Guéant : chapeau l’artiste ?

Je termine Des hommes de l’ombre, je songe à Guéant. Pour la politique sécuritaire ? Oui. Aussi, parce que lui, son coup, il l’a fait à la lumière. Ce qui n’exclut évidemment pas qu’il ait été pensé dans l’ombre. Et puis, en milieu de semaine, le Guéant ne doit pas être mécontent de son effet.

Cela fait pédant mais je prends le risque : je trouve le petit théâtre des réactions éminemment drôle à observer. Il vaut mieux trouver ça drôle que désespérant, tout en suivant sa propre route.

Pour un observateur politique, il était facile d’anticiper les positions des uns et des autres. Facile de préméditer le coup. Parce que chacun joue un rôle, certains plus lucidement que d’autres. Que d’autres, tout en flairant le piège, ne peuvent s’empêcher d’y succomber. C’est leur raison d’être, leur statut social, leur créneau. Ils ne peuvent pas se contenir là-dessus et, en prime, ça leur offre des passages média. Ils flattent leur public et tant pis si flatter leur public n’est finalement pas nécessairement dans l’intérêt de la gauche.

Claude Guéant a prononcé une phrase anodine. Pas pour le militant socialiste bien sûr, pas pour le sociologue, ou le professeur de sciences politiques, qui tiennent là l’occasion de démontrer, pour l’un, son orthodoxie idéologique et pour l’autre, qu’il comprend des trucs que toi, t’as pas vu. Mais pour l’électeur « normal », la nuance entre civilisation, culture et régime, franchement, elle ne se fraie pas son chemin entre deux sujets sur le grand froid.

Que reste-t-il, alors ? Une déclaration ciselée, toute prête à être relativisée, jusqu’à Laurent Wauquiez qui nous parle des civilisations spartiates et athéniennes. Nous préférons une biiiip (parce qu’on s’en fout, en fait) qui célèbre la liberté d’expression plutôt que la tyrannie, l’émancipation des femmes plutôt que leur oppression, le vinaigre balsamique plutôt que l’huile de foie de morue. Ben, sérieux : oui. Si vous me mettez là sur la table deux biiip de ce genre, j’hésite pas, je préfère.

Et Luc Ferry peut citer André Comte-Sponville, que personne n’a encore soupçonné de « nous ramener jour après jour à ces idéologies européennes qui ont donné naissance aux camps de concentration », comme on l’a entendu.

 «Toutes les civilisations ne se valent pas, ni tout dans chacune d’elles… Disons le donc tranquillement: de notre point de vue, non d’Européens mais de démocrates, une civilisation qui respecte les droits de l’homme est supérieure à une civilisation qui ne les respecte pas. Une civilisation qui prône l’égalité des sexes est supérieure à une civilisation qui veut maintenir les femmes en situation d’infériorité et d’oppression. Une civilisation laïque qui protège la liberté de croyance et d’incroyance est supérieure à une civilisation intégriste…» (Le Goût de vivre, Albin Michel, p. 292).

Une déclaration ciselée, donc, et dont la sortie ne doit rien au hasard. Prononcée au sein d’une convention de l’UNI, elle donne le sentiment que Claude Guéant s’est lâché. Mais elle était faite pour être sortie et, de fait, elle l’a été par un certain Tristan Maupoil, qui est loin d’être un inconnu sur le web pour quelques sorties douteuses.

Et les réactions n’ont pas tardé à être à la hauteur des espérances que pouvait avoir Claude Guéant, culminant avec le dérapage du député Letchimy permettant à la droite de faire à la gauche un procès en hystérie. Sur le web, ce fut à qui rappelait que notre « civilisation », c’était la Saint Barthélémy, Abu Ghraïb et la Shoah (oubliant d’ailleurs de relever que d’autres « civilisations » ont également leurs génocides, outre l’absence d’égalité entre l’homme et la femme, de liberté de conscience et d’expression). Cette déferlante a pu souligner cette haine de soi que l’on pressent trop souvent à gauche. Du pain bénit pour Claude Guéant.

Et probablement la meilleure façon d’introduire une campagne identitaire. L’hypothèse a été évoquée à plusieurs reprises ces derniers mois, et elle semble se concrétiser. Il y a quelques mois, un analyste avançait que si Nicolas Sarkozy s’était calmé après son discours de Grenoble, c’est qu’avec la chute de DSK, il n’avait plus besoin de privilégier les discours musclés pour écarter les questions économiques du débat, sur lesquels DSK pouvait lui contester sa légitimité. Mais voilà, sur le plan économique, les évènements ne se déroulent pas pour le mieux. La TVA sociale ne fait pas triper les Français, le triple A a tout de même fait quelques dégâts et la perte d’intensité de la crise rend moins porteur la stratégie du « capitaine courage ». On lit même que François Hollande serait jugé plus crédible que Nicolas Sarkozy.

Alors, va pour l’identitaire. Et la gauche, toute à ses réactions convenues, à ses cris d’orfraie prévus,  a donné tête baissé dans le débat tendu, pour installer le sujet dans la campagne. De façon amusante, si Martine Aubry avance que « Guéant passe son temps à provoquer », ça n’a pourtant pas l’air de marcher moins bien.

Va pour l’identitaire, et va pour les valeurs. Quitte, peut-être à se répartir les rôles : un ton plus apaisé de la part du Président (à confirmer à la lecture du FigMag), plus vindicatif pour le Ministre de l’Intérieur.

Reste à savoir si la stratégie, qui semble fonctionner, sera payante. Jusqu’à présent, chaque fois que Nicolas Sarkozy ou l’UMP ont ciblé ces sujets, ils n’ont fait qu’apporter des fournées d’électeurs à Marine Le Pen. Reste à savoir aussi si l’on se satisfait, moralement, d’une politique hystérique.

Mais j’ai dit qu’aujourd’hui, on s’amusait juste du spectacle des réactions…

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105 commentaires

  • Oui, il y a eu les guerres de religions, les conquêtes napoléoniennes, la traite des esclaves, les colonisations etc. Si on cherche dans le passé, la liste est longue. Mais maintenant?

  • Au judo on apprend à respecter son adversaire. C’est un sport où l’on ne peut pas progresser si on n’affronte pas l’autre. C’est aussi un sport où pour gagner il faut bien sûr travailler beaucoup « sa » technique. Mais la maîtrise des émotions y est aussi quelque chose de très important: la haine et/ou le mépris de l’adversaire n’aident pas à gagner. Au contraire se laisser aller à la haine ou au mépris de l’adversaire peut faire perdre le combat. Sur le fond mon sentiment est qu’il y a dans notre pays des tendances néo-pétainistes qui ne manquent aucune occasion de se manifester mais c’est pas nouveau. Juste peut-être que l’époque s’y prête plus que pendant les trente glorieuses. A suivre…

  • Votre position, comme celle de quelques personnes de droite « humaniste » comme on pourrait les regrouper, m’effarent dans leur défense de Guéant et leur critique de Letchimy.

    D’abord parce que le second a été tout à fait correct, en disant que c’était grosso modo les termes qui rappelaient une logique qui avait mené au nazisme (je n’ai plus les termes exacts) et donc on est loin du Guéant = Nazi.

    Ensuite parce que ciselée ou non, il est évident, comme vous le soulignez, que ces sorties du gouvernement, de membre éminent d’entre eux même, dont le rôle est de veiller au bon déroulement des choses, n’ont d’autre but qu’électoraliste.

    Alors effectivement il y avait un piège, mais je crois qu’il fallait, cette fois, y aller. Parce que refuser de qualifier la dérive xénophobe d’une gouvernement, c’est également tomber dans le piège, à plus long terme, du clivage de la société.

    Et quiconque se réclame humaniste devrait condamner ici un gouvernement qui faillit à sa responsabilité.

    Regarder cette mascarade en « observateur », en considérant que tout ceci n’est « que » manœuvre politique, c’est choisir, je pense, de remplacer sa conscience politique par un cynisme partisan. Remplacer les valeurs qui vous (pas Koz personnellement hein :p ) anime par un soutien aveugle.

  • Il faut une certaine imagination pour voir en Claude Guéant un « artiste ». Un « artiste » du ratissage des voix d’extrême droite ? Le bel « art » que voilà. Et en plus, apparemment, jusqu’ici, cela ne marche pas (car même les électeurs du FN ne croient plus vraiment à la mise en scène du volontarisme sarkozyste, sur la sécurité ou sur l’immigration notamment).

    D’accord avec vous, bien sûr, pour constater le caractère excessif de certaines réactions de gauche à cette phrase de Claude Guéant. D’accord avec vous aussi pour penser que ces propos ont été bien calculés, avec objectif précis, qui n’échappe à personne. Ce qui rend nécessairement cette phrase pas si anodine que cela dans le contexte.

    Sur le fait de savoir si Claude Guéant est content de son effet, j’ai quelques doutes, car la satisfaction pourrait être de courte durée. Il va au sacrifice pour son chef mais son image en prend un coup, y compris à droite. S’il veut continuer dans la politique après 2012, ce qui semble être dans ses intentions, il va devoir ramer pour « recentrer » son image.

  • Cela deviendra surement un axe de campagne.

    Dans le « C dans l’air » du 8 février 2012, Jean-Paul Delevoye suggérait que pour régénérer économiquement l’Europe, on allait avoir à faire venir sur ce continent « qui vieillit » autour de 50 millions d’immigrés.

    Dominique Reynié, qui notait l’usure et l’essouflement des politiques d’intégrations au niveau culturel des pays d’Europe : elles ont laissé la porte ouverte aux divers populismes européens, pense que dans cette perspective, notre sytème français relativement stable autour de la laïcité et du tryptique libetté-égalité-fraternité, ne suffit plus dans la réalité et que nous n’échapperons pas au travail de réinvention d’un « vivre ensemble » pour cette transformation à venir.

    Quelles seront les valeurs de demain, lesquelles aboliront nous ? lesquelles prendrons-nous aux nouvelles populations venues d’ailleurs ? quel équilibre alchimique finira par s’installer dans cette optique ?

    Manifestement, la réaffirmation de la laicité par Claude Guéant ou par François Hollande ne sont que des voeux pieux pour nos intellectuels.

    J’avoue que je suis partagé, que mon coeur balance et que je n’ai pas de réponse.

    Mais en tout cas, si ce qu’a dit Claude Guéant a pu faire autant de bruit, comme la sécularisation du discours de Hollande a pu en faire dans le camp opposé, nous sommes en face vraiment d’un problème/tabou brûlant sur l’avenir européen.

  • « Une phrase anodine » dis-tu ? Elle n’est pas si anodine, et j’ai tout de suite pensé à ce billet de Jaddo : http://www.jaddo.fr/2008/10/05/la-force-de-la-perversion/ : « faire de tout petits pas, tout petits, l’un après l’autre »… « Ce n’est pas bien grave, ce n’est qu’un tout petit pas, c’est moi qui suis folle de tout prendre de travers, c’est moi qui voit le mal partout ». Quand j’ai entendu cette phrase, mon signal d’alarme, celui dont parle Jaddo, a sonné.

    La réponse de Letchimy n’était peut-être pas la meilleure qu’on pouvait faire. Mais elle a été exploitée, tronquée. Eh oui, on ne peut plus prononcer le mot « nazi » sans qu’on enlève toutes les phrases autour, pour aboutir au résumé saisissant Guéant = nazi, si commode pour godwiner. Par rapport à nos ancètres d’il y a 80 ans, nous avons la chance d’avoir vu les petits pas de 1930, 1931, 1932… Mais il faudrait surtout les oublier, sinon on godwine. Quant à y voir de la « haine de soi » tu vas un peu loin : la reconnaissance par Chirac en 95 de la responsabilité de la France, c’était donc de la haine de soi ?

    Et puis c’est dommage quand même de citer Comte-Sponville avec des « … » aux endroits intéressants. Les passages sur l’absolu, l’universel, la différence entre guerre entre civilisations et lutte, à l’intérieur d’une civilisation, entre les forces du progrès et celles de la barbarie… Cela rétablit une certaine « hiérarchie » entre la pensée de Comte-Sponville et le discours de Guéant/Roucaute.

    J’attends l’interview du Fig Mag, mais je m’attends au tournant identitaire en effet.

  • Shimegi a écrit ::

    Votre position, comme celle de quelques personnes de droite « humaniste » comme on pourrait les regrouper, m’effarent dans leur défense de Guéant et leur critique de Letchimy.

    Je ne défends pas Guéant, je constate. J’ai suffisamment écrit ici mon opposition à l’instrumentalisation de l’islam pour ne pas m’en satisfaire aujourd’hui. Mais je constate qu’il a fait du « beau boulot » en terme de stratégie, ou de communication.

    En ce qui concerne Lechtimy, il a entre autres déclaré que Guéant « nous ramène jour après jour à ces idéologies européennes qui ont donné naissance aux camps de concentration ». Ca n’est pas « Guéant = nazi » mais nous n’en sommes pas si loin.

    Shimegi a écrit ::

    Alors effectivement il y avait un piège, mais je crois qu’il fallait, cette fois, y aller. Parce que refuser de qualifier la dérive xénophobe d’une gouvernement, c’est également tomber dans le piège, à plus long terme, du clivage de la société.

    J’ai rencontré la même question stratégique à d’autres occasions. Il n’y a pas de solution assurément bonne. En l’occurrence, je crois que le mépris n’aurait pas été une mauvaise solution et que, en revanche, réagir comme beaucoup l’ont fait, en pointant Abu Ghraib, les camps ou la Saint-Barthélémy, c’était donner à Guéant exactement la réaction qu’il pouvait souhaiter.

    Jeff a écrit ::

    Il faut une certaine imagination pour voir en Claude Guéant un « artiste ».

    Artiste du coup politique. Avec la phrase suffisamment bien ciselée et énoncée à l’endroit qu’il faut pour produire des réactions prédéterminées, susceptibles de vous servir ensuite. Il a eu les réactions qu’il voulait, encore une fois. Après, Sarko va-t-il vraiment en tirer parti ? C’est mon doute final. La présidentielle n’est pas les municipales, les régionales ni les cantonales. Le résultat peut-être différent. Même si le résultat des précédentes poussées droitistes n’incite pas à donner beaucoup de crédit à cette stratégie.

    @ hipparkhos: Luc Ferry donne les références, on verra si le passage est tronqué. Mais en apparence tout du moins ce n’est pas le cas. De fait, ils disent la même chose. Mais avec un parcours différent. Alors oui, elle est « anodine » parce que ce n’est pas le « point de détail », ce n’est pas non plus un « quand y’en a un, ça va… », c’est une phrase qui, dite par un autre, ne suscite aucune opposition. C’est en cela qu’elle est anodine et fort bien ciselée.

    « Celles qui défendent l’humanité nous paraissent plus avancées que celles qui la nient. Celles qui défendent la liberté, l’égalité et la fraternité, nous paraissent supérieures à celles qui acceptent la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique ».

    Je vois bien où il veut en venir mais elle est tellement facile à défendre face à l’indignation de la gauche…

    hipparkhos a écrit ::

    Quant à y voir de la « haine de soi » tu vas un peu loin : la reconnaissance par Chirac en 95 de la responsabilité de la France, c’était donc de la haine de soi ?

