je ne suis pas sûr que mettre plus de pensée ou de religion dans la vie des gens (même s’il en faut un peu) leur changera forcément la vie. Les personnes que j’ai rencontré qui semblaient les plus heureuses, les plus épanouies étaient sont, pas des philosophes, mais des gens qui faisaient leur métier, et le faisaient honorablement, en n’ayant souvent pas d’autres horizons.

  • Liberal a écrit:

    Oui, je ressens aussi un tel frémissement. Une sorte de « déringardisation » de certaines valeurs. Et je me permets d’espérer, timidement. Même si Robespierre a raison (je n’en suis pas sûr), le fait que des girouettes choisissent de rejoindre le train en marche est un indice.

    Merci de partager ce sentiment. ca me fait beaucoup de bien, si, si. J’y vois comme un effet combiné de la crise et de l’antisarkozysme…

    Quant aux autres, je n’ai pas voulu être lourd mais je crois que l’on comprend néanmoins que j’ai plutôt l’impression d’être rejoint (enfin, pas moi personnellement) par des personnes qui fustigeaient ces valeurs auparavant…

    Cela étant, je ne préjugerais pas des intentions profondes de l’un comme de l’autre. Beigbeder était effectivement l’interlocuteur de Di Falco, à un moment où ce dernier était complètement cramé. Alors, qui peut sonder les reins et les cœurs, hum ?

    Liberal a écrit:

    Il y a les 2, Koz. Les dispositions morales et les incitations.

    Oui, c’est pour cela que j’enchaîne là-dessus :

    Bien sûr, il ne faut pas se reposer sur une confiance immodérée dans la bonne volonté de chacun. Mais existe-t-il une seule idée sur laquelle on puisse se reposer totalement, entièrement ?

  • Dans le principe, la finance islamique est plutôt intéressante. En fait, cela revient à remplacer un achat et prêt par une sorte de leasing avec transfert de propriété

    Votre banque achète l’appartement, et vous le vend « par morceaux » avec des mensualités qui ressemblent aux traites d’un prêt. La différence, c’est que si une catastrophe arrive, c’est la banque qui a pris le risque et pas vous. C’est sans doute effectivement (au moins en théorie) intéressant, car cela oblige:
    – la banque à bien estimer l’opération, car c’est elle qui prend le risque;
    – à prêter seulement pour des investissements (qui peuvent seuls faire l’objet d’un leasing), ce qui est sans doute plus sage.

    L’inconvénient, c’est évidemment que l’opération est plus risquée pour la banque, et toutes choses égales par ailleurs, le coût total pour le bénéficiaire de l’opération sera plus cher.

    Cela est effectivement plutôt au goût du jour, même si j’ai parfois entendu que sur des instruments financiers complexes, la limite est beaucoup plus floue entre produits islamiques et produits conventionnels.

    En tout cas, c’est un débat intéressant, et je comprend que Christine Lagarde se pose la question. Cela n’a par contre pas grand chose à voir avec le retour du sens, c’est juste une discussion sur les règles du système financier.

  • Et la finance chrétienne? qui veut bien faire une étude comparée?

    si ces ouvertures à d’autres possibles sont un début de recherche de bon sens et d’abandon de la langue de bois, c’est très bien…

  • Pingback: Koztoujours, tu m’intéresses ! » Ce n’est pas la taille qui fait l’homme

  • Liberal a écrit:

    Le boss a raison. C’est soit « decency come-back », soit « decency comes back » (sans trait d’union).

    Non. La seconde proposition marche, mais pas la première.

    Yogui a écrit:

    Voire même, par pur esprit de pinaillage et pour faire assaut de science en linguistique anglo-américaine, le bon titre en anglais idiomatique US eut pu être « Decency is back with vengeance ».

    Non… Ce serait « Decency is back with a vengeance. » À pinailleur, pinailleur et demi.

    D’ailleurs ce n’est pas du pinaillage. C’est de la grammaire. (J’ai complimenté Koz pour le titre d’un autre billet, alors je me sens investi du droit de critiquer celui-ci. Pas taper…)

    Et le fond, me direz-vous. Ben, sur le fond, je suis d’accord pour dire que le retour de la décence, la « déringardisation », comme dit Liberal, d’un minimum de valeurs communes est une bonne chose. Reste à savoir si Mme Aubry a une chance de reconquérir l’électorat populaire avec la notion de « postmatérialisme ». Il n’y a pas que le pouvoir d’achat dans la vie, d’accord, l’abondance n’est pas synonyme de bonheur, d’accord, mais il faut aussi avoir quelque chose à dire à ceux qui n’ont guère l’expérience de l’abondance.

    Par ailleurs, je ne vois pas bien ce que la « politique de civilisation » de Sarkozy vient faire là. À cet égard, le cynisme de robespierre est au moins justifié par l’expérience: le discours volait haut, mais il n’y avait rien derrière.

  • Mais ce que vous êtes bornés les mecs, je n’y crois pas. C’est un titre et je suis libre de faire ce que je veux, de l’intituler comme je veux. Sortez de vos bescherelle. Si j’avais voulu l’intituler « Décence revenir », je l’aurais fait. Si un jour j’ai envie d’intituler un billet « ‘amour vérité », je le ferai. Et pourtant, horreur !, ce n’est pas une phrase. Ce sont des mots que j’avais envie de mettre comme ça, je le fais, même si ça ne vous plaît pas. Décoincez, décoincez !

    Gwynfrid a écrit:

    Par ailleurs, je ne vois pas bien ce que la « politique de civilisation » de Sarkozy vient faire là.

    Quel que soit le contenu, le fait que l’un et l’autre veuillent afficher une préoccupation de « civilisation » est une information. Cela montre qu’il se passe quelque chose autour de cette notion, que le débat est susceptible de s’engager sur les valeurs.

    Mon sujet n’est pas de juger ce qu’il y a derrière : je sais très bien que je ne partage pas certaines convictions de Martine Aubry.

    C’est un peu comme si vous refaisiez une analyse du champ lexical d’un texte, comme en cours de français. Identifier le champ lexical ne signifie pas que l’on accorde un crédit particulier au texte, mais c’est déjà une info.

  • Gwynfrid a écrit:

    Non… Ce serait « Decency is back with a vengeance. » À pinailleur, pinailleur et demi.
    D’ailleurs ce n’est pas du pinaillage. C’est de la grammaire.

    AhAh !!! Je l’attendais celle-là !! J’ai pourtant bien dit anglo-américain idiomatique !

    Il va falloir vous frotter un peu plus à la culture contemporaine US … et vérifiez vous-même : Google donne 1.140.000 réponses pour « back with a vengeance » et 5.290.000 pour « back with vengeance ».
    A pinailleur et demi, pinailleur trois quarts 🙂 !

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