    Lorsque cela devient une habitude, une fixation, oui, c’est de la haine de soi. Reconnaître une fois la responsabilité de la France – quoi que je pense sur l’évocaiton de la France – c’est autre chose. Mais il y a une partie de la gauche qui répond systématiquement présente pour mettre en avant les pages sombres de notre Histoire. Les connaître, c’est une chose. C’est la systématicité qui est remarquable. Et cette gauche-là, on l’a bien vu réagir ces jours derniers, dans le débat public ou sur les réseaux sociaux. Et ouais, ça relève de la haine de soi.

  • « Vous nous ramenez, jour après jour, à des idéologies européennes qui ont donné naissance aux camps de concentration au bout du long chapelet esclavagiste et colonial. Le régime nazi, si soucieux de purification, était-ce une civilisation ? La barbarie de l’esclavage et de la colonisation, était-ce une mission civilisatrice ? »

    (Au passage, miam-miam, du gloubiboulga esclavagisto-colonialo-nazi, mon plat préféré!)

     » Il existe, M. le premier ministre, une France obscure qui cultive la nostalgie de cette époque, que vous tentez de récupérer sur les terres du FN… »

    Je rappelle juste que c’est là, pas avant, que le gouvernement est parti. Moi non plus, je n’aime pas les citations tronquées.

    C’est tout de même amusant de voir comment certains qui refusent de jouer à « Jacques-a-dit » avec Guéant (ce qui se comprend), retrouvent leur sens de la nuance quand il s’agit de prendre la défense des âneries de Lechtimy. Franchement Hipparkhos, parler de « civilisations », c’est comme casser la gueule à un juif dans la rue, c’est un premier pas vers la Solution Finale ?

    On notera aussi qu’au PS, on sait travailler en équipe. C’est bien le groupe PS qui a décidé d’envoyer Lechtimy au charbon, plutôt que de privilégier une parole modérée. Quand on joue au méchant et au gentil flic à l’UMP, on prend plus de précautions… Les réactions PS à la polémique ont aussi valu leur pesant de cacahouètes, c’est dommage que l’on ne puisse pas tout relever. Mes préférées sont quand même celles tournant autour de la légitimité de M. Lechtimy à s’indigner plus qu’un autre, car il serait « descendant d’esclaves ». Les Martiniquais, c’est un peu une race de victimes, quoi.

    Bref, on a au départ une déclaration malhonnête de Guéant. Pas scandaleuse, malhonnête, car sous son apparence de truisme elle condamne le débat, en invitant à tous les amalgames. Présentons les choses bien en bloc, comme ça l’on est sûr que quiconque empruntera le passage derrière vous sera obligé de comparer des torchons et des serviettes. Avec oui, sans doute, l’idée de mettre la « civilisation occidentale » dans le rôle de la serviette et la « civilisation musulmane » ou une autre dans celui du torchon.

    Le problème n’est même pas que ça marche. Le problème est que ça marche tellement bien que la démarche en deviendrait presque légitime. Car savoir que le mot civilisation engendre des courts-circuits dans le cerveau de la moitié des députés de France, c’est effectivement une information qui devrait intéresser l’électeur.

  • Si personne ne conteste la triste inégalité des « civilisations », il n’en qu’une qui adore la flagellation. On peut admettre que la « civilisation occidentale » (fondée à partir d’une référence chrétienne) a pu enfanter des sociétés déviantes; et de nombreux masochistes ont pu se complaire à le faire ressortir comme congénital à cette civilisation.

    Vous citez Luc Ferry mais le pompon revient au député de la Martinique qui a gagné la célébrité tant l’extrait vidéo circule sur l’Internet.

    Cela me rappelle une remarque que j’ai faite ici (à propos des « révolutions arabes ») où j’expliquais que seule la « Civilisation chrétienne » pouvait enfanter une Révolution.

    Commentaire qui me valut une remarque du style « Charrier et les Colonnes Infernales » comme si une avancée se devait d’être contre-balancée par ses « effets de bord ».

  • Koz a écrit ::

    Shimegi a écrit ::

    Votre position, comme celle de quelques personnes de droite « humaniste » comme on pourrait les regrouper, m’effarent dans leur défense de Guéant et leur critique de Letchimy.

    Je ne défends pas Guéant, je constate. J’ai suffisamment écrit ici mon opposition à l’instrumentalisation de l’islam pour ne pas m’en satisfaire aujourd’hui. Mais je constate qu’il a fait du « beau boulot » en terme de stratégie, ou de communication.

    Considérer que c’est du bon boulot c’est prendre sa défense. Pas sur ce qu’il dit, mais sur le fait qu’il le dise. C’est considérer que la stratégie du pouvoir justifie les débordements.

    René de Sévérac a écrit ::

    Si personne ne conteste la triste inégalité des « civilisations », il n’en qu’une qui adore la flagellation. On peut admettre que la « civilisation occidentale » (fondée à partir d’une référence chrétienne) a pu enfanter des sociétés déviantes; et de nombreux masochistes ont pu se complaire à le faire ressortir comme congénital à cette civilisation.

    Réducteur. La civilisation musulmane fut bien plus avancées que la nôtre, et d’autres avant elles. La roue tourne. Et considérer que la nôtre est meilleurs aujourd’hui c’est oublier que la prétendue civilisation musulmane, au sens où Guéant la suggère dans sa quête aux électeurs, est séparée de la nôtre de façon étanche. Il faudrait être aveugle pour le croire, les influences croisées sont légions et séculaires. Nous sommes ce qu’on est en partie à cause où grâce à eux, ils sont ce qu’ils sont en partie à cause où grâce à nous, pour peu que le « eux » et le « nous » ai un sens.

  • Shimegi a écrit ::

    Considérer que c’est du bon boulot c’est prendre sa défense. Pas sur ce qu’il dit, mais sur le fait qu’il le dise. C’est considérer que la stratégie du pouvoir justifie les débordements.

    Non.

  • Vieil imbécile a écrit ::

    Peut-être que dans dix ans le nom commun « koz » sera synonyme de bon sens…

    En tout cas, celui de Claude Guéant est déjà synonyme de violence verbale en politique.

    Cette technique constitue un marqueur spécifique des années Sarkozy. Une déclaration sans contenu pratique mais incluant un signal identitaire fort, anodine ou sans aucun intérêt pour 80% de la population mais constituant un chiffon rouge gravissime pour les 20% restants, des réactions prévisibles à des kilomètres, un défense automatique sur le thème « ce n’est que du bon sens et c’est ce que pensent la majorité des gens »… La méthode est ultraclassique et on a fini par s’habituer. Mais elle n’avait pas d’équivalent du temps de Chirac ou de Mitterrand (et encore moins auparavant). C’est un héritage bien malsain que nous laissera cette présidence-là.

    Ensuite, je suppose que la déclaration avait pour but de faire réagir très fort les usual suspects tels que SOS Racisme, et ça n’a pas manqué. Mais la réaction qui marquera les esprits ne vient pas de là, elle vient de l’Outre-Mer, par la voix de M.Letchimy. Je me demande si Claude Guéant avait prévu cela.

    Pour ma part, je trouve que la réaction intelligente était celle de François Hollande.

    « Il y a des sujets majeurs », a poursuivi M. Hollande, citant l’emploi, la crise, le froid… « Et puis, là, il faudrait discuter des différences de civilisations ? », a-t-il demandé. « Moi la responsabilité que je me donne, si les Français me font confiance, c’est de les rassembler, c’est de les réunir, c’est de les réconcilier, c’est pas d’entretenir les guerres internes, les haines recuites (…). Nous avons besoin de nous réconcilier, de nous réunir dans un grand mouvement ».

    Pour finir:
    Shimegi a écrit ::

    Considérer que c’est du bon boulot c’est prendre sa défense.

    Absurde. C’est comme si vous disiez que reconnaître l’habileté politique de Guéant (ou de Marine Le Pen, ou de J.L.Mélenchon, ou de qui que ce soit d’autre) revient à voter pour lui.

  • @Shimegi:

    Ah ça c’est vraiment un délice:
    « La civilisation musulmane fut bien plus avancées que la nôtre, et d’autres avant elles. La roue tourne. »

    Et juste après:
     » … que la prétendue civilisation musulmane, au sens où Guéant la suggère dans sa quête aux électeurs, est séparée de la nôtre de façon étanche. Il faudrait être aveugle pour le croire, les influences croisées sont légions et séculaires. Nous sommes ce qu’on est en partie à cause où grâce à eux, ils sont ce qu’ils sont en partie à cause où grâce à nous, pour peu que le « eux » et le « nous » ai un sens. »

    Va falloir choisir…

    Non, bien sûr, il n’y a pas à choisir, les deux phrases ont un sens. L’une regarde les choses de loin, l’autre de plus près. Mais on se demande pourquoi il serait permis de regarder le passé de loin et pas le présent. D’autant que la première phrase, en fait, implique en creux le propos sur l’infériorité actuelle de la civilisation musulmane qu’on attribue à Guéant (et qu’il s’est d’ailleurs empressé de se défendre d’avoir tenu).

    Guéant a lancé une phrase imprécise. Je ne comprends rien au calcul politicien qu’il y aurait derrière, mais d’un point de vue strictement intellectuel, on ne peut rien lui reprocher d’autre: une phrase imprécise. Et s’il est vrai que son but est de jouer sur des prétendus « fantasmes », il faudrait peut-être arrêter de leur donner corps à chaque fois, à ces fantasmes. Il n’y a absolument rien dans ce propos que deux ou trois questions bien ciblées ne suffisent à désamorcer.

  • @ jfsadys: A propos du judo, on peut aussi remarquer que le vainceur est celui qui sait utiliser au mieux sa force mais surtout celle de l’adversaire pour la retourner contre lui. Le faible peut vaincre le fort de cette façon. En structurant le débat de manière aussi stupide, une UMP un peu brutale permet à un PS faiblard de l’emporter.

  • Gwynfrid a écrit ::

    Vieil imbécile a écrit ::

    Absurde. C’est comme si vous disiez que reconnaître l’habileté politique de Guéant (ou de Marine Le Pen, ou de J.L.Mélenchon, ou de qui que ce soit d’autre) revient à voter pour lui.

    Pas du tout, je ne parle pas d’une défense sur le fond mais sur la forme. Je pense qu’assimiler ces dérapages volontaires au dépend de leur rôle en tant que ministre à une bonne stratégie c’est avaliser l’idée que peu importe le fond, seul la stratégie compte.
    Parce que je pense qu’au delà de la polémique, ce qui pose un problème réel c’est le total manque du sens de l’État qui est à déplorer ici.

  • +@ Shimegi, « La civilisation musulmane fut bien plus avancées que la nôtre ».

    Cela fait partie du discours masochiste.
    En effet, la civilisation musulmane s’est dévelopée dès le VIIIe siècle (et jusqu’au XIIème) sur les lambeaux de la civilisation gréco-chrétienne du Moyen-Orient.
    L’empire romain s’etant effondré au Vème siècle, l’Occident a subi les pires dévastation des « civilisations barbares » venues de l’est jusqu’au moment où les Carolingiens (à partir de 732) ont pu rebâtir l’Empire. Après Charlemagne encore les invasions ont repris (Saxons, Normands) au point que c’est aux moines irlandais (seul peuple à l’abri) que l’on doit un premier retour de la Civilisation.

    Loin de moi l’idée d’ignorer la transmission par les Arabes (d’Al Andalous) des textes grecs au monde chrétien d’un Occident défait. Mais de là à nous faire le discours d’Attali qui n’a d’objectif que de déclasser la Chrétienté.

    En toute hypothèse, si on admet le développement de la Civilisation de la naissance d’Abélard (1079 ?) à aujourd’hui, voilà 1000 ans au cours desquels s’est forgée notre Civilisation qui malgré quelques dévoiements au XXème siècle reste le flambeau du monde.

    Si l’Orient Musulman a produit de grands hommes, l’Occident Chrétien s’est fixé l’objectif de transmettre au plus grand nombre les lumières du savoir (création de l’Université).

  • @ nicolas:On va continuer alors si vous le voulez bien dans le judo: un comportement « basique » de judoka: ne pas aller là où l’adversaire veut vous emmener. Ceci étant dit personnellement je ne ferai aucun pronostic. Jospin devait être élu sans problème, Balladur devait être élu sans problème, Giscard devait être ré élu sans problème. Je verrai au soir du premier tour. C’est Bossuet je crois bien qui a écrit que le plus grand dérèglement de l’esprit c’est de croire que les choses sont comme on voudrait qu’elles soient. Donc pour moi Wait and see. Par contre je sais comment je vais voter et je ne pense pas changer d’avis sauf imprévu vraiment imprévu.

  • Shimegi a écrit ::

    Je pense qu’assimiler ces dérapages volontaires au dépend de leur rôle en tant que ministre à une bonne stratégie c’est avaliser l’idée que peu importe le fond, seul la stratégie compte.

    Ben, non. C’est juste restreindre la discussion à la seule stratégie politicienne. L’idée est qu’on a le droit de discuter du fond (l’aspect politique « noble ») et des basses considérations politiciennes, séparément.

    En ce qui me concerne, une bonne stratégie politicienne, c’est une stratégie qui marche. Une bonne politique pour la France, c’est autre chose. Je pense d’ailleurs qu’on fait le jeu de Claude Guéant lorsqu’on discute le fond du sujet, que ce soit sur le mode de l’indignation ou de l’approbation: c’est exactement ce qu’il cherche. C’est pourquoi j’estime que François Hollande a eu raison de ramener la discussion sur les sujets qui comptent vraiment, plutôt que de se jeter sur le chiffon rouge.

  • @ René de Sévérac @Logopathe

    Je me suis mal exprimé. Mon idée est, plus précisément qu’importante, la civilisation musulmane fut plus rayonnante. C’est à ce sujet que la roue tourne, et on devrait en tirer un peu d’humilité.
    Je ne vois pas le masochisme là dedans.

    Ensuite, les civilisations se nourrissent les unes des autres. Et je crois, qu’étant à un moment de l’Histoire où notre civilisation domine, les valeurs dont on se réclament en Occident devraient nous amener à autre chose qu’à la stigmatisation où à la comparaison.

    @Gwynfrid :

    Vous expliquez justement ce que je dénonce. Un politicien qui use d’une stratégie aux dépends des intérêts qu’il doit défendre de part sa fonction, est peut être habile mais en aucun cas défendable ou justifiable. Une bonne stratégie est une stratégie qui fonctionne, effectivement, mais qui ne se fait pas aux dépends des personnes qu’elle doit servir.
    Discuter de la « technique » hors du contexte, me parait insensé. C’est avoir le cynisme pour tout projet politique, le pouvoir pour tout objectif.

  • Kéoz a parfaitement raison,Guéant en prononçant cette phrase savait très bien qu’il pourrait peut-être ainsi se mettre dans la poche tous ceux qui vivent dans l’obsession de l’islamisation de notre société et malheureusement dans cette catégorie se trouvent de nombreux catholiques pratiquants.
    Pour eux « j’étais un étranger et vous m’avez accueilli » ne peut que se comprendre que comme « j’étais un étranger ,en situation régulière ,et vous m’avez accueilli »

  • Shimegi a écrit ::

    C’est avoir le cynisme pour tout projet politique, le pouvoir pour tout objectif.

    Vous savez, nous ici ne sommes que de modestes commentateurs… nous n’avons pas nécessairement à avoir de projet politique. Koz non plus, me semble-t-il.

    Et en tout cas, je peux vous le jurer sur tout ce que j’ai de plus cher: je n’ai pas le pouvoir pour objectif.

  • Shimegi a écrit ::

    Discuter de la « technique » hors du contexte, me parait insensé. C’est avoir le cynisme pour tout projet politique, le pouvoir pour tout objectif.

    Et pourtant, je vous assure qu’il y a des établissements fort cotés qui enseignent la communication.

    Dingue.

  • Pour ma part, j’ai bien analysé la déclaration de Claude GUEANT comme une opération dans le cadre de la campagne présidentielle; dans d’autres débats, j’ai bien voulu parler de « maladresse » mais….: de quelque côté que ce soit, je ne peux comprendre et excès (là je fais référence à S. LETCHIMY) et utilisation de certaines communautés, parce qu’il y a de cela, aussi. Des pratiques condamnables, inacceptables ne font pas une généralité et « notre » civilisation a reçu, aussi, de celles que certains considèrent inférieures. Il n’y a pas de limite au respect de l’homme, et cela commence quand il est blessé en lui-même par une déclaration.

  • Koz a écrit ::

    Shimegi a écrit ::

    Discuter de la « technique » hors du contexte, me parait insensé. C’est avoir le cynisme pour tout projet politique, le pouvoir pour tout objectif.

    Et pourtant, je vous assure qu’il y a des établissements fort cotés qui enseignent la communication.

    Dingue.

    Je parle évidemment de Guéant 🙂 Et je sais bien que Koz a autre chose dans la tête que le cynisme, bien que je partage peu de ses points de vues ses réflexions sont réelles.
    Je souligne simplement que le fait de discuter de la polémique en entérinant de fait les dérapages de ce type comme des artifices normaux d’une stratégie c’est légitimer ces polémiques dans le discours politique. On tombe, comme je le disais, autant dans le piège en dénonçant le dérapage qu’en dénonçant le piège qu’il consiste sous l’angle « technique », voir plus. Il faut dénoncer la stratégie même.

    Or des billets comme celui ci, commente la polémique un peu comme on commenterai un match. Mais ce que fait Guéant dépasse le cadre du « jeu politique », c’est la France, et l’image qu’on a d’elle, qui trinque.

  • Attention Koz, je crois que vous vous fourvoyez au sujet de Tristan Maupoil. Le compte Twitter vers lequel vous renvoyez est un compte piraté. Voyez ici : https://twitter.com/#!/TristanMpl

    Le vrai compte est celui-ci : https://twitter.com/#!/Tristan_Maupoil

    Les déclarations douteuses que vous pointez n’appartiennent manifestement pas à l’intéressé. Pour avoir eu l’occasion de lui parler en une ou deux occasions, je serai fort étonné qu’il ait pu tenir ces propos.

  • Le meilleur texte que j’aie lu sur le sujet : http://www.lavie.fr/chroniques/editorial/c-est-nous-les-plus-civilises-09-02-2012-24031_37.php

    Ne me parle pas de haine de soi, malgré le dernier paragraphe, je t’en prie.

    Sinon le passage est effectivement tronqué, c’est dommage mais sans doute volontaire de la part de Ferry, si tu as repris le passage de lui. Les deux phrases se ressemblent, mais les contextes, les détails, les développements sont plus que lointains.

  • Même si je peux effectivement penser que M Guéant s’en prend à une « certaine catégorie de français », j’ai eu beau lire et relire, je n’ai pas vu écrit les mots : musulmans, arabes, noirs, ni même le mot martiniquais!

    Alors, polémiquer sur des suppositions fondées ou non me dépasse!

    La polémique est le joujou de la gauche depuis 5 ans et plus.
    Je suis entièrement d’accord sur le fait qu’un parti d’opposition intelligent aurait du traiter cette phrase avec mépris.

    D’autant que cette phrase est belle et qui peut affirmer qu’il est contre : « la liberté, l’égalité et la fraternité » et pour « la tyrannie, la minorité des femmes, la haine sociale ou ethnique « .

    Et dire que cette phrase est une agression est dénuée de tout fondement objectif. Fondement subjectif? Peut être. Le bénéfice du doute est décidément uniquement pour une partie seulement de la population française, l’autre n’en bénéficiant jamais (histoire de biiiip, peut être?)

    Si une biiip se sent concernée, a t elle donc quelque chose à se reprocher? (si non, pourquoi penserait elle que M Guéant parle d’elle en disant cette phrase copiée sur celle de M Comte Sponville?)
    Voilà pourquoi le silence aurait été preuve d’intelligence. Et c’est en cela que je rejoints Koz lorsqu’il dit de M Guéant qu’il est un artiste!

  • @Koz:

    « Sur le web, ce fut à qui rappelait que notre « civilisation », c’était la Saint Barthélémy, Abu Ghraïb et la Shoah (oubliant d’ailleurs de relever que d’autres « civilisations » ont également leurs génocides, outre l’absence d’égalité entre l’homme et la femme, de liberté de conscience et d’expression). »

    C’est pratique d’oublier le passé et de se focaliser sur le présent uniquement pour condamner ainsi le reste du monde car, aujourd’hui, ils ne seraient pas aussi libres que nous… Vous semblez simplement vouloir faire table rase de toutes les exactions que l’occident et la France ont commises (n’oubliez pas l’esclavage au passage http://www.basile-y.com/islam/isl3c.html). Effectivement, plus on fait commencer tard la « civilisation » occidentale, et moins il y a de trucs qu’on peut se reprocher…

    C’est oublier que les « civilisations » et les sociétés progressent à des rythmes différents.
    Il y a (et il y a eu) tellement de bon et de mauvais dans chaque « civilisation » qu’il est impossible de les classer les unes par rapport aux autres de manière absolue, même si ça parait tentant pour se rassurer. Cette tentation relève plutôt de notre obsession du classement, celle qui nous a donné les listes de plus grands trucs de tous les temps, comme le plus grand film, plus grand méchant de film, musique la plus épique, jusqu’à l’élection du plus grand Français de tous les temps…

    D’autre part, ce classement des civilisations est aussi une condition des discours impérialistes et colonisateurs (même si elle ne les implique pas forcément, c’en est bien une condition), et nous décourage de porter un regard critique sur notre propre société, ce qui est pourtant indispensable pour l’améliorer. Il serait plus constructif de voir que chaque société / civilisation a évolué au gré du temps et des évènements, parfois dans le bon sens, parfois dans le mauvais, et de chercher à s’inspirer du meilleur de chacune.

    « Cette déferlante a pu souligner cette haine de soi que l’on pressent trop souvent à gauche. Du pain bénit pour Claude Guéant. »

    « Lorsque cela devient une habitude, une fixation, oui, c’est de la haine de soi. Reconnaître une fois la responsabilité de la France […] c’est autre chose. Mais il y a une partie de la gauche qui répond systématiquement présente pour mettre en avant les pages sombres de notre Histoire. Les connaître, c’est une chose. C’est la systématicité qui est remarquable. Et cette gauche-là, on l’a bien vu réagir ces jours derniers, dans le débat public ou sur les réseaux sociaux. Et ouais, ça relève de la haine de soi. »

    Vous confondez peut-être « haine de soi » et sens critique. La « systématicité » que vous reprochez, ne vient-elle pas plutôt de l’acharnement du gouvernement à rabâcher toujours les mêmes thèmes ? Il ne faudrait pas répondre aux énormités du ministre de l’intérieur car il y en a trop, et que ça rend les réponses « systématiques » ?

    Si on veut progresser, il faut être capable de reconnaître ses erreurs, de reconnaître que notre civilisation / société n’est pas, et n’a jamais été, loin de là, parfaite. L’attitude de Guéant témoigne précisément de l’anesthésie de ce sens critique indispensable, au point que le simple fait de rappeler nos propres exactions passées (ce qui devrait, au minimum, appeler à un peu d’humilité) est perçu par certains comme de l’automutilation…

    Et un peu plus de sens critique ne serait pas forcément du luxe pour les défenseurs autoproclamés des droits de l’Homme de notre majorité, quand la France vient d’être condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour « traitements inhumains et dégradants » d’une fillette de 3 ans et d’un bébé, dans un Centre de Rétention Administrative. Mais peut-être est-ce de la haine de soi que d’en parler ?

  • Il y a un aspect que je ne comprends pas dans les critiques adressées contre M. Guéant par la gauche :

    Elle prétend répugner à voir le FN capter une partie croissante de l’électorat. Les méchants étant toujours les leaders et les électeurs des gentils frappés de plein fouet par la crise. Alors elle devrait se réjouir d’entendre des propos, d’où qu’ils viennent, incitant les électeurs potentiels du FN à se tourner vers un parti plus modéré.

    Et ben non elle n’en est pas contente !

    A croire qu’elle préfère voir Marine faire un très bon score, pour être présente au deuxième tour par exemple !

    C’est compliqué la politique.

  • Tara a écrit ::

    Même si je peux effectivement penser que M Guéant s’en prend à une « certaine catégorie de français », j’ai eu beau lire et relire, je n’ai pas vu écrit les mots : musulmans, arabes, noirs, ni même le mot martiniquais!

    Il a clarifié ses propos en disant « ce qui est en cause est la religion musulmane ».

  • @Hervé:

    « [La Gauche] prétend répugner à voir le FN capter une partie croissante de l’électorat. Les méchants étant toujours les leaders et les électeurs des gentils frappés de plein fouet par la crise. Alors elle devrait se réjouir d’entendre des propos, d’où qu’ils viennent, incitant les électeurs potentiels du FN à se tourner vers un parti plus modéré. »

    Ce n’est pas le FN qui est dangereux en lui même, c’est le discours qu’il tient, et les idéologies qu’il véhicule. Si, sous prétexte de piquer des voix à Marine Le Pen, l’UMP se met à tenir le même discours que le FN et à véhiculer les mêmes idéologies, c’est la même chose.

    D’autre part, cette stratégie de l’UMP de s’approprier le discours du FN a jusqu’à présent eu pour seul résultat de légitimiser ce même discours, et de renforcer le Front National comme jamais. Cette stratégie a aidé MLP dans sa « dédiabolisation », au point qu’aujourd’hui les électeurs n’ont même plus honte de dire qu’ils votent FN: ils le revendiquent !

    L’argument de la lutte contre le FN a fait long feu. Il faudrait trouver autre chose.

  • Je ne suis pas certain que ce soit si bien joué, et ce pour deux raisons :

    I) Cela part du postulat que les électeurs du FN votent pour le FN parce qu’ils sont convaincus de la supériorité de l’Occident.

    Ce diagnostic est faux, selon moi.

    Je pense que ceux votant FN le font pour deux raisons :
    a) Rejet des partis de gouvernement
    b) Adhésion au programme du FN

    Reprendre le programme du FN ne suffit pas. Le rejet demeure. C’est donc en grande partie vain, à mon sens, surtout quand les propos tenus sont de toute évidence à visée électoraliste. Ce que veulent les personnes votant FN dans un but de contestation, c’est une solution à la crise, des emplois et ainsi de suite. Pas qu’on les rassure sur notre supériorité supposée.

    II) Les personnes se classant à droite peuvent ne pas apprécier cette sortie. Le problème n’est pas tant la phrase en elle-même que l’émetteur et le contexte électoral.

    On peut être à droite sans considérer que l’Islam est le problème absolu en France (ne nous leurrons pas, Guéant visait, ou voulait faire qu’il visait, l’Islam).

    Ils peuvent détester cette façon de faire de la politique. Et se détourner de Sarkozy et de sa méthode détestable.

    Au final, le bilan sera à mon avis négatif pour l’UMP, négatif pour le PS.

    Chapeau l’artiste. Quel génie.

  • « La TVA sociale ne fait pas triper les Français, le triple A a tout de même fait quelques dégâts et la perte d’intensité de la crise rend moins porteur la stratégie du « capitaine courage » »

    Je suis déçu. Dans cette phrase, vous reliez 3 hypotaxes, et employez pour les 2 premières un homophone de « triple ».
    Pour une réaction qui se veut drôle, je m’attendais à trouver dans la troisième proposition, pour l’effet comique, un autre mot en « trip ».
    Par exemple, pour la troisième partie:
    « et la victoire à Tripoli aura installé un régime basé sur la Charia »
    ou encore
    « et la perte d’intensité de la crise rend moins porteur la stratégie de celui qui se veut diriger avec ses tripes »
    « et à force de trop tripoter la Merkel, on pourrait blesser l’orgueil Français »
    « et pas sur que tripatouiller le code du Travail plaise au Français »

  • Shimegi a écrit ::

    Si.

    Enfin bon vous êtes chez vous hein

    Voilà. Et pour appuyer ma position, j’ai 6 ans 1/2 d’archives qui tendent à démontrer que je ne conçois pas la politique comme vous le prétendez.

    hipparkhos a écrit ::

    Le meilleur texte que j’aie lu sur le sujet : http://www.lavie.fr/chroniques/editorial/c-est-nous-les-plus-civilises-09-02-2012-24031_37.php

    Ne me parle pas de haine de soi, malgré le dernier paragraphe, je t’en prie.

    Mon petit lapin, je l’ai moi-même recommandé cet article…
    Quant à Comte-Sponville, dire que c’est tronqué, c’est une chose, le démontrer, c’est mieux. Je l’admettrai évidemment si c’est le cas. Ferry a donné la page, j’imagine que tu as un scanner…

    jor a écrit ::

    C’est oublier que les « civilisations » et les sociétés progressent à des rythmes différents. Il y a (et il y a eu) tellement de bon et de mauvais dans chaque « civilisation » qu’il est impossible de les classer les unes par rapport aux autres de manière absolue, même si ça parait tentant pour se rassurer.

    On pourrait aussi se demander pourquoi les civilisations n’évoluent pas au même rythme, et s’il n’y a pas des facteurs intrinsèques qui freinent cette évolution. On pourrait aussi se dire qu’à tout prendre, on peut profiter de l’avance prise par les autres, dans la mesure où l’on ne fonctionne pas en vases clos. Mais attention, avec votre discours, vous êtes en train de laisser entendre qu’il y a des civilisations « en retard ». Vous êtes pas un facho, vous ?

    jor a écrit ::

    Vous confondez peut-être « haine de soi » et sens critique. La « systématicité » que vous reprochez, ne vient-elle pas plutôt de l’acharnement du gouvernement à rabâcher toujours les mêmes thèmes ? Il ne faudrait pas répondre aux énormités du ministre de l’intérieur car il y en a trop, et que ça rend les réponses « systématiques » ?

    Non, non, rassurez-vous, c’est une constante d’une certaine gauche qui n’est jamais autant à son aise que quand elle fustige la France pour une raison ou pour une autre. Elle n’a pas besoin de Guéant pour cela. Mais connaissant son existence, Guéant appuie sur le bon bouton pour la faire réagir.

    Tara a écrit ::

    Et c’est en cela que je rejoints Koz lorsqu’il dit de M Guéant qu’il est un artiste!

    Avec un point d’interrogation, vous l’aurez noté.

    sinay a écrit ::

    Il a clarifié ses propos en disant « ce qui est en cause est la religion musulmane ».

    De fait, il a un peu tout dit et son contraire. Au point que j’ai cru qu’il avait oublié un « pas » dans la phrase ci-dessus. De fait, dans les explications qu’il a données lundi dans le Figaro, il apparaissait assez clairement qu’il visait les/des musulmans.

    Yoann a écrit ::

    Je ne suis pas certain que ce soit si bien joué

    Moi non plus :

    Reste à savoir si la stratégie, qui semble fonctionner, sera payante. Jusqu’à présent, chaque fois que Nicolas Sarkozy ou l’UMP ont ciblé ces sujets, ils n’ont fait qu’apporter des fournées d’électeurs à Marine Le Pen. Reste à savoir aussi si l’on se satisfait, moralement, d’une politique hystérique.

    J’imagine qu’il doit considérer que son réservoir de voix est plus important sur sa droite que sur sa gauche (relative). Mais comme vous le dîtes, il assume le risque de crédibiliser Marine Le Pen et de braquer la droite modérée.

    Et pour le coup, je suis d’accord avec Jor : l’argument du « cordon sanitaire », du containment, a fait long feu. Je l’ai d’ailleurs écrit il y a plus de dix-huit mois. Avec une limite, toutefois : le FN semble stagner dans les sondages, ces jours-ci. Est-ce temporaire ? Et est-ce suffisant pour valider une stratégie, d’un strict point de vue électoraliste ? Est-ce que l’on a gagné quelque chose à voir la droite censément républicaine adopter le discours de Le Pen ?

  • Je me risque à un petit commentaire. Il me semble qu’il serait bon de laisser de côté les propos de basse stratégie électorale de monsieur Guéant ( qui à n’en pas douter conforteront les nombreux auditeurs de TF1) et d’essayer de voir plus loin que le bout du nez d’icelui.

    Je me permets donc de conseiller à tous la lecture de l’ouvrage: « Cet Autre « du Polonais Ryszard Kapuscinski. Je l’ai découvert avant que n’éclate la polémique suite aux déclarations de Mr Guéant.

    Voici quelques mots tirés de la quatrième de couverture :  » [ Kauscinski ] examine ainsi le regard porté par nos sociétés sur les habitants du Sud, toujours considérés comme des étrangers hostiles, objets d’étude plus que partenaires assumant pleinement la responsabilité du destin de l’Homme. Dans un monde de plus en plus globalisé et de plus en plus polarisé, Kapuscinski démontre à quel point l’idée de l’Autre demeure un défi permanent pour l’ esprit humain. »

  • On retrouve le même développement d’André Comte-Sponville, dans Pyschologie Magazine en 2001

    Il est vain de s’interroger sur les mérites respectifs de telle ou telle civilisation, comme si elles étaient des entités homogènes et immuables. Tout dépend de quoi l’on parle, de quel point de vue, et à quelle époque. Le christianisme de l’Inquisition n’est pas celui de Vatican II. L’islam d’Averroès ou de Massoud n’est pas celui des taliban. Non, pourtant, que toutes les civilisations soient égales, comme certains, pour de très politiquement correctes raisons, l’affirment un peu vite. Pourquoi serait-ce le cas ? Mais parce que le même combat, qui les oppose parfois, les traverse. Toutes les civilisations ne se valent pas, ni tout dans chacune d’elle. Que nul n’en puisse juger qu’au nom des valeurs qui sont les siennes – donc à l’intérieur d’une certaine civilisation –, c’est ce qui nous interdit de prétendre à l’absolu.

    Mais cela ne saurait nous dispenser de juger et d’agir. Disons-le donc tranquillement : de notre point de vue non d’Européens mais de démocrates, une civilisation qui respecte les droits de l’homme est supérieure à une civilisation qui ne les respecte pas. Une civilisation qui prône l’égalité des sexes est supérieure à une civilisation qui veut maintenir les femmes en situation d’infériorité ou d’oppression. Une civilisation qui protège la liberté de croyance et d’incroyance est supérieure à une civilisation qui n’admet que sa propre foi et veut l’imposer par la force. Il y a là un combat à mener, pour beaucoup de démocrates du monde arabe et musulman. Ce combat est aussi le nôtre. Il n’oppose pas des civilisations, il rapproche des individus.

    Bien sûr, il ne s’agit pas pour André Comte-Sponville d’en appeler à écraser la civilisation musulmane mais, avec des réserves que n’introduit pas Guéant, il tient un propos identique (et à deux reprises, par écrit). Et, de fait, non, ce n’est pas tronqué. La seule réserve, c’est que Luc Ferry ne cite pas les 400 pages. Mais ce n’est pas ce que l’on appelle une citation tronquée. C’est ce qu’on appelle… une citation.

    Je ne dis évidemment pas que les intentions soient les mêmes. Ce que j’écris dans mon billet, c’est que j’écris, c’est que Guéant a pris soin d’utiliser une phrase tout à fait justifiable dès lors que l’on s’éloigne des intentions.

  • Koz a écrit ::

    Ce que j’écris dans mon billet, c’est que j’écris, c’est que Guéant a pris soin d’utiliser une phrase tout à fait justifiable dès lors que l’on s’éloigne des intentions.

    En fait, précisément, c’est là le problème : dans un discours on ne peut faire abstraction de l’intention de l’auteur. Un discours a une vie propre mais il ne peut être détaché de l’intention qui lui a donné naissance. Ensuit, je ne sais pas si c’est habile, vicieux ou maladroit. Ce genre de manœuvres (celle de Guéant comme celle de l’opposition) laisse clairement voir que la campagne restera à une niveau de médiocrité rarement atteint.

  • Certes, mais mon propos est de dire que l’intervention est bien ciselée : Guéant prend soin de tenir un propos qui sera parfaitement défendable ensuite et qui permet, après, de dénoncer le « politiquement correct » de la gauche. Parce qu’elle ne peut que s’appuyer sur les intentions et non sur la déclaration en elle-même.

  • Chapeau pour ce billet (et ses compléments en commentaires) fort bien documentés qui expliquent clairement ce qui s’est vraiment passé car en lisant les journaux on n’avait pas tout compris. Ceux qui on sauté sur l’occasion pour faire croire à une bourde de Guéant sont tombés dans le panneau. La stratégie est tout de même assez fine de faire une déclaration, soit disant destinée exclusivement aux militants UMP, en sachant qu’elle va être diffusée à l’extérieur et avoir le même effet que si on l’avait faite au JT de 20h00. Effectivement, y a de la maîtrise.

  • Koz a écrit ::

    jor a écrit ::

    C’est oublier que les « civilisations » et les sociétés progressent à des rythmes différents. Il y a (et il y a eu) tellement de bon et de mauvais dans chaque « civilisation » qu’il est impossible de les classer les unes par rapport aux autres de manière absolue, même si ça parait tentant pour se rassurer.

    On pourrait aussi se demander pourquoi les civilisations n’évoluent pas au même rythme, et s’il n’y a pas des facteurs intrinsèques qui freinent cette évolution. On pourrait aussi se dire qu’à tout prendre, on peut profiter de l’avance prise par les autres, dans la mesure où l’on ne fonctionne pas en vases clos. Mais attention, avec votre discours, vous êtes en train de laisser entendre qu’il y a des civilisations « en retard ». Vous êtes pas un facho, vous ?

    Au temps pour moi, je me suis mal exprimé, et vous en avez profité (petit coquin). Ce que j’ai voulu dire c’est que les civilisations n’évoluaient pas au même rythme tout le temps. Je l’ai d’ailleurs plus ou moins redit plus loin dans mon commentaire: « chaque société / civilisation a évolué au gré du temps et des évènements, parfois dans le bon sens, parfois dans le mauvais ». Il n’y a pas de civilisation ou de société plus « rapide » ou plus « lente » à progresser vers le respect des droits de l’homme. Simplement, leur « vitesse » n’est pas constante.

    Ainsi il y a quelques siècles, la « civilisation musulmane » (aussi vague que ça puisse être, puisque c’est l’exemple qu’affectionne notre ministre) était peut-être plus avancée que la notre (en terme de respect de l’individu et des libertés, par exemple), mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Et ce sera peut-être le cas à nouveau dans quelques décennies. Ou peut-être la Chine, aujourd’hui pire dictature du monde, aura t-elle vu une révolution renverser le pouvoir, et sera t-elle devenue un exemple de démocratie pour le reste du monde.

    Pour ce qui est de la raison pour ces rythmes de progression différents, il peut exister en fait des centaines de facteurs différents selon les lieux et les époques, et ces facteurs sont même souvent le résultat des interactions entre différentes « civilisations ». L’apparition des différents moyens de diffusion de l’information comme Internet peut jouer, ainsi que la vitesse à laquelle ces moyens deviennent accessible à tous, par exemple. Sinon pour prendre un autre exemple très récent, les talibans qui font régner la terreur en Afghanistan n’ont-ils pas au départ été armés et formés par la CIA pour virer les cocos ? Faut-il les considérer uniquement comme un pur produit de la « civilisation musulmane », ou comme un mélange malheureux de ce que cette civilisation et la notre pouvaient produire de pire ?

    De la même manière, il faut rappeler que les différentes dictatures des pays arabes qui ont fait leur révolution l’année dernière étaient pour la plupart (ou sont encore, pour celles qui n’ont pas encore été renversées) soutenues à divers degrés par « l’occident ». On se rappelle la proposition légèrement déplacée de MAM d’aller prêter main forte au régime de Ben Ali pour « maintenir l’ordre »… Eh bien peut-être que sans ce genre de soutien, certaines de ces dictatures auraient-elles été renversées plus tôt, vous ne croyez pas ? Donc avant de juger et de rabaisser les autres, il est urgent de balayer devant notre porte.

    Koz a écrit ::

    jor a écrit ::

    Vous confondez peut-être « haine de soi » et sens critique. La « systématicité » que vous reprochez, ne vient-elle pas plutôt de l’acharnement du gouvernement à rabâcher toujours les mêmes thèmes ? Il ne faudrait pas répondre aux énormités du ministre de l’intérieur car il y en a trop, et que ça rend les réponses « systématiques » ?

    Non, non, rassurez-vous, c’est une constante d’une certaine gauche qui n’est jamais autant à son aise que quand elle fustige la France pour une raison ou pour une autre. Elle n’a pas besoin de Guéant pour cela. Mais connaissant son existence, Guéant appuie sur le bon bouton pour la faire réagir.

    Tout dépend de ce que vous entendez par « fustiger la France ». Si je critique les mesures du gouvernement Fillon avec lesquelles je ne suis pas d’accord (c’est à dire à peu près toutes, pour le coup), est-ce fustiger la France ? Si je ne suis pas particulièrement enthousiasmé par la vente de matériel de guerre à l’Inde aujourd’hui, ou par les négociations d’hier pour en vendre à Kadhafi (avant qu’il soit « devenu méchant » et plus présentable comme copain), est-ce faire preuve d’un manque de patriotisme ?

    Dans ce cas il deviendrait difficile d’exprimer une opinion négative sur ce que les divers gouvernement font, ou ont fait par le passé, non ? Or on peut très bien désapprouver notre passé colonial et ses restes sans fustiger « la France ». Si on accepte l’idée que ce passé colonial est en contradiction totale avec les valeurs actuelles de notre pays, nous n’avons pas le droit de le cacher sous le tapis pour se souvenir uniquement des « aspects positifs », ce qui est la seule manière de voir notre civilisation comme supérieure.

  • L’école « buissonnière » (du conseiller Patrick Buisson) semble toujours en cour à l’Elysée. Personnellement, je ne crois pas que cette stratégie de siphonnage des voix du FN (en agitant des thèmes identitaires, en faisant des moulinets sur la sécurité et l’immigration, et en dénonçant les « assistés », qui n’ont presque rien, pour diriger la colère des travailleurs pauvres, qui n’ont pas grand-chose) puisse marcher une deuxième fois, après cinq ans au pouvoir. Mais je peux me tromper… Je ne pense pas non plus que la prestidigitation politique puisse aller jusqu’à faire la « révolution » avec soi-même en 2012 après avoir fait la « rupture » avec son « père » en 2007. Mais je peux aussi me tromper… Périlleux exercice en tout cas. Et un peu pitoyable aussi, il faut bien l’avouer, d’un certain point de vue.

  • Shimegi a écrit ::

    Si.

    Répéter en boucle le même argument ne mène jamais bien loin, et vous en fournissez ici l’illustration.

    Mais je vais aller plus loin: non seulement dissocier la discussion sur la tactique politicienne de la discussion de fond est légitime, mais c’est même la meilleure façon de réagir à la technique guéantesque.

    D’abord, parce que la riposte sur le fond est contre-productive. Elle se fait sur le terrain adverse et donc en position réactive et défensive. Elle amène la discussion sur les questions philosophiques du genre, qu’est-ce qu’une civilisation, ce qui n’intéresse pas grand-monde. En se complaisant dans le quasi-pavlovien réflexe de condamnation, elle permet, comme l’a dit Koz plus haut, à Claude Guéant de se draper dans le refus du politiquement correct. Et elle conforte dans leurs convictions les électeurs de droite qui se prévalent du bon sens – les réactions de Tara ou de René de Sévérac ci-dessus en sont de bons exemples.

    Ensuite, parce que le démontage de la tactique est éclairant et permet de juger des méthodes et des intentions des auteurs de cette petite provocation. Un électeur qui cherche à s’informer a besoin de voir et de comprendre le dessous des cartes. À lui ensuite de se faire sa propre opinion, mais en dehors du bruit et de la fureur, et en ayant compris la manipulation qui se trouve derrière tout cela.

    Bref, le billet de Koz relève de l’hygiène démocratique.

  • @ Gwynfrid:
    Oui, vous avez raison pour ce qui concerne les dessous, manipulation, tactique politicienne, tout ça, mais pourquoi s’abstiendrait-on de discuter sur le fond? Il ne me semble pas inutile ou incongru de rappeler, de dire à quelles « valeurs » on croit…

  • Plein de commentaires.

    1. Tout le monde semble considérer que tout ceci est une opération calculée de la part de Guéant. Je n’en suis pas si sûr. Mais il est vrai que je ne partage pas la confiance que la plupart de mes concitoyens placent dans la compétence des hommes politiques. Pour moi, les coups à trois bandes de nos politocards leur retombent presque toujours sur la tronche. C’est la dissolution de Chirac, l’affaire Clearstream, les pitreries de Bayrou entre les 2 tours de 2007, l’instrumentalisation de l’Allemagne par Sarkozy aujourd’hui…
      Bref, le rasoir d’Occam suggère que Guéant, en discussion avec des étudiants de droite, a dit des trucs de droite. Un truc dingue. Pouvait-il prévoir que ça serait repris et que ça aurait cet écho? Peut-être. La liste des sujets sur lesquelles les opinions sont réglementées est extensible : immigration, nationalité, religion, homosexualité, avortement, Israël, relations sociales… Et maintenant civilisation; sur ce dernier sujet, l’opinion autorisée est donc officiellement : « elles se valent toutes, mais la nôtre c’est l’esclavage, le colonialisme et le nazisme ». Bon.

    2. Tout le monde semble considérer que cette histoire vise à « récupérer les voix du FN ». Je n’en suis pas sûr. A titre perso, je n’ai jamais voté FN. Je n’étais pas tenté quand il était d’extrême droite, je ne vais pas m’y mettre maintenant qu’il est passé à l’extrême gauche. Mais j’ai tout de même des tendances réac prononcées (j’espère que je ne regretterai pas cet aveu le jour de mon procès).
      Tenez, il y a quelques mois, j’avais une discussion ici-même avec Gwynfrid. J’écrivais, pour le regretter : « Le modèle de démocratie libérale qui a permis l’extraordinaire essor économique, scientifique, social de l’occident entre les lumières et le siècle dernier n’est plus conçu comme universel. Et Gwynfrid (désolé de te dénoncer mon ami) me répondait : Je crois bien que si, en tout cas c’est en s’appuyant sur lui que nous sommes intervenus en Lybie. Ici, nous sommes confrontés à une limite: nous pouvons proposer ce modèle, nous ne pouvons pas l’imposer.
      Je ne vous fais pas un dessin. Je suis tout sauf FN. J’étais (et demeure) fortement tenté par l’abstention en avril. Et cette histoire me fait hésiter. Ces gens sont devenus fous dans leurs délires relativistes. Ils contrôlent déjà l’éducation, l’essentiel des media, tout l’échelon local et régional et le sénat. S’ils prennent l’Elysée et l’assemblée, ça va être terrible.

    3. La sortie de Letchimy est hallucinante. Bien sûr, il y a le point Godwin. Mais au-delà de ça son raisonnement est aberrant. Présenter le nazisme comme la conséquence de l’esclavage et de la colonisation est grotesque. A peu près tous les peuples de l’histoire ont fait des esclaves à un moment ou un autre, mais il n’y a qu’un nazisme, né justement dans le pays d’Europe qui avait le moins de colonies. Bien sûr tout ça passe inaperçu derrière la polémique à la con. Et puis ça ne choque pas vraiment, depuis le temps qu’on nous le dit à l’école ou à la télé. On assiste à un véritable révisionnisme historique sur la colonisation.

    4. Il faut arrêter de parler de haine de soi. C’est de la haine de l’autre pure et simple. Je défie quiconque de trouver la moindre once de sincérité dans tous ces repentirs, demandes d’excuses etc… Personne ne propose de s’excuser pour ses propres fautes, réelles ou supposées. Toutes ces sorties contre la France moisie, la France nauséabonde, le fondement de racisme supposé régner dans la France profonde… c’est de la pure haine des autres, relevée de bonne conscience. La sortie de Letchimy, qui se présente comme un fils d’esclave, ce n’est pas de la haine de soi, c’est de la haine des autres, revancharde.

    5. Coïncidence de l’actualité. Un vieillard a dit une connerie il y a quelques mois. Dans un pays civilisé, il aurait reçu le mépris plus ou moins appuyé des gens autour de lui. Dans la France d’aujourd’hui, le vieillard est traîné devant les tribunaux et doit expliquer en se tordant les mains qu’il a compris sa faute et la regrette.

    Depuis quand l’autocritique publique a-t-elle cessé d’être l’apanage exclusif du stalinisme pour devenir une norme de la justice française?

  • Lib a écrit ::

    Mais au-delà de ça son raisonnement est aberrant. Présenter le nazisme comme la conséquence de l’esclavage et de la colonisation est grotesque.

    Je ne doute pas que ce soient vos études poussées en philosophie politique et en sciences sociales qui vous permettent d’être aussi méprisant et catégorique vis à vis de cette thèse. Il n’en demeure pas moins que de nombreux philosophes et historiens de renom, sans doute moins éclairés que vous, la défendent, à l’instar de Hannah Arendt, auteur de référence sur l’histoire des totalitarismes, qui établit cette filiation dans son ouvrage « L’Impérialisme ».

  • Présenter le nazisme comme la conséquence de l’esclavage et de la colonisation est grotesque. A peu près tous les peuples de l’histoire ont fait des esclaves à un moment ou un autre, mais il n’y a qu’un nazisme, né justement dans le pays d’Europe qui avait le moins de colonies.

    Bin, en fait, Hitler, il voulait juste coloniser un peu les peuples moins avancés, pour faire comme les autres. C’est une attitude bien compréhensible de la part des peuples supérieurs.

    La où je vous rejoins Lib, c’est sur la « haine de soi », cette qualité étrange que l’on prête aux autres.

    En gros, messieurs A et B sont dans une pièce. A dit « je n’aime pas la couleur de ce mur ». B se dit: « il n’aime pas la pièce. Je suis dans la pièce, donc il ne m’aime pas. Il est lui même dans la pièce, il ne s’aime pas lui-même ». En fait, A n’aime pas la couleur du mur.

  • Dans les commentaires sur ce blog, ce qui me surprend c’est le jugement porté à l’encontre du relativisme.

    En matière religieuse, le relativisme y subit généralement un tir nourri au gros calibre. Toutes les religions ne se valent pas, parait-il.

    Par contre, en matière de civilisation, le relativisme semble pour beaucoup admis.

    Y aurait-il là un paradoxe ou suis-je victime d’une lecture trop rapide ?

  • @ Yogui:

    La colonisation a été l’occasion de grands crimes, cela ne suffit ni à la réduire à ces crimes, ni à en faire l’explication princeps du nazisme. Pas plus qu’elle ne justifie le jugement de valeur inversé qui consiste à dire que toutes les civilisations se valent, sauf l’occidentale qui serait pire que toutes les autres.

    Comme Lib, je considère que la repentance est une démarche perverse qui consiste à se défausser sur les autres de la responsabilité du mal. L’historien gauchiste qui pisse sur la France colonisatrice a d’abord pour objectif de se démarquer des autres Français qu’il dénonce comme coupables : je suis né Français, on ne peut m’en tenir rigueur, les salauds, ce sont les autres, et leurs descendants.

  • sinay a écrit ::

    Tara a écrit ::

    Même si je peux effectivement penser que M Guéant s’en prend à une « certaine catégorie de français », j’ai eu beau lire et relire, je n’ai pas vu écrit les mots : musulmans, arabes, noirs, ni même le mot martiniquais!

    —–>Il a clarifié ses propos en disant « ce qui est en cause est la religion musulmane ».

    Je n’avais pas lu cela. Il est vrai que je n’ai pas vraiment le temps de lire les polémiques à répétitions.
    Dont acte!

    Ceci dit, confondre musulmans et arabes, noirs -ou martiniquais-, c’est un pas que je refuse de franchir! Les croyances n’ont rien à voir avec l’origine géographique, et, comme vous, je suppose, je connais des tas d’arabes hérétiques, incroyants, voire chrétiens …Et de nombreux occidentaux qui sont musulmans.

    En tous les cas, permettez moi de préférer la Convention des droits de l’homme (et de la femme et de l’enfant) à la Charia et le Nouveau Testament à l’Ancien ou au Coran.

    Je peux comprendre que chacun ait des appréciations différentes du bien, du mal et/ou du meilleur ou du pire, et que certaines façons de vivre corresponde mieux à leur vision de la « vérité » (sans majuscules).

    Néanmoins, par contre, j’ai du mal à intégrer le fait que, au XXI eme siècle, la tolérance soit à sens unique.
    Que voulez vous, j’ai encore beaucoup de chemin à faire pour être une sainte. Et à mon âge, bien qu’ayant encore, je l’espère deux ou trois décennies devant moi pour m’améliorer, je doute arriver au point où je serais capable d’apprécier tout et son contraire en toute sérénité et amour.Veuillez me le pardonner.

    Déjà, je reconnais mes erreurs (ou mes défauts?). C’est déjà un grand pas!

  • @ Lib:

    J’ai un ami habitué de ces convergences UNI qui m’a apporté deux informations intéressantes au sujet de cette agaçante polémique:

    • Tristan chose est, je cite, « un type falot dont l’initiative la plus audacieuse jusqu’alors avait été d’emprunter son stylo à Pécresse, ça m’étonnerait qu’il ait fait ça tout seul »

    • Chaque année, Pasqua -qui est un habitué des lieux- dit bien pire, et ça ne sort jamais. Il est donc étonnant que pile cette année, une phrase de cette personne-là sorte à ce moment-là

    • D’après lui, qui a des responsabilités au sein de l’UNI et qui a fait partie de la « cellule riposte » mise en place juste après, tout était vraiment très bien organisé, dans la réponse.

    Je tiens à préciser que lui trouve que tout ça est très bien.

    Sinon, sur le fond, je suis le seul à n’en avoir strictement rien à foutre de cette histoire?

  • @ Aristote:

    Hannah Arendt n’était pas française ; peut-être était-elle gauchiste ce qui évidemment disqualifierait l’ensemble de ses travaux. Pour ma part je n’ai pas d’idée bien arrêtée sur le colonialisme et son influence sur les totalitarismes ; je réagissais simplement à l’attitude de Lib qui me semble être : « Je ne connais rien au sujet, mais les propos de Letchimy vont à l’encontre de mes préjugés, je les qualifie donc d’hallucinants, aberrants, grotesques et révisionnistes (sic, sic, sic et sic) ».

    Mon point était seulement : des gens se sont penchés sur le sujet, avec semble-t-il un certain sérieux, et eux voient une filiation. Leur thèse est peut-être erronée, mais certainement pas grotesque. C’est tout.

  • @ Yogui:

    Quand je mentionnais « l’historien gauchiste », je ne pensais pas à Arendt, allons…

    Arendt n’était pas dans la repentance. De plus, son sujet ne se limitait pas au nazisme, mais couvrait le phénomène totalitaire dans son ensemble. Et, plus particulièrement en France, la mémoire du totalitarisme est étrangement asymétrique.

    Quelques historiens ont soutenu que l’exemple qui avait inspiré les méthodes nazis était celui, beaucoup plus proche dans l’espace et dans le temps, de l’approche stalinienne de l’élimination de l’ennemi de classe.

    Je me garderai de trancher et je ne crois pas à l’explication unique. Mais il est notable que les historiens qui ont avancé l’hypothèse stalinienne ont été abreuvés d’injures alors que ceux qui avancent l’hypothèse coloniale sont écoutés.

  • En tant qu’étudiante en histoire et étudiant l’histoire coloniale plus précisément, j’ai pu remarquer plusieurs choses :
    Le XIXème siècle a vu s’épanouir, en même temps que la colonisation, toutes sortes de théories racialistes qui se sont répandues et inscrites dans les mentalités au fur et à mesure que les contacts de type conquête et occupation coloniale se multipliaient.
    Jean Thullard propose une définition de la colonisation avec cinq caractéristiques dont l’une étant : la volonté expansionniste (augmenter la taille critique de son espace vital).
    On retrouve donc certaines composantes et on ne peut nier qu’il y a des points communs : en Europe, il y avait une certaine mentalité dominante, qui poussée à l’extrême a donné des catastrophes.
    Mais c’est être très réducteur que de réduire le nazisme au colonialisme car malgré tous leurs défauts, on ne peut pas dire pour autant que l’empire britannique et l’empire français étaient au même niveau que le régime nazi.

    On peut voir la « civilisation occidentale » comme une souche ayant donné plusieurs branches, certaines pourries (totalitarisme, colonialisme) et d’autres beaucoup plus saines (Droits de l’Homme…). De même pour les autres civilisations.

    Mais une chose est sûre : la civilisation est un concept complexe qui ne doit à aucun prix être réduit à un ou deux aspects mais qui doit être étudiée dans son ensemble. En tant qu’historienne, je peux étudier la civilisation mais je ne me donne pas le droit de la juger et de la considérer comme supérieur ou inférieure à d’autres.

  • Théa a écrit ::

    En tant qu’historienne, je peux étudier la civilisation mais je ne me donne pas le droit de la juger et de la considérer comme supérieur ou inférieure à d’autres

    En tant qu’historienne, certainement.

    Mais Théa ne se réduit pas à n’être qu’une historienne. Et quid de ceux qui ne sont pas historiens ?

    Cela ne donne pas la réponse à la question, mais « en tant qu’historienne » ne suffit pas à clore le débat.

  • Notre civilisation, en tout cas, semble toujours la seule à être à ce point capable d’autocritique; et faire son autocritique tout en refusant de critiquer les autres, c’est une façon de se sentir supérieur.

    Ceci dit, sans avoir la mansuétude de Yogui pour le discours du député PS, dont je doute qu’il soit alimenté par une lecture éclairée d’Hannah Arendt, il n’est pas absurde de voir dans la colonisation et dans le nazisme deux expressions d’un certain suprématisme européen racialisant. Qui n’a sans doute rien de spécifiquement occidental, d’ailleurs.

    Mais ce suprématisme n’a pas disparu des mentalités, et je crois qu’il s’exprime encore tout autant, si ce n’est plus, dans le discours de la gauche française que dans celui de la droite. J’ai regardé un bout d’interview de Mélanchon l’autre jour, je suis fasciné par le nationalisme hallucinant de ce type. La Révolution française, les Droits de l’Homme, le modèle social français, le modèle d’intégration, tout cela constitue les éléments d’un mythe et d’une fierté nationalistes qui s’affichent sans aucune restriction. Je ne suis pas hostile à tous les éléments de ce mythe (à l’exception de la Révolution Française), mais je m’étonne du manque de lucidité de ces gens qui tiennent des discours religieux et nationalistes tout en conspuant ceux qui le font avec des termes un peu différents.

    Le fédéraliste européen post-national que je suis au fond n’est pas près de se remettre de l’effondrement de toutes ses illusions… De l’extrême droite à l’extrême gauche, ils n’ont tous que la Nation à la bouche. Mère nourricière et protectrice, ses frontières sont conçues comme plus ou moins étanches par les uns et les autres, mais constituent toujours l’horizon indépassable de la politique.

  • @ Aristote

    Cela ne clôt certainement pas le débat, en effet, mais cela a l’avantage de donner un peu de distance.

    La partie historienne en moi a beaucoup d’influence et n’est pas franchement détachée de ma personnalité : elle en fait partie et a contribué à la construire.

    Je sais qu’on peut trouver du bon et du mauvais dans chaque civilisation. Et quant à la supériorité, j’ai envie de dire dans quel domaine ?
    De plus, on aura parfois tendance à dire que SA civilisation est la meilleure (ou parfois la pire) parce que c’est celle dont l’on connait le mieux les qualités ou les défauts.

    Si je devais parler d’un point de vue plus personnel au sujet d’une supposée supériorité d’une civilisation, je citerai l’Eclésiaste « Vanité des Vanités, tout est Vanité. » Les civilisations s’élèvent et se défont (là c’est l’historienne qui parle) mais à la fin, Dieu reste (là, c’est la catholique…)

    Voilà si tu voulais plus personnel 😉

  • « Et quant à la supériorité, j’ai envie de dire dans quel domaine ? » Ben oui, c’est évidemment la question. C’est pour ça que je disais que la phrase de Guéant est imprécise. J’ai du mal à comprendre la notion de supériorité dans l’absolu. Il y a supériorité dans un référentiel donné, suivant des critères donnés. « Les civilisations ne se valent pas » est un truisme: ça veut dire, stricto sensu, qu’elles sont différentes. Mais si on veut y voir un jugement de valeur, il faut préciser sur quels critères. Implicitement, il semble que le critère moral soit le critère par défaut. C’est fou comme la morale est partout depuis que le mot a mauvaise presse.

  • Soyons positifs. Proposition (projet) de loi :
    Art. 1 : Le peuple français reconnaît que toutes les civilisations se valent. D’ailleurs, tout vaut tout. Les cuirassés de poche n’ont rien à envier aux dreadnoughts.
    Art. 2 : La négation ou contestation de l’article 1 « même si elle est présentée sous une forme déguisée ou dubitative ou par voie d’insinuation » (voir : Code pénal, édition de 2006, p. 2059 B) sera punie de etc…

    Comme dit l’excellent Bayrou, on ne peut pas laisser dire n’importe quoi.

  • @ Théa:

    Merci.

    je développe mon point de vue personnel sur le blog de Philarète, L’esprit de l’escalier.

    La seule chose que je voulais dire c’est que l’historien doit s’efforcer à la neutralité axiologique. Cela ne l’empêche pas d’avoir un jugement personnel, ni même d’en faire état, mais j’aurais du mal avec un historien qui dirait « en tant qu’historien, je pense que la monarchie est supérieure à la république ».

  • Else a écrit ::

    Il ne me semble pas inutile ou incongru de rappeler, de dire à quelles « valeurs » on croit…

    D’abord, je ne vois pas grand-monde se contenter de rappeler des valeurs. J’entends surtout, sur ce sujet, des vociférations contre les valeurs d’autrui, que celui-ci soit le sale gauchiste tenaillé par la repentance et la haine de la France, ou l’ignoble suprémaciste cuturel, voire ethnique, nostalgique du temps de l’empire colonial (je pousse à peine: regardez le ton des commentaires ici même, et encore est-ce l’un des lieux les plus policés que je connaisse dans la blogosphère politique) . Notez qu’il ne semble ici exister aucun courant de pensée en dehors de ces deux-là: voilà qui fait un peu homme de paille sur les bords, ne trouvez-vous pas ? J’en conclus que le débat de fond n’existe pas réellement. C’est un simple jeu de fumée et de miroirs, comme diraient nos amis anglophones: un échange de signaux identitaires de part et d’autre. Chacun se rassure et rassure ses amis sur son appartenance au camp des bons, par le moyen habituel qui consiste à vilipender les méchants. Permettez-moi de ne pas trouver l’exercice indispensable.

    Ensuite, comme je l’expliquais plus haut, c’est contre-productif (sauf bien sûr pour ceux qui espèrent le succès de la méthode de Claude Guéant). Vous en avez ici un exemple simple:

    Lib a écrit :

    J’étais (et demeure) fortement tenté par l’abstention en avril. Et cette histoire me fait hésiter.

    @ Lib:
    En toute franchise, t’exagères. Même sur les points où je pourrais volontiers te rejoindre (pour n’en citer qu’un: il est ridicule et odieux de traîner en justice M.Guerlain pour avoir dit une sottise plus grosse que lui), tu pousses la caricature à un niveau stratosphérique. Je sais que la gauche est sur le point de prendre le pouvoir dans notre belle France, mais quand même… assieds-toi et prends une verveine. Tiens, pense au 10 mai 1981, par exemple. Le pays a survécu, tu sais.

  • Koz,

    Quand on refuse l’obstacle (le debat sur l’identité nationale), on voit la question revenir encore et encore, sans fin. La phrase de Gueant n’est pas tres sympathique, mais si c’est une verite, elle doit pouvoir etre prononcée. La recherche de la verité passe avant la morale.

    J’ai toujours ete frappé de voir a quel point un certain nombre de pretendus preceptes moraux appris par coeur par la partie de la société la plus sensible aux medias sert de vade mecum à la pensée en ce moment. Manque de bol il n’y a aucune coherence entre ces differents preceptes tres rapidement assimilés sous forme de grandes phrases ou d’interdits syntaxiques.

    Exemple avec LEchtimy qui melange tout a trac colonialisme et nazisme et divers. Où est la coherence d’un type qui n’a que les droits de l’Homme a la bouche mais qui refusent de dire que toutes les civilisations ne se valent pas et a qui il ne vient pas une seconde a l’idée que ce sont les lumieres que voulaient partager les colonialistes de gauche comme Jules Ferry?

    Ca en devient ridicule voire grave. L’affaire zemmour : je CITE « la proportion des delinquants parmi les Arabes est superieure a la moyenne nationale », jugement : il n’y a pas diffamation, il a donc dit la vérité, mais provocation a la haine raciale. Conclusion du jugement : la vérité pousse a la haine raciale… Voila les horreurs auxquelles on arrive a force de politiquement correct bien simpliste. Je prefere ne meme pas parler de la civilisation musulmane du CFCM! Ces personnes sont vraiment si solidaires qu’elles avancent l’idée audacieuse que la civilisation talibane ou meme pakistanaise, c’est la meme que la leur, que c’est une seule et meme chose?

    Bref, si on est pas d’accord, on laisse tomber les invectives et on commence a bosser, on contre argumente et du debat sortira la verité ou presque, en tout cas une vision moins simpliste et beaucoup plus fructueuse. Si on ne peut meme pas obtenir ca de nos deputés auxquels on delegue une bonne partie de notre souveraineté…

  • Je vous cite, Oim,  » a qui il ne vient pas une seconde a l’idée que ce sont les lumieres que voulaient partager les colonialistes de gauche comme Jules Ferry? »

    Voici ce que disait Ferry en question :

    « Messieurs, il faut parler plus haut et plus vrai ! Il faut dire ouvertement qu’en effet les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures. (…) Je répète qu’il y a pour les races supérieures un droit, parce qu’il y a un devoir pour elles. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures. (…) Ces devoirs ont souvent été méconnus dans l’histoire des siècles précédents, et certainement quand les soldats et les explorateurs espagnols introduisaient l’esclavage dans l’Amérique centrale, ils n’accomplissaient pas leur devoir d’hommes de race supérieure. Mais de nos jours, je soutiens que les nations européennes s’acquittent avec largeur, grandeur et honnêteté de ce devoir supérieur de la civilisation.» (discours de Jules Ferry de Juillet 1885)

    Jules Ferry ne voulait pas partager les Lumières avec les colonies, il voulait les y imposer, et encore ! La France n’a jamais respecté les principes des lumières et de la révolution dans ses colonies, c’était toujours deux poids, deux mesures.
    Pourquoi croyez vous que beaucoup d’intellectuels Africains et Asiatiques se soient révoltés contre le colonialisme alors qu’un certain nombre d’entre eux admiraient la France et sa civilisation ? Parce qu’ils voyaient que ces principes n’étaient applicables qu’en métropole et jamais dans les colonies.

    Beaucoup ont cru à l’influence civilisatrice de l’Europe sur les pays d’Afrique ou d’Asie mais cette croyance était aussi basé sur beaucoup d’arrogance et sur un complexe de supériorité très affirmé.

  • Gwynfrid a écrit ::

    Tiens, pense au 10 mai 1981, par exemple. Le pays a survécu, tu sais.

    Retraite à 60 ans, 35 h, mise en orbite du FN, ISF masochiste, explosion des dépenses des régions déjà contrôlées par le gauche…., certes le pays a survécu. Il s’est juste affaibli au point qu’il devient plausible qu’il fasse faillite dans les années qui viennent.

  • « J’entends surtout, sur ce sujet, des vociférations contre les valeurs d’autrui, que celui-ci soit le sale gauchiste tenaillé par la repentance et la haine de la France, ou l’ignoble suprémaciste cuturel, voire ethnique, nostalgique du temps de l’empire colonial . Notez qu’il ne semble ici exister aucun courant de pensée en dehors de ces deux-là: voilà qui fait un peu homme de paille sur les bords, ne trouvez-vous pas ? J’en conclus que le débat de fond n’existe pas réellement. C’est un simple jeu de fumée et de miroirs, comme diraient nos amis anglophones: un échange de signaux identitaires de part et d’autre. Chacun se rassure et rassure ses amis sur son appartenance au camp des bons, par le moyen habituel qui consiste à vilipender les méchants. Permettez-moi de ne pas trouver l’exercice indispensable. » (Gwynfrid).

    Voilà qui est fort bien dit.

    « L’affaire zemmour : je CITE « la proportion des delinquants parmi les Arabes est superieure a la moyenne nationale », jugement : il n’y a pas diffamation, il a donc dit la vérité, mais provocation a la haine raciale. Conclusion du jugement : la vérité pousse a la haine raciale… » (oim)

    Il n’y a pas diffamation, donc il n’y a pas mensonge avéré, mais thèse argumentable et non démontrée – défaut de vérité. Ce n’est pas tout à fait la même chose. Ceci dit votre raisonnement reste juste, dans ses grandes lignes. Si ce n’est que la provocation à la haine raciale n’a pas été retenue non plus, si je me souviens bien: c’est la provocation à la discrimination qui a fondé la condamnation. Ce qui revenait à interdire la contestation d’une loi et pose problème aussi, mais c’est un peu différent.

  • Il est difficile de ne pas donner raison à Gwynfrid, qui renvoit dos à dos les anti-repentance et les anti-colonialiste (même si d’aucun me considèreront comme l’anti-colonialiste type (à moins que mon égocentrisme me joue des tours (on n’est jamais sûr de rien…))).

    En supposant que la phrase de Guéant était « ciselée » pour susciter des réactions « pavloviennes » des droits-de-l’hommistes, on peut se demander s’il avait anticipé les grossières et non moins pavloviennes réactions aux réactions des anti-droits-de-l’hommiste. Parceque là, franchement, il n’a pas fallu longtemps pour voir ressortir dans les commentaires la repentance, la haine de soi, les aspects positifs de la colonisation, et quelques autres trucs qui nous font voyager dans le temps pour nous propulser cinq ans en arrière, au moment où une certaine idéologie est arrivée sur le devant de la scène.

    C’est le problème. Vous pouvez ciseler une phrase, vous ne pouvez pas contrôller l’enthousiasme de ceux qui vont la défendre.

    @Gwynfrid

    Tiens, pense au 10 mai 1981, par exemple. Le pays a survécu, tu sais.

    Là par contre vous avez merdé. Vous ne saviez pas que quelqu’un allait répondre « oui, mais de justesse »?

  • Peut-être fallait-il parler de sociétés plutôt que de civilisations. Mais tous ces beaux esprits qui sont si révulsés ne le sont-ils pas par ces sociétés où l’on laisse des vieillards épouser des petites filles, leur faire des enfants que leurs petits corps ne peuvent pas supporter, elles deviennent alors incontinentes et l’on renvoie le tout chez les parents dont elles sont la honte ? Ce sont des drames quotidiens dans certaines sociétés. Je ne parle pas des excisions…Rappelons, quoique moins dramatique mais difficile à vivre , la soumission demandée systématiquement aux femmes dans les très nombreux pays en Afrique, en Inde etc….où un gamin sera autorisé à surveiller sa mère, ses soeurs,des femmes quoi …

    Interrogez ces femmes du « printemps arabe » demandez leur si elles n’ont pas de craintes vis à vis de la société que certains veulent leur imposer (leur imposer « à nouveau » dans certains pays)

    Que ses opposants ne voient dans ce qu’a déclaré M. Guéant que de la tactique politicienne soit, mais il serait élégant d’admettre que beaucoup de politiques croient souvent ce qu’ils disent et pas seulement ceux de gauche !

    Les femmes de tous les bords qui regardent lucidement comment sont traitées certaines de leurs « soeurs » sont bien convaincues que de nos jours toutes les sociétés ne se valent pas et que tous comptes faits nous sommes mieux dans la nôtre. Que ce pauvre député de Martinique que l’on a envoyé au casse pipe interroge donc la sienne ! N…

  • Point « La Grande Peur de 1981 » atteint, avec évocation des heures les plus roses de notre Histoire. Ha ben bravo, Gwynfrid. :-).

  • Gwynfrid a écrit::
    « Notez qu’il ne semble ici exister aucun courant de pensée en dehors de ces deux-là: (le anti-repentance et les anticolonialistes pour aller vite et reprendre la typologie de Gatien) voilà qui fait un peu homme de paille sur les bords, ne trouvez-vous pas ? J’en conclus que le débat de fond n’existe pas réellement.  »
    Oui pourtant Thierry Lhôte 9 février 2012 à 14 h 37 min fait une tentative en s’interrogeant (nous interrogeant ?) sur ce que pourraient être nos valeurs de demain : « lesquelles aboliront nous ? Lesquelles prendrons-nous aux nouvelles populations venues d’ailleurs ? quel équilibre alchimique finira par s’installer dans cette optique ? » J’avoue, j’ai pas d’idées. Umberto Eco qui lui n’en manque pas, et pour qui rien de sérieux ne peut se concevoir sans humour, rien que sur la religion tente quelques avancées : pourquoi pas un christianisme sunnite, un avicennisme anglican ou soufisme bouddhiste ?

  • Gatien a écrit ::

    Là par contre vous avez merdé. Vous ne saviez pas que quelqu’un allait répondre « oui, mais de justesse »?

    Gwynfrid s’en fout, il est au Canada ! 🙂

  • Braillard a écrit ::

    J’ai un ami habitué de ces convergences UNI qui m’a apporté deux informations intéressantes au sujet de cette agaçante polémique

    Moi, je ne connais personne à l’UNI. Et je n’ai toujours pas compris en quoi l’existence de Tristan bidule démontre irrévocablement que tout ceci est un coup monté de Guéant. Des mecs falots qui tiennent un blog, il doit y en avoir quelques uns. Pour que cette histoire aie un tel retentissement, il a bien fallu que quelques membres du camp du bien aillent sur les sites des mecs falots de l’UNI et décident que cette déclaration méritait d’être montée en épingle.

    Le rasoir d’Occam suggère plutôt que Guéant est surveillé par tous les vigiles de la bienpensance qui hurlent à la mort à la moindre de ses déclarations, et la mayonnaise ne prend qu’au terme d’une alchimie complexe et imprévisible. Il aurait pu dire n’importe quelle autre phrase anodine : « je suis fier de l’histoire de mon pays » (apologie de crimes), « notre politique d’immigration doit servir l’intérêt des Français » (stigmatise l’immigration), « je reprendrais bien des nouilles » (stigmatise les Italiens). Non, il a dit « toutes les civilisations ne se valent pas » (I’m a Nazi).

    Pour moi, l’élément remarquable de cette triste histoire c’est bien la violence des réactions de la gauche dite modérée.

    Yogui a écrit ::

    Il n’en demeure pas moins que de nombreux philosophes et historiens de renom, sans doute moins éclairés que vous, la défendent, à l’instar de Hannah Arendt, auteur de référence sur l’histoire des totalitarismes, qui établit cette filiation dans son ouvrage « L’Impérialisme ».

    Merci de m’orienter vers le passage dans lequel Arendt rappelle le grand passé esclavagiste de l’Allemagne et souligne à quel point ce pays était une grande puissance coloniale dans les années 30. Puis, quand vous aurez fini le name-dropping, on pourra parler sérieusement.

    Le nazisme est un phénomène complexe et unique. Le résumer à l’esclavage et au colonialisme est aussi malhonnête que de le résumer au socialisme. Eh oui, si Hitler a choisi pour son parti le nom de « Parti National-Socialiste des Travailleurs Allemands » et pas « Parti National-Libéral des Citoyens Allemands », ce n’est pas un hasard.

    Gwynfrid a écrit ::

    En toute franchise, t’exagères. (…) Je sais que la gauche est sur le point de prendre le pouvoir dans notre belle France, mais quand même… assieds-toi et prends une verveine.

    C’est vrai, quelle violence! J’ai écrit que j’envisageais de ne pas m’abstenir (et implicitement de voter Sarkozy). Quel extrémisme, quelle caricature. Je devrais prendre des leçons de modération chez M. Letchimy qui va traiter de nazi un ministre de la république à la tribune de l’assemblée.

    Allez, j’essaie. Mais en plus violent, tu me connais (bave aux lèvres, tout ça). Voila, j’ai une citation pour toi. Qui a dit : « La lutte contre la finance internationale est devenue le point le plus important de la lutte de la nation pour son indépendance et sa liberté économique ».

    Je t’aide, son nom commence par un H.

    Gwynfrid a écrit ::

    Tiens, pense au 10 mai 1981, par exemple. Le pays a survécu, tu sais.

    Tu as raison. Surtout que cette fois-ci, les 2 ans de n’importe quoi ne dureront que 2 mois ou 2 semaines. Le temps qu’une adjudication de bons du trésor échoue et qu’ils ne puissent plus payer les fonctionnaires.

    A ton avis, quand ça arrivera, que fera Hollande? Il rentrera dans le rang et fera du Sarkozy-Chirac-Mitterrand-VGE (plus d’impôts, plus d’Etat, plus de relance keynésienne, plus de chômage)? Ou il partira en overdrive sur la désignation de l’ennemi (les riches, la finance sans visage, l’Allemagne)?

  • Gwynfrid a écrit ::

    Tiens, pense au 10 mai 1981, par exemple. Le pays a survécu, tu sais.

    Oui nous avons survécu! Patates en fin de mois (mieux vaut cela que de mourir de faim comme au Biafra, je vous l’accorde!)

    Vivien a écrit ::

    Point « La Grande Peur de 1981″ atteint, avec évocation des heures les plus roses de notre Histoire. Ha ben bravo, Gwynfrid.

    Mais franchement, je me demande si vous étiez nés.
    Et si oui, dans quel état est votre mémoire.

    3 dévaluations et pourtant des taux d’inflation à 2 chiffres. Un taux de chômage à deux chiffres,avec des méthodes de calculs pires que les méthodes actuelles, le tout avec les salaires gelés! Sans compter les taux d’intérêts immobiliers aussi à deux chiffres (j’imagine si nous avions vécu cela sous Sarkosy!!!)

    Eh bien oui, j’ai la grande peur de 1981, en pire. Parce que j’ai vécu cette période, que nous avons cru, jeune couple avec deux enfants en bas âge, que nous n’en sortirions pas. Galère sur galère, insomnies sur insomnies… Licenciement économique de mon conjoint pour couronner le tout.

    Et retour chez papa-maman à la campagne pour améliorer notre « ordinaire » très ordinaire.
    (au fait, nous étions cadre sup tous les deux, moi dans la santé, lui dans la recherche)

    Alors, tant mieux si vous avez eu la chance de passer à travers les gouttes sans encombre! Ce n’a pas été le cas pour nombre d’entre nous. mais les français ont la mémoire courte.

    Alors comme ensuite, nous avons eu à subir M Aubry et ses âneries (c’est fou comme les maths modernes sont utiles dans les TPE, genre 12 employés à 35h, ça fait une embauche de plus. Oui, le salarié homme orchestre qui fait du ménage, du jardinage, du commercial, de la compta, du technique, de la recherche, du secrétariat, des cours, prise en charge des clients…Calcul intelligent au possible qui a finit par avoir la peau de cette TPE, d’ailleurs!), lorsqu’on voit les calculs de M Hollande (ces calculs sont largement aussi aberrants que ceux de Mme Aubry dans certains domaines), lorsqu’on voit toutes ces promesses genre : »je vais prendre aux riches pour donner aux autres » -sous-entendu, « je vais prendre à votre voisin pour vous donner à vous », alors oui, j’ai peur.

    Rassurez vous, je vais aller prendre une verveine! C’est tellement violent, n’est ce pas, de dire qu’on a vécu la période la plus difficile de sa vie, tant sur le plan social qu’économique sous Mitterrand!

    Mais, de fait, je ne voterai pas et, ce, jamais, pour M Hollande ni pour aucun membre du PS ou pour quelqu’un qui toucherait de près ou de loin à ce parti.
    Je n’ai pas envie de revivre cela et n’ai pas envie que mes enfants le vivent une deuxième fois, cette fois ci en tant que parents !

  • Gatien a écrit :

    même si d’aucun me considèreront comme l’anti-colonialiste type (à moins que mon égocentrisme me joue des tours

    Je ne sais pas si vous êtes un archétype, mais vous amenez la colonisation sur le tapis avec une telle régularité que ça en devient un peu prévisible, non ?

    Aristote a écrit ::

    Retraite à 60 ans, 35 h, mise en orbite du FN, ISF masochiste, explosion des dépenses des régions déjà contrôlées par le gauche…., certes le pays a survécu. Il s’est juste affaibli au point qu’il devient plausible qu’il fasse faillite dans les années qui viennent.

    C’est sans doute pour cela que nous devrions aujourd’hui réélire la droite, qui depuis dix ans a engagé le pays avec courage sur la voie du redressement, en réduisant massivement l’endettement, le déficit et les impôts…

    Gatien a écrit :

    Là par contre vous avez merdé. Vous ne saviez pas que quelqu’un allait répondre « oui, mais de justesse »?

    Que voulez-vous, ma foi naïve dans le bon sens et de mes interlocuteurs me perdra.

    @ Vivien: 😀 😀 😀

    Lib a écrit ::

    Le rasoir d’Occam suggère plutôt que Guéant est surveillé par tous les vigiles de la bienpensance qui hurlent à la mort à la moindre de ses déclarations

    Le rasoir d’Occam suggère aussi que Guéant le sait très bien, qu’il a quelques décennies d’expérience derrière lui, que l’équipe Sarkozy a tous les pros de la com dont il peut avoir besoin – bref, n’essaie pas de le faire passer pour une sorte d’Éva Joly de droite, ça ne marche pas.

    Lib a écrit ::

    Je devrais prendre des leçons de modération chez M. Letchimy qui va traiter de nazi un ministre de la république à la tribune de l’assemblée.

    Tiens, voilà que tu viens te chercher des excuses en te comparant à celui des protagonistes qui a gagné le pompon de la réaction la plus caricaturale. Faut-il y voir l’effet d’un léger embarras ?

    Lib a écrit ::

    Tu as raison. Surtout que cette fois-ci, les 2 ans de n’importe quoi ne dureront que 2 mois ou 2 semaines. Le temps qu’une adjudication de bons du trésor échoue et qu’ils ne puissent plus payer les fonctionnaires.

    Même pas. Le n’importe quoi dure depuis déjà depuis pas mal d’années, on a été obligé de freiner depuis l’été dernier (en gros), et quel que soit le président élu, cela ne changera rien à la nécessité de surveiller les adjudications comme du lait sur le feu.

  • @ Tara:
    Pendant les années 80, nous avions quatre enfants en bas âge et je trouvais que la vie était belle…Pourtant, nous habitions la France aussi…( Et je ne me souviens pas que nos amis, de professions et d’ appartenances politiques diverses se soient lamentés sur le gouvernement de Mitterrand et se soient trouvés dans de telles difficultés…)

  • 81, j’étais trop petit, mais je me souviens bien de 1997. Ce fut une catastrophe incroyable. On ne mangeait même plus des patates, on mangeait des pierres!

    @Lib

    A ton avis, quand ça arrivera, que fera Hollande? Il rentrera dans le rang et fera du Sarkozy-Chirac-Mitterrand-VGE (plus d’impôts, plus d’Etat, plus de relance keynésienne, plus de chômage)? Ou il partira en overdrive sur la désignation de l’ennemi (les riches, la finance sans visage, l’Allemagne)?

    Vous penchez pour la seconde option?

    Merci de m’orienter vers le passage dans lequel Arendt rappelle le grand passé esclavagiste de l’Allemagne

    C’est amusant comme vous placez l’Allemagne nazie dans une sorte de monde parallèle. L’Allemagne est un pays européen. Passé esclavagiste ou pas, on ne voit pas bien en quoi l’évolution des idées en Allemagne serait radicalement déconnectée de celle du reste de l’Europe, cet argument tombe à plat.

  • @ Tara: clairement je n’ai pas les mêmes souvenirs que vous. D’accord, j’appartiens à un milieu favorisé, si vous voulez. Mais aucune des difficultés économiques auxquelles vous faites référence n’est spécifique aux années Mitterand, et en tout cas elles n’ont pas disparu avec le président socialiste. Si ça va mieux pour vous aujourd’hui c’est que vous vous en êtes sortie, ce dont je me réjouis. Mais il ne vous prendra guère de temps pour voir autour de vous que l’inquiétude des fins de mois est au moins aussi sévère actuellement qu’elle pouvait l’être dans les années 80. Pour qui est de la crainte de l’avenir, il n’y a aucune comparaison possible; d’ailleurs, cela transparaît de votre commentaire lui-même.

  • Lib a écrit ::

    Merci de m’orienter vers le passage dans lequel Arendt rappelle le grand passé esclavagiste de l’Allemagne et souligne à quel point ce pays était une grande puissance coloniale dans les années 30. Puis, quand vous aurez fini le name-dropping, on pourra parler sérieusement.

    La fureur vous aveugle. Qualifier de name-dropping une référence à Arendt dans un débat sur le rapport entre colonialisme et totalitarisme c’est, oserai-je dire, hallucinant et grotesque. Quant à parler sérieusement, vu les amalgames que vous me prêtez et les citations que vous demandez, ce n’est visiblement pas votre intention.

    Tara a écrit ::

    Eh bien oui, j’ai la grande peur de 1981, en pire. Parce que j’ai vécu cette période, que nous avons cru, jeune couple avec deux enfants en bas âge, que nous n’en sortirions pas.

    Il semble que nous soyons les seuls, sur ce blog, à avoir vraiment vécu les années 80. Moi aussi je garde le cruel souvenir des tickets de rationnement et des chars russes sur la place de la Concorde.

  • « Mais franchement, je me demande si vous étiez nés. Et si oui, dans quel état est votre mémoire. »

    Bah non, je n’étais pas né. Il faut que je rajoute 1981 à la liste des épisodes historiques sur lesquels on n’a pas le droit de faire de blagues parce que l’on y a mangé des enfants?

    Bon, cela dit, je ne me moque certainement pas des galères que vous ou qui que ce soit d’autre avez pu connaitre étant jeunes, ne vous méprenez pas.

  • Gatien a écrit ::

    Vous penchez pour la seconde option?

    Non, pour la première. Mais j’aimerais connaître l’idée de ceux qui s’apprêtent à voter pour lui.

    Il y avait un article très drôle de Charles Wiplosz dans Le Monde il y a 2 semaines, dans lequel il imaginait les deux mandats de Hollande. En gros, Martine Aubry était premier ministre pendant 2 mois, puis remplacée par Eric Besson sous la pression des créanciers. Ce dernier mettait en place un ensemble de mesures choc (retraite à 70 ans…). L’article est très amusant, mais très optimiste…

    Gatien a écrit ::

    Passé esclavagiste ou pas, on ne voit pas bien en quoi l’évolution des idées en Allemagne serait radicalement déconnectée de celle du reste de l’Europe, cet argument tombe à plat.

    Bien essayé mais c’est un peu court jeune homme. J’ignore si vous considérez le nazisme comme quelque chose de radicalement exceptionnel ou non. Mais s’il est la conséquence directe de l’esclavage et de la colonisation, comme le pensent M. Letchimy et son farouche supporter Yogui, on est surpris qu’il soit né en Allemagne et non dans un pays esclavagiste et colonial comme la France (si j’en crois M. Letchimy).

    Yogui a écrit ::

    Qualifier de name-dropping une référence à Arendt dans un débat sur le rapport entre colonialisme et totalitarisme c’est, oserai-je dire, hallucinant et grotesque. Quant à parler sérieusement, vu les amalgames que vous me prêtez et les citations que vous demandez, ce n’est visiblement pas votre intention.

    Je ne vous prête aucun amalgame. Ce fil de commentaires est né d’une critique que je faisais de la diatribe de M. Letchimy, qui a dit à l’assemblée : « Vous nous ramenez, jour après jour, à des idéologies européennes qui ont donné naissance aux camps de concentration au bout du long chapelet esclavagiste et colonial. » Dans cette phrase, il présente le nazisme comme la conséquence directe, voire inéluctable de l’esclavagisme et du colonialisme. J’ai écrit que c’était grotesque, ce qui n’a pas eu l’heur de vous plaire.

    Invoquer Arendt au secours d’une telle thèse lui fait injure et n’est autre que du name-dropping.

    Pour vous être agréable, je vous accorde que vous avez cité Arendt dans le bon contexte, félicitations. Si vous l’aviez invoquée pour affirmer que le PSG va gagner le championnat cette année, ça aurait toujours été du name-dropping, mais à coté de la plaque.

    Yogui a écrit ::

    Moi aussi je garde le cruel souvenir des tickets de rationnement et des chars russes sur la place de la Concorde.

    Au fait, cette histoire de chars russes, je n’en ai aucun souvenir personnel. Et quand je fais une recherche rapide sur Google, la seule chose que je trouve c’est des références à Poniatowski qui aurait dit ça en 74 ou 76. Ca a vraiment existé? Il y a vraiment eu des gens sérieux, des journalistes, des politiques, pour annoncer les chars russes sur la Concorde en cas de victoire de Mitterrand en 81?

    Ou bien est-ce encore une instance de création de réalité alternative par le peuple de gauche qui, à force de se répéter en boucle ce qu’il a envie de croire, finit par se convaincre que c’est réel?

    Un peu comme le mythe du nuage de Tchernobyl qui s’est arrêté à la frontière. Aujourd’hui, tout le monde prend pour une vérité révélée la fable selon laquelle le gouvernement aurait prétendu une telle chose. Alors que la lecture des journaux de l’époque établit clairement qu’il n’en est rien.

    Bref, je serais très reconnaissant envers quiconque me fournirait un lien vers un article de 81 prophétisant l’arrivée des chars russes à Paris.

  • Tara a écrit ::

    C’est sans doute pour cela que nous devrions aujourd’hui réélire la droite, qui depuis dix ans a engagé le pays avec courage sur la voie du redressement, en réduisant massivement l’endettement, le déficit et les impôts…

    Vous avez mille fois raison. Et c’est bien pour cela que je suis très pessimiste.

    Dans d’autres pays, comme le Canada, la Suède, l’Allemagne, la Nouvelle-Zélande, les équilibres politiques ont permis l’accession au pouvoir d’équipes qui ont eu le courage de remettre un peu de bon sens dans la gestion des dépenses publiques.

    La France semble en être incapable. NS a fait quelques efforts, réduction des effectifs de la fonction publique d’État — alors que la gauche dans les régions a massivement embauché, bien au-delà de ce qui pouvait être justifié par les transferts de compétences –, réforme des retraites,…, mais on est très loin du compte.

    Le scénario d’une faillite, accélérée par une thrombose fiscale, devient chaque année plus plausible. La faillite de la France, c’est aussi la fin de l’Euro. Veuillez attacher vos ceintures s’il vous plaît.

  • Allons donc. Je cite Gwynfrid et le logiciel attribue la citation à Tara. Ce n’est pas la première fois que cela arrive. Mes excuses aux deux.

  • Bon, eh bien soit je suis atteinte d’Alzheimer, soit il y a un négationnisme impressionnant sur cette période.

    Ensuite, depuis, je n’ai pas encore constaté d’inflation à ce point, ni de taux d’intérêts aussi hauts.
    Mais sans aucun doute ai je des œillères et lorsque je regarde mes anciens comptes bancaires je ne vois pas les virgules. J’ai du emprunté à 1,2% et mes amis à 1,7% et l’inflation n’était pas à 12%; mais à 1,2%
    Et le salaire de mon mari (avant son licenciement économique: charretée de plus de 1000 emplois dans la société qui l’employait) a été augmenté!
    C’est vrai quoi!
    J’ai été obligée de manger des petits enfants! Et les pauvres petits mangeaient des cailloux.
    J’avoue que ce sont des arguments efficaces.

    Vous pouvez faire les blagues que vous voulez sur cette période, Vivien. Je n’y vois aucun inconvénient. Le passé est le passé . Simplement, je suis extrêmement surprise que certains bâtissent leur campagne sur la période Mitterrand et font de cet homme, qui a vécu sur le dos des contribuables et a permis de mettre la France dans un état incomparable, leur modèle (jusque dans les gestes et les intonations de voix) et ce avec les hourra de la foule en liesse.

    il serait bien , il me semble de voir la réalité historique -réalité vécue par un grand nombre de français, mais pas tous, j’en suis consciente- et cesser d’encenser une gauche qui n’a de sociale que le nom.

    Et je n’ai jamais parlé de char russe, il me semble. Simplement de la vie de tous les jours qui était loin d’être rose ( 😉 ). Ni même de ticket de rationnement (je trouve la plaisanterie un peu, comment dire, osée, pour ceux qui, comme mes parents, ont vécu précisément la période de ces tickets)

    Sans compter que nous avons du par ailleurs rassurer une de nos amies, hongroise, prête à quitter la France pour ne pas revivre ce qu’elle venait de vivre en Hongrie, en lui disant qu’en France, tant qu’elle était « pauvre » elle n’avait aucun problème et que non….il n’y aurait pas de char russe sur la place de la Concorde!)

    Et j’aimerai bien connaître leurs réactions si M Sarkosy avait un bilan identique à présenter! (il est vrai que M Mitterrand a été réélu. Comme quoi les français doivent être masos). J’imagine les Unes de journaux!

    Bon, fin du HS.

    Pour rebondir sur le sujet du billet: tous les souvenirs ne se valent pas (les mauvais souvenirs de 1981 sont moins valables que les bons?), toutes les idées politiques ne se valent pas non plus (mieux valent les idées relativistes?), toutes les morales ne se valent pas (mieux vaut le laxisme et l’égalitarisme à la droiture, l’égalité et la fraternité?)
    Ou bien tout se vaut-il et Gloire aux partis extrémistes (des deux côtés, bien sur, les valeurs du NPA valant les valeurs du FN).

    Il semble qu’effectivement, à la lecture des commentaires ci dessus, M Guéant avait une arrière pensée. Ceci dit, ses propos n’ont rien de répréhensibles si on les lit objectivement, sans suspicion aucune et sans parti pris.
    Je me demande comment on peut être contre la tolérance, l’égalité, la liberté et la fraternité.

    Oui, je termine mes élans de colère (et de caricatures) et je vais prendre une verveine…..

  • Bon, Lib, profitons en, cette fois nous sommes dans le sujet. Rationaliser la supériorité de peuples par rapport à d’autres et construire là dessus une politique. Est-ce une spécificité du nazisme? Non, à l’évidence, il suffit de relire Jaurès sur la colonisation. L’eugénisme est-il une spécificité du nazisme? Pas plus. Il a une longue histoire en europe et en amérique du nord. On pourrait multiplier les exemples. L’antisémitisme, etc.
    Vous dites « le nazisme est singulier ». Certes, comme tout autre événement, mais pas en dehors du monde, ni « inhumain » comme l’avait suggéré une fois Sarkozy.

    on est surpris qu’il soit né en Allemagne et non dans un pays esclavagiste et colonial comme la France (si j’en crois M. Letchimy).

    Bin non, on n’est pas surpris. Parce qu’on ne confond pas une condition nécessaire et une condition suffisante, et que l’on garde en tête que l’Allemagne fait partie de l’Europe « esclavagiste et coloniale ».

    Maintenant un Guéant vient parler de supériorité, et un Letchimy réponds camps de concentration. L’enchainement se tient, mais il n’est pas politiquement correct. Il n’est pas admis qu’un responsable politique puisse avoir la moindre sorte de rapport avec le nazisme, ce grand tabou.
    Moi je suis un peu comme Koz, je me marre, sauf que ceux qui s’indignent dès que le nazisme est évoqué me font marrer autant que les autres.

  • « Simplement de la vie de tous les jours qui était loin d’être rose … »

    Tara, c’était justement une bonne partie de la blague. A la relecture, on l’impression qu’une moitié de la France a vécu un rêve éveillé rose bonbon (coté cucul compris), et que l’autre a cru basculer dans le cauchemar rougeâtre. Pour moi qui ne l’ait pas vécu et qui voit bien que la France n’est ni devenue un goulag ni Disneyland, c’est plutôt amusant…

    C’est aussi pour ça que le sujet marche si bien et fonctionne comme un « point attracteur » pour les discussions, comme le point Godwin.

    Gatien a écrit ::

    @Lib
    Mais s’il est la conséquence directe…
    Mais vous êtes le seul à parler de conséquence directe…

    On n’est pas obligé de parler de conséquences directes si ça fache, mais la phrase de Lechtimy présente quand même les choses sous un jour déterministe, et ne laisse qu’assez peu de place à la multiplicité des causes.

    Enfin bon, sinon, je proposerai pour le prix Koztoujours de la Paix celui qui réussira à trouver la citation d’Hannah Arendt qui va bien, pour éviter à nos duellistes de s’entretuer.

  • Gatien a écrit ::

    Maintenant un Guéant vient parler de supériorité, et un Letchimy réponds camps de concentration. L’enchainement se tient, mais il n’est pas politiquement correct. Il n’est pas admis qu’un responsable politique puisse avoir la moindre sorte de rapport avec le nazisme, ce grand tabou. Moi je suis un peu comme Koz, je me marre, sauf que ceux qui s’indignent dès que le nazisme est évoqué me font marrer autant que les autres.

    Oups, on s’est croisé, Gatien.

    Complètement d’accord avec vous sur le caractère tabou du nazisme qui nuit au débat. Le nazisme doit retrouver sa place… qui reste celle d’une idéologie particulièrement atroce et meurtrière.

    Donc l’enchainement « se tient » peut être, mais il est complètement excessif, et c’est encore plus malvenu alors que l’on prétend se défendre d’une « injure faite à l’homme », parce que l’on ne s’est jamais autant rapproché de l’injure qu’avec ce discours. Pas besoin de tabou ou de politiquement correct pour y voir une violence qui n’a rien à faire dans une prise de parole officielle à l’Assemblée.

  • Allez, name-droppons gaiement :

    Dès 1951, dans son livre pionnier Les Origines du totalitarisme, la philosophe Hannah Arendt met l’expansion impérialiste des dominations coloniales à la charnière de ce basculement européen dans l’horreur. Elle n’hésite pas à discerner dans la domination coloniale, et notamment dans la « mêlée pour l’Afrique », dénuée de toute limite éthique, « maints éléments qui, une fois réunis, seraient capables de créer un gouvernement totalitaire fondé sur la race ». Elle y décèle même, entre dispositifs bureaucratiques et massacres de masse, l’une des prémisses du système concentrationnaire.

    Selon Enzo Traverso dans son essai sur La Violence nazie, sous-titré Une généalogie européenne, l’ascension idéologique du racisme biologique fut parallèle à l’essor d’un colonialisme qu’il légitimait. Dès lors, souligne-t-il, « deux discours complémentaires se superposent : la “mission civilisatrice” de l’Europe et l’“extinction” des “races inférieures” ; en d’autres termes, la conquête par l’extermination ». Rappelant que la notion d’« espace vital », loin d’être une invention nazie, était un lieu commun de la culture européenne à l’époque de l’impérialisme, de ses civilisations supérieures et de ses humanités inférieures, Enzo Traverso décrit « le lien qui rattache le national-socialisme à l’impérialisme classique », dont le ressort était la conviction de l’Europe « d’accomplir une mission civilisatrice en Asie et en Afrique ». Et il souligne que, pour les analystes des années trente et quarante du siècle passé, ce lien était évident.

    Et pour finir Aimé Césaire :« Une nation qui colonise, qu’une civilisation qui justifie la colonisation – donc la force – est déjà une civilisation malade, une civilisation moralement atteinte, qui, irrésistiblement, de conséquence en conséquence, de reniement en reniement, appelle son Hitler, je veux dire son châtiment. Colonisation : tête de pont dans une civilisation de la barbarie d’où, à n’importe quel moment, peut déboucher la négation pure et simple de la civilisation. »

    Césaire, dont Nicolas Sarkozy dit au Panthéon, le 6 avril 2011 lors de la Cérémonie d’hommage solennel de la Nation à Aimé Césaire, que lors de sa mort en 2008, « la France venait de perdre l’un de ses enfants qui lui faisait le plus honneur ».

    Les mots me manquent pour qualifier tous ces auteurs … ah si j’ai trouvé : hallucinants et grotesques.

  • Oui enfin, ce qui est rigolo, c’est que le propos du député dont j’ai la flemme d’orthographier le nom reprend précisément la conception essentialiste des civilisations au nom de laquelle il condamne le propos de Guéant. Bref, à un truc vague et critiquable, il répond un truc vague et critiquable. C’est franchement le café du commerce.

    Sur le fond de l’argumentaire des auteurs cités ci-dessus, on remarque quand même que 1) la critique de l’ordre colonial se fait en grande partie avec les catégories mentales du colonisateur, comme quoi il y a bien eu une influence culturelle – positive ou pas, ça c’est affaire de goût – et que 2) effectivement, entre la colonisation et le nazisme, il y a le point commun du suprématisme racial, mais qu’entre vouloir « civiliser » les prétendus « inférieurs » et les exterminer, il y a quand même un peu plus qu’une nuance de style, quoiqu’en pensent aujourd’hui les intellectuels de salon. Quant aux notions d’espace vital et de race supérieure, elles ne sont non certes pas spécifiques du nazisme, mais elles ne sont pas spécifiques de la civilisation occidentale non plus.

  • Yogui a écrit ::

    l’ascension idéologique du racisme biologique fut parallèle à l’essor d’un colonialisme qu’il légitimait.

    Cette ascension fut aussi parallèle à l’essor de la pensée darwinienne. Vous allez bondir, à juste titre, en me rétorquant que parallélisme et relation de cause à effet ne sont pas la même chose et que le darwinisme n’est en rien un argument pour le racisme.

    Dont acte. Mais pourquoi le parallélisme qui vous scandalise dans un cas devient-il acceptable dans l’autre ?

  • Aristote, si vous donnez dans le parallélisme grotesque et hallucinant, on ne va pas s’en sortir 😉

    Plus sérieusement – et brièvement car le hors sujet nous guette et Koz est tapi prêt à bondir – il est clair qu’une découverte scientifique comme le darwinisme peut être interprétée et utilisée par des esprits dévoyés à l’appui de leurs thèses. Mais l’évolution est un fait scientifique, pas un système politique. Faut-il freiner la recherche sous prétexte que ses résultats puissent être exploités par des idéologies bancales ?

    Une fois encore, je n’ai pas d’avis tranché sur l’influence plus ou moins directe du colonialisme sur le nazisme – encore que les arguments de celle-qu’il-ne-faut-pas-nommer et de ses successeurs me paraissent pertinents. Ce qui me choque c’est que l’on puisse les balayer d’un revers de main méprisante sur la base de ce qui me paraît de purs préjugés.

  • Le racisme biologique était aussi, à l’époque, considéré comme un « fait scientifique ». Son essor n’en a pas moins été contemporain de l’abolition de l’esclavage. Il y a fort à parier que beaucoup d’abolitionnistes n’avaient pas spécialement de problèmes avec l’idée d’une hiérarchie biologique des races. C’est l’idée, morale et philosophique, de l’égale dignité des hommes qui a fondé leur action, pas la science.

    Il est même dangereux de fonder l’égalité des hommes sur la science, parce que la science, on connaît, ça va ça vient… L’égalité est un principe moral, pas scientifique.

    Bref on peut trouver toutes les généalogies qu’on veut entre toutes les idées et tous les régimes meurtriers… Je ne suis pas persuadé que ce soit l’approche la plus intéressante. Mais nos intellectuels, qui vivent dans un monde d’idées et de mots, voient le passé comme un enchaînement d’idées et de mots. Ils n’ont qu’un marteau, et voient les problèmes en forme de clous.

  • Moi non plus, je n’ai pas vraiment d’avis sur l’influence directe du colonialisme sur le nazisme, mais je trouve quand même fort de café qu’on ne puisse se référer à des philosophes de la trempe d’Hannah Arendt dont les oeuvres sur le totalitarisme sont étudiées partout dans le monde.

    Et tant pis si je radote , je cite un extrait du p’tit bouquin dont j’ai parlé l’autre jour : « Cet Autre ».
    – L’auteur, un écrivain polonais, qui a passé sa vie dans les pays d’ Asie, d’Afrique, d’Amérique Latine énonce :  » L’ Autre me renvoie un nouvel éclairage sur ma propre histoire. En entendant parler des camps de concentration nazis et du Goulag soviétique, les Noirs s’étonnent que l’homme blanc puisse être si cruel à l’égard d’un autre Blanc.Pourquoi les hommes blancs se haïssent-ils au point de se massacrer par millions? A leurs yeux, la race blanche s’est suicidée au XXème siècle. Cette prise de conscience les a encouragés à entreprendre la lutte contre le colonialisme. »

  • Bonjour,

    Aristote a écrit ::

    Quelques historiens ont soutenu que l’exemple qui avait inspiré les méthodes nazis était celui, beaucoup plus proche dans l’espace et dans le temps, de l’approche stalinienne de l’élimination de l’ennemi de classe.

    Tiens, vous pourriez nous en citer trois ou quatre ? Merci

  • Yogui a écrit ::

    Mais l’évolution est un fait scientifique

    Pour être plus précis c’est une thèse (ou un modèle) qui se fonde sur des données de plusieurs discplines scientifiques.

    « Toutes les civilisations ne se valent pas ». Trivialité qui passe pour une insolence.

    Certes, mais tout le monde a bien vu ici que le problème était 1) de définir précisément le contour d’une civilisation donnée dans le temps et l’espace 2) de définir des critères. Ainsi chez nous on expédie des hommes sur la lune et nos anciens dans les asiles – en attendant de les piquer le moment venu. Ailleurs on va pieds-nus et on vénère l’ancien.

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